[110] Ὅλως δ' οἶμαι τότε δεῖν τοὺς ἑτέρων ἐπαινεῖν τρόπους καὶ ἔθη τοῖς
ὑμετέροις ἐπιτιμῶντας, ὅταν ᾖ δεῖξαι βέλτιον ἐκείνους πράττοντας ὑμῶν. Ὅτε
δ' ὑμεῖς, καλῶς ποιοῦντες, καὶ κατὰ τὰς κοινὰς πράξεις καὶ κατὰ τὴν
ὁμόνοιαν καὶ κατὰ τἄλλα πάντ' ἄμεινον ἐκείνων πράττετε, τοῦ χάριν ἂν τῶν
ὑμετέρων αὐτῶν ἐθῶν ὀλιγωροῦντες ἐκεῖνα διώκοιτε; Εἰ γὰρ καὶ κατὰ τὸν
λογισμὸν ἐκεῖνα φανείη βελτίω, τῆς γε τύχης ἕνεχ' ᾗ παρὰ ταῦτ' ἀγαθῇ
κέχρησθε, ἐπὶ τούτων ἄξιον μεῖναι. (111) Εἰ δὲ δεῖ παρὰ πάντα ταῦτ' εἰπεῖν
ὃ δίκαιον ἡγοῦμαι, ἐκεῖν' ἂν ἔγωγ' εἴποιμι. Οὐκ ἔστι δίκαιον, ὦ ἄνδρες
Ἀθηναῖοι, τοὺς Λακεδαιμονίων νόμους οὐδὲ τοὺς Θηβαίων λέγειν ἐπὶ τῷ τοὺς
ἐνθάδε λυμαίνεσθαι, οὐδὲ δι' ὧν μὲν ἐκεῖνοι μεγάλοι τῆς ὀλιγαρχίας καὶ
δεσποτείας εἰσί, κἂν ἀποκτεῖναι βούλεσθαι τὸν παρ' ἡμῖν τούτων τι
κατασκευάσαντα, διὰ δ' ὧν ὁ παρ' ἡμῖν δῆμος εὐδαίμων, ταῦθ' ὡς ἀνελεῖν δεῖ
λεγόντων τινῶν ἐθέλειν ἀκούειν.
(112) Ἔστι τοίνυν τις πρόχειρος λόγος, ὡς ἄρα καὶ παρ' ἡμῖν ἐπὶ τῶν
προγόνων πόλλ' ἀγάθ' εἰργασμένοι τινὲς οὐδενὸς ἠξιοῦντο τοιούτου, ἀλλ'
ἀγαπητῶς ἐπιγράμματος ἐν τοῖς Ἑρμαῖς ἔτυχον· καὶ ἴσως τοῦθ' ὑμῖν
ἀναγνώσεται τοὐπίγραμμα. Ἐγὼ δ' ἡγοῦμαι τοῦτον τὸν λόγον, ὦ ἄνδρες
Ἀθηναῖοι, κατὰ πόλλ' ἀσύμφορον εἶναι τῇ πόλει λέγεσθαι, πρὸς δὲ καὶ οὐδὲ
δίκαιον. (113) Εἰ μὲν γὰρ ἀναξίους εἶναί τις φήσει κἀκείνους τιμᾶσθαι, τίς
ἄξιος, εἰπάτω, εἰ μήτε τῶν προτέρων μηδεὶς μήτε τῶν ὑστέρων· εἰ δὲ μηδένα
φήσει, συναχθεσθείην ἂν ἔγωγε τῇ πόλει, εἰ μηδεὶς ἐν ἅπαντι τῷ χρόνῳ
γέγον' ἄξιος εὖ παθεῖν. Καὶ μὴν εἴ γ' ὁμολογῶν ἐκείνους εἶναι σπουδαίους
μὴ τετυχηκότας δείξει μηδενός, τῆς πόλεως ὡς ἀχαρίστου δήπου κατηγορεῖ.
