[36] ἐπὶ τούτῳ (36a) τῷ γεγονότι, ὅτι μου κατεψηφίσασθε, ἄλλα τέ μοι πολλὰ
συμβάλλεται, καὶ οὐκ ἀνέλπιστόν μοι γέγονεν τὸ γεγονὸς τοῦτο, ἀλλὰ πολὺ
μᾶλλον θαυμάζω ἑκατέρων τῶν ψήφων τὸν γεγονότα ἀριθμόν. οὐ γὰρ ᾠόμην
ἔγωγε οὕτω παρ᾽ ὀλίγον ἔσεσθαι ἀλλὰ παρὰ πολύ· νῦν δέ, ὡς ἔοικεν, εἰ
τριάκοντα μόναι μετέπεσον τῶν ψήφων, ἀπεπεφεύγη ἄν. Μέλητον μὲν
οὖν, ὡς ἐμοὶ δοκῶ, καὶ νῦν ἀποπέφευγα, καὶ οὐ μόνον ἀποπέφευγα, ἀλλὰ
παντὶ δῆλον τοῦτό γε, ὅτι εἰ μὴ ἀνέβη Ἄνυτος καὶ Λύκων κατηγορήσοντες
ἐμοῦ, κἂν ὦφλε (36b) χιλίας δραχμάς, οὐ μεταλαβὼν τὸ πέμπτον μέρος
τῶν ψήφων.
τιμᾶται δ᾽ οὖν μοι ὁ ἀνὴρ θανάτου. εἶεν· ἐγὼ δὲ δὴ τίνος ὑμῖν
ἀντιτιμήσομαι, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι; ἢ δῆλον ὅτι τῆς ἀξίας; τί οὖν; τί ἄξιός
εἰμι παθεῖν ἢ ἀποτεῖσαι, ὅτι μαθὼν ἐν τῷ βίῳ οὐχ ἡσυχίαν ἦγον, ἀλλ᾽
ἀμελήσας ὧνπερ οἱ πολλοί, χρηματισμοῦ τε καὶ οἰκονομίας καὶ
στρατηγιῶν καὶ δημηγοριῶν καὶ τῶν ἄλλων ἀρχῶν καὶ συνωμοσιῶν καὶ
στάσεων τῶν ἐν τῇ πόλει γιγνομένων, ἡγησάμενος ἐμαυτὸν (36c) τῷ ὄντι
ἐπιεικέστερον εἶναι ἢ ὥστε εἰς ταῦτ᾽ ἰόντα σῴζεσθαι, ἐνταῦθα μὲν οὐκ ᾖα
οἷ ἐλθὼν μήτε ὑμῖν μήτε ἐμαυτῷ ἔμελλον μηδὲν ὄφελος εἶναι, ἐπὶ δὲ τὸ
ἰδίᾳ ἕκαστον ἰὼν εὐεργετεῖν τὴν μεγίστην εὐεργεσίαν, ὡς ἐγώ φημι,
ἐνταῦθα ᾖα, ἐπιχειρῶν ἕκαστον ὑμῶν πείθειν μὴ πρότερον μήτε τῶν
ἑαυτοῦ μηδενὸς ἐπιμελεῖσθαι πρὶν ἑαυτοῦ ἐπιμεληθείη ὅπως ὡς
βέλτιστος καὶ φρονιμώτατος ἔσοιτο, μήτε τῶν τῆς πόλεως, πρὶν αὐτῆς τῆς
πόλεως, τῶν τε ἄλλων οὕτω κατὰ τὸν (36d) αὐτὸν τρόπον ἐπιμελεῖσθαι --
τί οὖν εἰμι ἄξιος παθεῖν τοιοῦτος ὤν; ἀγαθόν τι, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, εἰ δεῖ
γε κατὰ τὴν ἀξίαν τῇ ἀληθείᾳ τιμᾶσθαι· καὶ ταῦτά γε ἀγαθὸν τοιοῦτον
ὅτι ἂν πρέποι ἐμοί. τί οὖν πρέπει ἀνδρὶ πένητι εὐεργέτῃ δεομένῳ ἄγειν
σχολὴν ἐπὶ τῇ ὑμετέρᾳ παρακελεύσει; οὐκ ἔσθ᾽ ὅτι μᾶλλον, ὦ ἄνδρες
Ἀθηναῖοι, πρέπει οὕτως ὡς τὸν τοιοῦτον ἄνδρα ἐν πρυτανείῳ σιτεῖσθαι,
πολύ γε μᾶλλον ἢ εἴ τις ὑμῶν ἵππῳ ἢ συνωρίδι ἢ ζεύγει νενίκηκεν
Ὀλυμπίασιν· ὁ μὲν γὰρ ὑμᾶς ποιεῖ εὐδαίμονας δοκεῖν εἶναι, ἐγὼ δὲ (36e)
εἶναι, καὶ ὁ μὲν τροφῆς οὐδὲν δεῖται, ἐγὼ δὲ δέομαι. εἰ οὖν δεῖ με κατὰ τὸ
δίκαιον τῆς ἀξίας τιμᾶσθαι,
| [36] Je ne suis nullement ému, Athéniens,
du jugement que vous venez de prononcer, et pour
plusieurs raisons : la principale, c'est que j'y étais tout
préparé. Je suis bien plus surpris du nombre de voix
pour ou contre; je n'espérais pas être condamné
par un si petit nombre de suffrages. Présentement
