[50] Τῶν γὰρ ἀνθρώπων οἱ πλεῖστοι κτῶνται μὲν τἀγαθὰ
τῷ καλῶς βουλεύεσθαι καὶ μηδενὸς καταφρονεῖν, φυλάττειν δ' οὐκ ἐθέλουσι
τοῖς αὐτοῖς τούτοις. Ὃ μὴ πάθητε νῦν ὑμεῖς, μηδ' οἴεσθε νόμον τοιοῦτον
θέσθαι δεῖν, ὃς καλῶς τε πράττουσαν τὴν πόλιν ἡμῶν πονηρᾶς δόξης ἀναπλήσει,
ἐάν τέ τι συμβῇ ποτέ, ἔρημον τῶν ἐθελησόντων ἀγαθόν τι ποιεῖν καταστήσει.
(51) Οὐ τοίνυν μόνον, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, τοὺς ἰδίᾳ γνόντας εὖ ποιεῖν ὑμᾶς
καὶ παρασχόντας χρησίμους αὑτοὺς ἐπὶ τηλικούτων καὶ τοιούτων καιρῶν, οἵων
μικρῷ πρότερον Φορμίων διεξελήλυθε κἀγὼ νῦν εἴρηκα, ἄξιόν ἐστιν
εὐλαβηθῆναι ἀδικῆσαι, ἀλλὰ καὶ πολλοὺς ἄλλους, οἳ πόλεις ὅλας, τὰς ἑαυτῶν
πατρίδας, συμμάχους ὑμῖν ἐπὶ τοῦ πρὸς Λακεδαιμονίους πολέμου παρέσχον, καὶ
λέγοντες ἃ συμφέρει τῇ πόλει τῇ ὑμετέρᾳ καὶ πράττοντες· ὧν ἔνιοι διὰ τὴν
πρὸς ὑμᾶς εὔνοιαν στέρονται τῆς πατρίδος. (52) Ὧν ἐπέρχεταί μοι πρώτους
ἐξετάσαι τοὺς ἐκ Κορίνθου φεύγοντας. Ἀναγκάζομαι δὲ λέγειν πρὸς ὑμᾶς ταῦθ'
ἃ παρ' ὑμῶν τῶν πρεσβυτέρων αὐτὸς ἀκήκοα. Τὰ μὲν οὖν ἄλλ' ὅσα χρησίμους
ὑμῖν ἑαυτοὺς ἐκεῖνοι παρέσχον, ἐάσω· ἀλλ' ὅθ' ἡ μεγάλη μάχη πρὸς
Λακεδαιμονίους ἐγένεθ' ἡ ἐν Κορίνθῳ, τῶν ἐν τῇ πόλει βουλευσαμένων μετὰ
τὴν μάχην μὴ δέχεσθαι τῷ τείχει τοὺς στρατιώτας, ἀλλὰ πρὸς Λακεδαιμονίους
ἐπικηρυκεύεσθαι, (53) ὁρῶντες ἠτυχηκυῖαν τὴν πόλιν καὶ τῆς παρόδου
κρατοῦντας Λακεδαιμονίους, οὐχὶ προὔδωκαν οὐδ' ἐβουλεύσαντ' ἰδίᾳ περὶ τῆς
αὑτῶν σωτηρίας, ἀλλὰ πλησίον ὄντων μεθ' ὅπλων ἁπάντων Πελοποννησίων
ἀνέῳξαν τὰς πύλας ὑμῖν βίᾳ τῶν πολλῶν, καὶ μᾶλλον εἵλοντο μεθ' ὑμῶν τῶν
τότε στρατευσαμένων, εἴ τι δέοι, πάσχειν ἢ χωρὶς ὑμῶν ἀκινδύνως σεσῶσθαι,
καὶ εἰσέφρουν τὸ στρά τευμα, καὶ διέσωσαν καὶ ὑμᾶς καὶ τοὺς συμμάχους.
