[519] ὅτι δὲ οἰδεῖ καὶ ὕπουλός ἐστιν (519a) δι' ἐκείνους τοὺς παλαιούς,
οὐκ αἰσθάνονται. ἄνευ γὰρ σωφροσύνης καὶ δικαιοσύνης λιμένων καὶ
νεωρίων καὶ τειχῶν καὶ φόρων καὶ τοιούτων φλυαριῶν ἐμπεπλήκασι τὴν πόλιν·
ὅταν οὖν ἔλθῃ ἡ καταβολὴ αὕτη τῆς ἀσθενείας, τοὺς τότε παρόντας αἰτιάσονται
συμβούλους, Θεμιστοκλέα δὲ καὶ Κίμωνα καὶ Περικλέα ἐγκωμιάσουσιν, τοὺς
αἰτίους τῶν κακῶν· σοῦ δὲ ἴσως ἐπιλήψονται, ἐὰν μὴ εὐλαβῇ, καὶ τοῦ ἐμοῦ
ἑταίρου Ἀλκιβιάδου, ὅταν καὶ τὰ ἀρχαῖα προσαπολλύωσι (519b) πρὸς οἷς
ἐκτήσαντο, οὐκ αἰτίων ὄντων τῶν κακῶν ἀλλ' ἴσως συναιτίων. καίτοι ἔγωγε
ἀνόητον πρᾶγμα καὶ νῦν ὁρῶ γιγνόμενον καὶ ἀκούω τῶν παλαιῶν ἀνδρῶν πέρι.
αἰσθάνομαι γάρ, ὅταν ἡ πόλις τινὰ τῶν πολιτικῶν ἀνδρῶν μεταχειρίζηται ὡς
ἀδικοῦντα, ἀγανακτούντων καὶ σχετλιαζόντων ὡς δεινὰ πάσχουσι· πολλὰ καὶ
ἀγαθὰ τὴν πόλιν πεποιηκότες ἄρα ἀδίκως ὑπ' αὐτῆς ἀπόλλυνται, ὡς ὁ τούτων
λόγος. τὸ δὲ ὅλον ψεῦδός ἐστιν· προστάτης γὰρ πόλεως (519c) οὐδ' ἂν εἷς ποτε
ἀδίκως ἀπόλοιτο ὑπ' αὐτῆς τῆς πόλεως ἧς προστατεῖ. κινδυνεύει γὰρ ταὐτὸν
εἶναι, ὅσοι τε πολιτικοὶ προσποιοῦνται εἶναι καὶ ὅσοι σοφισταί. καὶ γὰρ οἱ
σοφισταί, τἆλλα σοφοὶ ὄντες, τοῦτο ἄτοπον ἐργάζονται πρᾶγμα· φάσκοντες γὰρ
ἀρετῆς διδάσκαλοι εἶναι πολλάκις κατηγοροῦσιν τῶν μαθητῶν ὡς ἀδικοῦσι σφᾶς
(αὑτούς), τούς τε μισθοὺς ἀποστεροῦντες καὶ ἄλλην χάριν οὐκ ἀποδιδόντες,
(519d) εὖ παθόντες ὑπ' αὐτῶν. καὶ τούτου τοῦ λόγου τί ἂν ἀλογώτερον εἴη
πρᾶγμα, ἀνθρώπους ἀγαθοὺς καὶ δικαίους γενομένους, ἐξαιρεθέντας μὲν
ἀδικίαν ὑπὸ τοῦ διδασκάλου, σχόντας δὲ δικαιοσύνην, ἀδικεῖν τούτῳ ᾧ οὐκ
ἔχουσιν; οὐ δοκεῖ σοι τοῦτο ἄτοπον εἶναι, ὦ ἑταῖρε; ὡς ἀληθῶς δημηγορεῖν με
ἠνάγκασας, ὦ Καλλίκλεις, οὐκ ἐθέλων ἀποκρίνεσθαι.
