[1,1256a] (1256a) Ἀξιοῦσι γάρ, ὥσπερ ἐξ ἀνθρώπου ἄνθρωπον καὶ ἐκ θηρίων
γίνεσθαι θηρίον, οὕτω καὶ ἐξ ἀγαθῶν ἀγαθόν. Ἡ δὲ φύσις βούλεται
μὲν τοῦτο ποιεῖν πολλάκις, οὐ μέντοι δύναται.
§ 20. Ὅτι μὲν οὖν ἔχει τινὰ λόγον ἡ ἀμφισβήτησις, καὶ οὐκ εἰσί τινες
οἱ μὲν φύσει δοῦλοι οἱ δ' ἐλεύθεροι, δῆλον, καὶ ὅτι ἔν τισι διώρισται
τὸ τοιοῦτον, ὧν συμφέρει τῷ μὲν τὸ δουλεύειν τῷ δὲ τὸ δεσπόζειν
καὶ δίκαιον, καὶ δεῖ τὸ μὲν ἄρχεσθαι τὸ δ' ἄρχειν ἣν πεφύκασιν
ἀρχὴν ἄρχειν, ὥστε καὶ δεσπόζειν, τὸ δὲ κακῶς ἀσυμφόρως ἐστὶν
ἀμφοῖν (τὸ γὰρ αὐτὸ συμφέρει τῷ μέρει καὶ τῷ ὅλῳ, καὶ σώματι καὶ
ψυχῇ, ὁ δὲ δοῦλος μέρος τι τοῦ δεσπότου, οἷον ἔμψυχόν τι τοῦ
σώματος κεχωρισμένον δὲ μέρος· διὸ καὶ συμφέρον ἐστί τι καὶ φιλία
δούλῳ καὶ δεσπότῃ πρὸς ἀλλήλους τοῖς φύσει τούτων ἠξιωμένοις,
τοῖς δὲ μὴ τοῦτον τὸν τρόπον, ἀλλὰ κατὰ νόμον καὶ βιασθεῖσι, τοὐναντίον).
§ 21. Φανερὸν δὲ καὶ ἐκ τούτων ὅτι οὐ (αὐτόν ἐστι δεσποτεία καὶ
πολιτική, οὐδὲ πᾶσαι ἀλλήλαις αἱ ἀρχαί, ὥσπερ τινές φασιν. Ἡ μὲν
γὰρ ἐλευθέρων φύσει ἡ δὲ δούλων ἐστίν, καὶ ἡ μὲν οἰκονομικὴ
μοναρχία αμοναρχεῖται γὰρ πᾶς οἶκος), ἡ δὲ πολιτικὴ ἐλευθέρων
καὶ ἴσων ἀρχή.
§ 22. Ὁ μὲν οὖν δεσπότης οὐ λέγεται κατ' ἐπιστήμην, ἀλλὰ τῷ
τοιόσδ' εἶναι, ὁμοίως δὲ καὶ ὁ δοῦλος καὶ ὁ ἐλεύθερος. Ἐπιστήμη δ'
ἂν εἴη καὶ δεσποτικὴ καὶ δουλική, δουλικὴ μὲν οἵαν περ ὁ ἐν
Συρακούσαις ἐπαίδευεν· ἐκεῖ γὰρ λαμβάνων τις μισθὸν ἐδίδασκε τὰ
ἐγκύκλια διακονήματα τοὺς παῖδας· εἴη δ' ἂν καὶ ἐπὶ πλεῖον τῶν
τοιούτων μάθησις, οἷον ὀψοποιικὴ καὶ τἆλλα τὰ τοιαῦτα γένη τῆς
διακονίας. Ἔστι γὰρ ἕτερα ἑτέρων τὰ μὲν ἐντιμότερα ἔργα τὰ δ'
ἀναγκαιότερα, καὶ κατὰ τὴν παροιμίαν
Δοῦλος πρὸ δούλου, δεσπότης πρὸ δεσπότου.
