[150] Καὶ μὴν πρός γε Κηφισόδοτον τοσοῦτ' ἂν εἴποιμι. Οὗτός ἐστιν οὐδενὸς ἧττον,
ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, τῶν λεγόντων δεινὸς εἰπεῖν. Πολὺ τοίνυν κάλλιον τῇ
δεινότητι ταύτῃ χρῆσθαι ἐπὶ τὸ τοὺς ἀδικοῦντας ὑμᾶς κολάζειν ἢ τοὺς ἀγαθοῦ
τινὸς αἰτίους ἀδικεῖν. Εἰ γὰρ ἀπεχθάνεσθαί τισι δεῖ, τοῖς ἀδικοῦσι τὸν
δῆμον, οὐ τοῖς ἀγαθόν τι ποιοῦσιν ἔγωγε νομίζω δεῖν. (151) Πρὸς τοίνυν
Δεινίαν· οὗτος ἴσως ἐρεῖ τριηραρχίας αὑτοῦ καὶ λῃτουργίας. Ἐγὼ δ', εἰ
πολλοῦ τῇ πόλει Δεινίας ἄξιον αὑτὸν παρέσχηκεν, ὡς ἔμοιγε δοκεῖ νὴ τοὺς
θεούς, μᾶλλον ἂν παραινέσαιμ' αὑτῷ τινὰ τιμὴν ὑμᾶς ἀξιοῦν δοῦναι ἢ τὰς
ἑτέροις πρότερον δοθείσας ἀφελέσθαι κελεύειν· πολὺ γὰρ βελτίονος ἀνδρός
ἐστιν ἐφ' οἷς αὐτὸς εὖ πεποίηκεν ἀξιοῦν τιμᾶσθαι ἢ ἐφ' οἷς ἕτεροι
ποιήσαντες ἐτιμήθησαν φθονεῖν. (152) Ὃ δὲ δὴ μέγιστον ἁπάντων καὶ κοινὸν
ὑπάρχει κατὰ πάντων τῶν συνδίκων· τούτων πολλάκις εἷς ἕκαστος πρότερόν
τισι πράγμασι σύνδικος γέγονεν. Ἐστι δὲ καὶ μάλ' ἔχων νόμος ὑμῖν καλῶς,
οὐκ ἐπὶ τούτοις τεθείς, ἀλλ' ἵνα μὴ τὸ πρᾶγμ' ὥσπερ ἐργασία τισὶν ᾖ καὶ
συκοφαντία, μὴ ἐξεῖναι ὑπὸ τοῦ δήμου χειροτονηθέντα πλεῖν ἢ ἅπαξ
συνδικῆσαι. (153) Τοὺς δὴ συνεροῦντας νόμῳ καὶ διδάξοντας ὑμᾶς ὡς
ἐπιτήδειός ἐστιν, αὐτοὺς τοῖς ὑπάρχουσι νόμοις δεῖ πειθομένους φαίνεσθαι·
εἰ δὲ μή, γελοῖον νόμῳ μὲν συνδικεῖν, νόμον δ' αὐτοὺς παραβαίνειν ἕτερον.
Ἀνάγνωθι λαβὼν τὸν νόμον αὐτοῖς ὃν λέγω.
ΝΟΜΟΣ.
Οὗτος, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, καὶ παλαιός ἐσθ' ὁ νόμος καὶ καλῶς ἔχων, ὃν ἐὰν
σωφρονῶσι φυλάξονται παραβαίνειν οὗτοι.
