[13,35] Οὐ χρὴ δὲ θαυμάζειν εἰ ἐξ ἀκοῆς τινες ἠράσθησάν τινων, ὁπότε Χάρης ὁ Μιτυληναῖος ἐν
τῇ δεκάτῃ τῶν ῾Ιστοριῶν περὶ ᾿Αλέξανδρόν φησι ὀνείρατι θεασαμένους τινὰς οὓς μὴ
πρότερον εἶδον ἐρασθῆναι αὐτῶν· γράφει δὲ οὕτως· «῾Υστάσπῃ νεώτερος ἦν ἀδελφὸς
Ζαριάδρη, περὶ ὧν λέγουσιν οἱ ἐπιχώριοι ὅτι ἐξ ᾿Αφροδίτης καὶ ᾿Αδώνιδος ἐγεννήθησαν.
᾿Εκυρίευσεν δὲ ὁ μὲν ῾Υστάσπης Μηδίας καὶ τῆς ὑποκάτω χώρας, ὁ δὲ Ζαριάδρης τῆς
ὑπεράνω Κασπίων πυλῶν μέχρι τοῦ Τανάιδος. Τῶν δὲ ἐπέκεινα τοῦ Τανάιδος ῾Ομάρτῃ
βασιλεῖ Μαραθῶν θυγάτηρ ᾿Οδάτις· περὶ ἧς ἐν ταῖς ἱστορίαις γέγραπται ὡς ἄρα κατὰ τὸν
ὕπνον ἰδοῦσα τὸν Ζαριάδρην ἐρασθείη, τὸ δ' αὐτὸ τοῦτο κἀκείνῳ πάθος συμπεσεῖν πρὸς
αὐτὴν. Διετέλουν οὖν ἀλλήλων ἐπιτυμοῦντες διὰ τὴν κατὰ τὸν ὕπνον φαντασίαν. Ἦν δὲ ἡ
᾿Οδάτις καλλίστη τῶν κατὰ τὴν ᾿Ασίαν γυναικῶν, καὶ ὁ Ζαριάδρης δὲ ἦν καλός. Πέμποντος
οὖν τοῦ Ζαριάδρου πρὸς τὸν ῾Ομάστην καὶ φιλοτιμουμένου γῆμαι τὴν ἄνθρωπον, οὐ
συνετίθετο ὁ ῾Ομάρτης διὰ τὸ εἶναι ἀρρένων παίδων ἕρημος· ἤθελεν γὰρ αὐτὴν δοῦναι ἑνὶ
τῶν περὶ αὑτὸν οἰκείων. Καὶ μετ' οὐ πολὺν χρόνον ὁ ῾Ομάρτης συναγαγὼν τοὺς ἐκ τῆς
βασιλείας δυνάστας καὶ φίλους καὶ συγγενεῖς ἐποιεῖτο τοὺς γάμους, οὐ προειπῶν ὅτῳ
μέλλοι διδόναι τὴν θυγατέρα. ᾿Ακμαζούσης οὖν τῆς μέθης εἰσκαλέσας τὴν ᾿Οδάτιν ὁ πατὴρ
εἰς τὸ συμπόσιον εἶπεν ἀκουόντων τῶν συνδείπνων· «῾Ημεῖς, ὦ θύγατερ ᾿Οδάτι, νῦν
ποιούμεθα τοὺς σοὺς γάμους. Περιβλέψασα οὖν καὶ θεωρήσασα πάντας λαβοῦσα χρυσῆν
φιάλην καὶ πληρώσασα δὸς ᾧ θέλεις {γαμηθῆναι}· τούτου γὰρ κεκλήσῃ γυνή.» Κἀκείνη
περιβλέψασα πάντας ἀπῄει δακρύουσα, ποθοῦσα τὸν Ζαριάδρην ἰδεῖν· ἐπεστάλκει γὰρ
αὐτῷ ὅτι μέλλουσιν οἱ γάμοι συντελεῖσθαι. Ὃ δὲ στρατοπεδεύων ἐπὶ τοῦ Τανάιδος {καὶ}
διαλαθὼν τὴν στρατοπεδείαν διέβη μετὰ μόνου τοῦ ἁρματηλάτου καὶ νυκτὸς ὁρμήσας ἐπὶ
τοῦ ἅρματος διῆλθεν διὰ γῆς πολλῆς, διώξας περὶ τοὺς ὀκτακοσίους σταδίους. Πλησίον δὲ
τῆς κώμης γενόμενος ἐν ᾗ τοὺς γάμους συνετέλουν καὶ καταλιπὼν ἔν τινι τόπῳ αὐτῷ
ἅρματι τὸν ἁρματηλάτην προῆγεν ἐνδεδυκὼς στολὴν Σκυθικήν. Καὶ παρελθὼν εἰς τὴν
αὐλὴν καὶ ἰδὼν τὴν ᾿Οδάτιν ἑστηκυῖαν πρὸ τοῦ κυλικείου καὶ δακρύουσαν κιρνᾶσάν τε
βραδέως τὴν φιάλην εἶπεν πλησίον στὰς παρ' αὐτὴν· «Ὦ ᾿Οδάτι, πάρειμι δή σοι καθάπερ
ἠξίωσας, ἐγὼ Ζαριάδρης.» Ἣ δὲ κατανοήσασα ξένον ἄνδρα καὶ καλὸν καὶ ὅμοιον τῷ κατὰ
τὸν ὕπνον ἑωραμένῳ περιχαρὴς γενομένη δίδωσιν αὐτῷ τὴν φιάλην· καὶ ὃς ἁρπάσας αὐτὴν
ἀπήγαγεν ἐπὶ τό ἅρμα καὶ ἔφυγεν ἔχων τὴν ᾿Οδάτιν. Οἱ δὲ παῖδες καὶ αἱ θεράπαιναι
συνειδυῖαι τὸν ἔρωτα κατεσιώπησαν καὶ κελεύοντος τοῦ πατρὸς λαλεῖν οὐκ ἔφασαν εἰδέναι
ὅπου πεπόρευεται. Μνημονεύεται δὲ ὁ ἔρως οὗτος παρὰ τοῖς τὴν ᾿Ασίαν οἰκοῦσι βαρβάροις
καὶ περισσῶς ἐστι ζηλωτὸς, καὶ τὸν μῦθον τοῦτον ζωγραφοῦσιν ἐν τοῖς ἱεροῖς καὶ τοῖς
βασιλείοις, ἔτι δἐ ταῖς ἰδιωτικαῖς οἰκίαις· καὶ ταῖς ἑαυτῶν θυγατράσιν οἱ πολλοὶ τῶν
δυναστῶν ὄνομα τιθένται ᾿Οδάτιν.»
