[3,1] CHAPITRE I.
(995a)(24) Ἀνάγκη πρὸς τὴν ἐπιζητουμένην ἐπιστήμην ἐπελθεῖν ἡμᾶς (25) πρῶτον περὶ ὧν ἀπορῆσαι δεῖ πρῶτον· ταῦτα δ᾽ ἐστὶν ὅσα τε περὶ αὐτῶν ἄλλως ὑπειλήφασί τινες, κἂν εἴ τι χωρὶς τούτων τυγχάνει παρεωραμένον. Ἔστι δὲ τοῖς εὐπορῆσαι βουλομένοις προὔργου τὸ διαπορῆσαι καλῶς· ἡ γὰρ ὕστερον εὐπορία λύσις τῶν πρότερον ἀπορουμένων ἐστί, λύειν δ᾽ οὐκ (30) ἔστιν ἀγνοοῦντας τὸν δεσμόν, ἀλλ᾽ ἡ τῆς διανοίας ἀπορία δηλοῖ τοῦτο περὶ τοῦ πράγματος· ᾗ γὰρ ἀπορεῖ, ταύτῃ παραπλήσιον πέπονθε τοῖς δεδεμένοις· ἀδύνατον γὰρ ἀμφοτέρως προελθεῖν εἰς τὸ πρόσθεν. Διὸ δεῖ τὰς δυσχερείας τεθεωρηκέναι πάσας πρότερον, τούτων τε χάριν καὶ διὰ τὸ τοὺς (35) ζητοῦντας ἄνευ τοῦ διαπορῆσαι πρῶτον ὁμοίους εἶναι τοῖς ποῖ δεῖ βαδίζειν ἀγνοοῦσι, καὶ πρὸς τούτοις οὐδ᾽ εἴ ποτε τὸ ζητούμενον εὕρηκεν ἢ μὴ γιγνώσκειν· (995b)(1) τὸ γὰρ τέλος τούτῳ μὲν οὐ δῆλον τῷ δὲ προηπορηκότι δῆλον. Ἔτι δὲ βέλτιον ἀνάγκη ἔχειν πρὸς τὸ κρῖναι τὸν ὥσπερ ἀντιδίκων καὶ τῶν ἀμφισβητούντων λόγων ἀκηκοότα πάντων.
Ἔστι δ᾽ ἀπορία πρώτη (5) μὲν περὶ ὧν ἐν τοῖς πεφροιμιασμένοις διηπορήσαμεν, πότερον μιᾶς ἢ πολλῶν ἐπιστημῶν θεωρῆσαι τὰς αἰτίας· καὶ πότερον τὰς τῆς οὐσίας ἀρχὰς τὰς πρώτας ἐστὶ τῆς ἐπιστήμης ἰδεῖν μόνον ἢ καὶ περὶ τῶν ἀρχῶν ἐξ ὧν δεικνύουσι πάντες, οἷον πότερον ἐνδέχεται ταὐτὸ καὶ ἓν ἅμα φάναι καὶ ἀποφάναι (10) ἢ οὔ, καὶ περὶ τῶν ἄλλων τῶν τοιούτων· εἴ τ᾽ ἐστι περὶ τὴν οὐσίαν, πότερον μία περὶ πάσας ἢ πλείονές εἰσι, κἂν εἰ πλείονες πότερον ἅπασαι συγγενεῖς ἢ τὰς μὲν σοφίας τὰς δὲ ἄλλο τι λεκτέον αὐτῶν.
