[494] ἀναγκάζοιτο δ' ἀεὶ καὶ νύκτα καὶ (494a) ἡμέραν πιμπλάναι αὐτά, ἢ τὰς
ἐσχάτας λυποῖτο λύπας· ἆρα τοιούτου ἑκατέρου ὄντος τοῦ βίου, λέγεις τὸν τοῦ
ἀκολάστου εὐδαιμονέστερον εἶναι ἢ τὸν τοῦ κοσμίου; πείθω τί σε ταῦτα λέγων
συγχωρῆσαι τὸν κόσμιον βίον τοῦ ἀκολάστου ἀμείνω εἶναι, ἢ οὐ πείθω;
(Καλλίκλης)
οὐ πείθεις, ὦ Σώκρατες. τῷ μὲν γὰρ πληρωσαμένῳ ἐκείνῳ οὐκέτ' ἔστιν ἡδονὴ
οὐδεμία, ἀλλὰ τοῦτ' ἔστιν, ὃ νυνδὴ ἐγὼ ἔλεγον, τὸ ὥσπερ λίθον ζῆν, ἐπειδὰν
(494b) πληρώσῃ, μήτε χαίροντα ἔτι μήτε λυπούμενον. ἀλλ' ἐν τούτῳ ἐστὶν τὸ
ἡδέως ζῆν, ἐν τῷ ὡς πλεῖστον ἐπιρρεῖν.
(Σωκράτης)
οὐκοῦν ἀνάγκη γ', ἂν πολὺ ἐπιρρέῃ, πολὺ καὶ τὸ ἀπιὸν εἶναι, καὶ μεγάλ' ἄττα τὰ
τρήματα εἶναι ταῖς ἐκροαῖς;
(Καλλίκλης) πάνυ μὲν οὖν.
(Σωκράτης)
χαραδριοῦ τινα αὖ σὺ βίον λέγεις, ἀλλ' οὐ νεκροῦ οὐδὲ λίθου. καί μοι λέγε· τὸ
τοιόνδε λέγεις οἷον πεινῆν καὶ πεινῶντα ἐσθίειν;
(Καλλίκλης) ἔγωγε.
(494c) (Σωκράτης) καὶ διψῆν γε καὶ διψῶντα πίνειν;
(Καλλίκλης)
λέγω, καὶ τὰς ἄλλας ἐπιθυμίας ἁπάσας ἔχοντα καὶ δυνάμενον πληροῦντα
χαίροντα εὐδαιμόνως ζῆν.
(Σωκράτης)
εὖγε, ὦ βέλτιστε· διατέλει γὰρ ὥσπερ ἤρξω, καὶ ὅπως μὴ ἀπαισχυνῇ. δεῖ δέ, ὡς
ἔοικε, μηδ' ἐμὲ ἀπαισχυνθῆναι. καὶ πρῶτον μὲν εἰπὲ εἰ καὶ ψωρῶντα καὶ
κνησιῶντα, ἀφθόνως ἔχοντα τοῦ κνῆσθαι, κνώμενον διατελοῦντα τὸν βίον
εὐδαιμόνως ἔστι ζῆν.
(494d) (Καλλίκλης) ὡς ἄτοπος εἶ, ὦ Σώκρατες, καὶ ἀτεχνῶς δημηγόρος.
(Σωκράτης)
τοιγάρτοι, ὦ Καλλίκλεις, Πῶλον μὲν καὶ Γοργίαν καὶ ἐξέπληξα καὶ αἰσχύνεσθαι
ἐποίησα, σὺ δὲ οὐ μὴ ἐκπλαγῇς οὐδὲ μὴ αἰσχυνθῇς· ἀνδρεῖος γὰρ εἶ. ἀλλ'
ἀποκρίνου μόνον.
(Καλλίκλης) φημὶ τοίνυν καὶ τὸν κνώμενον ἡδέως ἂν βιῶναι.
(Σωκράτης) οὐκοῦν εἴπερ ἡδέως, καὶ εὐδαιμόνως;
(Καλλίκλης) πάνυ γε.
