[4,1121] (1121a) (1) Ἐὰν δὲ παρὰ τὸ δέον καὶ τὸ καλῶς ἔχον συμβαίνῃ αὐτῷ
ἀναλίσκειν, λυπήσεται, μετρίως δὲ καὶ ὡς δεῖ· τῆς ἀρετῆς γὰρ καὶ ἥδεσθαι
καὶ λυπεῖσθαι ἐφ᾽ οἷς δεῖ καὶ ὡς δεῖ. Καὶ εὐκοινώνητος δ᾽ ἐστὶν ὁ
ἐλευθέριος εἰς χρήματα· (5) δύναται γὰρ ἀδικεῖσθαι, μὴ τιμῶν γε τὰ
χρήματα, καὶ μᾶλλον ἀχθόμενος εἴ τι δέον μὴ ἀνάλωσεν ἢ λυπούμενος εἰ μὴ
δέον τι ἀνάλωσεν, καὶ τῷ Σιμωνίδῃ οὐκ ἀρεσκόμενος.
Ὁ δ᾽ ἄσωτος καὶ ἐν τούτοις διαμαρτάνει· οὔτε γὰρ ἥδεται ἐφ᾽ οἷς δεῖ οὐδὲ
ὡς δεῖ οὔτε λυπεῖται· ἔσται δὲ προϊοῦσι φανερώτερον.
(10) Εἴρηται δὴ ἡμῖν ὅτι ὑπερβολαὶ καὶ ἐλλείψεις εἰσὶν ἡ ἀσωτία καὶ ἡ
ἀνελευθερία, καὶ ἐν δυσίν, ἐν δόσει καὶ λήψει· καὶ τὴν δαπάνην γὰρ εἰς τὴν
δόσιν τίθεμεν. Ἡ μὲν οὖν ἀσωτία τῷ διδόναι καὶ μὴ λαμβάνειν ὑπερβάλλει, τῷ
δὲ λαμβάνειν ἐλλείπει, ἡ δ᾽ ἀνελευθερία τῷ διδόναι μὲν ἐλλείπει, (15) τῷ
λαμβάνειν δ᾽ ὑπερβάλλει, πλὴν ἐν μικροῖς. Τὰ μὲν οὖν τῆς ἀσωτίας οὐ πάνυ
συνδυάζεται· οὐ γὰρ ῥᾴδιον μηδαμόθεν λαμβάνοντα πᾶσι διδόναι· ταχέως γὰρ
ἐπιλείπει ἡ οὐσία τοὺς ἰδιώτας διδόντας, οἵπερ καὶ δοκοῦσιν ἄσωτοι εἶναι·
ἐπεὶ ὅ γε τοιοῦτος δόξειεν ἂν οὐ μικρῷ βελτίων εἶναι (20) τοῦ ἀνελευθέρου.
Εὐίατός τε γάρ ἐστι καὶ ὑπὸ τῆς ἡλικίας καὶ ὑπὸ τῆς ἀπορίας, καὶ ἐπὶ τὸ
μέσον δύναται ἐλθεῖν. Ἔχει γὰρ τὰ τοῦ ἐλευθερίου· καὶ γὰρ δίδωσι καὶ οὐ
λαμβάνει, οὐδέτερον δ᾽ ὡς δεῖ οὐδ᾽ εὖ. Εἰ δὴ τοῦτο ἐθισθείη ἤ πως ἄλλως
μεταβάλοι, εἴη ἂν ἐλευθέριος· δώσει γὰρ οἷς δεῖ, (25) καὶ οὐ λήψεται ὅθεν
οὐ δεῖ. Διὸ καὶ δοκεῖ οὐκ εἶναι φαῦλος τὸ ἦθος· οὐ γὰρ μοχθηροῦ οὐδ᾽
ἀγεννοῦς τὸ ὑπερβάλλειν διδόντα καὶ μὴ λαμβάνοντα, ἠλιθίου δέ. Ὁ δὲ τοῦτον
τὸν τρόπον ἄσωτος πολὺ δοκεῖ βελτίων τοῦ ἀνελευθέρου εἶναι διά τε τὰ
εἰρημένα, καὶ ὅτι ὃ μὲν ὠφελεῖ πολλούς, ὃ δὲ οὐθένα, (30) ἀλλ᾽ οὐδ᾽ αὑτόν.