Ἔστι δ' οὐχ οὕτω ταῦτ' ἔχοντα, οὐδ' ὀλίγου δεῖ· ἀλλ' ἐπειδάν τις οἶμαι
κακουργῶν ἐπὶ μὴ προσήκοντα πράγματα τοὺς λόγους μετα φέρῃ, δυσχερεῖς
ἀνάγκη φαίνεσθαι. (114) Ὡς δὲ τἀληθές τ' ἔχει καὶ δίκαιόν ἐστι λέγειν, ἐγὼ
πρὸς ὑμᾶς ἐρῶ. Ἦσαν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, πολλοὶ τῶν πρότερον σπουδαῖοι, καὶ
ἡ πόλις ἡμῶν ἐτίμα καὶ τότε τοὺς ἀγαθούς· αἱ μέντοι τιμαὶ καὶ τἄλλα πάντα
τὰ μὲν τότ' ἦν ἐπὶ τοῖς τότ' ἔθεσιν, τὰ δὲ νῦν ἐπὶ τοῖς νῦν. Πρὸς οὖν τί
τοῦτο λέγω; Ὅτι φήσαιμ' ἂν ἔγωγ' ἐκείνους οὐκ ἔσθ' ὅτου παρὰ τῆς πόλεως οὐ
τυχεῖν ὧν ἐβουλήθησαν. (115) Τίνι χρώμενος τεκμηρίῳ; Ὅτι Λυσιμάχῳ δωρειάν,
ἑνὶ τῶν τότε χρησίμων, ἑκατὸν μὲν ἐν Εὐβοίᾳ πλέθρα γῆς πεφυτευμένης
ἔδοσαν, ἑκατὸν δὲ ψιλῆς, ἔτι δ' ἀργυρίου μνᾶς ἑκατόν, καὶ τέτταρας τῆς
ἡμέρας δραχμάς. Καὶ τούτων ψήφισμ' ἔστιν Ἀλκιβιάδου, ἐν ᾧ ταῦτα γέγραπται.
Τότε μὲν γὰρ ἡ πόλις ἡμῶν καὶ γῆς ηὐπόρει καὶ χρημάτων, νῦν δ' εὐπορήσει·
δεῖ γὰρ οὕτω λέγειν καὶ μὴ βλασφημεῖν. Καίτοι τίν' οὐκ ἂν ῎οἴεσθε νῦν τὸ
τρίτον μέρος τούτων ἀντὶ τῆς ἀτελείας ἑλέσθαι; Ὅτι τοίνυν ἀληθῆ λέγω, λαβέ
μοι τὸ ψήφισμα τουτί.
ΨΗΦΙΣΜΑ.
(116) Ὅτι μὲν τοίνυν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, καὶ τοῖς προγόνοις ὑμῶν ἔθος ἦν
τοὺς χρηστοὺς τιμᾶν, δηλοῖ τὸ ψήφισμα τουτί· εἰ δὲ μὴ τοῖς αὐτοῖς οἷσπερ
ἡμεῖς νῦν, ἕτερόν τι τοῦτ' ἂν εἴη. Εἰ τοίνυν μήτε Λυσίμαχον μήτ' ἄλλον
μηδένα μηδὲν εὑρῆσθαι παρὰ τῶν προγόνων ἡμῶν συγχωρήσαιμεν, τί μᾶλλον,
οἷς ἔδομεν νῦν ἡμεῖς, διὰ τοῦτο δικαίως ἂν ἀφαιρε θεῖεν; (117) Οὐ γὰρ οἱ μὴ
δόντες ἃ μὴ 'δόκει δεινόν εἰσιν οὐδὲν εἰργασμένοι, ἀλλ' οἱ δόντες μέν,
πάλιν δ' ὕστερον μηδὲν ἐγκαλοῦντες ἀφαιρούμενοι. Εἰ μὲν γάρ τις ἔχει
δεῖξαι κἀκείνους ὧν ἔδοσάν τῴ τι, τοῦτ' ἀφῃρημένους, συγχωρῶ καὶ ὑμᾶς
ταὐτὸ τοῦτο ποιῆσαι, καίτοι τοῦτό γ' αἰσχρὸν ὁμοίως· εἰ δὲ μηδ' ἂν εἷς ἐν
ἅπαντι τῷ χρόνῳ τοῦτ' ἔχοι δεῖξαι γεγονός, τίνος εἵνεκ' ἐφ' ἡμῶν πρώτων
καταδειχθῇ τοιοῦτον ἔργον;
(118) Χρὴ τοίνυν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, κἀκεῖν' ἐνθυμεῖσθαι καὶ ὁρᾶν, ὅτι νῦν
ὀμωμοκότες κατὰ τοὺς νόμους δικάσειν ἥκετε, οὐχὶ τοὺς Λακεδαιμονίων οὐδὲ
Θηβαίων, οὐδ' οἷς ποτ' ἐχρήσανθ' οἱ πρῶτοι τῶν προγόνων, ἀλλὰ καθ' οὓς
ἔλαβον τὰς ἀτελείας οὓς ἀφαιρεῖται νῦν οὗτος τῷ νόμῳ, καὶ περὶ ὧν ἂν νόμοι
μὴ ὦσι, γνώμῃ τῇ δικαιοτάτῃ κρινεῖν. Καλῶς. Τὸ τοίνυν τῆς γνώμης πρὸς
ἅπαντ' ἀνενέγκατε τὸν νόμον. (119) Ἆρ' οὖν δίκαιον, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι,
τοὺς εὐεργέτας τιμᾶν; Δίκαιον. Τί δέ; Ὃσ' ἂν δῷ τις ἅπαξ, δίκαιον ἔχειν
ἐᾶν; Δίκαιον. Ταῦτα τοίνυν αὐτοί τε ποιεῖτε, ἵν' εὐορκῆτε, καὶ τοὺς
προγόνους ὀργίζεσθ' ἂν μή τις φῇ ποιεῖν, καὶ τοὺς τὰ τοιαῦτα λέγοντας
