[8,47] Ἔτι δ´ αὐτῆς λεγούσης ὑπολαβὼν ὁ
Μάρκιος εἶπεν· Ἀδυνάτων δεομένη, μῆτερ, ἐλήλυθας
ἀξιοῦσα προδοῦναί με τοῖς ἐκβαλοῦσι τοὺς ὑποδεξαμένους, καὶ
τοῖς ἅπαντά με ἀφελομένοις τὰ ἐμαυτοῦ
τοὺς χαρισαμένους τὰ μέγιστα τῶν ἐν ἀνθρώποις ἀγαθῶν· οἷς
ἐγὼ τὴν ἀρχὴν τήνδε παραλαμβάνων θεούς
τε καὶ δαίμονας ἐγγυητὰς ἔδωκα, μήτε προδώσειν τὸ
κοινὸν αὐτῶν μήτε προκαταλύσεσθαι τὸν πόλεμον, ἐὰν
μὴ Οὐολούσκοις ἅπασι δοκῇ. θεούς τε δὴ σεβόμενος,
οὓς ὤμοσα, καὶ ἀνθρώπους αἰδούμενος, οἷς τὰς πίστεις
ἔδωκα, πολεμήσω Ῥωμαίοις ἄχρι τέλους. ἐὰν δ´ ἀποδιδῶσι τὴν
χώραν Οὐολούσκοις, ἣν κατέχουσιν αὐτῶν
βίᾳ, καὶ φίλους αὐτοὺς ποιήσωνται πάντων αὐτοῖς
μεταδιδόντες τῶν ἴσων ὥσπερ Λατίνοις, διαλύσομαι
τὸν πρὸς αὐτοὺς πόλεμον· ἄλλως δ´ οὔ. ὑμεῖς μὲν
οὖν, ὦ γυναῖκες, ἄπιτε καὶ λέγετε τοῖς ἀνδράσι ταῦτα
καὶ πείθετε αὐτοὺς μὴ φιλοχωρεῖν τοῖς ἀλλοτρίοις
ἀδίκως, ἀλλ´ ἀγαπᾶν, ἐὰν τὰ ἑαυτῶν ἔχειν τις αὐτοὺς
ἐᾷ, μηδ´ ὅτι πολέμῳ λαβόντες ἔχουσι τὰ Οὐολούσκων,
περιμένειν, ἕως πολέμῳ πάλιν αὐτὰ ὑπὸ τούτων ἀφαιρεθῶσιν. οὐ
γὰρ ἀποχρήσει τοῖς κρατοῦσι τὰ ἑαυτῶν
μόνον ἀπολαβεῖν, ἀλλὰ καὶ τὰ τῶν κρατηθέντων ἴδια
ἀξιώσουσιν ἔχειν. ἐὰν δὲ περιεχόμενοι τῶν μηθὲν
αὐτοῖς προσηκόντων πᾶν ὁτιοῦν πάσχειν ὑπομένωσι
φυλάττοντες τὸ αὔθαδες, ἐκείνους αἰτιάσεσθε τῶν
καταληψομένων κακῶν, οὐ Μάρκιον οὐδὲ Οὐολούσκους
οὐδὲ τῶν ἄλλων ἀνθρώπων οὐδένα. σοῦ δέ, ὦ
μῆτερ, ἐν μέρει πάλιν υἱὸς ὢν ἐγὼ δέομαι μή με
παρακαλεῖν εἰς ἀνοσίους πράξεις καὶ ἀδίκους, μηδὲ
μετὰ τῶν ἐχθίστων ἐμοί τε καὶ σεαυτῇ τεταγμένην
πολεμίους ἡγεῖσθαι τοὺς ἀναγκαιοτάτους· ἀλλὰ παρ´
ἐμοὶ γενομένην ὥσπερ ἐστὶ δίκαιον πατρίδα τε νέμειν,
ἣν ἐγὼ νέμω, καὶ οἶκον, ὃν ἐγὼ κέκτημαι, τιμάς τε
καρποῦσθαι τὰς ἐμάς, καὶ δόξης ἀπολαύειν τῆς ἐμῆς,
τοὺς αὐτοὺς ἡγουμένην φίλους τε καὶ πολεμίους οὕσπερ ἐγώ·
ἀποθέσθαι τ´ ἤδη τὸ πένθος, ὃ διὰ τὰς
ἐμὰς ὑπέμεινας, ὦ ταλαίπωρε, φυγάς, καὶ παύσασθαι
τιμωρουμένην με τῷ σχήματι τούτῳ. ἐμοὶ γὰρ τὰ μὲν
ἄλλα, ὦ μῆτερ, ἀγαθὰ κρείττονα ἐλπίδων καὶ μείζονα
εὐχῆς παρὰ θεῶν τε καὶ ἀνθρώπων ἀπήντηται, ἡ δὲ
περὶ σοῦ φροντίς, ᾗ τὰς γηροβοσκοὺς οὐκ ἀπέδωκα
χάριτας, ἐντετηκυῖα τοῖς σπλάγχνοις πικρὸν ἐποίει καὶ
ἀνόνητον ἁπάντων τῶν ἀγαθῶν τὸν βίον. εἰ σὲ σὺν
ἐμοὶ τάξεις σεαυτὴν καὶ τῶν ἐμῶν κοινωνεῖν ἐθελήσεις ἁπάντων,
οὐθενὸς ἔτι μοι δεήσει τῶν ἀνθρωπίνων ἀγαθῶν.
