[258] (258a) (Σωκράτης)
οὐ μανθάνεις ὅτι ἐν ἀρχῇ ἀνδρὸς πολιτικοῦ (συγγράμματι) πρῶτος ὁ ἐπαινέτης
γέγραπται.
(Φαῖδρος) πῶς;
(Σωκράτης)
" ἔδοξέ" πού φησιν "τῇ βουλῇ" ἢ "τῷ δήμῳ" ἢ ἀμφοτέροις, καὶ "ὃς <καὶ ὃς> εἶπεν" -
τὸν αὑτὸν δὴ λέγων μάλα σεμνῶς καὶ ἐγκωμιάζων ὁ συγγραφεύς — ἔπειτα λέγει
δὴ μετὰ τοῦτο, ἐπιδεικνύμενος τοῖς ἐπαινέταις τὴν ἑαυτοῦ σοφίαν, ἐνίοτε πάνυ
μακρὸν ποιησάμενος σύγγραμμα· ἤ σοι ἄλλο τι φαίνεται τὸ τοιοῦτον ἢ λόγος
συγγεγραμμένος;
(258b) (Φαῖδρος) οὐκ ἔμοιγε.
(Σωκράτης)
οὐκοῦν ἐὰν μὲν οὗτος ἐμμένῃ, γεγηθὼς ἀπέρχεται ἐκ τοῦ θεάτρου ὁ ποιητής· ἐὰν
δὲ ἐξαλειφθῇ καὶ ἄμοιρος γένηται λογογραφίας τε καὶ τοῦ ἄξιος εἶναι
συγγράφειν, πενθεῖ αὐτός τε καὶ οἱ ἑταῖροι.
(Φαῖδρος) καὶ μάλα.
(Σωκράτης)
δῆλόν γε ὅτι οὐχ ὡς ὑπερφρονοῦντες τοῦ ἐπιτηδεύματος, ἀλλ᾽ ὡς τεθαυμακότες.
(Φαῖδρος) πάνυ μὲν οὖν.
(Σωκράτης)
τί δέ; ὅταν ἱκανὸς γένηται ῥήτωρ ἢ βασιλεύς, ὥστε (258c) λαβὼν τὴν Λυκούργου ἢ
Σόλωνος ἢ Δαρείου δύναμιν ἀθάνατος γενέσθαι λογογράφος ἐν πόλει, ἆρ᾽ οὐκ
ἰσόθεον ἡγεῖται αὐτός τε αὑτὸν ἔτι ζῶν, καὶ οἱ ἔπειτα γιγνόμενοι ταὐτὰ ταῦτα
περὶ αὐτοῦ νομίζουσι, θεώμενοι αὐτοῦ τὰ συγγράμματα;
(Φαῖδρος) καὶ μάλα.
(Σωκράτης)
οἴει τινὰ οὖν τῶν τοιούτων, ὅστις καὶ ὁπωστιοῦν δύσνους Λυσίᾳ, ὀνειδίζειν αὐτὸ
τοῦτο ὅτι συγγράφει;
(Φαῖδρος)
οὔκουν εἰκός γε ἐξ ὧν σὺ λέγεις· καὶ γὰρ ἂν τῇ ἑαυτοῦ ἐπιθυμίᾳ, ὡς ἔοικεν,
ὀνειδίζοι.
(258d) (Σωκράτης)
τοῦτο μὲν ἄρα παντὶ δῆλον, ὅτι οὐκ αἰσχρὸν αὐτό γε τὸ γράφειν λόγους.
(Φαῖδρος) τί γάρ;
(Σωκράτης)
ἀλλ᾽ ἐκεῖνο οἶμαι αἰσχρὸν ἤδη, τὸ μὴ καλῶς λέγειν τε καὶ γράφειν ἀλλ᾽ αἰσχρῶς
τε καὶ κακῶς.
(Φαῖδρος) δῆλον δή.
(Σωκράτης)
τίς οὖν ὁ τρόπος τοῦ καλῶς τε καὶ μὴ γράφειν; δεόμεθά τι, ὦ Φαῖδρε, Λυσίαν τε
περὶ τούτων ἐξετάσαι καὶ ἄλλον ὅστις πώποτέ τι γέγραφεν ἢ γράψει, εἴτε
πολιτικὸν σύγγραμμα εἴτε ἰδιωτικόν, ἐν μέτρῳ ὡς ποιητὴς ἢ ἄνευ μέτρου ὡς ἰδιώτης;
(258e) (Φαῖδρος)
ἐρωτᾷς εἰ δεόμεθα; τίνος μὲν οὖν ἕνεκα κἄν τις ὡς εἰπεῖν ζῴη, ἀλλ᾽ ἢ τῶν
τοιούτων ἡδονῶν ἕνεκα; οὐ γάρ που ἐκείνων γε ὧν προλυπηθῆναι δεῖ ἢ μηδὲ
ἡσθῆναι, ὃ δὴ ὀλίγου πᾶσαι αἱ περὶ τὸ σῶμα ἡδοναὶ ἔχουσι· διὸ καὶ δικαίως
ἀνδραποδώδεις κέκληνται.