| [13,35] Sans forcément tomber des nues, convenons qu’il peut exister
des gens qui s’amourachent d’une femme simplement par ouï-dire.
Ainsi, dans le livre X de ses Histoires d'Alexandre, Charès de
Mytilène parle de ces hommes qui aiment des femmes sans jamais
les avoir vues, excepté dans leurs rêves. Mais écoutons ce qu’il nous dit :
«Hystaspès avait un frère cadet appelé Zariadrès. Les gens du pays
prétendaient qu’ils étaient nés des œuvres d'Aphrodite et d'Adonis. Hystaspès
était le maître de la Médie et des contrées inférieures, tandis que Zariadrès
gouvernait les régions supérieures, des Portes Caspiennes au fleuve Tanaïs.
Homartès, qui était roi des Marathi, dont l’influence s’étendait au delà du
Tanaïs, avait une fille nommée Odatis. Des chroniques racontent qu’un jour
Odatis vit en songe Zoriadrès et tomba éperdument amoureuse de lui. La
même aventure survint également pour elle à Zariadrès. Dès lors ils ne
cessèrent de fantasmer l'un pour l'autre par rêves interposés. Odatis était la
plus belle femme de l'Asie, et Zariadrès, de son côté, était considéré comme le
plus bel homme.
Zariadrès exprima à Homartès son désir fervent d'épouser Odatis. Mais
Homartès refusa, parce que, n’ayant pas d'enfants mâles, il voulait la donner
en mariage à un homme de sa propre maison.
Peu après, Homartès convoqua les princes du royaume, ainsi que ses amis
et parents, pour célébrer les noces de sa fille, en s’abstenant bien de dévoiler
le nom de l’élu.
Quand l’ivresse fut générale, le père fit venir Odatis au banquet, et lui
déclara devant les invités réunis :
"Odatis, ma chère fille, aujourd'hui nous célébrons tes noces. Regarde
autour de toi, scrute chaque visage, puis prends une coupe d’or, remplis-la de
vin, et offre-la à celui que tu voudrais comme époux.»
Et la pauvre fille, après avoir regardé autour d’elle, quitta bientôt les lieux,
les yeux en larmes. En effet, son unique désir était de voir Zariadrès, lequel
avait été averti par elle de la cérémonie.
Zariadrès avait établi son camp le long du fleuve Tanaïs, qu'il traversa à
l’insu de son armée, accompagné seulement de son cocher, avec lequel il
s’élança sur son char en pleine nuit, parcourant d’une seule traite un immense
territoire d’environ 800 stades. Arrivé à l’endroit où les noces se célébraient, il
abandonna char et cocher, et continua son chemin, déguisé en Scythe.
Il pénétra dans la cour et remarqua Odatis qui pleurait à chaudes larmes
devant le buffet, tout occupée à remplir de vin la coupe fatidique. Il vint alors
près d’elle et lui dit :
«Odatis, je suis ici pour exaucer ton désir. Je suis Zariadrès.»
Voyant que cet étranger ressemblait traits pour traits à l’homme qui peuplait
ses rêves, elle ne put contenir sa joie et elle lui tendit la coupe. Il s’en saisit,
puis emmena Odatis jusqu’à son char et s’enfuit avec elle.
Les esclaves et les servantes, qui connaissaient pertinemment le secret
d’amour de leur maîtresse, gardèrent le silence, et bien que le père leur ait
ordonné de s’expliquer, elles feignirent d'ignorer où était parti le jeune homme.
Le souvenir de cette histoire d’amour est toujours vivace chez les Barbares
d’Asie et elle est extrêmement populaire. Cette légende a souvent été
représentée sur les fresques ornant leurs temples, leurs palais et même les
demeures des particuliers. Et la plupart des princes ont coutume de donner le
nom d’Odatis à leur propre fille.»
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