(154) Ἐγὼ δ' ἔτι μικρὰ πρὸς ὑμᾶς εἰπὼν καταβήσομαι. Ἔστι γάρ, ὦ ἄνδρες
Ἀθηναῖοι, πάντας μὲν τοὺς νόμους ὑμῖν, ὡς ἐγὼ νομίζω, σπουδαστέον ὡς
κάλλιστ' ἔχειν, μάλιστα δὲ τούτους δι' ὧν ἢ μικρὰν ἢ μεγάλην ἔστ' εἶναι
τὴν πόλιν. Εἰσὶ δ' οὗτοι τίνες; Οἵ τε τοῖς ἀγαθόν τι ποιοῦσι τὰς τιμὰς
διδόντες καὶ οἱ τοῖς τἀναντία πράττουσι τὰς τιμωρίας. Εἰ γὰρ ἅπαντες ὡς
ἀληθῶς τὰς ἐν τοῖς νόμοις ζημίας φοβούμενοι τοῦ κακόν τι ποιεῖν ἀποσταῖεν,
καὶ πάντες τὰς ἐπὶ ταῖς εὐεργεσίαις δωρειὰς ζηλώσαντες ἃ χρὴ πράττειν
προέλοιντο, τί κωλύει μεγίστην εἶναι τὴν πόλιν καὶ πάντας χρηστοὺς καὶ
μηδέν' εἶναι πονηρόν;
(155) Ὁ τοίνυν νόμος οὗτος ὁ Λεπτίνου, οὐ μόνον, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, τοῦτ'
ἀδικεῖ, ὅτι τὰς τιμὰς ἀναιρῶν τῶν εὐεργεσιῶν ἀχρεῖον τὴν ἐπιείκειαν τοῖς
φιλοτιμεῖσθαι βουλομένοις καθίστησιν, ἀλλ' ὅτι καὶ παρανομίας δόξαν
αἰσχίστην τῇ πόλει καταλείπει. Ἴστε γὰρ δήπου τοῦθ' ὅτι τῶν τὰ δεινόταθ'
ἡμᾶς ἀδικούντων ἓν ἑκάστῳ τίμημ' ὑπάρχει διὰ τὸν νόμον, ὃς διαρρήδην λέγει
« Μηδὲ ὡς χρὴ τίμημ' ὑπάρχειν ἐπὶ κρίσει πλέον ἢ ἕν, ὁπότερον ἂν τὸ
δικαστήριον τιμήσῃ, παθεῖν ἢ ἀποτεῖσαι· ἀμφότερα δὲ μὴ ἐξέστω. » (156)
Ἀλλ' οὐχ οὗτος ἐχρήσατο τούτῳ τῷ μέτρῳ, ἀλλ' ἐάν τις ἀπαιτήσῃ χάριν ὑμᾶς,
« Ἄτιμος ἔστω » φησὶ « καὶ ἡ οὐσία δημοσία ἔστω. » Δύο τιμήματα ταῦτα. «
Εἶναι δὲ καὶ ἐνδείξεις καὶ ἀπαγωγάς· ἐὰν δ' ἁλῷ, ἔνοχος ἔστω τῷ νόμῳ ὃς
κεῖται, ἐάν τις ὀφείλων ἄρχῃ τῷ δημοσίῳ. » Θάνατον λέγει· τοῦτο γάρ ἐστ'
ἐπ' ἐκείνῳ τοὐπιτίμιον. Οὐκοῦν τρία τιμήματα ταῦτα. Πῶς οὖν οὐ σχέτλιον
καὶ δεινόν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, εἰ χαλεπώτερον εἶναι παρ' ὑμῖν δόξει χάριν
εὖ ποιήσαντ' ἀπαιτεῖν ἢ τὰ δεινότατ' ἐργαζόμενον ληφθῆναι;
(157) Αἰσχρός, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, καὶ κακῶς ἔχων ὁ νόμος, καὶ ὅμοιος φθόνῳ
τινὶ καὶ φιλονικίᾳ καὶ τὸ λοιπὸν ἐῶ· τοιούτοις δέ τισιν προσέοιχ' ὁ γράφων
χρῆσθαι. Ὑμῖν δ' οὐχὶ πρέπει τὰ τοιαῦτα μιμεῖσθαι, οὐδ' ἀνάξια φαίνεσθαι
φρονοῦντας ὑμῶν αὐτῶν. Φέρε γὰρ πρὸς Διός, τί μάλιστ' ἂν ἀπευξαίμεθα
πάντες, καὶ τί μάλιστ' ἐν ἅπασι διεσπούδασται τοῖς νόμοις; Ὅπως μὴ
γενήσονται οἱ περὶ ἀλλήλους φόνοι, περὶ ὧν ἐξαίρετος ἡ βουλὴ φύλαξ ἡ ἐν
Ἀρείῳ πάγῳ τέτακται. (158) Ἐν τοίνυν τοῖς περὶ τούτων νόμοις ὁ Δράκων
φοβερὸν κατασκευάζων καὶ δεινὸν τό τιν' αὐτόχειρ' ἄλλον ἄλλου γίγνεσθαι,
καὶ γράφων χέρνιβος εἴργεσθαι τὸν ἀνδροφόνον, σπονδῶν, κρατήρων, ἱερῶν,
ἀγορᾶς, πάντα τἄλλα διελθὼν οἷς μάλιστ' ἄν τινας ᾤετ' ἐπισχεῖν τοῦ
τοιοῦτόν τι ποιεῖν, ὅμως οὐκ ἀφείλετο τὴν τοῦ δικαίου τάξιν, ἀλλ' ἔθηκεν
ἐφ' οἷς ἐξεῖναι ἀποκτιννύναι, κἂν οὕτω τις δράσῃ, καθαρὸν διώρισεν εἶναι.