Ἀλλ᾽ οἱ πολλοὶ τῶν ἀσώτων, καθάπερ εἴρηται, καὶ λαμβάνουσιν ὅθεν μὴ δεῖ,
καὶ εἰσὶ κατὰ τοῦτο ἀνελεύθεροι. Ληπτικοὶ δὲ γίνονται διὰ τὸ βούλεσθαι μὲν
ἀναλίσκειν, εὐχερῶς δὲ τοῦτο ποιεῖν μὴ δύνασθαι· ταχὺ γὰρ ἐπιλείπει αὐτοὺς
τὰ ὑπάρχοντα. Ἀναγκάζονται οὖν ἑτέρωθεν πορίζειν. (1121b) (1) Ἅμα δὲ καὶ
διὰ τὸ μηδὲν τοῦ καλοῦ φροντίζειν ὀλιγώρως καὶ πάντοθεν λαμβάνουσιν·
διδόναι γὰρ ἐπιθυμοῦσι, τὸ δὲ πῶς ἢ πόθεν οὐδὲν αὐτοῖς διαφέρει. Διόπερ
οὐδ᾽ ἐλευθέριοι αἱ δόσεις αὐτῶν εἰσίν· οὐ γὰρ καλαί, οὐδὲ τούτου (5)
ἕνεκα, οὐδὲ ὡς δεῖ· ἀλλ᾽ ἐνίοτε οὓς δεῖ πένεσθαι, τούτους πλουσίους
ποιοῦσι, καὶ τοῖς μὲν μετρίοις τὰ ἤθη οὐδὲν ἂν δοῖεν, τοῖς δὲ κόλαξιν ἤ
τιν᾽ ἄλλην ἡδονὴν πορίζουσι πολλά. Διὸ καὶ ἀκόλαστοι αὐτῶν εἰσὶν οἱ
πολλοί· εὐχερῶς γὰρ ἀναλίσκοντες καὶ εἰς τὰς ἀκολασίας δαπανηροί εἰσι, καὶ
διὰ τὸ μὴ πρὸς (10) τὸ καλὸν ζῆν πρὸς τὰς ἡδονὰς ἀποκλίνουσιν. Ὁ μὲν οὖν
ἄσωτος ἀπαιδαγώγητος γενόμενος εἰς ταῦτα μεταβαίνει, τυχὼν δ᾽ ἐπιμελείας
εἰς τὸ μέσον καὶ εἰς τὸ δέον ἀφίκοιτ᾽ ἄν.
Ἡ δ᾽ ἀνελευθερία ἀνίατός τ᾽ ἐστίν (δοκεῖ γὰρ τὸ γῆρας καὶ πᾶσα ἀδυναμία
ἀνελευθέρους ποιεῖν), καὶ συμφυέστερον τοῖς ἀνθρώποις (15) τῆς ἀσωτίας· οἱ
γὰρ πολλοὶ φιλοχρήματοι μᾶλλον ἢ δοτικοί. Καὶ διατείνει δ᾽ ἐπὶ πολύ, καὶ
πολυειδές ἐστιν· πολλοὶ γὰρ τρόποι δοκοῦσι τῆς ἀνελευθερίας εἶναι. Ἐν δυσὶ
γὰρ οὖσα, τῇ τ᾽ ἐλλείψει τῆς δόσεως καὶ τῇ ὑπερβολῇ τῆς λήψεως, οὐ πᾶσιν
ὁλόκληρος παραγίνεται, ἀλλ᾽ ἐνίοτε χωρίζεται, (20) καὶ οἳ μὲν τῇ λήψει
ὑπερβάλλουσιν, οἳ δὲ τῇ δόσει ἐλλείπουσιν. Οἱ μὲν γὰρ ἐν ταῖς τοιαύταις
προσηγορίαις οἷον φειδωλοὶ γλίσχροι κίμβικες, πάντες τῇ δόσει ἐλλείπουσι,
τῶν δ᾽ ἀλλοτρίων οὐκ ἐφίενται οὐδὲ βούλονται λαμβάνειν, οἳ μὲν διά τινα
ἐπιείκειαν καὶ εὐλάβειαν τῶν αἰσχρῶν (25) (δοκοῦσι γὰρ ἔνιοι ἢ φασί γε διὰ
τοῦτο φυλάττειν, ἵνα μή ποτ᾽ ἀναγκασθῶσιν αἰσχρόν τι πρᾶξαι· τούτων δὲ καὶ
ὁ κυμινοπρίστης καὶ πᾶς ὁ τοιοῦτος· ὠνόμασται δ᾽ ἀπὸ τῆς ὑπερβολῆς τοῦ
μηδὲν ἂν δοῦναι)· οἳ δ᾽ αὖ διὰ φόβον ἀπέχονται τῶν ἀλλοτρίων ὡς οὐ ῥᾴδιον
αὐτὸν μὲν τὰ ἑτέρων (30) λαμβάνειν, τὰ δ᾽ αὐτοῦ ἑτέρους μή· ἀρέσκει οὖν
αὐτοῖς τὸ μήτε λαμβάνειν μήτε διδόναι.
