[8,27] Εἷς ἔτι μοι καταλείπεται λόγος, ὃν εἰ μὴ
μετ´ ὀργῆς, ἀλλ´ ἐκ λογισμοῦ κρινεῖς, ὀρθῶς τ´ εἰρῆσθαι
δόξει καὶ παραστήσεταί σοι μεταμέλεια τῶν πραττομένων. τίς δ´
ἐστὶν οὗτος ὁ λόγος; οὐδενὶ θνητῷ
φύντι θεοὶ τῶν μελλόντων ἔσεσθαι βεβαίαν ἐπιστήμην
ἔδωκαν ἔχειν, οὐδ´ ἂν εὕροις ἐκ τοῦ παντὸς αἰῶνος,
ὅτῳ πάντα κατὰ νοῦν ἐχώρησε τὰ πράγματα μηδὲν
ἐναντιωθείσης τῆς τύχης. καὶ διὰ τοῦτο οἱ φρονήσει
προὔχοντες ἑτέρων, ἣν ὁ μακρὸς βίος καὶ τὰ πολλὰ
μαθήματα φέρει, πρὶν ἐγχειρεῖν ὁτῳδήποτε ἔργῳ, τὸ
τέλος αὐτοῦ πρῶτον οἴονται δεῖν σκοπεῖν, οὐ θάτερον
μόνον, ὃ βούλονται γενέσθαι σφίσιν, ἀλλὰ καὶ τὸ παρὰ
γνώμην ἐκβησόμενον· μάλιστα δ´ οἱ τῶν πολέμων ἡγεμόνες, ὅσῳ
μειζόνων τε γίνονται πραγμάτων κύριοι,
καὶ τὰς αἰτίας τῶν κατορθωμάτων ἢ σφαλμάτων ἅπαντες
ἐπὶ τούτους ἀναφέρουσιν. ἔπειτ´ ἂν μὲν εὕρωσι μηδεμίαν
ἐνοῦσαν ἢ μικρὰς καὶ ὀλίγας ἐν τῷ μὴ κατορθῶσαι
βλάβας, ἅπτονται τῶν ἔργων, ἐὰν δὲ πολλὰς καὶ μεγάλας,
ἀφίστανται. τοῦτο δὴ καὶ σὺ ποίησον καὶ σκόπει
πρὸ τῶν ἔργων, ἐὰν σφαλῇς κατὰ τὸν πόλεμον καὶ
μὴ πάντα ὑπάρξῃ, τί συμβήσεταί σοι παθεῖν. δι´ αἰτίας μὲν ἔσῃ
παρὰ τοῖς ὑποδεξαμένοις, μέμψῃ δὲ καὶ
αὐτὸς σεαυτόν, ὡς μείζοσιν ἐπιχειρήσας πράγμασιν ἢ
δυνατοῖς· στρατιᾶς δ´ ἡμετέρας πάλιν ἐκεῖσε ἀφικομένης καὶ
φθειρούσης τὴν ἐκείνων γῆν· οὐ γὰρ ἀνεξόμεθα μὴ
ἀντιτιμωρούμενοι τοὺς ἄρξαντας ἡμᾶς κακῶς
ποιεῖν· δυεῖν οὐκ ἂν ἁμάρτοις θατέρου, ἢ πρὸς αὐτῶν
ἐκείνων, οἷς αἴτιος ἔσῃ συμφορῶν μεγάλων, αἰσχρῶς
ἀναιρεθῆναι, ἢ πρὸς ἡμῶν, οὓς ἀποκτενῶν τε καὶ
δουλωσόμενος ἦλθες. τάχα δ´ ἂν ἐκεῖνοι, πρὶν ἐν τῷ
παθεῖν τι κακὸν γενέσθαι, διαλύσεις ποιεῖσθαι πρὸς
ἡμᾶς ἐπιχειροῦντες ἔκδοτον ἀξιώσειαν ἐπὶ τιμωρίᾳ σε
παραδιδόναι· ὃ πολλοὶ βάρβαροί τε καὶ Ἕλληνες εἰς
τοιαύτας καταστάντες τύχας ἠναγκάσθησαν ὑπομεῖναι.
ἆρά γε μικρὰ καὶ οὐκ ἄξια λόγου ταῦτ´ εἶναί σοι δοκεῖ
καὶ δέον αὐτῶν ὑπεριδεῖν ἢ κακῶν συμπάντων τὰ
ἔσχατα παθεῖν;
| [8,27] « XI. J'ajoute encore une raison très forte, persuadé que vous la
trouverez juste et que vous vous repentirez de ce que vous avez fait,
pourvu que vous l'examiniez avec attention et que vous consultiez plutôt
vos lumières que vos ressentiments. Quelle est donc cette raison ? La
voici. Les dieux n'ont accordé à aucun mortel une connaissance certaine
de l'avenir, et dans tous les siècles vous ne trouverez pas un seul
homme à qui toutes choses aient réussi sans aucun revers de fortune.
C'est pour cela que les plus prudents qui ont acquis beaucoup
d'expérience par une longue vie, ne commencent jamais aucune
entreprise sans avoir examiné, non seulement quelles en seront les suites
en cas de succès, mais encore les conséquences qu'elle peut avoir si elle
ne réussit pas. Les généraux d'armée prennent surtout cette précaution,
avec d'autant plus de soin, qu'étant maîtres des choses les plus
importantes, ils sont responsables et des bonnes et des mauvaises
réussites. Lorsqu'ils voient qu'en cas de mauvais succès, la perte ne sera
que très petite, ou qu'il n'y en aura aucune, ils commencent leur
entreprise : mais s'il y a à craindre qu'elle n'ait plusieurs suites fâcheuses,
ils l'abandonnent. Faites donc la même chose, Marcius, avant que de
commencer, prévoyez ce qui vous arrivera si vous ne réussissez pas
dans cette guerre et que vous ne veniez pas à bout de vos projets. Les
Volsques qui vous ont donné une retraite chez eux, vous accuseront
d'avoir tenté des desseins au dessus de vos forces. Quand notre armée
usant de représailles tombera comme un déluge affreux sur les terres de
ces peuples qui nous auront fait les premières insultes, pourrez-vous
éviter d'être puni d'une mort honteuse, ou par les Volsques à qui vous
aurez causé de grandes pertes, ou par nous-mêmes que vous voulez
perdre entièrement et réduire sous l'esclavage ? Qui peut vous répondre
que les Volsques, avant que d'être plongés dans les malheurs funestes
qu'entraîné après soi une longue guerre, ne vous sacrifieront pas à notre
ressentiment ? Qui sait s'ils ne vous livreront point entre nos mains pour
s'ouvrir par votre sang un chemin sûr à la paix, comme ont fait plusieurs
peuples, tant Grecs que Barbares, lorsqu'ils se sont vus pressés par une
dure nécessité ? Toutes ces choses vous paraissent-elles trop petites
pour mériter qu'on en parle: faut-il les mépriser et ne pas craindre de
vous exposer aux plus grands de tous les maux ?
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