[15,74] 74. Οὐκ ἀνοίκειον δ' ἐστὶ τῆς ὑποκειμένης ἱστορίας φδιελθεῖν τάς τε
αἰτίας τῆς τελευτῆς καὶ τὰ συμβάντα τούτῳ τῷ δυνάστῃ περὶ τὴν τοῦ
βίου καταστροφήν. Διονυσίου τοίνυν δεδιδαχότος ᾿Αθήνησι Ληναίοις
τραγῳδίαν καὶ νικήσαντος, τῶν ἐν τῷ χορῷ τις ᾀδόντων ὑπολαβὼν
τιμηθήσεσθαι λαμπρῶς, ἐὰν πρῶτος ἀπαγγείλῃ τὴν νίκην,
διέπλευσεν εἰς τὴν Κόρινθον. Καταλαβὼν δ' ἐκεῖ ναῦν ἐκπλέουσαν εἰς
Σικελίαν καὶ μετεμβὰς εἰς ταύτην, οὐρίοις ἐχρήσατο πνεύμασι, καὶ
καταπλεύσας εἰς Συρακούσας συντόμως ἀπήγγειλε τῷ τυράννῳ τὴν
νίκην. (2) Ὁ δὲ Διονύσιος τοῦτον μὲν ἐτίμησεν, αὐτὸς δὲ περιχαρὴς
ἐγένετο καὶ τοῖς θεοῖς εὐαγγέλια θύσας πότους καὶ μεγάλας εὐωχίας
ἐπετέλεσεν. Ἑστιῶν δὲ λαμπρῶς τοὺς φίλους, καὶ κατὰ τοὺς πότους
φιλοτιμότερον τῇ μέθῃ δοὺς ἑαυτόν, εἰς ἀρρωστίαν σφοδροτέραν
ἐνέπεσε διὰ τὸ πλῆθος τῶν ἐμφορηθέντων ὑγρῶν. (3) Ἔχων δὲ παρὰ
θεῶν λόγιον, τότε τελευτήσειν ὅταν τῶν κρειττόνων περιγένηται, τὸν
χρησμὸν ἀνέφερεν ἐπὶ τοὺς Καρχηδονίους, ὑπολαμβάνων τούτους
κρείττους ἑαυτοῦ εἶναι. διὸ καὶ πρὸς αὐτοὺς πλεονάκις πεπολεμηκὼς
εἰώθει κατὰ τὰς νίκας ὑποφεύγειν καὶ ἑκουσίως ἡττᾶσθαι, ἵνα μὴ
δόξῃ τῶν ἰσχυροτέρων γεγονέναι κρείττων. (4) Οὐ μὴν ἠδυνήθη γε τῇ
πανουργίᾳ κατασοφίσασθαι τὴν ἐκ τῆς πεπρωμένης ἀνάγκην, ἀλλὰ
ποιητὴς ὢν κακὸς καὶ διακριθεὶς ἐν ᾿Αθήναις ἐνίκησε τοὺς κρείττονας
ποιητάς. Εὐλόγως οὖν κατὰ τὸν χρησμὸν διὰ τὸ περιγενέσθαι τῶν
κρειττόνων ἐπακολουθοῦσαν ἔσχε τὴν τοῦ βίου τελευτήν.
(5) Ὁ δὲ Διονύσιος ὁ νεώτερος διαδεξάμενος τὴν τυραννίδα, πρῶτον
τὰ πλήθη συναγαγὼν εἰς ἐκκλησίαν παρεκάλεσε τοῖς οἰκείοις λόγοις
τηρεῖν τὴν πατροπαράδοτον πρὸς αὐτὸν εὔνοιαν, ἔπειτα τὸν πατέρα
μεγαλοπρεπῶς θάψας κατὰ τὴν ἀκρόπολιν πρὸς ταῖς βασιλίσι
καλουμέναις πύλαις, ἠσφαλίσατο τὰ κατὰ τὴν ἀρχήν.