(54) Ἐπειδὴ δ' ἡ πρὸς Λακεδαιμονίους εἰρήνη μετὰ ταῦτ' ἐγένετο, ἡ ἐπ'
Ἀνταλκίδου, ἀντὶ τῶν ἔργων τούτων ὑπὸ Λακεδαιμονίων ἐξέπεσον. Ὑποδεξάμενοι
δ' ὑμεῖς αὐτοὺς ἐποιήσατ' ἔργον ἀνθρώπων καλῶν κἀγαθῶν· ἐψηφίσασθε γὰρ
αὐτοῖς ἅπανθ' ὧν ἐδέοντο. Εἶτα ταῦτα νῦν εἰ χρὴ κύρι' εἶναι σκοποῦμεν;
Ἀλλ' ὁ λόγος πρῶτον αἰσχρὸς τοῖς σκοπουμένοις, εἴ τις ἀκούσειεν ὡς
Ἀθηναῖοι σκοποῦσιν εἰ χρὴ τοὺς εὐεργέτας ἐᾶν τὰ δοθέντ' ἔχειν· πάλαι γὰρ
ἐσκέφθαι ταῦτα καὶ ἐγνῶσθαι προσῆκεν. Ἀνάγνωθι καὶ τοῦτο τὸ ψήφισμ' αὐτοῖς.
ΨΗΦΙΣΜΑ.
(55) Ἃ μὲν ἐψηφίσασθε τοῖς φεύγουσιν δι' ὑμᾶς Κορινθίων ταῦτ' ἐστίν, ὦ
ἄνδρες δικασταί. Ὅρα δέ, εἴ τις ἐκείνους τοὺς καιροὺς εἰδὼς ἢ παρὼν ἤ
τινος εἰδότος διεξιόντος ἀκούσας, ἀκούσαι τοῦ νόμου τούτου τὰς τότε
δωρειὰς δοθείσας ἀφαιρουμένου, ὅσην ἂν κακίαν τῶν θεμένων τὸν νόμον
καταγνοίη, οἳ παρὰ μὲν τὰς χρείας οὕτω φιλάνθρωποι καὶ πάντα ποιοῦντες,
ἐπειδὴ δ' ἐπράξαμεν πάνθ' ὅσ' ἂν εὐξαίμεθα, οὕτως ἀχάριστοι καὶ κακοί,
ὥστε τούς τ' ἔχοντας ἀφῃρήμεθα καὶ τὸ λοιπὸν μηδενὶ δοῦναι ταῦτ' ἐξεῖναι
νόμον τεθήκαμεν.
(56) Νὴ Δί' ἀνάξιοι γάρ τινες τῶν εὑρημένων ταῦτ' ἦσαν· τουτὶ γὰρ παρὰ
πάντ' ἔσται τὸν λόγον αὐτοῖς. Ἔπειτ' ἐκεῖν' ἀγνοεῖν φήσομεν, ὅτι τὴν
ἀξίαν, ὅταν διδῶμεν, δεῖ σκοπεῖν, οὐ μετὰ ταῦθ' ὕστερον χρόνῳ παμπληθεῖ;
Τὸ μὲν γὰρ ἐξ ἀρχῆς τι μὴ δοῦναι γνώμῃ χρησαμένων ἔργον ἀνθρώπων ἐστί· τὸ
δὲ τοὺς ἔχοντας ἀφαιρεῖσθαι φθονούντων, τοῦτο δ' οὐ δεῖ δοκεῖν ὑμᾶς
πεπονθέναι. (57) Καὶ μὴν οὐδ' ἐκεῖν' ὀκνήσω περὶ τῆς ἀξίας αὐτῆς πρὸς ὑμᾶς
εἰπεῖν. Ἐγὼ γὰρ οὐ τὸν αὐτὸν τρόπον νομίζω πόλει τὸν ἄξιον ἐξεταστέον
εἶναι καὶ ἰδιώτῃ· οὐδὲ γὰρ περὶ τῶν αὐτῶν ἡ σκέψις. Ἰδίᾳ μὲν γὰρ ἕκαστος
ἡμῶν σκοπεῖ τίς ἄξιός ἐστιν ἑκάστου κηδεστὴς ἢ τῶν τοιούτων τι γίγνεσθαι,
ταῦτα δὲ καὶ νόμοις τισὶ καὶ δόξαις διώρισται· κοινῇ δ' ἡ πόλις καὶ ὁ
δῆμος, ὅστις ἂν αὐτὸν εὖ ποιῇ καὶ σῴζῃ, τοῦτο δ' οὐ γένει καὶ δόξῃ
κρινόμενον ἴδοι τις ἄν, ἀλλ' ἔργῳ. Ὅταν μὲν οὖν εὖ πάσχειν δέῃ, τὸν
βουλόμενον εὖ ποιεῖν ἡμᾶς ἐάσομεν, ἐπειδὰν δὲ πάθωμεν, τότε τὴν ἀξίαν τοῦ
ποιήσαντος σκεψόμεθα; Οὐκ ἄρ' ὀρθῶς βουλευσόμεθα.
