[8,49] Φέρε, ἀλλὰ δόξαν αἰσχρὰν οἴσεσθαι
δέδοικας, ἐὰν ἃ παρακαλῶ σε πράττῃς, ὡς ἀχάριστος
εἰς τοὺς εὐεργέτας ἐξελεγχθησόμενος, οἵ σε πολέμιον
ὄντα ὑποδεξάμενοι πάντων μετέδωκαν ὧν τοῖς φύσει
πολίταις μέτεστιν ἀγαθῶν· ταῦτα γάρ ἐστιν, ἃ μεγάλα
ποιεῖς τοῖς λόγοις ἀεί. οὐκ ἀποδέδωκας οὖν αὐτοῖς
πολλὰς καὶ καλὰς ἀμοιβὰς καὶ νενίκηκας ἀπείρῳ δή
τινι μεγέθει καὶ πλήθει χαρίτων τὰς ἐξ ἐκείνων εὐεργεσίας; οὓς
ἀγαπητὸν ἡγουμένους καὶ πάντων μέγιστον ἀγαθῶν, ἐὰν
ἐλευθέρας οἰκῶσι τὰς πατρίδας, οὐ
μόνον ἑαυτῶν κυρίους εἶναι βεβαίως παρεσκεύακας,
ἀλλὰ καὶ πεποίηκας ἤδη σκοπεῖν, πότερα καταλῦσαι
τὴν Ῥωμαίων ἀρχὴν αὐτοῖς ἄμεινον, ἢ μετέχειν αὐτῆς
ἐξ ἴσου κοινὴν καταστησαμένους πολιτείαν. ἐῶ γὰρ
λέγειν, ὅσοις κεκόσμηκας ἐκ τοῦ πολέμου λαφύροις τὰς
πόλεις αὐτῶν, καὶ πηλίκους κεχάρισαι τοῖς συστρατευσαμένοις
πλούτους. τοὺς δὴ τοσούτους διὰ σὲ γενομένους καὶ ἐπὶ
τηλικαύτης βεβηκότας εὐτυχίας οὐ
δοκεῖς ἀγαπήσειν οἷς ἔχουσιν ἀγαθοῖς, ἀλλ´ ὀργιεῖσθαί
σοι καὶ ἀγανακτήσειν, ἐὰν μὴ καὶ τὸ τῆς πατρίδος
αἷμα ταῖς χερσὶν αὐτῶν ἐπισπείσῃς; ἐγὼ μὲν οὐκ οἴομαι. εἷς ἔτι
μοι καταλείπεται λόγος ἰσχυρὸς μέν,
ἐὰν λογισμῷ κρίνῃς αὐτόν, ἀσθενὴς δ´, ἐὰν μετ´ ὀργῆς,
ὁ περὶ τῆς οὐ δικαίως μισουμένης ὑπὸ σοῦ πατρίδος.
οὔτε γὰρ ὑγιαίνουσα καὶ τῷ πατρίῳ κόσμῳ πολιτευομένη τὴν οὐ
δικαίαν κατὰ σοῦ κρίσιν ἐξήνεγκεν, ἀλλὰ
νοσοῦσα καὶ ἐν πολλῷ κλύδωνι σαλευομένη, οὔτε πᾶσα
τὴν αὐτὴν γνώμην τότ´ ἔσχεν, ἀλλὰ τὸ κάκιον ἐν
αὐτῇ μέρος πονηροῖς προστάταις χρησάμενον. εἰ δὲ
δὴ μὴ τοῖς κακίστοις μόνον, ἀλλὰ καὶ τοῖς ἄλλοις
ἅπασιν ἐδόκει ταῦτα, καὶ ὡς οὐ τὰ κράτιστα πολιτευόμενος
ἀπηλάθης ὑπ´ αὐτῶν, οὐδ´ οὕτω σοι προσῆκε
μνησικακεῖν πρὸς τὴν σεαυτοῦ πατρίδα. πολλοῖς γὰρ
δὴ καὶ ἄλλοις τῶν ἀπὸ τοῦ βελτίστου πολιτευομένων
τὰ παραπλήσια συνέβη παθεῖν· καὶ σπάνιοι δή τινές
εἰσιν, οἷς οὐκ ἀντέπνευσε πρὸς τὴν δοκοῦσαν ἀρετὴν
φθόνος ἐκ τῶν συμπολιτευομένων ἄδικος. ἀλλ´ ἀνθρωπίνως, ὦ
Μάρκιε, φέρουσι καὶ μετρίως ἅπαντες
οἱ γενναῖοι τὰς συμφοράς, καὶ πόλεις μεταλαμβάνουσιν,
ἐν αἷς οἰκήσαντες οὐθὲν λυπήσουσι τὰς πατρίδας·
ὥσπερ καὶ Ταρκύνιος ἐποίησεν ὁ Κολλατῖνος ἐπικαλούμενος·
{ἱκανὸν ἓν παράδειγμα καὶ οἰκεῖον·} ὃς συνελευθερώσας ἀπὸ τῶν
τυράννων τοὺς πολίτας, ἔπειτα
διαβληθεὶς πρὸς αὐτοὺς ὡς συμπράττων πάλιν τοῖς
τυράννοις τὴν κάθοδον, καὶ διὰ τοῦτο ἐξελασθεὶς αὐτὸς ἐκ τῆς
πατρίδος, οὐκ ἐμνησικάκει πρὸς τοὺς ἐκβαλόντας αὐτόν, οὐδ´
ἐπεστράτευε τῇ πόλει τοὺς τυράννους ἐπαγόμενος, οὐδ´ ἐποίει
τεκμήρια τῶν διαβολῶν τὰ ἔργα, ἀλλ´ εἰς τὴν μητρόπολιν ἡμῶν
Λαουΐνιον ἀπελθὼν ἐκεῖ πάντα τὸν λοιπὸν ἐβίω χρόνον εὔνους
ὢν τῇ πατρίδι καὶ φίλος.