Οἳ δ᾽ αὖ κατὰ τὴν λῆψιν ὑπερβάλλουσι τῷ πάντοθεν λαμβάνειν καὶ πᾶν, οἷον
οἱ τὰς ἀνελευθέρους ἐργασίας ἐργαζόμενοι, πορνοβοσκοὶ καὶ πάντες οἱ
τοιοῦτοι, καὶ τοκισταὶ κατὰ μικρὰ καὶ ἐπὶ πολλῷ.
| [4,1121] (1121a) Mais, s'il arrive à l'homme libéral
de faire quelque dépense peu convenable ou déplacée, il en sera affligé sans
doute, mais sans excès, et comme il doit l'être; car le propre de la vertu, c'est de
n'être accessible au plaisir ou à la peine que pour des sujets convenables, et dans
la mesure qu'il faut. Le libéral est d'ailleurs facile en affaires d'intérêts, car il peut
souffrir même des injustices, faisant peu de cas des richesses, étant plus
susceptible d'éprouver de la peine quand il lui arrive de ne pas dépenser dans
quelque occasion où cela eût été convenable, que de s'affliger pour avoir fait
quelque dépense déplacée; sentiment tout-à-fait contraire à celui de Simonide.
Quant au prodigue, il est sujet à errer aussi à cet égard; car il n'est capable ni
d'avoir du plaisir, ni d'avoir de la peine, pour les sujets qui le méritent, ni de la
manière qui convient, comme je le ferai voir plus clairement tout à l'heure.
J'ai dit que la prodigalité et l'avarice pèchent l'une par excès, et l'autre par
défaut, sous deux rapports, donner et recevoir ; car je comprends les dépenses
sous l'idée de donner. Par conséquent, la prodigalité est excès sous le rapport de
donner et de ne pas recevoir, et elle est défaut du penchant à recevoir; l'avarice, au
contraire, est défaut sous le rapport de donner, et excès du penchant à recevoir; à
la vérité, seulement dans des occasions et en fait de choses de peu d'importance.
Ainsi donc ce qui caractérise la prodigalité, c'est de manquer, à quelques égards,
de ce qui peut l'entretenir et l'accroître ; car il est difficile de donner à tout le monde,
quand on ne reçoit d'aucun côté, attendu que ces dons continuels épuisent bientôt
la fortune des simples particuliers, qui sont surtout ceux auxquels s'applique le nom
de prodigues. Au reste, l'homme de ce caractère a une véritable supériorité sur
l'avare ; car l'âge et la détresse peuvent le corriger, et le faire revenir aux habitudes
de modération, puisqu'il a plusieurs des dispositions du libéral, celle de donner et
celle de ne pas être avide de recevoir, ou de prendre : seulement il ne les exerce ni
comme il convient, ni d'une manière conforme à la raison. Si donc il parvient à
prendre ces habitudes raisonnables, ou à se modifier de quelque manière que ce
soit, il pourra devenir libéral; car alors il donnera avec discernement, et il saura ne
pas prendre où il ne faut pas. Aussi ne regarde-t-on pas ordinairement le prodigue
comme un homme méprisable; car dans le penchant excessif à donner et à ne pas
recevoir, il n'y a ni bassesse, ni perversité; il n'y a que de la duperie. Celui donc qui
est prodigue de cette manière, passe généralement pour meilleur que l'avare, par
les raisons que je viens de dire, et aussi parce qu'il rend service à beaucoup de
gens, tandis que l'avare n'en rend à personne, et n'est pas même utile à lui-même.