je vois qu'il n'a tenu qu'à trois voix que je n'aie été
absous. Il me semble donc que j'ai échappé à Mélitus ;
et non seulement je lui ai échappé, mais il
est évident que si Anytus et Lycon ne se fussent
levés pour m'accuser, il aurait perdu ses mille drachmes,
n'ayant pas obtenu la cinquième partie des voix.
Mélitus me juge donc digne de mort, à la bonne
heure; et moi, de quelle peine me jugerai-je digne?
Athéniens, vous verrez clairement que je ne choisis
que ce que je mérite. Qu'est-ce donc? et à quelle
peine, ou à quelle amende vais-je me condamner,
pour n'avoir pas tu ce que j'ai appris de bon dans
toute ma vie, pour avoir négligé ce que les autres
recherchent avec tant d'empressement, les richesses,
le soin de ses affaires domestiques, les
emplois et les dignités, pour n'être jamais entré
dans aucune cabale, ni dans aucune conjuration,
pratiques assez ordinaires dans cette ville ; car je
me suis toujours connu trop honnête homme pour
vouloir conserver ma vie par ces indignes moyens.
D'ailleurs, vous savez que je n'ai jamais voulu
prendre aucune profession où je n'aurais pu travailler
en mèrne temps à votre utilité et à la mienne,
et que mon unique but a été de vous procurer
à chacun en particulier le plus grand de tous les
biens, en vous persuadant de n'avoir soin d'aucune
des choses qui sont à vous, avant que de prendre
soin de vous-mêmes, pour vous rendre très sages
et très parfaits, comme il faut avoir soin de la ville,
avant que de penser aux choses qui sont à la ville ;
et ainsi de tout le reste.
Après cela, de quoi suis-je digne? d'un grand
bien, sans doute, Athéniens, si vous proportionnez
véritablement la récompense au mérite, et d'un
grand bien qui puisse convenir à un hornme tel
que moi : or, qu'est-ce qui convient à un homme
pauvre, qui est votre bienfaiteur, et qui a besoin
d'un grand loisir pour ne s'employer qu'à vous
exhorter? Rien ne lui convient tant, Athéniens,
que d'être nourri dans le Prytanée ; cela lui est bien
plus dû qu'à ceux d'entre vous qui ont remporté le
prix des courses des chevaux et de chariots aux jeux
Olympiques : car ceux-ci, par leurs victoires, ne
rendent heureux qu'en apparence, et moi je vous
rends véritablement heureux. D'ailleurs , ils n'ont
pas besoin de ce secours, et j'en ai besoin. S'il faut donc
en toute justice m'adjuger une récompense digne de moi,
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