Εἶτ' ἀποκτεῖναι μὲν δικαίως ἔν γε τοῖς παρ' ὑμῖν νόμοις ἐξέσται, χάριν δ'
ἀπαιτεῖν οὔτε δικαίως οὔθ' ὁπωσοῦν διὰ τὸν τούτου νόμον; (159) Μηδαμῶς, ὦ
ἄνδρες Ἀθηναῖοι· μὴ βούλεσθε δοκεῖν πλείω πεποιῆσθαι σπουδὴν ὅπως μηδενὶ
τῶν εὖ τι ποιούντων ὑμᾶς χάριν ἐξέσται κομίσασθαι ἢ ὅπως μηδεὶς φόνος ἐν
τῇ πόλει γενήσεται· ἀλλ' ἀναμνησθέντες τῶν καιρῶν, παρ' οὓς εὖ πεπονθότες
εὖ πεποιήκατε τοὺς εὑρομένους, καὶ τῆς Δημοφάντου στήλης περὶ ἧς εἶπε
Φορμίων, ἐν ᾗ γέγραπται καὶ ὀμώμοται, ἄν τις ἀμύνων τι πάθῃ τῇ δημοκρατίᾳ,
τὰς αὐτὰς δώσειν δωρειὰς ἅσπερ Ἁρμοδίῳ καὶ Ἀριστογείτονι, | [150] J'en puis dire tout autant de Képhisodote. Celui-là, Athéniens, ne le cède
à personne pour le talent de manier la parole. Eh bien, il vaut beaucoup mieux
employer ce talent à punir ceux qui vous font du mal, qu'à faire du mal à
ceux qui vous ont rendu service. Car s'il faut avoir des ennemis, on doit
choisir, à mon avis du moins, ceux qui font du mal au peuple et non ceux
qui lui font du bien. (151) J'arrive enfin à Dinias. Celui-là vous parlera
peut-être de ses triérarchies et de ses liturgies. Mais si Dinias a bien
mérité de notre ville, comme je le crois moi-même, j'en atteste les dieux,
je l'engagerais plutôt à vous demander une récompense qu'à proposer de
reprendre celles qui ont déjà été données à d'autres. Car il vaut
infiniment mieux demander une récompense pour les services qu'on a
soi-même rendus, que de porter envie aux honneurs obtenus par d'autres
pour les services rendus par eux. (152) Mais l'objection la plus forte est
celle-ci, qui s'adresse à tous les défenseurs de la loi en général. Déjà
plusieurs fois chacun d'eux a été chargé du même rôle dans cetaines
affaires. Or, il y a chez vous une loi excellente, non pas faite contre
eux, mais pour empêcher que cette défense des lois ne tourne en métier et
en fait de sycophante. Elle défend de remplir plus d'une fois les
fonctions de défenseur d'une loi, désigné à main levée par le peuple.
Or ceux qui prennent la parole pour soutenir une loi et pour vous prouver
qu'elle est bonne, ceux-là doivent eux-mêmes se montrer obéissants aux
lois existantes. Autrement il est ridicule de prendre la défense d'une loi
et en même temps d'en enfreindre une autre. Prends cette loi dont je
parle, et donnes-en lecture aux juges. LOI.
Telle est cette loi, Athéniens, loi ancienne et excellente. Si mes
adversaires sont bien avisés, ils se garderont de l'enfreindre.
