[200] (200a) Τοῦτο μὲν τοίνυν, εἰπεῖν τὸν Σωκράτη, φύλαξον παρὰ σαυτῷ μεμνημένος ὅτου·
τοσόνδε δὲ εἰπέ, πότερον ὁ Ἔρως ἐκείνου οὗ ἔστιν ἔρως, ἐπιθυμεῖ αὐτοῦ ἢ οὔ; Πάνυ γε,
φάναι. Πότερον ἔχων αὐτὸ οὗ ἐπιθυμεῖ τε καὶ ἐρᾷ, εἶτα ἐπιθυμεῖ τε καὶ ἐρᾷ, ἢ οὐκ
ἔχων; Οὐκ ἔχων, ὡς τὸ εἰκός γε, φάναι. Σκόπει δή, εἰπεῖν τὸν Σωκράτη, ἀντὶ τοῦ
εἰκότος εἰ ἀνάγκη οὕτως, τὸ ἐπιθυμοῦν ἐπιθυμεῖν οὗ ἐνδεές ἐστιν, ἢ μὴ (200b)
ἐπιθυμεῖν, ἐὰν μὴ ἐνδεὲς ᾖ. ἐμοὶ μὲν γὰρ θαυμαστῶς δοκεῖ, ὦ Ἀγάθων, ὡς
ἀνάγκη εἶναι· σοὶ δὲ πῶς; Κἀμοί, φάναι, δοκεῖ. Καλῶς λέγεις. ἆρ᾽ οὖν βούλοιτ᾽ ἄν
τις μέγας ὢν μέγας εἶναι, ἢ ἰσχυρὸς ὢν ἰσχυρός; Ἀδύνατον ἐκ τῶν
ὡμολογημένων. Οὐ γάρ που ἐνδεὴς ἂν εἴη τούτων ὅ γε ὤν. Ἀληθῆ λέγεις. Εἰ γὰρ
καὶ ἰσχυρὸς ὢν βούλοιτο ἰσχυρὸς εἶναι, φάναι τὸν Σωκράτη, καὶ ταχὺς ὢν ταχύς,
καὶ ὑγιὴς ὢν ὑγιής—ἴσως γὰρ ἄν τις ταῦτα οἰηθείη καὶ πάντα τὰ τοιαῦτα, τοὺς
ὄντας (200c) τε τοιούτους καὶ ἔχοντας ταῦτα τούτων ἅπερ ἔχουσι καὶ ἐπιθυμεῖν,
ἵν᾽ οὖν μὴ ἐξαπατηθῶμεν, τούτου ἕνεκα λέγω· τούτοις γάρ, ὦ Ἀγάθων, εἰ
ἐννοεῖς, ἔχειν μὲν ἕκαστα τούτων ἐν τῷ παρόντι ἀνάγκη ἃ ἔχουσιν, ἐάν τε
βούλωνται ἐάν τε μή, καὶ τούτου γε δή που τίς ἂν ἐπιθυμήσειεν; ἀλλ᾽ ὅταν τις
λέγῃ ὅτι ἐγὼ ὑγιαίνων βούλομαι καὶ ὑγιαίνειν, καὶ πλουτῶν βούλομαι καὶ
πλουτεῖν, καὶ ἐπιθυμῶ αὐτῶν τούτων ἃ ἔχω, εἴποιμεν ἂν αὐτῷ ὅτι σύ, ὦ
ἄνθρωπε, (200d) πλοῦτον κεκτημένος καὶ ὑγίειαν καὶ ἰσχὺν βούλει καὶ εἰς τὸν
ἔπειτα χρόνον ταῦτα κεκτῆσθαι, ἐπεὶ ἐν τῷ γε νῦν παρόντι, εἴτε βούλει εἴτε μή,
ἔχεις· σκόπει οὖν, ὅταν τοῦτο λέγῃς, ὅτι ἐπιθυμῶ τῶν παρόντων, εἰ ἄλλο τι
λέγεις ἢ τόδε, ὅτι βούλομαι τὰ νῦν παρόντα καὶ εἰς τὸν ἔπειτα χρόνον παρεῖναι·
ἄλλο τι ὁμολογοῖ ἄν; Συμφάναι ἔφη τὸν Ἀγάθωνα. εἰπεῖν δὴ τὸν Σωκράτη,
Οὐκοῦν τοῦτό γ᾽ ἐστὶν ἐκείνου ἐρᾶν, ὃ οὔπω ἕτοιμον αὐτῷ ἐστιν οὐδὲ ἔχει, τὸ εἰς
τὸν ἔπειτα χρόνον ταῦτα εἶναι αὐτῷ σῳζόμενα καὶ παρόντα; (200e) Πάνυ γε,
φάναι. Καὶ οὗτος ἄρα καὶ ἄλλος πᾶς ὁ ἐπιθυμῶν τοῦ μὴ ἑτοίμου ἐπιθυμεῖ καὶ τοῦ
μὴ παρόντος, καὶ ὃ μὴ ἔχει καὶ ὃ μὴ ἔστιν αὐτὸς καὶ οὗ ἐνδεής ἐστι, τοιαῦτ᾽ ἄττα
ἐστὶν ὧν ἡ ἐπιθυμία τε καὶ ὁ ἔρως ἐστίν; Πάνυ γ᾽, εἰπεῖν. Ἴθι δή, φάναι τὸν
Σωκράτη, ἀνομολογησώμεθα τὰ εἰρημένα. ἄλλο τι ἔστιν ὁ Ἔρως ἢ πρῶτον μὲν
τινῶν, ἔπειτα τούτων ὧν ἂν ἔνδεια παρῇ αὐτῷ;
| [200] — Garde donc dans ta mémoire, dit Socrate, de quoi
il est amour, et réponds seulement à ceci : l'Amour
désire-t-il ou non l'objet dont il est amour?
— Il le désire, répondit-il.
— Mais, reprit Socrate, quand il désire et aime, a-t-il