(Καλλίκλης)
σὺ δ' οὐκ ἂν οἷός τ' εἴης λέγειν, εἰ μή τίς σοι ἀποκρίνοιτο;
(519e) (Σωκράτης)
ἔοικά γε· νῦν γοῦν συχνοὺς τείνω τῶν λόγων, ἐπειδή μοι οὐκ ἐθέλεις
ἀποκρίνεσθαι. ἀλλ', ὠγαθέ, εἰπὲ πρὸς Φιλίου, οὐ δοκεῖ σοι ἄλογον εἶναι ἀγαθὸν
φάσκοντα πεποιηκέναι τινὰ μέμφεσθαι τούτῳ ὅτι ὑφ' ἑαυτοῦ ἀγαθὸς γεγονώς τε
καὶ ὢν ἔπειτα πονηρός ἐστιν;
(Καλλίκλης) ἔμοιγε δοκεῖ.
(Σωκράτης)
οὐκοῦν ἀκούεις τοιαῦτα λεγόντων τῶν φασκόντων παιδεύειν ἀνθρώπους εἰς
ἀρετήν;
| [519] sans s'apercevoir que cet agrandissement n'est qu'une enflure,
une tumeur pleine de corruption, et que c'est là tout ce qu'ont fait
ces anciens politiques, en remplissant la ville de ports,
d'arsenaux, de murailles, de tributs et d'autres superfluités
semblables, sans songer à la tempérance et à la
justice. Aussi, quand viendra la crise excitée par leur
faiblesse, ils s'en prendront à ceux qui se mêleront
alors de leur donner des conseils, et ils n'auront que
des éloges pour Thémistocle, Cimon et Périclès, les
véritables auteurs de leurs maux. Peut-être même se
saisiront-ils de toi, si tu n'es sur tes gardes, et de mon
ami Alcibiade, quand ils auront perdu leurs anciennes
possessions outre celles qu'ils ont acquises, quoique
vous ne soyez point les premiers auteurs, mais peut-être
les complices de leur ruine. Au reste, je vois
qu'il se passe aujourd'hui une chose tout à fait déraisonnable,
et j'en entends dire autant de ceux qui nous
ont précédés. Je remarque en effet que, si la république
punit quelqu'un de ces hommes politiques, comme,
coupable de malversation, ils s'emportent et se plaignent
amèrement des mauvais traitements qu'on leur
fait subir, après les services sans nombre qu'ils ont
rendus à l'État ; ils prétendent que c'est injustement
qu'on les fait mourir. Mais rien n'est plus faux. Jamais
un homme à la tête d'un état ne peut être injustement
opprimé par l'État qu'il gouverne. Mais il paraît qu'il
en est de ceux qui se donnent pour des hommes politiques,
comme des sophistes ; car les sophistes, gens
habiles d'ailleurs, tiennent à certain égard une conduite
dépourvue de bon sens. En même temps qu'ils font
profession d'enseigner la vertu, ils accusent souvent
leurs élèves d'être coupables envers eux d'injustice,
en ce qu'ils les frustrent de l'argent qui leur est dû, et
ne témoignent pour eux aucune reconnaissance des
bienfaits qu'ils en ont reçus Or, y a-t-il rien de plus
inconséquent qu'un pareil langage ? Des hommes devenus
bons et justes, auxquels leur maître a ôté l'injustice
et donné la justice en échange, agir injustement sous
l'empire d'un vice qui n'est plus en eux ! Ne juges-tu
pas cela tout à fait absurde, mon cher? Vraiment,
Calliclès, tu m'as réduit à faire un discours dans les
formes, en refusant de me répondre.
LXXV. — CALLICLÉS. Quoi donc ! ne pourrais-tu
point parler, à moins qu'on ne te réponde ? — SOCRATE.
Il y a apparence que je le puis, puisque je m'étends à
présent en longs discours depuis que tu ne veux plus
me répondre. Mais, mon cher, au nom de Zeus qui
préside à l'amitié, dis-moi : ne trouves-tu point absurde
qu'un homme qui se vante d'en avoir rendu un autre
vertueux, se plaigne de lui comme d'un méchant, quand
par ses soins il est devenu bon et qu'il l'est réellement?
— CALLICLÈS. Cela me paraît absurde. — SOCRATE. N'est-ce
pas pourtant le langage que tu entends tenir à ceux
qui font profession de former les hommes à la vertu?
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