| [15,74] Il n'est point étranger à notre histoire de rapporter les circonstances de
la mort du père et ce qui parut même l'avoir causée. Denys avait envoyé
à Athènes une tragédie qui fut représentée aux fêtes de Bacchus et qui
même y remporta le prix : un des acteurs du choeur se flatta d'une
grande récompense de la part de Denys s'il lui annonçait le premier cette
nouvelle. Il s'embarqua donc pour Corinthe où il trouva un vaisseau qui
allait en Sicile, il se mit dedans, et le vent ayant été favorable, il arriva
bientôt à Syracuse. Là il se présenta brusquement au tyran, auquel il
annonça sa victoire. (2) Denys lui fit donner une grande récompense et se
livrant à sa joie il fit aux dieux avec toute sorte de somptuosités les
sacrifices de bonnes nouvelles. Traitant ensuite magnifiquement ses amis
et s'abandonnant lui-même aux excès de la table et surtout du vin, il
attaqua en lui les principes de la santé et de la vie, et s'affaiblit tous les
nerfs par la quantité de liqueurs qu'il avait prise. (3) Il avait reçu depuis
longtemps une réponse d'oracle par laquelle il lui avait été annoncé qu'il
mourrait lorsqu'il aurait vaincu des adversaires supérieurs à lui. Il
appliquait cet indice aux Carthaginois, qui en effet le surpassaient en
force. C'est pourquoi aussi ayant été souvent en guerre contre eux, il
avait plus d'une fois abandonné son avantage et s'était laissé vaincre
volontairement pour ne pas tomber dans le cas de l'oracle, ou pour en
éloigner le terme. (4) Mais il ne put parer avec toute son adresse l'arrêt de
sa destinée : car étant très mauvais poète il vainquit par le jugement des
Athéniens, des hommes qui le surpassaient beaucoup en cet art et
confirma par le temps de sa mort les paroles de l'oracle.
(5) Le jeune Denys montant à sa place assembla d'abord tout le peuple et
le pria de lui conserver la bienveillance qu'il avait marquée pour son père
auquel il fit ensuite de magnifiques funérailles. On déposa le corps dans
la citadelle à l'endroit qu'on appelle la porte royale après quoi le jeune
Denys succéda tranquillement à l'autorité de l'ancien.
XIV. (4) ENVIRON ce temps-là le roi Artaxerxès, voyant toute la Grèce en
division et en trouble, y envoya des ambassadeurs pour inviter toutes les
villes à terminer leurs querelles et à rentrer en paix les unes avec les
autres, aux conditions dont elles étaient auparavant convenues. Elles se
portèrent volontiers à cette proposition ; et toutes ces villes, hors Thèbes
seule, renouvelèrent l'ancien traité. Les Thébains prétendaient toujours
que la Béotie ne composait qu'une seule et même république sous un
seul et même gouvernement. Ainsi ils ne pouvaient s'accommoder d'une
forme selon laquelle chaque ville donnait à part et comme de son chef sa
signature et son serment. Exclus par là comme auparavant de la
convention générale, ils demeurèrent seuls sous le nom particulier de
province de la Béotie. (5) Les Lacédémoniens mécontents de cette
exception opinèrent à les attaquer avec une armée nombreuse comme
des ennemis communs. Dans le fond ils ne voyaient leur accroissement
qu'avec une extrême jalousie et ils craignaient beaucoup que maîtres
seuls de la Béotie entière, ils ne leur enlevassent à eux-mêmes avec le
temps le commandement de la Grèce. Comme les Thébains passaient
leur vie en des exercices perpétuels, ils acquerraient une prodigieuse
force de corps ; et ayant d'ailleurs les inclinations extrêmement
guerrières, ils ne cédaient en cette partie à aucun peuple de la Grèce. (6)
Nous avons déjà parlé de la supériorité de leurs trois capitaines
Épaminondas, Gorgias et Pélopidas sur d'autres qu'ils avaient encore et
qui étaient excellents. La Ville de Thèbes s'était distinguée dès les temps
héroïques par la gloire de ses fondateurs et dans routes les occasions où
il avait fallu montrer de la prudence et du courage. Les Lacédémoniens
se préparèrent donc sérieusement à la guerre et ils levèrent un grand
nombre de troupes tant de leurs propres citoyens que de toutes les Villes
qui étaient demeurées dans leur alliance.
|