[265] (265a) (Φαῖδρος) τὸ ποῖον δὴ λέγεις;
(Σωκράτης)
ἐναντίω που ἤστην· ὁ μὲν γὰρ ὡς τῷ ἐρῶντι, ὁ δ᾽ ὡς τῷ μὴ δεῖ χαρίζεσθαι,
ἐλεγέτην.
(Φαῖδρος) καὶ μάλ᾽ ἀνδρικῶς.
(Σωκράτης)
ὤιμην σε τἀληθὲς ἐρεῖν, ὅτι μανικῶς· ὃ μέντοι ἐζήτουν ἐστὶν αὐτὸ τοῦτο. μανίαν
γάρ τινα ἐφήσαμεν εἶναι τὸν ἔρωτα. ἦ γάρ;
(Φαῖδρος) ναί.
(Σωκράτης)
μανίας δέ γε εἴδη δύο, τὴν μὲν ὑπὸ νοσημάτων ἀνθρωπίνων, τὴν δὲ ὑπὸ θείας
ἐξαλλαγῆς τῶν εἰωθότων νομίμων γιγνομένην.
(265b) (Φαῖδρος) πάνυ γε.
(Σωκράτης)
τῆς δὲ θείας τεττάρων θεῶν τέτταρα μέρη διελόμενοι, μαντικὴν μὲν ἐπίπνοιαν
Ἀπόλλωνος θέντες, Διονύσου δὲ τελεστικήν, Μουσῶν δ᾽ αὖ ποιητικήν, τετάρτην
δὲ ἀφροδίτης καὶ Ἔρωτος, ἐρωτικὴν μανίαν ἐφήσαμέν τε ἀρίστην εἶναι, καὶ οὐκ
οἶδ᾽ ὅπῃ τὸ ἐρωτικὸν πάθος ἀπεικάζοντες, ἴσως μὲν ἀληθοῦς τινος ἐφαπτόμενοι,
τάχα δ᾽ ἂν καὶ ἄλλοσε παραφερόμενοι, κεράσαντες οὐ παντάπασιν ἀπίθανον
λόγον, (265c) μυθικόν τινα ὕμνον προσεπαίσαμεν μετρίως τε καὶ εὐφήμως τὸν
ἐμόν τε καὶ σὸν δεσπότην ἔρωτα, ὦ Φαῖδρε, καλῶν παίδων ἔφορον.
(Φαῖδρος) καὶ μάλα ἔμοιγε οὐκ ἀηδῶς ἀκοῦσαι.
(Σωκράτης)
τόδε τοίνυν αὐτόθεν λάβωμεν, ὡς ἀπὸ τοῦ ψέγειν πρὸς τὸ ἐπαινεῖν ἔσχεν ὁ
λόγος μεταβῆναι.
(Φαῖδρος) πῶς δὴ οὖν αὐτὸ λέγεις;
(Σωκράτης)
ἐμοὶ μὲν φαίνεται τὰ μὲν ἄλλα τῷ ὄντι παιδιᾷ πεπαῖσθαι· τούτων δέ τινων ἐκ
τύχης ῥηθέντων δυοῖν εἰδοῖν, (265d) εἰ αὐτοῖν τὴν δύναμιν τέχνῃ λαβεῖν δύναιτό
τις, οὐκ ἄχαρι.
(Φαῖδρος) τίνων δή;
(Σωκράτης)
εἰς μίαν τε ἰδέαν συνορῶντα ἄγειν τὰ πολλαχῇ διεσπαρμένα, ἵνα ἕκαστον
ὁριζόμενος δῆλον ποιῇ περὶ οὗ ἂν ἀεὶ διδάσκειν ἐθέλῃ. ὥσπερ τὰ νυνδὴ περὶ
Ἔρωτος — ὃ ἔστιν ὁρισθέν — εἴτ᾽ εὖ εἴτε κακῶς ἐλέχθη, τὸ γοῦν σαφὲς καὶ τὸ αὐτὸ
αὑτῷ ὁμολογούμενον διὰ ταῦτα ἔσχεν εἰπεῖν ὁ λόγος.
