[237] (237a) (Φαῖδρος) λέγε δή.
(Σωκράτης) οἶσθ᾽ οὖν ὡς ποιήσω;
(Φαῖδρος) τοῦ πέρι;
(Σωκράτης)
ἐγκαλυψάμενος ἐρῶ, ἵν᾽ ὅτι τάχιστα διαδράμω τὸν λόγον καὶ μὴ βλέπων πρὸς σὲ
ὑπ᾽ αἰσχύνης διαπορῶμαι.
(Φαῖδρος) λέγε μόνον, τὰ δ᾽ ἄλλα ὅπως βούλει ποίει.
(Σωκράτης)
ἄγετε δή, ὦ Μοῦσαι, εἴτε δι᾽ ᾠδῆς εἶδος λίγειαι, εἴτε διὰ γένος μουσικὸν τὸ
Λιγύων ταύτην ἔσχετ᾽ ἐπωνυμίαν, "ξύμ μοι λάβεσθε" τοῦ μύθου, ὅν με
ἀναγκάζει ὁ βέλτιστος οὑτοσὶ λέγειν, ἵν᾽ ὁ ἑταῖρος αὐτοῦ, καὶ πρότερον (237b)
δοκῶν τούτῳ σοφὸς εἶναι, νῦν ἔτι μᾶλλον δόξῃ.
ἦν οὕτω δὴ παῖς, μᾶλλον δὲ μειρακίσκος, μάλα καλός· τούτῳ δὲ ἦσαν ἐρασταὶ
πάνυ πολλοί. εἷς δέ τις αὐτῶν αἱμύλος ἦν, ὃς οὐδενὸς ἧττον ἐρῶν ἐπεπείκει τὸν
παῖδα ὡς οὐκ ἐρῴη. καί ποτε αὐτὸν αἰτῶν ἔπειθεν τοῦτ᾽ αὐτό, ὡς μὴ ἐρῶντι πρὸ
τοῦ ἐρῶντος δέοι χαρίζεσθαι, ἔλεγέν τε ὧδε —
περὶ παντός, ὦ παῖ, μία ἀρχὴ τοῖς μέλλουσι καλῶς (237c) βουλεύσεσθαι· εἰδέναι
δεῖ περὶ οὗ ἂν ᾖ ἡ βουλή, ἢ παντὸς ἁμαρτάνειν ἀνάγκη. τοὺς δὲ πολλοὺς λέληθεν
ὅτι οὐκ ἴσασι τὴν οὐσίαν ἑκάστου. ὡς οὖν εἰδότες οὐ διομολογοῦνται ἐν ἀρχῇ τῆς
σκέψεως, προελθόντες δὲ τὸ εἰκὸς ἀποδιδόασιν· οὔτε γὰρ ἑαυτοῖς οὔτε ἀλλήλοις
ὁμολογοῦσιν. ἐγὼ οὖν καὶ σὺ μὴ πάθωμεν ὃ ἄλλοις ἐπιτιμῶμεν, ἀλλ᾽ ἐπειδὴ σοὶ
καὶ ἐμοὶ ὁ λόγος πρόκειται πότερα ἐρῶντι ἢ μὴ μᾶλλον εἰς φιλίαν ἰτέον, περὶ
ἔρωτος οἷόν τ᾽ ἔστι καὶ ἣν ἔχει δύναμιν, (237d) ὁμολογίᾳ θέμενοι ὅρον, εἰς τοῦτο
ἀποβλέποντες καὶ ἀναφέροντες τὴν σκέψιν ποιώμεθα εἴτε ὠφελίαν εἴτε βλάβην
παρέχει. ὅτι μὲν οὖν δὴ ἐπιθυμία τις ὁ ἔρως, ἅπαντι δῆλον· ὅτι δ᾽ αὖ καὶ μὴ
ἐρῶντες ἐπιθυμοῦσι τῶν καλῶν, ἴσμεν. τῷ δὴ τὸν ἐρῶντά τε καὶ μὴ κρινοῦμεν; δεῖ
αὖ νοῆσαι ὅτι ἡμῶν ἐν ἑκάστῳ δύο τινέ ἐστον ἰδέα ἄρχοντε καὶ ἄγοντε, οἷν
ἑπόμεθα ᾗ ἂν ἄγητον, ἡ μὲν ἔμφυτος οὖσα ἐπιθυμία ἡδονῶν, ἄλλη δὲ ἐπίκτητος
δόξα, ἐφιεμένη τοῦ ἀρίστου. τούτω δὲ ἐν ἡμῖν τοτὲ μὲν ὁμονοεῖτον, (237e) ἔστι δὲ
ὅτε στασιάζετον· καὶ τοτὲ μὲν ἡ ἑτέρα, ἄλλοτε δὲ ἡ ἑτέρα κρατεῖ. δόξης μὲν οὖν
ἐπὶ τὸ ἄριστον λόγῳ ἀγούσης καὶ κρατούσης τῷ κράτει σωφροσύνη ὄνομα·
| [237] (a) — (PHÈDRE) : Parle donc, alors! — (SOCRATE) : Écoute!