(154) J'ai encore quelques mots à vous dire, et je descends. S'il est
vrai, Athéniens, comme je le crois, que tous vos efforts doivent tendre à
n'avoir que des lois excellentes, cela est vrai surtout pour les lois qui
peuvent faire la faiblesse ou la grandeur de notre ville. Quelles
sont-elles? Celles qui distribuent vos récompenses ou vos châtiments
suivant qu'on vous a fait du bien ou du mal. Supposez en effet que la
crainte des châtiments portés par les lois détourne tout le monde de mal
faire, que l'attrait des récompenses promises aux bonnes actions engage
tout le monde à faire son devoir, quel obstacle peut s'opposer alors à ce
que notre ville soit grande ente toutes, à ce qu'il n'y ait plus que des
bons et pas un méchant?
(155) Cette loi de Leptine, Athéniens, a un double vice. Non seulement
elle supprime les récompenses des services rendus et paralyse ainsi le bon
vouloir de ceux qui ambitionnent vos honneurs, mais encore elle expose
notre ville au reproche fâcheux d'incohérence législative. Vous savez
certainement que pour chaque crime, si grand qu'il soit, la loi n'institue
qu'une seule peine discrétionnaire. Elle porte expressément : « Il ne sera
jamais appliqué dans un jugement plus d'une seule peine discrétionnaire,
soit corporelle, soit pécuniaire, au choix du tribunal. Elles ne pourront
être cumulées. » (156) Leptine ne s'est pas renfermé dans celle limite. Si
quelqu'un vous demande une grâce, « qu'il soit frappé d'atimie, dit sa
loi, et que ses biens soient confisqués ». Voilà deux peines. « Il y aura
lieu, en outre, à dénonciation et à prise de corps, et, si le prévenu est
déclaré coupable, il sera sujet â l'application de la loi faite contre
ceux qui exercent une fonction étant débiteurs publics. » C'est la mort
qu'il prononce, car telle est la peine portée en pareil cas. Voilà donc
trois peines. N'est-ce donc pas, Athéniens, une chose déplorable et
odieuse, s'il y a chez vous plus de danger à demander la récompense d'un
service qu'à être pris commettant les plus grands crimes?
(157) Cette loi, Athéniens, est honteuse et détestable. On dirait un acte
d'envie ou de jalousie, ou même... mais je m'arrête. Celui qui l'a rédigée
paraît bien avoir cédé à quelque sentiment de ce genre. Mais il ne vous
convient pas, à vous, de suivre cet exemple, ni de paraître concevoir des
sentiments indignes de vous. Dites-moi, par Jupiter, quel est le mal que
nous devons le plus souhaiter d'éloigner de nous, et quel est le but que
l'on s'efforce d'atteindre avant tout dans toutes les lois. C'est de faire
cesser les meurtres réciproques, et à cet effet un gardien choisi
entre tous a été institué, le sénat de l'Aréopage. (158) Eh bien, dans les
lois faites sur cet objet, Dracon, tout en déclarant odieux et criminel le
fait de l'homme qui ôte la vie à un autre homme de sa propre main, tout en
ordonnant de repousser le meurtrier loin du vase aux ablutions, loin des
libations, des cratères, des choses sacrées, de l'agora, loin de
toutes les choses dont la privation a paru la plus propre à prévenir les
forfaits de ce genre, Dracon, dis-je, n'a cependant pas entièrement
supprimé le droit de tuer. Il a défini les cas dans lesquels l'homicide
est permis, et si quelqu'un commet un homicide dans ces conditions, Dracon
le déclare pur. Ainsi donc il sera permis, dans vos lois, de tuer pour de
justes raisons; mais demander une grâce, qu'il y ait ou non juste raison,
ce sera chose interdite par la loi de Leptine. (159) Ne faites pas cela,
Athéniens. On croirait que vous tenez surtout à ce qu'aucun de vos
bienfaiteurs ne puisse obtenir une grâce en retour, que vous tenez moins à
ce qu'il ne se commette aucun meurtre dans cette ville. Souvenez-vous au
contraire des circonstances dans lesquelles vous avez répondu à des
bienfaits par d'autres bienfaits. Souvenez-vous aussi de la stèle de
Démosphante, dont Phormion vous a parlé, dans laquelle il est écrit
et déclaré avec serment que quiconque aura souffert pour la cause du
gouvernement populaire sera récompensé comme Harmodios et Aristogiton.
Condamnez donc la loi; car si vous ne le faites pas, vous ne pouvez pas
tenir votre serment.
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