(Φαῖδρος) τὸ δ᾽ ἕτερον δὴ εἶδος τί λέγεις, ὦ Σώκρατες;
(265e) (Σωκράτης)
τὸ πάλιν κατ᾽ εἴδη δύνασθαι διατέμνειν κατ᾽ ἄρθρα ᾗ πέφυκεν, καὶ μὴ ἐπιχειρεῖν
καταγνύναι μέρος μηδέν, κακοῦ μαγείρου τρόπῳ χρώμενον· ἀλλ᾽ ὥσπερ ἄρτι τὼ
λόγω τὸ μὲν ἄφρον τῆς διανοίας ἕν τι κοινῇ εἶδος ἐλαβέτην,
| [265] — (PHÈDRE) : Qu'entends-tu donc par là? — (SOCRATE) :
Que ces deux discours se contredisaient en quelque
sorte, puisqu'ils disaient, l'un, que l'on doit céder aux
voeux de celui qui aime, l'autre, aux voeux de celui qui
n'aime pas. — (PHÈDRE) : Et ils le disaient avec grande énergie!
— (SOCRATE) : Je pensais que tu allais dire le mot vrai :
avec délire! En tout cas, c'est précisément celui que je
cherchais, car nous avons dit, n'est-ce pas? que
l'amour est un délire. — (PHÈDRE) : Oui. — (SOCRATE) : Mais,
à la vérité, il y a deux espèces de délire, l'une, qui est
le résultat d'humaines maladies, l'autre, celui d'une
rupture, d'essence divine, avec la coutume et ses règles.
(b) (PHÈDRE) : Hé! absolument! — (SOCRATE) : Or, le délire
divin, nous l'avons divisé en quatre sections, qui
dépendent de quatre Divinités, attribuant l'inspiration
divinatoire à Apollon, l'inspiration mystique à Dionysos,
l'inspiration poétique, de son côté, aux Muses,
la quatrième enfin à Aphrodite et à Amour; déclarant
aussi que le délire d'amour est, de tous, le plus beau.
Puis (comment est-ce arrivé? je ne sais!), en faisant
de l'émotion amoureuse une peinture, où sans doute
nous atteignions quelque vérité tandis que, d'autre part,
nous avions chance aussi de peut-être nous égarer dans
une autre direction, (c) ayant de la sorte combiné en
paroles un mélange qui n'était pas totalement dénué
de vertu persuasive, nous avons, en manière de badinage,
composé avec autant de convenance que de
piété une sorte d'hymne mythique en l'honneur d'Amour,
ton maître, Phèdre, comme le mien, à la garde de qui
sont confiés les beaux garçons! — (PHÈDRE) : C'est sans
déplaisir, ma foi! que, pour ma part, j'en ai été l'auditeur! —
(SOCRATE) : Eh bien! que cet hymne nous serve donc justement
à comprendre comment le discours fut à même de passer du
blâme à l'éloge.
— (PHÈDRE) : Comment donc, enfin, l'entends-tu? — (SOCRATE) :
Un point évident à mes yeux, c'est que, pour tout le
reste, on n'a fait réellement que jouer un jeu, mais que,
d'autre part, dans certaines de ces choses que nous a
fait dire une heureuse fortune, (d) il y a deux procédés,
dont l'étude ne serait pas sans profit pour qui
serait capable d'en utiliser la nature avec art... — (PHÈDRE) :
Et quels sont-ils? — (SOCRATE) : L'un est, prenant une vue
d'ensemble de ce qui est disséminé en une foule d'endroits,
de le mener à une essence unique, afin de
manifester, par une définition de chacun, l'objet sur
lequel, en chaque cas, on voudra donner enseignement.
C'est ce que nous fîmes tout à l'heure pour l'amour;
et, que notre définition de sa nature fût bien ou mal
énoncée, tout au moins la clarté et l'accord avec soi-même
ont-ils été, par ce moyen, rendus possibles pour
celui qui fait le discours. —
(PHÈDRE) : Et l'autre procédé dont tu parles, quel est-il,
Socrate? (e) — (SOCRATE) : C'est, au rebours, d'être capable
de fendre l'essence unique en deux selon les espèces,
en suivant les articulations naturelles et en tâchant de ne
rompre aucune partie, comme ferait un cuisinier maladroit;
bien plutôt, de même que, tout à l'heure, deux
discours comprenaient en commun dans l'unité d'une
essence tout ce qui est désordre de la pensée,
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