(Σωκράτης)
σχολὴ μὲν δή, ὡς ἔοικε· καὶ ἅμα μοι δοκοῦσιν ὡς ἐν τῷ πνίγει ὑπὲρ κεφαλῆς
ἡμῶν οἱ τέττιγες ᾄδοντες
| [258] — (SOCRATE) : Tu ne comprends pas que, (a) dans un écrit
d'homme politique, c'est le nom de l'approbateur qui est inscrit le
premier, tout au commencement? — (PHÈDRE) : Explique-toi...
— (SOCRATE) : « Il a plu », c'est à peu près ce qu'il dit,
« au Sénat », ou « Il a plu au peuple », ou bien, à tous
les deux ensemble; puis vient celui qui a fait la proposition,
se désignant lui-même avec solennité et se rendant
hommage, à lui l'auteur du texte; après quoi, voici
qu'ensuite il prend la parole, exposant au regard des
approbateurs sa sagesse à lui, composant un écrit qui
est parfois d'une belle longueur! (b) Dans un pareil
cas, vois-tu autre chose que la consignation par écrit
d'un discours? — (PHÈDRE) : Ma foi, non! — (SOCRATE) : Et
maintenant, s'il arrive que ce discours demeure au
programme, alors, tout joyeux, l'auteur s'éloigne du
théâtre! Si, au contraire, son discours en est rayé et
qu'il en vienne à être privé de participer à la logographie
et du droit de composer par écrit, c'est un deuil pour lui
personnellement comme pour les gens de son parti.
— (PHÈDRE) : Ah! je crois bien! — (SOCRATE) : Manifestement, ce
n'est pas la conduite de gens qui dédaignent la pratique
en question, mais au contraire de gens qui ont conçu pour
elle de l'admiration. — (PHÈDRE) : Hé! absolument. — (SOCRATE) :
Mais quoi? Lorsqu'un orateur, ou bien un roi, s'est
rendu capable, ayant acquis la puissance de Lycurgue,
ou de Solon, ou de Darius, (c) de devenir dans un Etat
un logographe immortel, ne se juge-t-il pas personnellement,
tant qu'il est encore en vie, être personnellement
un égal des Dieux? la postérité, au spectacle de ses
écrits, ne se fait-elle pas à son sujet cette même opinion?
— (PHÈDRE) : Ah! je crois bien! — (SOCRATE) : Alors,
crois-tu maintenant qu'un homme de cette espèce-là,
un quelconque et pour une raison quelconque mal
disposé à l'égard de Lysias, trouve, dans ce fait même
qu'il écrit, le motif d'un reproche à lui faire? —
(PHÈDRE) : En tout cas, ce n'est pas vraisemblable, au moins
d'après ce que tu dis; car le reproche, semble-t-il bien,
s'appliquerait alors à sa propre passion! — (SOCRATE) : Ainsi,
c'est pour tout le monde une conclusion manifeste :
(d) il n'y a rien de vilain à cela, je veux dire à composer
des discours par écrit. — (PHÈDRE) : Et pourquoi, en effet? —
(SOCRATE) : Mais où la chose, à mon avis, commence d'être
vilaine, c'est quand, au lieu de parler ou d'écrire de la
belle manière, on le fait d'une vilaine et mauvaise. —
(PHÈDRE) : Eh! manifestement. — (SOCRATE) : Mais quel est le
trait distinctif, et de la belle manière d'écrire, et de celle
qui ne l'est pas? Y a-t-il pour nous quelque obligation,
Phèdre, de faire subir là-dessus un examen, tant à Lysias
qu'à tout autre qui a jamais écrit ou écrira quelque
chose? que ce soit un écrit d'ordre politique, ou bien
d'ordre privé? que cet écrit ait recours au mètre et soit
une oeuvre poétique, ou qu'il s'en passe et soit en prose?
(e) — (PHÈDRE) : Tu demandes si c'est une obligation pour
nous? Demande plutôt pour quoi, si je puis dire, on
vivrait, si ce n'était pour de semblables jouissances! A
la vérité, ces jouissances ne sont pas de celles, vois-tu,
que doit précéder une souffrance, et faute de laquelle
on ne les sentirait même pas; ce qui caractérise assurément
toutes les jouissances, ou peu s'en faut, qui
concernent le corps. C'est pourquoi, aussi, il est légitime
que celles-ci aient été appelées serviles! —
(SOCRATE) : Ce n'est assurément pas, à ce qu'il semble, le
loisir qui nous manque! Et c'est en même temps mon
opinion que les cigales, qui, comme il se doit au fort de
la chaleur, au-dessus de nos têtes chantent
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