Cependant, la plupart des prodigues finissent, comme je l'ai dit, par se procurer
de l'argent par des moyens répréhensibles, et, en cela, ils deviennent des hommes
illibéraux. Le désir de continuer leurs dépenses, et la difficulté d'y pourvoir, les rend
avides, parce qu'ils ont bientôt dissipé leur fortune. Ils sont donc forcés de se
procurer d'autres ressources; (1121b) et, comme ils ne se soucient guère de
l'honneur, ils prennent de toutes parts et sans réflexion, parce qu'ils ne songent
qu'à satisfaire leur penchant à donner, et qu'il leur importe peu de savoir comment
et d'où ils s'en procureront les moyens. Voilà pourquoi leurs dons ne sont point
l'effet d'une véritable libéralité ; car il n'y a rien d'honorable ni dans leurs motifs, ni
dans la manière dont ils donnent. Souvent, au contraire, ils enrichissent des gens
qu'il aurait fallu laisser dans la pauvreté, tandis qu'ils ne donnent rien à ceux qui ont
des mœurs et un caractère estimables, et qu'ils prodiguent leur fortune à des
flatteurs, ou à ceux qui leur procurent quelque autre genre de plaisirs. Aussi la
plupart d'entre eux tombent -ils dans le vice et la débauche, parce qu'étant
disposés à dépenser facilement leur argent, ils l'emploient aussi aux voluptés, et,
faute de savoir vivre honorablement, ils finissent par donner dans tous les
désordres. Tel est donc le degré d'avilissement où tombe le prodigue, quand il est
devenu incapable de se laisser conduire; cependant, avec des soins et de sages
conseils, il peut encore revenir à la modération et rentrer dans le devoir.
L'avarice, au contraire, est incurable, parce que ce vice semble appartenir
plutôt à la vieillesse et à tous les genres de faiblesse et d'imbécillité, et qu'il est
plus dans notre nature que la prodigalité, car les hommes sont plus généralement
disposés à aimer l'argent qu'à en donner. Cette passion est même susceptible de
prendre beaucoup d'intensité et des formes très diverses; et il semble qu'il y a, en
effet, plusieurs sortes d'avarice. Car, comme elle renferme deux conditions, le
défaut de facilité à donner, et le penchant excessif à recevoir ou à
prendre, ce double caractère ne se trouve pas toujours dans un même individu;
mais il se partage quelquefois, de manière que l'on peut remarquer chez les uns
l'excès de l'avidité, tandis que chez d'autres c'est plutôt le défaut du penchant à
donner : aussi y a-t-il des noms particuliers pour désigner les hommes de ce
caractère, comme avare, chiche, ladre, tous termes qui expriment le même défaut,
et qui se disent de gens qu'on ne saurait accuser de vouloir prendre le bien d'autrui;
les uns, par un certain esprit de justice, ou par un sentiment d'honneur, puisqu'il y
en a même qui semblent ne conserver si soigneusement leur argent que pour n'être
pas forcés de faire quelque chose de honteux, ou du moins ils le disent. C'est
encore dans cette classe qu'il faut ranger l'homme d'une économie sordide, et, en
général, ceux qu'on désigne par des noms qui tous expriment l'éloignement
invincible à donner. Les autres ne s'abstiennent du bien d'autrui que par crainte,
parce que, quand ou prend le bien des autres, il est difficile qu'ils ne cherchent pas,
à leur tour, à vous prendre le vôtre; ils adoptent donc pour maxime qu'il ne faut ni
prendre, ni donner.
Il y en a d'autres, au contraire, qui sont caractérisés par un penchant excessif à
prendre tout et de toutes mains, comme ceux qui exercent des professions
illibérales; ceux qui se font entremetteurs d'infâmes intrigues, et les usuriers, et, en
général, ceux qui mettent un prix considérable aux plus petits services;
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