|
[3,80] Ἐπείτε δὲ κατέστη ὁ θόρυβος καὶ ἐκτὸς πέντε ἡμερέων ἐγένετο, ἐβουλεύοντο οἱ ἐπαναστάντες
τοῖσι Μάγοισι περὶ τῶν πάντων πρηγμάτων καὶ ἐλέχθησαν λόγοι ἄπιστοι μὲν ἐνίοισι Ἑλλήνων,
ἐλέχθησαν δ᾽ ὦν. (2) Ὀτάνης μὲν ἐκέλευε ἐς μέσον Πέρσῃσι καταθεῖναι τὰ πρήγματα, λέγων τάδε.
“ἐμοὶ δοκέει ἕνα μὲν ἡμέων μούναρχον μηκέτι γενέσθαι. οὔτε γὰρ ἡδὺ οὔτε ἀγαθόν. εἴδετε μὲν γὰρ
τὴν Καμβύσεω ὕβριν ἐπ᾽ ὅσον ἐπεξῆλθε, μετεσχήκατε δὲ καὶ τῆς τοῦ Μάγου ὕβριος. (3) κῶς δ᾽ ἂν εἴη
χρῆμα κατηρτημένον μουναρχίη, τῇ ἔξεστι ἀνευθύνῳ ποιέειν τὰ βούλεται; καὶ γὰρ ἂν τὸν ἄριστον
ἀνδρῶν πάντων στάντα ἐς ταύτην ἐκτὸς τῶν ἐωθότων νοημάτων στήσειε. ἐγγίνεται μὲν γάρ οἱ ὕβρις
ὑπὸ τῶν παρεόντων ἀγαθῶν, φθόνος δὲ ἀρχῆθεν ἐμφύεται ἀνθρώπῳ. (4) δύο δ᾽ ἔχων ταῦτα ἔχει
πᾶσαν κακότητα· τὰ μὲν γὰρ ὕβρι κεκορημένος ἔρδει πολλὰ καὶ ἀτάσθαλα, τὰ δὲ φθόνῳ. καίτοι
ἄνδρα γε τύραννον ἄφθονον ἔδει εἶναι, ἔχοντά γε πάντα τὰ ἀγαθά. τὸ δὲ ὑπεναντίον τούτου ἐς τοὺς
πολιήτας πέφυκε· φθονέει γὰρ τοῖσι ἀρίστοισι περιεοῦσί τε καὶ ζώουσι, χαίρει δὲ τοῖσι κακίστοισι
τῶν ἀστῶν, διαβολὰς δὲ ἄριστος ἐνδέκεσθαι. (5) ἀναρμοστότατον δὲ πάντων· ἤν τε γὰρ αὐτὸν
μετρίως θωμάζῃς, ἄχθεται ὅτι οὐ κάρτα θεραπεύεται, ἤν τε θεραπεύῃ τις κάρτα, ἄχθεται ἅτε θωπί.
τὰ δὲ δὴ μέγιστα ἔρχομαι ἐρέων· νόμαιά τε κινέει πάτρια καὶ βιᾶται γυναῖκας κτείνει τε ἀκρίτους. (6)
πλῆθος δὲ ἄρχον πρῶτα μὲν οὔνομα πάντων κάλλιστον ἔχει, ἰσονομίην, δεύτερα δὲ τούτων τῶν ὁ
μούναρχος ποιέει οὐδέν· πάλῳ μὲν ἀρχὰς ἄρχει, ὑπεύθυνον δὲ ἀρχὴν ἔχει, βουλεύματα δὲ πάντα ἐς
τὸ κοινὸν ἀναφέρει. τίθεμαι ὦν γνώμην μετέντας ἡμέας μουναρχίην τὸ πλῆθος ἀέξειν· ἐν γὰρ τῷ
πολλῷ ἔνι τὰ πάντα„.
| [3,80] LXXX. Cinq jours après le rétablissement de la tranquillité, les sept seigneurs
qui s'étaient soulevés contre les mages tinrent conseil sur l'état actuel des
affaires. Leurs discours paraîtront incroyables à quelques Grecs ; ils n'en sont
pas cependant moins vrais. Otanes exhorta les Perses à mettre l'autorité en
commun. «Je crois, dit-il, que l'on ne doit plus désormais confier
l'administration de l'État à un seul homme, le gouvernement monarchique n'étant
ni agréable ni bon. Vous savez à quel point d'insolence en était venu Cambyse,
et vous avez éprouvé vous-mêmes celle du mage. Comment, en effet, la monarchie
pourrait-elle être un bon gouvernement ? Le monarque fait ce qu'il veut, sans
rendre compte de sa conduite. L'homme le plus vertueux, élevé à cette haute
dignité, perdrait bientôt toutes ses bonnes qualités. Car l'envie naît avec tous
les hommes, et les avantages dont jouit un monarque le portent à l'insolence.