| [8,47] XVI. ELLE parlait encore, lorsque Marcius prenant la parole :
« MA mère, lui dit-il, vous me demandez une chose impossible,
quand vous m'exhortez à trahir mes bienfaiteurs pour prendre les intérêts
de ceux qui m'ont banni honteusement et dépouillé de tous mes biens.
Les Volsques m'ont reçu dans leur pays : ils m'ont rendu les services les
plus importants, et lorsque j'ai accepté de leurs mains le commandement
de l'armée, j'ai juré par les dieux et par les génies que je ne
trahirai jamais la république, et que je ne ferai point la paix sans le
consentement de toute la nation. Ainsi le respect que je dois aux dieux
témoins et garants de mes serments {et} la fidélité que je dois à des
peuples à qui j'ai engagé ma parole d'honneur, sont deux puissants motifs
qui m'engagent à faire la guerre aux Romains jusqu'à la fin. Que s'ils
veulent rendre aux Volsques toutes les terres qu'ils leur ont enlevées par
voies de fait, s'ils font prêts de {les} recevoir dans leur alliance en leur
accordant l'égalité et tous les droits qu'ils ont communiqués aux Latins, je
consens à mettre bas les armes, autrement il n'y a point de paix à
espérer. Allez, Romaines: portez cette réponse à vos maris, persuadez-leur
de modérer cette ambition démesurée qui les porte à retenir
injustement le bien d'autrui ; qu'ils doivent se croire trop heureux qu'on les
laisse jouir en paix de ce qui leur appartient, et qu'il n'est pas de leur
avantage d'attendre que les Volsques leur arrachent par les armes ce
qu'ils leur ont enlevé par les mêmes voies. Ajoutez que les vainqueurs ne
se contenteront pas de reprendre ce qui leur appartient, mais qu'ils
porteront leurs conquêtes jusque sur les biens de leurs ennemis quand ils
les auront vaincus. Que si les Romains conservant toujours leur fierté, se
résolvent à tout souffrir plutôt que de rendre ce qui n'est point à eux,
imputez-leur tous les maux qui vous arriveront, n'en rejetez pas la faute
sur Marcius, ni sur les Volsques, ni sur d'autres. Et vous, ma mère,
permettez que votre fils vous demande une grâce. Je vous conjure de ne
me point engager à une action qui n'est pas moins contraire à la piété
qu'à la justice et au caractère d'honnête homme, cessez de prendre le
parti de ceux qui sont autant vos ennemis que les miens, calmez vos
frayeurs, ne redoutez point comme ennemis ceux qui sont entièrement
attachés à vos intérêts. Demeurez auprès de votre fils, puisque rien n'est
plus juste ni plus raisonnable. Reconnaissez pour votre patrie celle que
Marcius a choisie pour la sienne. N'ayez plus d'autre maison que celle
que j'ai su me ménager. Jouissez des honneurs qu'on m'a accordés,
participez à ma gloire, ayez les mêmes amis, les mêmes parents, et les
mêmes ennemis que moi. Mettez bas dès aujourd'hui tout le chagrin que
mon exil vous a causé, ôtez ces habits de deuil qui ne servent qu'à
entretenir vos peines, et sortez enfin de cet état de tristesse. Les dieux
et les hommes, il est vrai, m'ont procuré jusqu'ici toutes sortes de biens,
et m'ont fait plus de grâces que je n'en pouvais espérer : je vous avoue
néanmoins, ma mère, qu'au milieu de cette prospérité, toujours inquiet
pour vous, j'ai mené une vie très désagréable. Le chagrin de ne pouvoir
pas vous rendre mes services dans votre vieillesse en reconnaissance de
ceux que vous m'avez rendus, m'a tellement rongé le cœur que je n'ai pu
goûter un moment les douceurs de ma destinée, ni jouir en repos de tous
les avantages dont la fortune m'a comblé. Mais si vous voulez vous
ranger de mon parti afin que je répande sur vous les biens dont je suis en
possession, il ne me manquera plus rien pour être le plus heureux de tous
les hommes.
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