Καὶ τοῦτο δ᾽ αὐτὸ τῶν ἀναγκαίων ἐστὶ ζητῆσαι, πότερον τὰς αἰσθητὰς οὐσίας εἶναι (15) μόνον φατέον ἢ καὶ παρὰ ταύτας ἄλλας, καὶ πότερον μοναχῶς ἢ πλείονα γένη τῶν οὐσιῶν, οἷον οἱ ποιοῦντες τά τε εἴδη καὶ τὰ μαθηματικὰ μεταξὺ τούτων τε καὶ τῶν αἰσθητῶν. Περί τε τούτων οὖν, καθάπερ φαμέν, ἐπισκεπτέον, καὶ πότερον περὶ τὰς οὐσίας ἡ θεωρία μόνον ἐστὶν ἢ καὶ περὶ (20) τὰ συμβεβηκότα καθ᾽ αὑτὰ ταῖς οὐσίαις,
πρὸς δὲ τούτοις περὶ ταὐτοῦ καὶ ἑτέρου καὶ ὁμοίου καὶ ἀνομοίου καὶ ἐναντιότητος, καὶ περὶ προτέρου καὶ ὑστέρου καὶ τῶν ἄλλων ἁπάντων τῶν τοιούτων περὶ ὅσων οἱ διαλεκτικοὶ πειρῶνται σκοπεῖν ἐκ τῶν ἐνδόξων μόνων ποιούμενοι τὴν σκέψιν, τίνος (25) ἐστὶ θεωρῆσαι περὶ πάντων· ἔτι δὲ τούτοις αὐτοῖς ὅσα καθ᾽ αὑτὰ συμβέβηκεν, καὶ μὴ μόνον τί ἐστι τούτων ἕκαστον ἀλλὰ καὶ ἆρα ἓν ἑνὶ ἐναντίον·
καὶ πότερον αἱ ἀρχαὶ καὶ τὰ στοιχεῖα τὰ γένη ἐστὶν ἢ εἰς ἃ διαιρεῖται ἐνυπάρχοντα ἕκαστον· καὶ εἰ τὰ γένη, πότερον ὅσα ἐπὶ τοῖς ἀτόμοις λέγεται (30) τελευταῖα ἢ τὰ πρῶτα, οἷον πότερον ζῷον ἢ ἄνθρωπος ἀρχή τε καὶ μᾶλλον ἔστι παρὰ τὸ καθ᾽ ἕκαστον. Μάλιστα δὲ ζητητέον καὶ πραγματευτέον πότερον ἔστι τι παρὰ τὴν ὕλην αἴτιον καθ᾽ αὑτὸ ἢ οὔ, καὶ τοῦτο χωριστὸν ἢ οὔ, καὶ πότερον ἓν ἢ πλείω τὸν ἀριθμόν, καὶ πότερον ἔστι τι παρὰ τὸ (35) σύνολον (λέγω δὲ τὸ σύνολον, ὅταν κατηγορηθῇ τι τῆς ὕλης) ἢ οὐθέν, ἢ τῶν μὲν τῶν δ᾽ οὔ, καὶ ποῖα τοιαῦτα τῶν ὄντων.
(996a)(1) Ἔτι αἱ ἀρχαὶ πότερον ἀριθμῷ ἢ εἴδει ὡρισμέναι, καὶ αἱ ἐν τοῖς λόγοις καὶ αἱ ἐν τῷ ὑποκειμένῳ; καὶ πότερον τῶν φθαρτῶν καὶ ἀφθάρτων αἱ αὐταὶ ἢ ἕτεραι, καὶ πότερον ἄφθαρτοι πᾶσαι ἢ τῶν φθαρτῶν φθαρταί; ἔτι δὲ τὸ πάντων (5) χαλεπώτατον καὶ πλείστην ἀπορίαν ἔχον, πότερον τὸ ἓν καὶ τὸ ὄν, καθάπερ οἱ Πυθαγόρειοι καὶ Πλάτων ἔλεγεν, οὐχ ἕτερόν τί ἐστιν ἀλλ᾽ οὐσία τῶν ὄντων; ἢ οὔ, ἀλλ᾽ ἕτερόν τι τὸ ὑποκείμενον, ὥσπερ Ἐμπεδοκλῆς φησὶ φιλίαν ἄλλος δέ τις πῦρ ὁ δὲ ὕδωρ ἢ ἀέρα· καὶ πότερον αἱ ἀρχαὶ (10) καθόλου εἰσὶν ἢ ὡς τὰ καθ᾽ ἕκαστα τῶν πραγμάτων, καὶ δυνάμει ἢ ἐνεργείᾳ· ἔτι πότερον ἄλλως ἢ κατὰ κίνησιν· καὶ γὰρ ταῦτα ἀπορίαν ἂν παράσχοι πολλήν. Πρὸς δὲ τούτοις πότερον οἱ ἀριθμοὶ καὶ τὰ μήκη καὶ τὰ σχήματα καὶ αἱ στιγμαὶ οὐσίαι τινές εἰσιν ἢ οὔ, κἂν εἰ οὐσίαι πότερον (15) κεχωρισμέναι τῶν αἰσθητῶν ἢ ἐνυπάρχουσαι ἐν τούτοις; περὶ γὰρ τούτων ἁπάντων οὐ μόνον χαλεπὸν τὸ εὐπορῆσαι τῆς ἀληθείας ἀλλ᾽ οὐδὲ τὸ διαπορῆσαι τῷ λόγῳ ῥᾴδιον καλῶς.
| [3,1] CHAPITRE PREMIER.