(58) Ἀλλὰ νὴ Δί' οὗτοι μόνοι τοῦτο πείσονται, καὶ περὶ τούτων μόνων
ποιοῦμαι λόγον τοσοῦτον. Πολλοῦ γε καὶ δέω. Ἀλλὰ πάντας μὲν οὐδ' ἂν
ἐγχειρήσαιμ' ἐξετάζειν ὅσοι πεποιηκότες ὑμᾶς εὖ διὰ τὸν νόμον, εἰ μὴ
λυθήσεται, τὰ δοθέντ' ἀφαιρεθήσονται· ἓν δ' ἢ δύο δείξας ἔτι ψηφίσματ'
ἀπαλλάττομαι τοῦ περὶ τούτων λέγειν. (59) Τοῦτο μὲν τοίνυν Θασίους τοὺς
μετ' Ἐκφάντου πῶς οὐκ ἀδικήσετε, ἐὰν ἀφαιρῆσθε τὴν ἀτέλειαν, οἳ παραδόντες
ὑμῖν Θάσον καὶ τὴν Λακεδαιμονίων φρουρὰν μεθ' ὅπλων ἐκβαλόντες καὶ
Θρασύβουλον εἰσαγαγόντες καὶ παρασχόντες φίλην ὑμῖν τὴν αὑτῶν πατρίδα
αἴτιοι τοῦ γενέσθαι σύμμαχον τὸν περὶ Θρᾴκην τόπον ὑμῖν ἐγένοντο;
| [50] Telle est en effet la règle ordinaire.
Les biens acquis à force de conseil et de prévoyance, on ne se
décide pas à les conserver par les mêmes moyens. N'allez pas tomber dans
la même erreur, ne jugez pas à propos de confirmer une loi qui, dans la
bonne fortune sera une tache à notre gloire, et qui, au premier revers,
éloignera de nous tous les amis disposés à nous servir.
(51) Maintenant, Athéniens, ces bienfaiteurs privés, ces utiles
auxiliaires dans des circonstances aussi graves, semblables à celles dont
Phormion vous entretenait tout à l'heure, et dont je viens de vous parler
moi-même, ne sont pas les seuls dont il convienne de respecter les droits.
