[461] ὅτι ὁ ῥήτωρ (461a) τῇ ῥητορικῇ κἂν ἀδίκως χρῷτο, οὕτω
θαυμάσας καὶ ἡγησάμενος οὐ συνᾴδειν τὰ λεγόμενα ἐκείνους εἶπον τοὺς
λόγους, ὅτι εἰ μὲν κέρδος ἡγοῖο εἶναι τὸ ἐλέγχεσθαι ὥσπερ ἐγώ, ἄξιον εἴη
διαλέγεσθαι, εἰ δὲ μή, ἐᾶν χαίρειν. ὕστερον δὲ ἡμῶν ἐπισκοπουμένων ὁρᾷς δὴ καὶ
αὐτὸς ὅτι αὖ ὁμολογεῖται τὸν ῥητορικὸν ἀδύνατον εἶναι ἀδίκως χρῆσθαι τῇ
ῥητορικῇ καὶ ἐθέλειν ἀδικεῖν. ταῦτα οὖν ὅπῃ ποτὲ ἔχει, μὰ τὸν (461b) κύνα, ὦ
Γοργία, οὐκ ὀλίγης συνουσίας ἐστὶν ὥστε ἱκανῶς διασκέψασθαι.
(Πῶλος)
τί δέ, ὦ Σώκρατες; οὕτω καὶ σὺ περὶ τῆς ῥητορικῆς δοξάζεις ὥσπερ νῦν λέγεις; ἢ
οἴει — ὅτι Γοργίας ᾐσχύνθη σοι μὴ προσομολογῆσαι τὸν ῥητορικὸν ἄνδρα μὴ οὐχὶ
καὶ τὰ δίκαια εἰδέναι καὶ τὰ καλὰ καὶ τὰ ἀγαθά, καὶ ἐὰν μὴ ἔλθῃ ταῦτα εἰδὼς
παρ' αὐτόν, αὐτὸς διδάξειν, ἔπειτα ἐκ ταύτης ἴσως τῆς ὁμολογίας ἐναντίον τι
συνέβη ἐν τοῖς (461c) λόγοις — τοῦτο <ὃ> δὴ ἀγαπᾷς, αὐτὸς ἀγαγὼν ἐπὶ τοιαῦτα
ἐρωτήματα — ἐπεὶ τίνα οἴει ἀπαρνήσεσθαι μὴ οὐχὶ καὶ αὐτὸν ἐπίστασθαι τὰ
δίκαια καὶ ἄλλους διδάξειν; — ἀλλ' εἰς τὰ τοιαῦτα ἄγειν πολλὴ ἀγροικία ἐστὶν
τοὺς λόγους.
(Σωκράτης)
ὦ κάλλιστε Πῶλε, ἀλλά τοι ἐξεπίτηδες κτώμεθα ἑταίρους καὶ ὑεῖς, ἵνα ἐπειδὰν
αὐτοὶ πρεσβύτεροι γενόμενοι σφαλλώμεθα, παρόντες ὑμεῖς οἱ νεώτεροι
ἐπανορθῶτε ἡμῶν τὸν βίον καὶ ἐν ἔργοις καὶ ἐν λόγοις. καὶ νῦν εἴ τι ἐγὼ καὶ
(461d) (Γοργίας) ἐν τοῖς λόγοις σφαλλόμεθα, σὺ παρὼν ἐπανόρθου — δίκαιος δ' εἶ —
καὶ ἐγὼ ἐθέλω τῶν ὡμολογημένων εἴ τί σοι δοκεῖ μὴ καλῶς ὡμολογῆσθαι,
ἀναθέσθαι ὅτι ἂν σὺ βούλῃ, ἐάν μοι ἓν μόνον φυλάττῃς.
(Πῶλος) τί τοῦτο λέγεις;
(Σωκράτης)
τὴν μακρολογίαν, ὦ Πῶλε, ἢν καθέρξῃς, ᾗ τὸ πρῶτον ἐπεχείρησας χρῆσθαι.
