[19,107] Ἀγαθοκλῆς δὲ τὰς τῶν Καρχηδονίων δυνάμεις
ὁρῶν ὑπερεχούσας τῶν ἑαυτοῦ διέλαβε τῶν τε φρουρίων οὐκ ὀλίγα
μεταθήσεσθαι πρὸς τοὺς Φοίνικας καὶ
τῶν πόλεων ὅσαι προσέκοπτον αὐτῷ. μάλιστα δ´ εὐλαβεῖτο περὶ τῆς τῶν
Γελῴων, πυνθανόμενος ἐν τῇ
τούτων χώρᾳ πάσας εἶναι τὰς τῶν πολεμίων δυνάμεις.
ἐγένετο δ´ αὐτῷ περὶ τοῦτον τὸν χρόνον καὶ περὶ τὸν
στόλον οὐ μικρὸν ἐλάσσωμα· τῶν γὰρ νεῶν εἴκοσιν
ἐπὶ τὸν πορθμὸν ὑποχείριοι τοῖς Καρχηδονίοις κατέστησαν σὺν αὐτοῖς
ἀνδράσιν. οὐ μὴν ἀλλὰ κρίνας
τὴν τῶν Γελῴων πόλιν ἀσφαλίσασθαι φρουρᾷ, φανερῶς οὐκ
ἐτόλμα δύναμιν εἰσαγαγεῖν, ἵνα μὴ φθάσαι
συμβῇ τοὺς Γελῴους προφάσεως δεομένους καὶ τὴν
πόλιν ἀποβάλῃ μεγάλας ἀφορμὰς αὐτῷ παρεχομένην.
ἀπέστειλεν οὖν κατ´ ὀλίγους τῶν στρατιωτῶν ὡς ἐπί
τινας χρείας, ἕως ὅτου συνέβη τῷ πλήθει πολὺ προτερῆσαι τῶν πολιτικῶν.
μετ´ ὀλίγον δὲ καὶ αὐτὸς παραγενόμενος προδοσίαν ἐνεκάλεσε καὶ
μετάθεσιν τοῖς Γελῴοις, εἴτε καὶ κατ´ ἀλήθειαν αὐτῶν διανοηθέντων
τι πρᾶξαι τοιοῦτον, εἴτε καὶ ψευδέσι διαβολαῖς φυγάδων πεισθεὶς ἢ καὶ
χρημάτων βουλόμενος εὐπορῆσαι,
καὶ ἀπέσφαξε τῶν Γελῴων πλείους τῶν τετρακισχιλίων καὶ τὰς οὐσίας
αὐτῶν ἀνέλαβε. προσέταξε δὲ
καὶ τοῖς ἄλλοις Γελῴοις πᾶσι τά τε νομίσματα καὶ
τὸν ἄσημον ἄργυρόν τε καὶ χρυσὸν ἀνενεγκεῖν, διαπειλησάμενος
τιμωρήσασθαι τοὺς ἀπειθήσαντας. ταχὺ
δὲ πάντων πραξάντων τὸ προσταχθὲν διὰ τὸν φόβον
χρημάτων τε πλῆθος ἤθροισε καὶ πᾶσι τοῖς ταττομένοις ὑφ´ ἑαυτὸν
δεινὴν ἐνεποίησε κατάπληξιν. δόξας
δ´ ὠμότερον κεχρῆσθαι τοῦ καθήκοντος τοῖς Γελῴοις
τοὺς μὲν ἀποσφαγέντας εἰς τὰς ἐκτὸς τῶν τειχῶν
τάφρους συνέχωσεν, ἐν δὲ τῇ πόλει τὴν ἱκανὴν φρουρὰν
ἀπολιπὼν ἀντεστρατοπέδευσε τοῖς πολεμίοις.
| [19,107] En présence de ces forces considérables des Carthaginois,
Agathocle comprit que beaucoup de garnisons
qu'il entretenait dans les villes, mécontentes de lui, passeraient,
à la première occasion, dans le parti des Phéniciens,
et il craignait surtout la défection des Géléens dont
le territoire était occupé par toutes les forces de l'ennemi.
Pour comble d'inquiétude, sa flotte venait alors d'éprouver
un échec considérable : vingt de ses navires, stationnés
dans le détroit, étaient tombés, avec tout leur équipage, au
pouvoir des Carthaginois. Mais comme il savait de quelle
importance serait pour lui l'occupation de Géla, au moyen
d'une forte garnison, il ne perdit pas cet objet de vue :
mais il n'osa point y introduire de troupes ouvertement,
afin qu'il ne donnât pas aux Géléens un prétexte pour justifier
leur rébellion, et qu'il ne perdit pas une ville qui
devait lui fournir de grandes ressources. Agathocle y fit
donc entrer les soldats en quelque sorte un à un, comme
pour des affaires particulières, jusqu'à ce qu'enfin leur
nombre dépassât de beaucoup celui des citoyens. Bientôt
après, Agathocle y entra lui-même, et accusa les Géléens
de trahison et de révolte; soit que les Géléens s'en fussent
réellement rendus coupables, soit que cette accusation eût
été basée sur le rapport calomnieux des bannis, soit que
le vrai motif fût de s'emparer des richesses de la ville, quoi
qu'il en soit, Agathocle fit mettre à mort plus de quatre
mille Géléens, et confisqua leurs biens. Il ordonna ensuite
aux autres Géléens de lui apporter, sous peine de mort,
tout l'argent et l'or non monnayé en leur possession. La
crainte fit promptement exécuter cet ordre; Agathocle
amassa ainsi d'immenses richesses et répandit la terreur
parmi les populations soumises à son autorité. Cependant,
comme il reconnut lui-même qu'il avait traité les Géléens
avec trop de cruauté, il fit enterrer les morts dans des
fosses creusées en dehors des murs, et, après avoir laissé
dans la ville une garnison suffisante, il vint camper en face de l'ennemi.
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