[8,8] Ὃν δὲ τρόπον ἀγωνιεῖσθε καὶ πῶς χρήσεσθε
τοῖς πράγμασιν, ἐπειδὴ γνώμην ἀξιοῦτέ με ἀποφήνασθαι, εἴτ´
ἐμπειρίαν μοι μαρτυροῦντες εἴτ´ εὔνοιαν εἴτε
καὶ ἀμφότερα, φράσω καὶ οὐκ ἀποκρύψομαι. πρῶτον
μὲν οὖν ὑμῖν παραινῶ σκοπεῖν, ὅπως εὐσεβῆ καὶ δικαίαν
πορίσησθε τοῦ πολέμου πρόφασιν. εὐσεβὴς δὲ
καὶ δικαία τοῦ πολέμου πρόφασις, ἥτις ἂν γένοιτο καὶ
ἅμα συμφέρουσα ὑμῖν, ἀκούσατέ μου. Ῥωμαίοις ἡ μὲν
ἐξ ἀρχῆς ὑπάρξασα γῆ βραχεῖά ἐστι καὶ λυπρά, ἡ δ´
ἐπίκτητος, ἣν τοὺς περιοίκους ἀφελόμενοι ἔχουσι,
πολλὴ καὶ ἀγαθή· καὶ εἰ τῶν ἠδικημένων ἕκαστοι τὴν
ἑαυτῶν ἀξιοῖεν ἀπολαβεῖν, οὐδὲν οὕτως μικρὸν οὐδ´
ἀσθενὲς οὐδ´ ἄπορον, ὡς τὸ Ῥωμαίων ἄστυ γενήσεται.
τούτου δ´ οἴομαι δεῖν ὑμᾶς ἄρξαι. πέμπετε οὖν πρέσβεις ὡς
αὐτοὺς ἀπαιτοῦντες ἃς κατέχουσιν ὑμῶν πόλεις καὶ ὅσα τείχη ἐν
τῇ ὑμετέρᾳ γῇ ἐνετειχίσαντο
ἀξιοῦντες ἐκλιπεῖν, καὶ εἴ τι ἄλλο βίᾳ σφετερισάμενοι
τῶν ὑμετέρων ἔχουσι πείθοντες ἀποδιδόναι. πολέμου
δὲ μήπω ἄρχετε, πρὶν ἢ λαβεῖν τὰς παρ´ αὐτῶν ἀποκρίσεις. ἐὰν
γὰρ ταῦτα ποιήσητε, δυεῖν ὧν βούλεσθε
ὑπάρξει θάτερον ὑμῖν· ἢ τὰ ἑαυτῶν ἀπολήψεσθε ἄνευ
κινδύνων καὶ δαπάνης, ἢ καλὴν καὶ δικαίαν πρόφασιν
εἰληφότες ἔσεσθε τοῦ πολέμου. τὸ γὰρ μὴ τῶν ἀλλοτρίων
ἐπιθυμεῖν, ἀλλὰ τὰ ἑαυτῶν ἀπαιτεῖν καὶ μὴ
τυγχάνοντας τούτου πολεμεῖν, ἅπαντες ἂν ὁμολογήσουσιν εἶναι
καλόν. φέρε δή, τί ποιήσειν οἴεσθε Ῥωμαίους
ταῦθ´ ὑμῶν προελομένων; πότερον ἀποδώσειν τὰ χωρία
ὑμῖν; καὶ τί κωλύσει πάντων αὐτοὺς ἀποστῆναι τῶν
ἀλλοτρίων; ἥξουσι γὰρ Αἰκανοί τε καὶ Ἀλβανοὶ καὶ
Τυρρηνοὶ καὶ πολλοὶ ἄλλοι τὴν ἑαυτῶν ἕκαστοι γῆν
ἀποληψόμενοι. ἢ καθέξειν τὰ χωρία καὶ μηθὲν τῶν
δικαίων ποιήσειν; ὅπερ ἐγὼ νομίζω. οὐκοῦν ἀδικεῖσθαι πρότεροι
λέγοντες ὑπ´ αὐτῶν κατὰ τὸ ἀναγκαῖον
ἐπὶ τὰ ὅπλα χωρήσετε καὶ συμμάχους ἕξετε, ὅσοι τὰ
ἑαυτῶν ἀφαιρεθέντες ἀπεγνώκασιν ἄλλως ἂν ἔτι αὐτὰ
ἢ πολεμοῦντες οὐκ ἀπολήψεσθαι. κράτιστος δ´ ὁ καιρὸς καὶ οἷος
οὐχ ἕτερος ἐπιθέσθαι Ῥωμαίοις, ὃν ἡ
τύχη τοῖς ἀδικουμένοις οὐδ´ ἂν ἐλπισθέντα παρεσκεύασεν, ἐν ᾧ
στασιάζουσι καὶ ὑποπτεύουσιν ἀλλήλους καὶ
ἡγεμόνας ἔχουσιν ἀπείρους πολέμου. ἃ μὲν οὖν ὑποτίθεσθαι ἔδει
λόγοις καὶ παραινεῖν φίλοις, μετὰ πάσης
εὐνοίας καὶ πίστεως εἰρημένα ὑπ´ ἐμοῦ, ταῦτ´ ἐστίν,
ἃ δὲ παρ´ αὐτὰ τὰ ἔργα ἑκάστοτε προορᾶσθαί τε καὶ
μηχανᾶσθαι δεήσει, τοῖς ἡγεμόσι τῆς δυνάμεως ἐπιτρέψατε
διανοεῖσθαι. πρόθυμον γὰρ καὶ τοὐμὸν ἔσται,
ἐν ᾧ ἄν με τάττητε τόπῳ, καὶ πειράσομαι μηδενὸς
εἶναι χείρων μήτε στρατιώτου μήτε λοχαγοῦ μήτε ἡγεμόνος·
ἀλλὰ καταχρῆσθέ μοι λαβόντες, ὅπου ἂν μέλλω
τι ὑμᾶς ὠφελήσειν, καὶ εὖ ἴστε ὅτι, εἰ πολεμῶν ὑμῖν
μεγάλα βλάπτειν δυνατὸς ἦν, καὶ σὺν ὑμῖν ἀγωνιζόμενος
μεγάλα δυνήσομαι ὠφελεῖν.