(995a) Il est nécessaire, dans l'intérêt de la science que nous (25) cherchons, de commencer par exposer les difficultés que nous avons à résoudre dès l'abord. Ces difficultés, ce sont, outre les opinions contradictoires des divers philosophes sur les mêmes sujets, tous les points obscurs qu'ils peuvent avoir négligé d'éclaircir: si l'on veut arriver à une solution vraie, il est utile de se bien poser d'abord ces difficultés. Car la solution vraie à laquelle on parvient ensuite, n'est autre chose que l'éclaircissement de ces difficultés : or, il est impossible de délier un nœud (30) si l'on ne sait pas la manière de s'y prendre. Ceci est évident surtout pour les difficultés, les doutes de la pensée. Douter, pour elle, c'est être dans l'état de l'homme enchainé: pas plus que lui elle ne peut aller en avant. Il nous faut donc commencer par examiner toutes les difficultés, et pour ces motifs, et aussi parce que chercher (35) sans se les être posées d'abord, c'est ressembler à ceux qui marchent sans savoir vers quel but il faut marcher, c'est s'exposer même à ne point reconnaître si l'on a découvert ou non ce que l'on cherchait. En effet, on n'a point alors de but marqué : (995b) le but est marqué au contraire pour celui qui a commencé par se les bien poser. Enfin, on doit nécessairement être mieux à même de juger, quand on a entendu, comme parties adverses en quelque sorte, toutes les raisons opposées. La première difficulté (5) est celle que nous nous sommes déjà proposée dans l'introduction. L'étude des causes appartient-elle à une seule science, ou à plusieurs, et la science doit-elle s'occuper seulement des premiers principes des êtres, ou bien doit-elle embrasser aussi les principes généraux de la démonstration, tels que celui-ci : Est-il possible, ou non, d'affirmer et de nier en même temps une seule (10) et même chose ? et tous les autres principes de ce genre ? Et si elle ne s'occupe que des principes des êtres, y a-t-il une seule science ou plusieurs pour tous ces principes ? Et s'il y en a plusieurs, y a-t-il entre toutes quelque affinité, on bien les unes doivent-elles être considérées comme des philosophies, les autres non?
Il est nécessaire encore de rechercher si l'on ne doit reconnaître que (15) des substances sensibles, ou s'il y en a d'autres en dehors de celles-là. Y a-t-il une seule espèce de substance, ou bien y en a-t-il plusieurs? De ce dernier avis sont, par exemple, ceux qui admettent les idées, et les substances mathématiques intermédiaires entre les idées et les objets sensibles. Ce sont là, disons-nous, des difficultés qu'il faut examiner, et encore celle-ci : Notre étude n'embrasse-t-elle que les essences, ou bien s'étend-elle aussi (20) aux accidents essentiels des substances ?
Ensuite, à quelle science appartient-il de s'occuper de l'identité et de l'hétérogénéité, de la similitude et de la dissimilitude, de l'identité et de la contrariété, de l'antériorité et de la postériorité, et des autres principes de ce genre à l'usage des Dialecticiens, lesquels ne raisonnent (25) que sur le vraisemblable ? Ensuite , quels sont les accidents propres de chacune de ces choses ? Il ne faut pas seulement rechercher ce qu'est chacune d'elles, mais encore si elles sont opposées les unes aux autres.
Sont-ce les genres qui sont les principes et les éléments ; sont-ce les parties intrinsèques de chaque être ? Et si ce sont les genres, sont-ce les plus rapprochés des individus, (30) ou bien les genres les plus élevés ? Est-ce l'animal, par exemple, ou bien l'homme, qui est principe ; et le genre l'est-il plutôt que l'individu ? Une autre question non moins digne d'être étudiée et approfondie est celle-ci : y a-t-il ou non, en dehors de la substance, quelque chose qui soit cause en soi ? Ce quelque chose en est-il ou non indépendant ; est-il un ou multiple ? Est-il ou non en dehors de (35) l'ensemble (et par l'ensemble j'entends ici la substance avec ses attributs ? En dehors de quelques individus et non des autres ; et quels sont alors les êtres en dehors desquels il existe ?
(996a) Ensuite, les principes soit formels soit substantiels, sont-ils numériquement distincts ou réductibles à des genres? Les principes des êtres périssables et ceux des êtres impérissables sont-ils les mêmes ou différents ; sont-ils tous impérissables, ou bien les principes des êtres périssables sont-ils périssables ? De plus, et c'est là (5) la difficulté la plus grande, la plus embarrassante, l'unité et l'être constituent-ils ou non la substance des êtres, comme le prétendaient les Pythagoriciens et Platon ; ou bien y a-t-îl quelque chose qui leur serve de sujet, de substance, comme l'Amitié d'Empédocle, le feu, l'eau, l'air de tel ou tel autre philosophe ? Les principes (10) sont-ils relatifs au général, ou bien aux choses particulières ? Sont-ils en puissance ou en acte ? Sont-ils en mouvement ou autrement? Ce sont là de graves difficultés. Ensuite, les nombres, les longueurs, les figures, les points, sont-ils ou non des substances ; et, s'ils sont des substances, sont-ils (15) indépendants des objets sensibles, ou existent-ils dans ces objets ? Sur tous ces points, non seulement il est difficile d'arriver à la vérité par une bonne solution, mais il n'est pas même bien facile de se poser nettement les difficultés.
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