(Πῶλος) τί δέ; οὐκ ἐξέσται μοι λέγειν ὁπόσα ἂν βούλωμαι;
(461e) (Σωκράτης)
δεινὰ μεντἂν πάθοις, ὦ βέλτιστε, εἰ Ἀθήναζε ἀφικόμενος, οὗ τῆς Ἑλλάδος
πλείστη ἐστὶν ἐξουσία τοῦ λέγειν, ἔπειτα σὺ ἐνταῦθα τούτου μόνος ἀτυχήσαις.
ἀλλὰ ἀντίθες τοι· σοῦ μακρὰ λέγοντος καὶ μὴ ἐθέλοντος τὸ ἐρωτώμενον
ἀποκρίνεσθαι, οὐ δεινὰ ἂν αὖ ἐγὼ πάθοιμι,
| [461] que l'orateur pouvait faire un usage injuste
de la rhétorique, j'al été surpris et j'ai cru que tes deux
discours ne s'accordaient pas. C'est ce qui m'a fait dire
que si tu regardais, ainsi que moi, comme un avantage
d'être réfuté, nous pouvions continuer l'entretien ; sinon,
qu'il fallait le laisser là. Or, tu vois toi-même qu'en
soumettant la chose à un nouvel examen, nous sommes
encore d'accord sur ce point ; que l'orateur ne peut
user injustement de la rhétorique, ni vouloir commettre
une injustice. Et par le chien! ce n'est pas la matière
d'un petit entretien, Gorgias, que d'examiner à
fond ce qu'il faut penser à cet égard.
DEUXIÈME PARTIE : Discussion de Socrate avec Polus sur la justice;
Polus défendla sophistique comme l'instrument le plus utile.
XVI. — POLUS. Quoi donc, Socrate, as-tu réellement
l'opinion que tu viens d'émettre sur la rhétorique? ou
ne crois-tu pas plutôt que c'est par pudeur que Gorgias
t'a accordé que l'orateur connaît le juste, le beau, le
bon, et que lui-même, si on venait chez lui sans être
instruit de ces choses, il les enseignerait? C'est probablement
par suite de cette concession qu'il a paru
quelque contradiction dans ses discours : chose dont
tu te fais un plaisir, en engageant toi-même tes interlocuteurs
dans ces questions captieuses. Mais penses-tu
qu'il y ait quelqu'un au monde qui veuille avouer qu'il
n'a aucune connaissance de la justice et qu'il n'est pas
en état d'en instruire les autres ? En vérité, c'est une
grande étrangeté que d'amener le discours à de pareilles
fadaises. — SOCRATE. Charmant Polus, nous avons
des amis et des enfants tout exprès, afin que si nous
venons à faire quelque faux pas étant devenus vieux,
vous autres jeunes gens, vous redressiez et nos actions
et nos discours. Ainsi dans ce moment, si nous disons,
Gorgias et moi , quelque chose qui ne soit pas exact,
corrige-nous ; tu le dois; et même, si parmi les concessions
qui ont été faites, il y en a quelqu'une qui te
paraisse mal à propos, je te permets de la retirer comme
tu voudras, pourvu seulement que tu prennes garde à
une chose. — POLUS. A quoi donc? — SOCRATE. A réprimer,
Polus, cette démangeaison de faire de longs
discours, à laquelle tu étais sur le point de te livrer
au commencement de cet entretien. — POLUS. Quoi
donc! ne me sera-t-il pas permis de parler aussi longtemps
que je voudrai? — SOCRATE. Ce serait en user
bien mal avec toi, mon cher, si étant venu à Athènes,
l'endroit de la Grèce où l'on a la plus grande liberté
de parler, tu étais le seul que l'on privât de ce droit.
Mais considère d'un autre côté que, si tu parles longuement,
sans vouloir répondre avec précision à mes
questions, je serai bien à plaindre à mon tour
|