(494e) (Σωκράτης)
πότερον εἰ τὴν κεφαλὴν μόνον κνησιῷ — ἢ ἔτι τί σε ἐρωτῶ; ὅρα, ὦ Καλλίκλεις, τί
ἀποκρινῇ, ἐάν τίς σε τὰ ἐχόμενα τούτοις ἐφεξῆς ἅπαντα ἐρωτᾷ. καὶ τούτων
τοιούτων ὄντων κεφάλαιον, ὁ τῶν κιναίδων βίος, οὗτος οὐ δεινὸς καὶ αἰσχρὸς καὶ
ἄθλιος; ἢ τούτους τολμήσεις λέγειν εὐδαίμονας εἶναι, ἐὰν ἀφθόνως ἔχωσιν ὧν
δέονται;
(Καλλίκλης) οὐκ αἰσχύνῃ εἰς τοιαῦτα ἄγων, ὦ Σώκρατες, τοὺς λόγους;
(Σωκράτης)
ἦ γὰρ ἐγὼ ἄγω ἐνταῦθα, ὦ γενναῖε, ἢ ἐκεῖνος ὃς ἂν φῇ ἀνέδην οὕτω τοὺς
χαίροντας, ὅπως ἂν χαίρωσιν,
| [494] et sera forcé jour et nuit de les remplir et de se donner ainsi
les plus grandes peines. Si telle est l'image de ces deux
genres de vie, peux-tu dire que la vie de l'homme dissolu
soit plus heureuse que celle de l'homme bien
réglé? Ce discours t'engage-t-il à convenir que la vie
réglée est préférable à la vie dissolue? ou bien n'en es-tu
pas persuadé? — CALLICLÈS. Tu ne me persuades pas,
Socrate; car cet homme dont les tonneaux demeurent
remplis, ne goûte plus aucun plaisir, et il est dans le
cas dont je parlais tout à l'heure : il vit comme une
pierre, dés qu'une fois ils sont pleins, sans plaisir ni
douleur. Mais la douceur de la vie consiste à y verser le
plus qu'on peut. — SOCRATE. N'est-ce pas une nécessité
que plus on y verse, plus il s'en écoule, et qu'il y ait de
grands trous pour ces écoulements ? — CALLICLÈS. Sans
doute. — SOCRATE. La condition dont tu parles n'est point
à la vérité celle d'un cadavre ni d'une pierre, mais
celle de l'oiseau glouton des ravins. De plus, dis-moi :
ne reconnais-tu point ce qu'on appelle avoir faim et
manger ayant faim ? — CALLICLÈS. Oui. — SOCRATE. Ainsi
qu'avoir soif et boire ayant soif? — CALLICLÈS. Oui; et
je soutiens que c'est vivre heureux que d'éprouver ces
désirs et les autres semblables, et d'être en état de les satisfaire.
XLIX. — SOCRATE. Fort bien, mon cher; continue
comme tu as commencé, et prends garde que la honte
ne s'empare de toi. Mais il faut, ce me semble, que je
ne sois point honteux de mon cité. Et d'abord, dis-moi
si c'est vivre heureux que de pouvoir, quand on a la gale
et des démangeaisons, se gratter à son aise et passer
toute sa vie à se gratter? — CALLICLÈS. Que tu es absurde
Socrate. Tu n'es qu'un bavard. — SOCRATE. Aussi, Calliclés,
ai-je déconcerté et rendu honteux Polus et Gorgias.
Pour toi, je n'ai pas peur que tu te déconcertes
ni que tu rougisses, tu es trop courageux; mais réponds
seulement à ma question. — CALLICLÈS. Je dis donc que
celui qui se gratte vit agréablement. — SOCRATE. Et si sa
vie est agréable, n'est-elle pas heureuse? — CALLICLÈS.
Sans contredit. —SOCRATE. Est-ce assez qu'il éprouve des
démangeaisons à la tête seulement? ou bien faut-il que
je continue à t'interroger encore? Prends garde, Calliclès,
à ce que tu répondras si l'on continue à te faire
toutes les questions qui se présentent naturellement
après celle-ci. Et, en un mot, les choses étant telles,
la vie des impudiques n'est-elle pas triste, honteuse et
misérable? Oseras-tu soutenir que ces hommes-là sont
heureux, même s'ils ont abondamment de quoi se satisfaire?
— CALLICLÈS. Ne rougis-tu pas, Socrate, de faire
tomber la conversation sur de pareils propos? —
SOCRATE. Est-ce moi, honorable Calliclès, qui y donne
occasion, ou celui qui avance sans façon que quiconque
ressent du plaisir, de quelque nature qu'il soit,
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