| [8,8] « XII. Mais puisque vous me demandez mon sentiment sur la
manière de faire la guerre aux Romains, soit que vous vous adressiez à
moi pour me donner des preuves que vous êtes persuadés de mon
attachement sincère à vos intérêts, soit que vous vouliez me
témoigner l'estime que vous faites de l'expérience que j'ai acquise dans
les armes, soit que tous ces deux motifs ensemble vous engagent à me
consulter, je vous dirai ingénument ce que j'en pense et je ne
dissimulerai rien. La première attention que vous devez avoir, c'est, à
mon avis, de chercher un pieux et juste prétexte de faire la guerre : je
vais vous apprendre par quel moyen vous le pourrez trouver ce légitime
prétexte, pour colorer vos entreprises. Les Romains dans leur premier
établissement n'avaient qu'un terrain fort resserré, encore était-ce un fond
assez mauvais et presque stérile. Les terres qu'ils y ont ajoutées en
empiétant sur leurs voisins, sont d'une grande étendue et d'un bon
rapport. Si donc tous les peuples voisins veulent redemander chacun la
portion de terres qu'on leur a injustement enlevée, il n'y aura rien de si
petit, de si faible, ni de si pauvre que la ville de Rome. Voila, Messieurs,
par où je crois que vous devez commencer. Envoyez une ambassade aux
Romains : redemandez-leur les villes qu'ils vous ont ôtées: sommez-les
de sortir des châteaux qu'ils ont bâtis sur votre fond : en un mot, s'il y a
encore quelqu'autre chose qui vous appartienne, et dont ils se soient
emparés par la force des armes, obligez-les de vous en faire restitution.
Au reste gardez-vous bien de déclarer la guerre avant que d'avoir reçu
leur réponse. Si vous suivez mes conseils, vous ne pourrez manquer
d'obtenir une des deux choses que vous souhaitez : ou vous rentrerez
sans aucun danger et sans qu'il vous en coûte rien, en possession de
tout ce qu'on vous a enlevé, ou du moins vous aurez un juste et honnête
prétexte de leur déclarer la guerre, car de l'aveu de tout le monde, quand
on n'en veut point au bien d'autrui et qu'on ne demande que le sien, si on
est payé d'un refus, c'est une raison légitime de prendre les armes.
XIII. QUELLE résolution pensez-vous que prendront les Romains si
vous en usez ainsi ? Croyez-vous qu'ils vous rendent vos terres ? S'ils le
font, qu'est-ce qui empêchera qu'on ne leur fasse rendre tout le bien
d'autrui qu'ils ont envahi ? Les Aeques, les Albains, les Tyrrhéniens et
plusieurs autres suivront sans doute votre exemple, et iront redemander
ce qui est à eux. Que feront donc les Romains? Retiendront- ils vos
terres, refuseront-ils de vous rendre justice ? Oui, Messieurs, ils
prendront ce dernier parti : je n'en doute point. Vous pourrez donc alors
protester contr'eux : vous serez censés avoir été absolument contraint à
prendre les armes, et tous ceux dont ils ont enlevé les biens et qui
désespèrent de les recouvrer par d'autres voies, deviendront vos alliés et
vous donneront des secours. Si jamais il y eut une occasion favorable
pour attaquer les Romains, c'est celle que la fortune vous présente
auiourd'hui dans le moment qu'on n'aurait osé l'espérer. La sédition les
divise, la défiance règne parmi eux, leurs chefs ne sont point
expérimentés au fait de la guerre: c'est la plus belle occasion que
puissent trouver ceux qu'ils ont offensés, pour tirer vengeance de leurs
injustices. Voila, Messieurs, les avis et les instructions que j'avais à vous
donner comme à mes amis: je l'ai fait dans toute la fidélité possible et
avec un parfait dévouement à vos intérêts.
« XIV. A l'égard de ce qu'il faudra prévoir et exécuter suivant les
différentes occurrences, vous en laisserez le soin aux généraux de vos
armées. Vous pouvez toujours compter sur ma bonne volonté : en
quelque poste que vous me mettriez, j'exécuterai ponctuellement vos
ordres, et je ferai de mon mieux, pour ne céder en rien ni aux simples
soldats, ni aux officiers, ni même au commandant. Disposez donc de moi
comme bon vous semblera ; mettez-moi dans quelque poste que ce soit
où vous me jugerez utile, et soyez persuadés que si j'ai pu vous faire
beaucoup de mal lorsque j'étais votre ennemi, je pourrai aussi vous faire
beaucoup de bien en combattant avec vous. »
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