[8,24] Ἀρχέτω δ´ ὁ περὶ τῶν δικαίων λόγος. συνέστη
τὸ δημοτικὸν ἐπὶ σοὶ παροξυνθὲν ὑπὸ τῶν δημάρχων,
καὶ ἧκον ὡς ἀποκτενοῦντές σε ἄκριτον, οἷς
φοβερὸς ἦσθα. τοῦτο τὸ ἔργον ἐκωλύσαμεν ἡμεῖς οἱ
ἐκ τοῦ συνεδρίου καὶ παρέσχομέν σοι μηθέν, ὃ μὴ δίκαιον ἦν τότε
παθεῖν. μετὰ τοῦτο προὐκαλοῦντό σε
οἱ κωλυθέντες ἀνελεῖν ἐπὶ δίκην, αἰτιασάμενοι πονηροὺς κατ´
αὐτῶν εἰπεῖν ἐν τῇ βουλῇ λόγους. ἐνέστημεν
καὶ πρὸς τοῦτο, ὡς οἶσθα, καὶ οὐκ ἐπετρέψαμεν οὔτε
γνώμης οὔτε λόγων ὑποσχεῖν σε δίκας. ἀποτυχόντες
καὶ τούτου τελευτῶντες ἧκον ἐφ´ ἡμᾶς αἰτιώμενοί σε
τυραννίδι ἐπιχειρεῖν. ταύτην αὐτὸς ὑπέμεινας ἀπολογήσασθαι
τὴν αἰτίαν, ἐπειδὴ πάμπολυ ἀπεῖχες αὐτῆς,
καὶ παρέσχες τοῖς δημοτικοῖς περὶ σεαυτοῦ τὴν ψῆφον
ἀναλαβεῖν. ἡ βουλὴ δὲ καὶ τότε παρῆν καὶ πολλὰς
ἐποιεῖτο δεήσεις περὶ σοῦ. τίνος οὖν ἡμεῖς οἱ πατρίκιοι τῶν
συμβεβηκότων σοι κακῶν γεγόναμεν αἴτιοι,
καὶ διὰ τί πολεμεῖς ἡμῖν τοσαύτην εὔνοιαν ἀποδειξαμένοις περὶ
σὲ κατὰ τὸν τότε ἀγῶνα; ἀλλὰ μὴν οὐδὲ
τὸ δημοτικὸν ἅπαν ἐξελασθῆναί σε βουλόμενον εὑρέθη·
δυσὶ γοῦν ψήφοις ἑάλως μόναις, ὥστ´ οὐδὲ τούτοις
ἂν εἴης σὺν δίκῃ πολέμιος, οἵ σε ὡς οὐδὲν ἀδικοῦντα
ἀπέλυσαν. τίθημι δ´, εἰ βούλει, πᾶσι μὲν τοῖς δημόταις δόξαν, ὅλῃ
δὲ τῇ βουλῇ φανὲν ταύτῃ χρήσασθαί σε τῇ συμφορᾷ, καὶ δίκαιον
εἶναί σου τὸ πρὸς ἅπαντας ἡμᾶς μῖσος· ἀλλ´ αἱ γυναῖκές σε, ὦ Μάρκιε,
τί δεινὸν εἰργάσαντο, ἀνθ´ ὅτου πολεμεῖς αὐταῖς;
ποίαν ἐπενέγκασαι περὶ φυγῆς ψῆφον ἢ τίνας εἰποῦσαι
κατὰ σοῦ πονηροὺς λόγους; τί δ´ οἱ παῖδες ἡμῶν δράσαντες ἢ
διανοηθέντες ἀδικεῖν περὶ σοῦ κινδυνεύουσιν
ὑπὲρ αἰχμαλωσίας καὶ τῶν ἄλλων, ἃ παθεῖν αὐτοὺς
εἰκός, ἐὰν ἡ πόλις ἁλῷ; οὐ τὰ δίκαια διαιτᾷς, ὦ
Μάρκιε, καὶ εἰ τοῦτον οἴει δεῖν τὸν τρόπον τὰ ὑπαίτια
καὶ ἐχθρὰ μισεῖν, ὥστε μηδὲ τῶν ἀναιτίων φείδεσθαι
καὶ φιλίων, οὐκ ἄρα τὰ προσήκοντα ἀνδρὶ ἀγαθῷ
φρονεῖς. ἵνα δὲ πάντα ταῦτα ἀφῶ, τί ἂν ἔχοις εἰπεῖν,
ὦ πρὸς Διός, εἴ τις ἔροιτό σε, τοὺς δὲ δὴ τάφους τῶν
προγόνων τί παθὼν {ὑπ´ αὐτῶν} ἀνασκάπτεις καὶ
τιμάς, ἃς κομίζονται παρ´ ἀνθρώπων, ἀφαιρῇ; θεῶν
δὲ βωμοὺς καὶ τεμένη καὶ νεὼς τίνος ἀδικήματος ὀργῇ
συλᾷς καὶ κατακαίεις καὶ ἀνατρέπεις καὶ σεβασμῶν
οὐκ ἐᾷς τυγχάνειν τῶν νομίμων; τί πρὸς ταῦτα φαίης
ἄν; ἐγὼ μὲν γὰρ οὐδὲν ὁρῶ. ταῦτά σοι περί τε ἡμῶν
αὐτῶν, ὦ Μάρκιε, τῶν ἐκ τοῦ συνεδρίου καὶ περὶ
τῶν ἄλλων πολιτῶν, οὓς ἀπολέσαι προθυμῇ κακὸν
οὐδὲν ὑπ´ αὐτῶν πεπονθώς, τάφων τε καὶ ἱερῶν καὶ
πόλεως τῆς γειναμένης τε καὶ θρεψαμένης τὰ δίκαια εἰρήσθω.
