[8,42] Ἀλλ´ εἰ καὶ τούτου δεῖσθε ὑμεῖς, ὦ γυναῖκες,
καὶ πάντως θέλετε ἀσχημονούσας ἡμᾶς ἰδεῖν,
ὑπολάβετε παρεῖναι πρὸς αὐτὸν κἀμὲ καὶ Οὐολουμνίαν
ἀγούσας τὰ παιδία· τίνας ἐρῶ πρῶτον ἡ μήτηρ ἐγὼ
πρὸς αὐτὸν λόγους, καὶ τίνα δέησιν ποιήσομαι τοῦ
υἱοῦ; λέγετε καὶ διδάσκετέ με. φείσασθαι παρακαλῶ
τῶν ἑαυτοῦ πολιτῶν, ὑφ´ ὧν ἐκ τῆς πατρίδος ἐξελήλαται καὶ
μηθὲν ἀδικῶν; οἰκτίρμονα δὲ καὶ συμπαθῆ
πρὸς τοὺς δημοτικοὺς γενέσθαι, παρ´ ὧν οὔτ´ ἐλέου
μετέσχεν οὔτε συμπαθείας; ἐγκαταλιπεῖν δ´ ἄρα καὶ
προδοῦναι τοὺς ὑποδεξαμένους αὐτοῦ τὴν φυγήν, οἳ
πολλὰ καὶ δεινὰ πεπονθότες ὑπ´ αὐτοῦ πρότερον, οὐ
πολεμίων μῖσος, ἀλλὰ φίλων καὶ συγγενῶν εὔνοιαν
εἰς αὐτὸν ἀπεδείξαντο; τίνα ψυχὴν λαβοῦσα ἀξιώσω
τὸν υἱὸν τὰ μὲν ἀπολέσαντα φιλεῖν, τὰ δὲ σώσαντα
ἀδικεῖν; οὐκ εἰσὶν οὗτοι μητρὸς ὑγιαινούσης λόγοι
πρὸς υἱὸν οὐδὲ γυναικὸς ἃ δεῖ λογιζομένης πρὸς ἄνδρα· μηδ´
ὑμεῖς βιάζεσθε, γυναῖκες, ἃ μήτε πρὸς ἀνθρώπους δίκαιά ἐστι
μήτε πρὸς θεοὺς ὅσια, ταῦθ´ ἡμᾶς αἰτεῖσθαι παρ´ αὐτοῦ, ἀλλ´ ἄφετε
τὰς ἐλεεινάς, ὡς πεπτώκαμεν ὑπὸ τῆς τύχης, κεῖσθαι ταπεινὰς μηθὲν
ἔτι πλέον ἀσχημονούσας.
| [8,42] Ce fut ainsi, Romaines, que cet infortuné citoyen nous quitta.
Voila déjà la quatrième année qu'il est sorti de sa patrie, et qu'il nous
regarde comme des étrangères. Depuis ce temps-là il ne nous a jamais
écrit de ses nouvelles, il n'a chargé personne de nous en dire, et il ne
s'embarrasse point de savoir des nôtres. Hélas ! Valérie, quelle force
peuvent avoir nos prières sur un cœur aussi dur et aussi inflexible ? Que
pouvons-nous obtenir d'un homme qui ne daigna pas nous embrasser, ni
nous faire les derniers adieux, ni nous donner aucune autre marque de
tendresse lorsqu'il quitta sa maison pour aller en exil ? Si néanmoins vous
nous faites de plus vives instances et si vous voulez absolument que
nous fassions un personnage indigne de nous : supposé que nous
allions trouver Marcius, Volumnie et moi avec nos enfants, quel discours
tiendrai-je d'abord, et quelles prières adresserai-je à mon fils ? Dites-le
moi, Romaines: donnez-moi vos instructions sur les moyens que je dois
employer. Le prierai-je d'épargner ses citoyens qui l'ont banni de la patrie
sans qu'il l'ait mérité ? Le conjurerai-je d'avoir pitié des plébéiens, dont il
n'a reçu, que des duretés et qui ne l'ont jamais plaint dans son malheur?
L'engagerai-je à abandonner les Volsques ? Le porterai-je à trahir ceux
qui ce lui ont donné un asile dans son exil, et qui loin de le traiter à la
rigueur en qualité d'ennemi, l'ont reçu avec toute la bienveillance qu'on
peut attendre de ses généreux amis et de ce ses parents, sans se
souvenir de tous les maux qu'il leur avait faits jusqu'alors? Cruelle âme
faudrait-il avoir, pour exhorter mon fils à aimer ceux qui l'ont voulu perdre
et à faire du mal à ses libérateurs. Une mère peut-elle demander de
pareilles grâces à son fils, si elle n'a pas entièrement perdu l'esprit ? Une
femme bien sensée peut-elle faire de semblables propositions à son mari ?
Non, Romaines, ne nous obligez pas de demander â Marcius des
choses qui ne sont ni justes devant les hommes, ni conformes aux
principes de la religion. Laissez-nous dans le malheureux état et dans
l'humiliation où la fortune nous a mises : ne nous portez pas â nous
déshonorer de plus en plus par de fausses démarches.
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