Il y en a d'autres, en grand nombre, qui ont mis dans votre alliance des
cités entières, leurs patries, pour faire la guerre aux Lacédémoniens,
servant par la parole et l'action les intérêts de votre ville. Plusieurs
ont payé de l'exil l'attachement qu'ils ont montré pour vous. (52) Les
premiers dont le souvenir se présente à mon esprit sont les exilés de
Corinthe. C'est une nécessité pour moi de vous répéter ce que j'ai
moi-même ouï dire à vos anciens. De tous les services que ces hommes nous
ont rendus je n'en rappellerai qu'un seul. Il remonte à la grande bataille
livrée contre les Lacédémoniens à Corinthe. On avait pris, dans la
ville, après le combat, la résolution de ne pas recevoir nos soldats, et
d'envoyer un héraut aux Lacédémoniens, (53) Athènes était battue, les
Lacédémoniens maîtres du passage. A ce moment les hommes dont je parle ne
songèrent ni à trahir, ni à pourvoir isolément à leur propre salut. En
présence de tous les Péloponnésiens assemblés en armes dans le voisinage,
ils vous ouvrirent leurs portes, malgré le plus grand nombre, aimant mieux
périr, s'il le fallait, avec votre armée, que d'assurer, en se séparant de
vous, leur sécurité et leur salut. Ils reçurent vos troupes dans leurs
murs et sauvèrent ainsi vous et vos alliés. (54) Mais ensuite, lorsque fut
conclue avec Lacédémone la paix d'Antalcidas, ils furent, à raison de ce
fait, exilés par les Lacédémoniens. En leur donnant asile vous vous êtes
conduits en gens d'honneur. Vous leur avez donné par décret tout ce qu'ils
vous ont demandé. Et après cela nous examinons s'il faut que ce décret
subsiste! Combien cette discussion paraîtra honteuse à ceux qui nous
regardent, s'ils voient les Athéniens examiner cette question : Faut-il
laisser les bienfaiteurs de la ville en possession des avantages qui leur
ont été conférés? Il y a longtemps que cette question doit être examinée
et résolue. Lis encore ce décret aux juges. DÉCRET.
(55) Voilà, juges, ce que vous avez décrété en faveur des Corinthiens
exilés à cause de vous. Eh bien, Athéniens, figurez-vous un homme ayant vu
ce temps-là, ayant assisté à l'événement, ou l'ayant connu par le récit
d'un témoin ; représentez-vous cet homme apprenant l'existence de la
présente loi qui retire les récompenses conférées alors. Quel ne serait
pas son mépris pour les auteurs de cette loi, si généreux dans le besoin
et si empressés à tout faire, mais, après le succès obtenu, assez ingrats
et assez vils pour reprendre la chose donnée et défendre par une loi de
donner jamais la même chose à l'avenir?
(56) Vous me direz : « Mais parmi les récompensés il se trouvait des
indignes. » C'est en effet l'argument qui reviendra dans toute leur
défense. Nous ignorons donc, de notre propre aveu, que c'est au moment où
l'on donne, et non longtemps après, qu'on doit examiner si le don est
mérité. Prendre tout d'abord la résolution de ne pas donner est le fait
d'hommes qui ont du jugement et qui s'en servent; retirer ce qu'on a donné
est le fait d'envieux. Il ne faut pas qu'on puisse vous soupçonner de
l'être. (57) Et même, en ce qui concerne le mérite, je n'hésite pas à vous
dire ceci: ce n'est pas de la même manière que l'État et un particulier
doivent s'y prendre, à mon avis, pour examiner ce point. La question, en
effet, n'est pas la même. Comme particuliers, nous examinons si un homme
est digne de devenir notre gendre ou de contracter une alliance avec nous.
Il y a certaines lois et certains usages qui nous dirigent dans ce
jugement. Mais lorsque l'État et le peuple, agissant au nom de tous,
distinguent un bienfaiteur et un sauveur, ce n'est pas à sa naissance ni à
sa réputation qu'ils le reconnaissent, c'est à ses actes. Voulez-vous donc
qu'au jour du besoin nous nous laissions rendre service par tout le monde,
et qu'après le service reçu nous commencions à examiner le mérite de notre
bienfaiteur ? Non, ce n'est pas ainsi qu'on doit procéder.
(58) Mais, dira-t-on, les exilés de Corinthe seront seuls à souffrir, et
je fais là un bien long discours pour eux seuls. Il s'en faut de beaucoup,
Athéniens. Je n'entreprendrai pas de rechercher tous ceux qui vous ont
rendu service et qui, par le fait de cette loi, si elle n'est pas annulée,
perdront leur récompense; mais je vais vous montrer encore un ou deux
décrets, après quoi je vous parlerai d'autre chose. (59) En premier lieu,
ne commettrez-vous pas une injustice si vous retirez l'immunité aux
Thasiens, amis d'Ecphantos, qui, en vous livrant Thasos, en chassant à
main armée la garnison lacédémonienne, en recevant Thrasybule et en vous
procurant l'amitié de leur patrie, ont été cause que toute la côte de
Thrace est entrée dans votre alliance ?
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