Or, quiconque a ces deux vices a tous les vices ensemble : tantôt il commet,
dans l'ivresse de l'insolence, les actions les plus atroces, et tantôt par
envie. Un roi devrait être exempt d'envie, du moins parce qu'il jouit de toutes
sortes de biens ; mais c'est tout le contraire, et ses sujets ne le savent que
trop par expérience. Il hait les plus honnêtes gens, et semble chagrin de ce
qu'ils existent encore. Il n'est bien qu'avec les plus méchants. Il prête
volontiers l'oreille à la calomnie ; il accueille les délateurs : mais ce qu'il
y a de plus bizarre, si on le loue modestement, il s'en offense ; si, au
contraire, on le recherche avec empressement, il en est pareillement blessé, et
ne l'impute qu'à la plus basse flatterie ; enfin, et c'est le plus terrible de
tous les inconvénients, il renverse les lois de la patrie, il attaque l'honneur
des femmes, et fait mourir qui bon lui semble, sans observer aucune formalité.
Il n'en est pas de même du gouvernement démocratique. Premièrement on l'appelle
isonomie (l'égalité des lois) ; c'est le plus beau de tous les noms :
secondement, il ne s'y commet aucun de ces désordres qui sont inséparables de
l'État monarchique. Le magistrat s'y élit au sort ; il est comptable de son
administration, et toutes les délibérations s'y font en commun. Je suis donc
d'avis d'abolir le gouvernement monarchique, et d'établir le démocratique, parce
que tout se trouve dans le peuple.» Telle fut l'opinion d'Otanes.
| [3,81] Ὀτάνης μὲν δὴ ταύτην γνώμην ἐσέφερε· Μεγάβυζος δὲ ὀλιγαρχίῃ ἐκέλευε ἐπιτρέπειν, λέγων
τάδε. “τὰ μὲν Ὀτάνης εἶπε τυραννίδα παύων, λελέχθω κἀμοὶ ταῦτα, τὰ δ᾽ ἐς τὸ πλῆθος ἄνωγε
φέρειν τὸ κράτος, γνώμης τῆς ἀρίστης ἡμάρτηκε· ὁμίλου γὰρ ἀχρηίου οὐδέν ἐστι ἀξυνετώτερον οὐδὲ
ὑβριστότερον. (2) καίτοι τυράννου ὕβριν φεύγοντας ἄνδρας ἐς δήμου ἀκολάστου ὕβριν πεσεῖν ἐστὶ
οὐδαμῶς ἀνασχετόν. ὃ μὲν γὰρ εἴ τι ποιέει, γινώσκων ποιέει, τῷ δὲ οὐδὲ γινώσκειν ἔνι· κῶς γὰρ ἂν
γινώσκοι ὃς οὔτ᾽ ἐδιδάχθη οὔτε εἶδε καλὸν οὐδὲν οἰκήιον, ὠθέει τε ἐμπεσὼν τὰ πρήγματα ἄνευ νόου,
χειμάρρῳ ποταμῷ εἴκελος; (3) δήμῳ μέν νυν, οἳ Πέρσῃσι κακὸν νοέουσι, οὗτοι χράσθων, ἡμεῖς δὲ
ἀνδρῶν τῶν ἀρίστων ἐπιλέξαντες ὁμιλίην τούτοισι περιθέωμεν τὸ κράτος· ἐν γὰρ δὴ τούτοισι καὶ
αὐτοὶ ἐνεσόμεθα· ἀρίστων δὲ ἀνδρῶν οἰκὸς ἄριστα βουλεύματα γίνεσθαι„.
| [3,81] LXXXI. Mégabyse, qui parla après lui, leur conseilla d'instituer l'oligarchie.
«Je pense, dit-il, avec Otanes, qu'il faut abolir la tyrannie, et j'approuve tout
ce qu'il a dit à ce sujet. Mais quand il nous exhorte à remettre la puissance
souveraine entre les mains du peuple, il s'écarte du bon chemin : rien de plus
insensé et de plus insolent qu'une multitude pernicieuse ? en voulant éviter
l'insolence d'un tyran, on tombe sous la tyrannie d'un peuple effréné. Y a-t-il
rien de plus insupportable ? Si un roi forme quelque entreprise, c'est avec
connaissance : le peuple, au contraire, n'a ni intelligence ni raison. Eh !
comment en aurait-il, lui qui n'a jamais reçu aucune instruction , et qui ne
connaît ni le beau, ni l’honnête, ni le décent ? Il se jette dans une affaire,
tête baissée et sans jugement, semblable à un torrent qui entraîne tout ce qu'il
rencontre sur son passage. Puissent les ennemis des Perses user de la
démocratie! Pour nous, faisons choix des hommes les plus vertueux ; mettons-leur
la puissance entre les mains : nous serons nous-mêmes de ce nombre ; et, suivant
toutes les apparences, des hommes sages et éclairés ne donneront que
d'excellents conseils.»
