[364] ἄλλο αὖ εἶδος λόγων περὶ δικαιοσύνης τε καὶ ἀδικίας ἰδίᾳ
τε λεγόμενον (364a) καὶ ὑπὸ ποιητῶν.
πάντες γὰρ ἐξ ἑνὸς στόματος ὑμνοῦσιν ὡς καλὸν μὲν ἡ σωφροσύνη τε καὶ
δικαιοσύνη, χαλεπὸν μέντοι καὶ ἐπίπονον, ἀκολασία δὲ καὶ ἀδικία ἡδὺ μὲν
καὶ εὐπετὲς κτήσασθαι, δόξῃ δὲ μόνον καὶ νόμῳ αἰσχρόν· λυσιτελέστερα
δὲ τῶν δικαίων τὰ ἄδικα ὡς ἐπὶ τὸ πλῆθος λέγουσι, καὶ πονηροὺς
πλουσίους καὶ ἄλλας δυνάμεις ἔχοντας εὐδαιμονίζειν καὶ τιμᾶν εὐχερῶς
ἐθέλουσιν δημοσίᾳ τε καὶ ἰδίᾳ, τοὺς δὲ ἀτιμάζειν καὶ ὑπερορᾶν, οἳ ἄν πῃ
ἀσθενεῖς τε (b) καὶ πένητες ὦσιν, ὁμολογοῦντες αὐτοὺς ἀμείνους εἶναι
τῶν ἑτέρων. τούτων δὲ πάντων οἱ περὶ θεῶν τε λόγοι καὶ ἀρετῆς
θαυμασιώτατοι λέγονται, ὡς ἄρα καὶ θεοὶ πολλοῖς μὲν ἀγαθοῖς δυστυχίας
τε καὶ βίον κακὸν ἔνειμαν, τοῖς δ’ ἐναντίοις ἐναντίαν μοῖραν. ἀγύρται δὲ
καὶ μάντεις ἐπὶ πλουσίων θύρας ἰόντες πείθουσιν ὡς ἔστι παρὰ σφίσι
δύναμις ἐκ θεῶν ποριζομένη θυσίαις τε καὶ ἐπῳδαῖς, εἴτε τι (c) ἀδίκημά
του γέγονεν αὐτοῦ ἢ προγόνων, ἀκεῖσθαι μεθ’ ἡδονῶν τε καὶ ἑορτῶν, ἐάν
τέ τινα ἐχθρὸν πημῆναι ἐθέλῃ, μετὰ σμικρῶν δαπανῶν ὁμοίως δίκαιον
ἀδίκῳ βλάψει ἐπαγωγαῖς τισιν καὶ καταδέσμοις, τοὺς θεούς, ὥς φασιν,
πείθοντές σφισιν ὑπηρετεῖν. τούτοις δὲ πᾶσιν τοῖς λόγοις μάρτυρας
ποιητὰς ἐπάγονται οἱ μὲν κακίας πέρι, εὐπετείας διδόντες, ὡς
τὴν μὲν κακότητα καὶ ἰλαδὸν ἔστιν ἑλέσθαι
(d) ῥηϊδίως· λείη μὲν ὁδός, μάλα δ’ ἐγγύθι ναίει·
τῆς δ’ ἀρετῆς ἱδρῶτα θεοὶ προπάροιθεν ἔθηκαν
καί τινα ὁδὸν μακράν τε καὶ τραχεῖαν καὶ ἀνάντη· οἱ δὲ τῆς τῶν θεῶν ὑπ’
ἀνθρώπων παραγωγῆς τὸν ῞Ομηρον μαρτύρονται, ὅτι καὶ ἐκεῖνος εἶπεν—
λιστοὶ δέ τε καὶ θεοὶ αὐτοί,
καὶ τοὺς μὲν θυσίαισι καὶ εὐχωλαῖς ἀγαναῖσιν
(e) λοιβῇ τε κνίσῃ τε παρατρωπῶσ’ ἄνθρωποι
λισσόμενοι, ὅτε κέν τις ὑπερβήῃ καὶ ἁμάρτῃ.
βίβλων δὲ ὅμαδον παρέχονται Μουσαίου καὶ ᾿Ορφέως, Σελήνης τε καὶ
Μουσῶν ἐκγόνων, ὥς φασι, καθ’ ἃς θυηπολοῦσιν, πείθοντες οὐ μόνον
ἰδιώτας ἀλλὰ καὶ πόλεις, ὡς ἄρα λύσεις τε καὶ καθαρμοὶ ἀδικημάτων
| [364] une autre conception de la justice et de l'injustice développée
par les particuliers et par les poètes. Tous, d'une seule voix, célèbrent
(364a) comme belles la tempérance et la justice, mais ils les trouvent
difficiles et pénibles ; l'intempérance et l'injustice au contraire leur
paraissent agréables et d'une possession facile, honteuses
seulement au regard de l'opinion et de la loi ; les actions
injustes, disent-ils, sont plus profitables que les justes dans
l'ensemble, et ils consentent aisément à proclamer les
méchants heureux et à les honorer, quand ils sont riches ou
disposent de quelque puissance; par contre, ils méprisent et
regardent de haut les bons qui sont faibles et pauvres, tout en
reconnaissant qu'ils sont meilleurs que les autres. Mais (364b)
de tous ces discours, ceux qu'ils tiennent sur les dieux et la
vertu sont les plus étranges. Les dieux même, prétendent-ils,
ont souvent réservé aux hommes vertueux l'infortune et une
vie misérable, tandis qu'aux méchants ils accordaient le sort
contraire. De leur côté, des prêtres mendiants et des devins
vont aux portes des riches, et leur persuadent qu'ils ont
obtenu des dieux le pouvoir de réparer les fautes qu'eux ou
leurs ancêtres ont pu (364c) commettre, par des sacrifices et des
incantations, avec accompagnement de plaisirs et de fêtes ; si
l'on veut porter préjudice à un ennemi, pour une faible
dépense on peut nuire au juste comme à l'injuste, par leurs
évocations et formules magiques, car, à les entendre, ils
persuadent aux dieux de se mettre à leur service. A l'appui de
toutes ces assertions ils invoquent le témoignage des poètes.
Les uns parlent de la facilité du vice :
Vers le mal en troupe l'on s'achemine
aisément : la route est douce et tout près il habite ; (364d)
Mais devant la vertu c'est peine et sueur que les dieux placèrent,
et une route longue, rocailleuse et montante. Les autres, pour
prouver que les hommes peuvent influencer les dieux,
allèguent ces vers d'Homère :
Les dieux eux-mêmes se laissent fléchir ;
et par le sacrifice et la bonne prière, (364e)
les libations, et des victimes la fumée, l'homme détourne leur colère
quand il a enfreint leurs lois et péché.
Et ils produisent une foule de livres de Musée et d'Orphée,
descendants, disent-ils, de Séléné et des Muses. Ils règlent
leurs sacrifices d'après ces livres, et persuadent non seulement
aux particuliers, mais encore aux cités qu'on peut être absous
et purifié de ses (365a) crimes,
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