ce qu'il désire et aime, ou ne l'a-t-il pas?
— Vraisemblablement il ne l'a pas, dit Agathon.
— Vois, continua Socrate, si, au lieu de vraisemblablement,
il ne faut pas dire nécessairement que celui
qui désire désire une chose qui lui manque et ne désire
pas ce qui ne lui manque pas. Pour ma part, c'est
merveille comme je trouve cela nécessaire, et toi?
— Moi aussi, dit Agathon.
— Fort bien. Donc un homme qui est grand ne
saurait vouloir être grand, ni un homme qui est fort être fort ?
— C'est impossible, d'après ce dont nous sommes convenus.
— En effet, étant ce qu'il est, il ne saurait avoir besoin de le devenir.
— C'est vrai.
— Si en effet, reprit Socrate, un homme fort voulait
être fort, un homme agile être agile, un homme bien
portant être bien portant — peut-être pourrait-on croire
que les hommes qui sont tels et possèdent ces qualités et
autres semblables désirent encore ce qu'ils ont déjà;
c'est pour ne pas tomber dans cette illusion que j'insiste —,
pour ces gens-là, Agathon, si tu veux y réfléchir, il est
nécessaire qu'ils aient au moment présent chacune des qualités
qu'ils ont, qu'ils le veuillent ou non ; comment donc
pourraient-ils désirer ce qu'ils ont?
Et si quelqu'un soutenait qu'étant en bonne santé
il désire être en bonne santé, qu'étant riche il désire être
riche et qu'il désire les biens mêmes qu'il possède, nous
lui répondrions : Toi, l'ami, qui jouis de la richesse, de
la santé, de la force, tu veux jouir de ces biens pour
l'avenir aussi, puisque dans le moment présent, que tu
le veuilles ou non, tu les possèdes. Vois donc, quand tu
prétends désirer ce que tu as, si tu ne veux pas précisément
dire : Je veux posséder aussi dans l'avenir les biens que je
possède maintenant. Il en tomberait d'accord, n'est-ce pas?
— Je le pense comme toi», dit Agathon.
Socrate reprit : « N'est-ce pas aimer une chose dont
on ne dispose pas encore, et qu'on n'a pas, que de souhaiter
pour l'avenir la continuation de la possession présente?
— Assurément, dit Agathon.
— Cet homme donc, comme tous ceux qui désirent,
désire ce qui n'est pas actuel ni présent; ce qu'on n'a
pas, ce qu'on n'est pas, ce dont on manque, voilà les
objets du désir et de l'amour.
— Il est vrai, répondit Agathon.
— Voyons maintenant, reprit Socrate, récapitulons.
N'avons-nous pas reconnu d'abord que l'Amour est
l'amour de certaines choses, ensuite de celles dont il sent le besoin?
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