[1,5] Ἡμεῖς δὲ λέγωμεν ὅθεν παρεξέβημεν. τὸ γὰρ ἀγαθὸν
καὶ τὴν εὐδαιμονίαν οὐκ ἀλόγως ἐοίκασιν ἐκ τῶν βίων
ὑπολαμβάνειν οἱ μὲν πολλοὶ καὶ φορτικώτατοι τὴν ἡδονήν·
διὸ καὶ τὸν βίον ἀγαπῶσι τὸν ἀπολαυστικόν. τρεῖς γάρ εἰσι
μάλιστα οἱ προύχοντες, ὅ τε νῦν εἰρημένος καὶ ὁ πολιτικὸς
καὶ τρίτος ὁ θεωρητικός. οἱ μὲν οὖν πολλοὶ παντελῶς
ἀνδραποδώδεις φαίνονται βοσκημάτων βίον προαιρούμενοι,
τυγχάνουσι δὲ λόγου διὰ τὸ πολλοὺς τῶν ἐν ταῖς ἐξουσίαις
ὁμοιοπαθεῖν Σαρδαναπάλλῳ. οἱ δὲ χαρίεντες καὶ πρακτικοὶ
τιμήν· τοῦ γὰρ πολιτικοῦ βίου σχεδὸν τοῦτο τέλος. φαίνεται δ´ ἐπιπολαιότερον εἶναι τοῦ ζητουμένου· δοκεῖ γὰρ ἐν
τοῖς τιμῶσι μᾶλλον εἶναι ἢ ἐν τῷ τιμωμένῳ, τἀγαθὸν δὲ
οἰκεῖόν τι καὶ δυσαφαίρετον εἶναι μαντευόμεθα. ἔτι δ´ ἐοίκασι
τὴν τιμὴν διώκειν ἵνα πιστεύσωσιν ἑαυτοὺς ἀγαθοὺς
εἶναι· ζητοῦσι γοῦν ὑπὸ τῶν φρονίμων τιμᾶσθαι, καὶ παρ´
οἷς γινώσκονται, καὶ ἐπ´ ἀρετῇ· δῆλον οὖν ὅτι κατά γε
τούτους ἡ ἀρετὴ κρείττων. τάχα δὲ καὶ μᾶλλον ἄν τις
τέλος τοῦ πολιτικοῦ βίου ταύτην ὑπολάβοι. φαίνεται δὲ
ἀτελεστέρα καὶ αὕτη· δοκεῖ γὰρ ἐνδέχεσθαι καὶ καθεύδειν
ἔχοντα τὴν ἀρετὴν ἢ ἀπρακτεῖν διὰ βίου, καὶ πρὸς τούτοις
(1096) κακοπαθεῖν καὶ ἀτυχεῖν τὰ μέγιστα· τὸν δ´ οὕτω ζῶντα
οὐδεὶς ἂν εὐδαιμονίσειεν, εἰ μὴ θέσιν διαφυλάττων. καὶ
περὶ μὲν τούτων ἅλις· ἱκανῶς γὰρ καὶ ἐν τοῖς ἐγκυκλίοις
εἴρηται περὶ αὐτῶν. τρίτος δ´ ἐστὶν ὁ θεωρητικός, ὑπὲρ οὗ
τὴν ἐπίσκεψιν ἐν τοῖς ἑπομένοις ποιησόμεθα. ὁ δὲ χρηματιστὴς
βίαιός τις ἐστίν, καὶ ὁ πλοῦτος δῆλον ὅτι οὐ τὸ ζητούμενον
ἀγαθόν· χρήσιμον γὰρ καὶ ἄλλου χάριν. διὸ μᾶλλον
τὰ πρότερον λεχθέντα τέλη τις ἂν ὑπολάβοι· δι´ αὑτὰ γὰρ
ἀγαπᾶται. φαίνεται δ´ οὐδ´ ἐκεῖνα· καίτοι πολλοὶ λόγοι
πρὸς αὐτὰ καταβέβληνται.
| [1,5] CHAPITRE V :
Après cette digression, reprenons notre raisonnement. Ce n'est pas sans quelque
raison que les hommes, comme on le voit nettement, conçoivent d'après leur
propre vie le bien et le bonheur. 2. La foule et les gens les plus grossiers
placent le bonheur dans le plaisir ; aussi montrent-ils leur goût pour une vie
toute de jouissances. Effectivement trois genres de vie ont une supériorité
marquée : celui que nous venons d'indiquer ; celui qui a pour objet la vie
politique active ; enfin celui qui a pour objet la contemplation. 3. La foule,
qui, de toute évidence, ne se distingue en rien des esclaves, choisit une
existence tout animale et elle trouve quelque raison dans l'exemple des gens au
pouvoir qui mènent une vie de Sardanapale. 4. L'élite et les hommes d'action
placent le bonheur dans les honneurs ; car telle est à peu près la fin de la vie
politique ; mais cette fin paraît plus commune que celle que nous cherchons ;
car elle a manifestement davantage rapport avec ceux qui accordent les honneurs
qu'avec ceux qui les reçoivent. Mais, selon notre conjecture, le vrai bien est
individuel et impossible à enlever à son possesseur. 5. De plus il apparaît
nettement que l'on ne recherche les honneurs que pour se convaincre de sa propre valeur ; du moins cherche-t-on à se faire honorer par les gens intelligents, par ceux qui vous connaissent et en se réclamant de son propre mérite. Il est donc
évident qu'aux yeux de ces gens-là tout au moins le mérite est le bien
supérieur. 6. Peut-être, de préférence, pourrait-on supposer que la vertu
est la fin de la vie civile ; mais il est clair qu'elle est insuffisamment
parfaite ; car il n'est pas impossible, semble-t-il, que l'homme vertueux
demeure dans le sommeil et l'inaction au cours de sa vie ; que, bien plus, il
supporte les pires maux et les pires malheurs ; dans ces conditions, nul ne
voudrait déclarer un homme heureux à moins de soutenir une thèse paradoxale. Et sur ce sujet, en voilà assez ; car nos Encycliques en ont dit suffisamment
là-dessus. 7. Le troisième genre de vie a pour objet la contemplation ; nous
l'examinerons dans les pages qui suivent. Quant à l'homme d'affaires, c'est
un être hors nature et il est bien clair que la richesse n'est pas le bien
suprême que nous cherchons. Car elle est simplement utile et a une autre fin
qu'elle-même. Aussi qui ne préférerait les fins dont nous avons déjà parlé ? Au
moins on les désire pour elles-mêmes, mais il est clair qu'elles ne sont pas les
vraies fins. Pourtant là-dessus maintes discussions ont été échafaudées.
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