παραδείγματα, ὡς ἄρ' ἐκεῖνοι μεγάλ' εὖ παθόντες οὐδέν' ἐτίμησαν, καὶ
πονηροὺς καὶ ἀπαιδεύτους ἡγεῖσθ' εἶναι, πονηροὺς μὲν διότι καταψεύδονται
τῶν προγόνων ὑμῶν ὡς ἀχαρίστων, ἀμαθεῖς δὲ διότι ἐκεῖν' ἀγνοοῦσιν, ὅτι εἰ
τὰ μάλιστα ταῦθ' οὕτως εἶχεν, ἀρνεῖσθαι μᾶλλον ἢ λέγειν αὐτοῖς προσῆκεν.
| [110] En général, on ne doit louer les mœurs et les usages des autres
peuples, en critiquant les vôtres, qu'à une condition : c'est de prouver
qu'ailleurs on se trouve mieux qu'ici. Mais, par bonheur, au point de vue
de l'action commune et de l'union, comme à tout autre point de vue, les
choses vont mieux chez vous qu'ailleurs. Dès lors, pourquoi rejeter vos
propres usages pour en aller chercher d'autres si loin? Je veux qu'à la
réflexion, ces derniers paraissent meilleurs; toujours est-il que vous
avez prospéré en suivant les vôtres; c'est une raison pour vous y tenir.
(111) Et si, après tout cela, il faut encore vous dire ce qui me paraît
juste, je puis ajouter ceci : Il n'est pas juste, Athéniens, de citer les
lois des Lacédémoniens, ni celles des Thébains, pour rabaisser les nôtres;
d'aller jusqu'à mettre à mort quiconque introduit chez nous ce qui fait la
grandeur de nos voisins, et d'écouter volontiers les conseils qu'on vous
donne de supprimer ce qui a fait la prospérité de notre peuple.
(112) Il y a encore un autre argument qui se présente en quelque sorte de
lui-même. On vous dira que, même chez nous, du temps de nos ancêtres,
plusieurs ont rendu de grands services et n'ont reçu aucune récompense de
ce genre, qu'à grande peine ils ont obtenu une inscription aux Hermès,
et peut-être on vous lira cette inscription. A mon avis, Athéniens,
cet argument est fâcheux pour notre ville, à beaucoup d'égards. J'ajoute
qu'il n'est pas juste. (113) Car si l'on prétend que ceux-là aussi étaient
indignes, qu'on me dise alors qui est digne, puisqu'il ne s'en trouve pas
un seul, ni des hommes d'autrefois ni de ceux d'aujourd'hui ; et si l'on
dit qu'il n'y en a pas un seul, alors je plains cette ville si, durant
tout ce temps, personne ne s'est rendu digne de reconnaissance. Aussi bien
si l'on convient que ces hommes ont été dévoués, montrer qu'ils n'ont rien
obtenu, c'est accuser par là même notre ville d'ingratitude. Mais il n'en
est pas ainsi, non, à beaucoup près. Seulement quand, de mauvaise foi, on
détourne la discussion sur des choses qui n'y ont aucun rapport, on dit
forcément des énormités. (114) Ce qui est vrai, ce qu'on a le droit de
dire, je vous le dirai, moi. Chez les hommes d'autrefois, Athéniens, le
dévouement n'était pas rare, et alors aussi notre ville honorait la vertu.