| [8,24] Commençons par ce qui concerne le droit.
Les tribuns ont soulevé le peuple contre vous :
vous regardant comme un homme à craindre ils ont voulu se saisir de
votre personne pour vous faire mourir sans aucune forme de jugement. Le
sénat s'y est opposé et nous n'avons pas souffert qu'on vous maltraitât
injustement dans cette occasion. Mais quand les tribuns ont vu que
nous les empêchions de vous ôter la vie, ils vous ont cité au tribunal du
peuple comme ayant tenu de mauvais discours en plein sénat. Nous nous
sommes encore opposés cette fois à leurs injustes prétentions, et vous
savez que nous n'avons pu souffrir qu'on vous punît pour avoir dit votre
sentiment avec liberté, ou pour avoir parlé contre le peuple dans nos
assemblées. Cette seconde tentative ne leur ayant pas réussi, ils vinrent
enfin nous trouver, et ils vous accusèrent d'avoir aspiré à la tyrannie.
Vous vous offrîtes vous-même à réfuter une calomnie si mal fondée :
vous fîtes voir que vous étiez bien éloigné d'un crime si énorme, et vous
consentîtes de subir le jugement du peuple sur ce chef d'accusation. Le
sénat ne vous abandonna pas ce dans cette rencontre : il s'intéressa pour
vous, et employa les plus instantes sollicitations pour obtenir votre grâce.
Quelle part les patriciens ont-ils donc eue à ce qui vous est arrivé ? Ont-ils
jamais contribué à votre disgrâce, et pourquoi nous déclarez-vous la
guerre, à nous qui vous avons donné tant de preuves de notre bon cœur
dans toutes les occasions que et j'ai rapportées? Bien plus; on ne peut
pas même dire que tout le peuple ait contribué à votre bannissement :
vos ennemis ne l'ont emporté que de deux voix seulement. Vous ne
pouvez donc sans injustice vous déclarer l'ennemi des autres plébéiens
qui ont conclu à vous renvoyer absous.
VII. Mais je suppose, si vous le voulez, que tous les plébéiens et
tous les sénateurs aient contribué à vous plonger dans le malheur où
vous êtes, et que vous soyez en droit de décharger votre colère sur tous
les citoyens. Après tout, Marcius, quel mal vous ont fait les femmes pour
mériter que ce vous leur déclariez la guerre ? Ont-elles donné leurs
suffrages pour vous chasser de la patrie ? Vous ont-elles accablé
d'injures ? Ont-elles débité de mauvais discours contre vous ? Et nos
enfants, que vous ont-ils fait de mal ? Quels injustes dédains ont-ils formé
contre votre personne, pour mériter de se voir aujourd'hui exposés à être
réduits en servitude et à tant d'autres malheurs qu'ils ne peuvent éviter si
la ville vient à être ce prise de vive force ? Votre conduite, Marcius, est
très injuste, ce si vous croyez qu'il faut faire sentir les effets de votre
colère aux coupables et à vos ennemis, sans épargner ni les innocents
ni vos amis mêmes : un tel dessein ne peut être qu'indigne d'un
homme de bien. Mais sans m'arrêter plus longtemps à toutes ces
réflexions, dites-moi, je vous prie, que répondriez-vous si on vous
demandait quel mal vous ont fait nos ancêtres pour mériter que vous
renversiez leurs tombeaux et que vous les priviez des honneurs qu'on a
coutume de leur rendre ? Quelle juste raison avez-vous d'exercer votre
vengeance sur les choses saintes, de piller, de brûler, et de renverser les
autels, les temples et les lieux sacrés , d'empêcher enfin qu'on n'y fasse
les cérémonies accoutumées et les sacrifices ordonnés par les lois ? Que
répondez-vous à cela ? Pour moi je ne sais pas ce que vous pourriez dire.
Voila, Marcius, ce que nous avions à vous représenter, tant pour nous-mêmes,
que pour le sénat, pour les autres citoyens que vous voulez
perdre entièrement sans qu'ils vous aient jamais fait aucun mal, pour les
tombeaux de nos ancêtres, pour les temples et les choses sacrées, et
pour la ville de Rome qui vous a donné la naissance et l'éducation : nos
raisons sont justes, il n'y a rien à répliquer.
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