§ 23. Αἱ μὲν οὖν τοιαῦται πᾶσαι δουλικαὶ ἐπιστῆμαί εἰσι· δεσποτικὴ
δ' ἐπιστήμη ἐστὶν ἡ χρηστικὴ δούλων. Ὁ γὰρ δεσπότης οὐκ ἐν τῷ
κτᾶσθαι τοὺς δούλους, ἀλλ' ἐν τῷ χρῆσθαι δούλοις. Ἔστι δ' αὕτη ἡ
ἐπιστήμη οὐδὲν μέγα ἔχουσα οὐδὲ σεμνόν· ἃ γὰρ τὸν δοῦλον
ἐπίστασθαι δεῖ ποιεῖν, ἐκεῖνον δεῖ ταῦτα ἐπίστασθαι ἐπιτάττειν. Διὸ
ὅσοις ἐξουσία μὴ αὐτοὺς κακοπαθεῖν, ἐπίτροπός τις λαμβάνει
ταύτην τὴν τιμήν, αὐτοὶ δὲ πολιτεύονται ἢ φιλοσοφοῦσιν. Ἡ δὲ
κτητικὴ ἑτέρα ἀμφοτέρων τούτων, οἷον ἡ δικαία, πολεμική τις οὖσα ἢ θηρευτική.
§ 24. Περὶ μὲν οὖν δούλου καὶ δεσπότου τοῦτον διωρίσθω τὸν τρόπον.
| [1,1256a] C'est croire que de parents distingués sortent des fils distingués, de
même qu'un homme produit un homme, et qu'un animal produit un animal. Mais
il est vrai que bien souvent la nature veut le faire sans le pouvoir.
§ 20. On peut donc évidemment soulever cette discussion avec quelque raison, et
soutenir qu'il y a des esclaves et des hommes libres par le fait de la nature ; on
peut soutenir que cette distinction subsiste bien réellement toutes les fois qu'il est
utile pour l'un de servir en esclave, pour l'autre de régner en maître; on peut
soutenir enfin qu'elle est juste, et que chacun doit, suivant le voeu de la nature,
exercer ou subir le pouvoir. Par suite, l'autorité du maître sur l'esclave est
également juste et utile; ce qui n'empêche pas que l'abus de cette autorité ne puisse
être funeste à tous deux. L'intérêt de la partie est celui du tout; l'intérêt du corps
est celui de l'âme ; l'esclave est une partie du maître ; c'est comme une partie de
son corps, vivante, bien que séparée. Aussi entre le maître et l'esclave, quand c'est
la nature qui les a faits tous les deux, il existe un intérêt commun, une
bienveillance réciproque ; il en est tout différemment quand c'est la loi et la force
seule qui les ont faits l'un et l'autre.
§ 21. Ceci montre encore bien nettement que le pouvoir du maître et celui du
magistrat sont très distincts, et que, malgré ce qu'on en a dit, toutes les autorités ne
se confondent pas en une seule : l'une concerne des hommes libres, l'autre des
esclaves par nature ; l'une, et c'est l'autorité domestique, appartient à un seul, car
toute famille est régie par un seul chef ; l'autre, celle du magistrat, ne concerne que
des hommes libres et égaux.
§ 22. On est maître, non point parce qu'on sait commander, mais parce qu'on a
certaine nature ; on est esclave ou homme libre par des distinctions pareilles. Mais
il serait possible de former les maîtres à la science qu'ils doivent pratiquer tout
aussi bien que les esclaves ; et l'on a déjà professé une science des esclaves à
Syracuse, où, pour de l'argent, on instruisait les enfants en esclavage de tous les
détails du service domestique. On pourrait fort bien aussi étendre leurs
connaissances et leur apprendre certains arts, comme celui de préparer les mets,
ou tout autre du même genre, puisque tels services sont plus estimés ou plus
nécessaires que tels autres, et que, selon le proverbe : « Il y a esclave et esclave, il y
a maître et maître ».
§ 23. Tous ces apprentissages forment la science des esclaves. Savoir employer des
esclaves forme la science du maître, qui est maître bien moins en tant qu'il possède
des esclaves, qu'en tant qu'il en use. Cette science n'est, il est vrai, ni bien étendue,
ni bien haute ; elle consiste seulement à savoir commander ce que les esclaves
doivent savoir faire. Aussi, dès qu'on peut s'épargner cet embarras, on en laisse
l'honneur à un intendant, pour se livrer à la vie politique ou à la philosophie. La
science de l'acquisition, mais de l'acquisition naturelle et juste, est fort différente
des deux autres sciences dont nous venons de parler; elle a tout à la fois quelque
chose de la guerre et quelque chose de la chasse.
§ 24. Nous ne pousserons pas plus loin ce que nous avions à dire du maître et de l'esclave.
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