sais-tu comment je le ferai? — (PHÈDRE) : A quel propos?
— (SOCRATE) : C'est la tête voilée que je vais parler, afin de courir
le plus rapidement possible jusqu'au terme de mon discours
et de peur que, si je regarde vers toi, je n'aille, de honte,
perdre la tête! — (PHÈDRE) : Parle seulement! et, pour le
reste, fais comme il te plaît!
— (SOCRATE) : « Allons, Muses ! Que vous soyez Ligies en raison
de la qualité de votre chant, ou que vous teniez ce
surnom de la gent musicienne des Ligures, aidez-moi à
m'engager dans ce discours, que me force à prononcer le très
honorable seigneur que voici, afin que son ami, (b) qui déjà
avait auprès de lui le prestige du talent, acquière à présent un
plus haut prestige encore!
Il y avait une fois un jeune garçon, bien plutôt un adolescent,
qui était extrêmement beau et avait toute une foule
d'amoureux. Or, dans le nombre, il y en avait un qui était un
rusé et qui, sans être moins amoureux qu'aucun autre, avait
persuadé au jeune garçon qu'il ne l'aimait point. Un jour
même, qu'il lui adressait sa requête, il entreprit de lui persuader
précisément ceci, que l'on doit céder aux voeux de celui
qui n'aime pas, plutôt que de celui qui aime, et voici le langage
qu'il lui tenait :
« Sur toute question, mon jeune ami, il y a un unique point
de départ pour quiconque veut en bien délibérer: (c) c'est,
obligatoirement, que nous sachions quel est éventuellement
l'objet de la délibération ; sans quoi, nécessairement, tout
est manqué. Or, ce qui échappe à la plupart des hommes,
c'est leur ignorance de la nature essentielle de chaque chose.
Aussi négligent-ils, croyant la connaître, de se mettre
d'accord au début de la recherche. Mais, en avançant, ils
paient le prix normal d'une telle négligence : ils ne s'accordent
en effet, ni avec eux-mêmes, ni entre eux. Ne nous exposons
donc pas, toi et moi, au reproche que nous faisons à d'autres ;
mais au contraire, puisque nous avons, toi et moi, à envisager
la question de savoir si c'est avec celui qui aime ou
avec celui qui n'aime pas qu'il faut plutôt entrer en amitié,
pour nous il y a, au sujet de l'amour, de sa nature, des effets
qu'il produit, (d) obligation, après avoir posé en accord
une définition, de faire, les yeux fixés là-dessus et nous y
référant, l'examen de la question de savoir s'il nous procure
utilité ou bien dommage.
« Or, que l'amour soit précisément un désir, c'est ce qui
est clair pour tout le monde, et que, d'un autre côté, même
ceux qui n'aiment pas désirent les beaux objets, nous le
savons ; alors, par quel moyen distinguerons-nous entre celui
qui aime et celui qui n'aime pas? Il faut encore réfléchir
qu'il existe en chacun de nous deux sortes de principes,
directeurs et moteurs, que nous suivons où ils peuvent bien
nous mener : l'un est inné, qui est désir de jouissances ;
l'autre est une croyance acquise, qui est aspiration au plus
parfait. Or, en nous, tantôt il y a concorde entre ces deux
principes, (e) mais il arrive aussi qu'il y ait, entre eux
deux, dissension ; et tantôt c'est l'un qui a le dessus, d'autres
fois c'est l'autre. Sans doute est-ce parce qu'une réflexion
mène au plus parfait la croyance et lui donne le dessus, que
cette supériorité prend le nom de modération,
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