| [8,49] Peut-être craignez-vous d'être noté d'infamie si vous faisiez
ce que je vous demande, ou de passer pour un ingrat envers vos
bienfaiteurs, qui après vous avoir reçu chez eux, quoique vous fussiez
leur ennemi, vous ont encore fait entrer dans tous les droits dont
jouissent les naturels du pays, car voila ce que vous faites sonner si haut,
et ce sont là les raisons que vous alléguez. Mais les Volsques ne sont-ils
pas assez récompensés par tant de services que vous leur avez rendus ?
Votre reconnaissance n'a-t-elle pas surpassé les grâces qu'ils vous ont
accordées? N'avez-vous pas beaucoup plus fait pour eux qu'ils n'avaient
fait pour vous ? Ils ne souhaitaient rien plus ardemment que de jouir dans
leur pays des douceurs de la liberté : ils regardaient cet avantage comme
le souverain bien, toute leur ambition se bornait là. Non seulement vous
les avez rendus maitres d'eux-mêmes en leur procurant une liberté hors
de toute atteinte, mais vous les avez élevés si haut, qu'aujourd'hui ils
mettent en délibération, s'ils doivent détruire l'empire des Romains ou
vivre avec eux dans une entière égalité en soumettant les deux nations à
un seul et même gouvernement. Je ne parle point des glorieuses
dépouilles qui sont l'ornement de leurs villes, ni des richesses immenses
dont vous avez comblé les compagnons de vos exploits. Devenus si
puissants par vos bienfaits, élevés au plus haut point de félicité, pensez-vous
que peu contents des avantages dont ils jouissent, ils seront irrités
contre vous si vous ne leur sacrifiez votre patrie et si vous ne rougissez
leurs mains du sang de vos citoyens ? Pour moi je ne puis le croire.
« XX. IL me reste encore quelques remontrances à vous faire : elles
vous toucheront vivement si vous consultez la raison ; mais elles ne feront
aucune impression sur vous, si vous vous laissez emporter à la colère.
Vous haïssez votre patrie. Mais n'avez-vous pas tort de la haïr ? Etait-elle
saine ou gouvernée selon les lois de nos pères, lorsqu'elle porta contre
vous un jugement injuste ? Ses membres étaient malades, elle était
agitée d'une violente tempête. D'ailleurs tous les citoyens n'étaient pas
d'avis de vous condamner : il n'y eut que les plus corrompus qui y furent
poussés par les pernicieux conseils de leurs chefs acharnés contre les
gens de bien. Et quand même, non seulement les méchants, mais tous
les autres citoyens auraient conspiré ensemble pour vous bannir comme
un homme dangereux à l'état par sa mauvaise politique, après tout,
devriez-vous vous en venger sur votre patrie ? Plusieurs autres qui
administraient les affaires de la république avec de droites intentions,
ont été traités aussi rigoureusement que vous; et vous trouverez de bons
magistrats dont la vertu et le mérite éclatant n'ait été en butte à l'envie de
leurs citoyens. Cependant, mon fils, tous ces grands personnages
souffrant leurs disgrâces avec modération comme des malheurs
inévitables aux hommes, passent dans d'autres villes où ils ne font aucun
tort à leur patrie. Tarquin surnommé Collatinus en a usé de la sorte : c'est
un exemple domestique, qui doit vous tenir lieu de plusieurs autres. Après
avoir contribué à délivrer Rome de la tyrannie des Tarquins, ce consul
accusé devant ses citoyens de travailler à faire revenir les tyrans, fut exilé
de la patrie sous ce prétexte. Il ne conserva néanmoins aucun
ressentiment contre ceux qui l'avaient banni. On ne le vit point attaquer
Rome avec une nombreuse armée pour remettre les tyrans sur le trône ; il
ne fit rien qui put confirmer les calomnies qu'on avait débitées contre lui.
Il se retira à Lavinium notre métropole, où il passa le reste de ses jours,
sans y rien diminuer de son attachement sincère pour sa patrie.
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