[8,33] Ἴθι δὴ σκόπει καὶ τὰ παρὰ θεῶν, Μηνύκιε,
οἷά μοι νῦν τ´ ἀπήντηται καί, ἐὰν ἄρα πεισθεὶς ὑμῖν προδῶ τὴν
τούτων πίστιν, οἷα τὸν λοιπὸν
ὑπάρξει μοι βίον. νῦν μέν γε πάσης πράξεως, ἧς ἂν
ἅψωμαι καθ´ ὑμῶν, συλλαμβάνουσί μοι, καὶ οὐδεμιᾶς
πείρας ἀποτυγχάνω. καὶ τοῦτο πηλίκον οἴεσθε εἶναι
τεκμήριον εὐσεβείας τῆς ἐμῆς; εἰ γὰρ δὴ κατὰ τῆς πατρίδος
οὐχ ὅσιον ἐγὼ πόλεμον ἐνεστησάμην, ἅπαντα
χρῆν ἐναντία μοι γίνεσθαι τὰ παρὰ θεῶν· ὁπότε δ´
οὐρίῳ πνεούσῃ κέχρημαι τῇ περὶ τοὺς πολέμους τύχῃ,
καὶ ὁπόσοις ἂν ἐπιβάλωμαι πράγμασι κατ´ ὀρθὸν
ἅπαντά μοι χωρεῖ, δῆλον ὅτι εὐσεβής εἰμι ἀνὴρ καὶ
πράξεις προῄρημαι καλάς. τί οὖν, ἐὰν μεταβάλωμαι
καὶ τὰ μὲν ὑμέτερα αὔξειν, τὰ δὲ τούτων ταπεινὰ
ποιεῖν ζητῶ, γενήσεταί μοι; ἆρ´ οὐχὶ τἀναντία, καὶ
πονηρὰν νέμεσιν ἕξω παρὰ τοῦ δαιμονίου τοῖς ἠδικημένοις
τιμωρόν, καὶ ὥσπερ ἐκ ταπεινοῦ μέγας διὰ τοὺς
θεοὺς ἐγενόμην, οὕτως αὖθις ἐκ μεγάλου ταπεινὸς
γενήσομαι, καὶ τἀμὰ παθήματα παιδεύματα γενήσεται
τοῖς ἄλλοις; ἐμοὶ μὲν ταῦτα παρίσταται περὶ τοῦ δαιμονίου
φρονεῖν, καὶ πείθομαί γε τὰς ἐρινύας ἐκείνας
τὰς φοβερὰς καὶ ἀπαραιτήτους τοῖς ἀνόσιόν τι διαπραξαμένοις,
ὧν καὶ σὺ ἐμνήσθης, ὦ Μηνύκιε, τότε
μοι παρακολουθήσειν ψυχήν τε καὶ σῶμα αἰκιζομένας,
ὅταν ἐγκαταλίπω καὶ προδῶ τοὺς σώσαντάς με ἀπολωλότα ὑφ´
ὑμῶν καὶ μετὰ τοῦ σῶσαι πολλὰς καὶ καλὰς
προσθέντας εὐεργεσίας, οἷς ἐγγυητὰς ἔδωκα θεούς, ὡς
ἐπ´ οὐδενὶ κακῷ τὴν ἄφιξιν ποιησάμενος καὶ φυλάξων
τὴν εἰς τόδε χρόνου καθαρὰν καὶ ἀμίαντον συνοῦσάν μοι πίστιν.
| [8,33] XXIV. Faites encore réflexion, Minucius, sur la protection dont les
dieux me favorisent: voyez, je vous prie, ce que j'en pourrais attendre le
reste de mes jours, si déférant à vos conseils je violais les serments
respectables dont ils ont été témoins. Jusque aujourd'hui ils m'ont été
favorables dans tout ce que j'ai entrepris contre vous, tous mes projets
ont réussi. N'est-ce pas là une grande preuve de la justice de ma cause ?
Pensez-vous que les dieux eussent secondé mes desseins, si j'avais
entrepris une guerre injuste contre ma patrie ? Puisque la fortune se
déclare entièrement pour moi dans la guerre que je vous fais, puisque tout
ce que j'entreprends me réussit à souhait, peut-on douter de ma piété, et
mes projets ne sont-ils pas justes, selon toutes les lois divines et
humaines? A quoi devrais-je donc m'attendre si je changeais de conduite ?
Si je cherchais à rétablir vos affaires et à ruiner celles des Volsques, ne
m'arriverait-il pas tout le contraire de ce qui m'arrive aujourd'hui ? Les
dieux irrités par une semblable perfidie ne m'enverraient-ils par les furies
les plus terribles pour me servir de bourreaux ? Ne se déclareraient-ils
pas contre moi en faveur de ceux que je voudrais opprimer ? Et puisque
c'est par leur secours que de l'état le plus humiliant je suis monté au plus
haut point d'élévation, ne me feraient-ils pas retomber du faîte de la
grandeur dans ma première bassesse, afin qu'une chute si terrible servît
d'exemple aux autres ? Voila l'idée que j'ai des dieux. Je suis persuadé,
Minucius, que ces furies vengeresses dont vous m'avez menacé, me
suivraient partout. Inexorables envers ceux qui ont commis de grands
crimes, elles s'attacheraient à moi pour me tourmenter le corps et l'âme si
j'étais capable de trahir et d'abandonner les Volsques qui m'ont tiré de la
misère où vous m'aviez réduit , qui non contents de ces premières
marques de bonté et de bienveillance, m'ont comblé de mille faveurs ; qui
m'ont reçu sur la parole que je leur ai donnée, prenant les dieux à témoins
que je ne me retirais point chez eux dans le dessein de leur faire du mal,
et qui m'ayant trouvé jusqu'aujourd'hui fidèle dans mes serments, me
confient sans réserve tous leurs intérêts.
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