Mais les honneurs et toutes les récompenses qu'on décernait alors étaient
conformes aux moeurs d'alors ; celles qu'on décerne aujourd'hui sont
conformes aux moeurs d'aujourd'hui. (115) A quoi tend mon raisonnement? A
ceci : je pourrais affirmer que notre ville n'a refusé à ces hommes rien
de ce qu'ils ont voulu. Quelle preuve puis-je en donner? Écoutez. Nos
pères ont donné à Lysimaque, un de ceux qui les avaient bien servis
alors, cent plèthres de terrain planté en Eubée, et cent de terre
labourable, de plus cent mines d'argent et quatre drachmes par jour. Il y
a un décret, rédigé par Alcibiade, dans lequel tout cela est écrit. Il est
vrai qu'alors notre ville était riche en terres et en argent. et
qu'aujourd'hui... elle le sera, car il faut parler ainsi et ne rien dire
de pénible. Eh bien, je vous le demande, qui ne consentirait à recevoir le
tiers seulement d'un pareil don, au lieu de l'immunité ? Pour prouver que
je dis vrai, prends-moi le décret que voici : DÉCRET.
(116) Ainsi, Athéniens, vos ancêtres aussi étaient dans l'usage de
récompenser les bons. C'est ce qui résulte de ce décret. Le faisaient-ils
de la même manière que nous? C'est une autre question. Au surplus,
concédons, si l'on veut, que ni Lysimaque ni aucun autre n'ont rien obtenu
de nos ancêtres. Suivrait-il de là que nous fissions une chose juste en
dépouillant ceux à qui nous avons donné? (117) Ceux qui n'ont pas donné
parce qu'ils n'ont pas jugé à propos de le faire n'ont encouru aucun
blâme, mais il en est autrement de ceux qui ont donné et ensuite repris,
sans raison. Car si l'un peut me prouver que vos ancêtres aussi ont repris
la moindre partie de ce qu'ils avaient donné, alors faites de même, j'y
consens, quoique après tout la honte soit égale. Mais si, dans tout cet
espace de temps, on ne trouve pas à citer un seul exemple du fait,
pourquoi veut-on nous faire prendre l'initiative de cette mauvaise action ?
(118) Il faut encore, Athéniens, vous mettre dans l'esprit et considérer
ceci : Vous avez prêté serment, en venant ici, de juger suivant les lois,
non pas celles des Lacédémoniens ni des Thébains, ni celles dont usaient
nos ancêtres les plus reculés, mais celles sous lesquelles ont été
conférées les immunités que Leptine retire aujourd'hui par sa loi; et
quant aux choses sur lesquelles il n'y aurait pas de lois, vous avez
promis de décider ce qui vous paraîtrait le plus juste. Cela est bien.
Appliquez donc cette règle à la loi de Leptine tout entière. (119) Est-il
juste, Athéniens, d'honorer ses bienfaiteurs? Oui. Et lorsqu'une fois on a
donné, est-il juste de laisser le donataire en possession ? Oui encore. Eh
bien donc, faites cela, si vous voulez tenir votre serment; fâchez-vous
si l'on vous dit que vos ancêtres ont fait autrement. On invoque à faux
des exemples du passé; vos ancêtres, dit-on, auraient reçu des services et
n'auraient jamais récompensé personne! Eh bien, regardez ceux qui tiennent
ce langage comme des menteurs et des malappris, menteurs parce qu'ils
calomnient nos ancêtres en parlant de leur ingratitude, malappris parce
qu'ils ignorent que, l'imputation fût-elle vraie, leur devoir serait de la
combattre et non de la soutenir.
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