| [3,82] Μεγάβυζος μὲν δὴ ταύτην γνώμην ἐσέφερε· τρίτος δὲ Δαρεῖος ἀπεδείκνυτο γνώμην, λέγων
“ἐμοὶ δὲ τὰ μὲν εἶπε Μεγάβυζος ἐς τὸ πλῆθος ἔχοντα δοκέει ὀρθῶς λέξαι, τὰ δὲ ἐς ὀλιγαρχίην οὐκ
ὀρθῶς. τριῶν γὰρ προκειμένων καὶ πάντων τῷ λόγῳ ἀρίστων ἐόντων, δήμου τε ἀρίστου καὶ
ὀλιγαρχίης καὶ μουνάρχου, πολλῷ τοῦτο προέχειν λέγω. (2) ἀνδρὸς γὰρ ἑνὸς τοῦ ἀρίστου οὐδὲν
ἄμεινον ἂν φανείη· γνώμῃ γὰρ τοιαύτῃ χρεώμενος ἐπιτροπεύοι ἂν ἀμωμήτως τοῦ πλήθεος, σιγῷτό
τε ἂν βουλεύματα ἐπὶ δυσμενέας ἄνδρας οὕτω μάλιστα. (3) ἐν δὲ ὀλιγαρχίῃ πολλοῖσι ἀρετὴν
ἐπασκέουσι ἐς τὸ κοινὸν ἔχθεα ἴδια ἰσχυρὰ φιλέει ἐγγίνεσθαι· αὐτὸς γὰρ ἕκαστος βουλόμενος
κορυφαῖος εἶναι γνώμῃσί τε νικᾶν ἐς ἔχθεα μεγάλα ἀλλήλοισι ἀπικνέονται, ἐξ ὧν στάσιες
ἐγγίνονται, ἐκ δὲ τῶν στασίων φόνος· ἐκ δὲ τοῦ φόνου ἀπέβη ἐς μουναρχίην, καὶ ἐν τούτῳ διέδεξε
ὅσῳ ἐστὶ τοῦτο ἄριστον. (4) δήμου τε αὖ ἄρχοντος ἀδύνατα μὴ οὐ κακότητα ἐγγίνεσθαι· κακότητος
τοίνυν ἐγγινομένης ἐς τὰ κοινὰ ἔχθεα μὲν οὐκ ἐγγίνεται τοῖσι κακοῖσι, φιλίαι δὲ ἰσχυραί· οἱ γὰρ
κακοῦντες τὰ κοινὰ συγκύψαντες ποιεῦσι. τοῦτο δὲ τοιοῦτο γίνεται ἐς ὃ ἂν προστάς τις τοῦ δήμου
τοὺς τοιούτους παύσῃ. ἐκ δὲ αὐτῶν θωμάζεται οὗτος δὴ ὑπὸ τοῦ δήμου, θωμαζόμενος δὲ ἀν᾽ ὦν
ἐφάνη μούναρχος ἐών, καὶ ἐν τούτῳ δηλοῖ καὶ οὗτος ὡς ἡ μουναρχίη κράτιστον. (5) ἑνὶ δὲ ἔπεϊ πάντα
συλλαβόντα εἰπεῖν, κόθεν ἡμῖν ἡ ἐλευθερίη ἐγένετο καὶ τεῦ δόντος; κότερα παρὰ τοῦ δήμου ἢ
ὀλιγαρχίης ἢ μουνάρχου; ἔχω τοίνυν γνώμην ἡμέας ἐλευθερωθέντας διὰ ἕνα ἄνδρα τὸ τοιοῦτο
περιστέλλειν, χωρίς τε τούτου πατρίους νόμους μὴ λύειν ἔχοντας εὖ· οὐ γὰρ ἄμεινον„.
| [3,82] LXXXII. Tel fut l'avis de Mégabyse. Darius parla le troisième, et proposa le
sien en ces termes : «L'avis de Mégabyse contre la démocratie me paraît juste
et plein de sens ; il n'en est pas de même de ce qu'il a avancé en faveur de
l'oligarchie. Les trois sortes de gouvernements que l'on puisse proposer, le
démocratique, l'oligarchique et le monarchique, étant aussi parfaits qu'ils
peuvent l'être, je dis que l'état monarchique l'emporte de beaucoup sur les deux
autres ; car il est constant qu'il n'y a rien de meilleur que le gouvernement
d'un seul homme, quand il est homme de bien. Un tel homme ne peut manquer de
gouverner ses sujets d'une manière irrépréhensible : les délibérations sont
secrètes, les ennemis n'en ont aucune connaissance. Il n'en est pas ainsi de
l'oligarchie : ce gouvernement étant composé de plusieurs personnes qui
s'appliquent à la vertu dans la vue du bien public, il naît ordinairement entre
elles des inimitiés particulières et violentes. Chacun veut primer, chacun vent
que son opinion prévale : de là les haines réciproques et les séditions; des
séditions on passe aux meurtres, et des meurtres on revient ordinairement à la
monarchie. Cela prouve combien le gouvernement d'un seul est préférable à celui
de plusieurs. D'un autre côté, quand le peuple commande, il est impossible qu'il
ne s'introduise beaucoup de désordre dans un État. La corruption, une fois
établie dans la république, ne produit point des haines entre les méchants ;
elle les unit, au contraire, par les liens d'une étroite amitié : car ceux qui
perdent l'État agissent de concert et se soutiennent mutuellement. Ils
continuent toujours à faire le mal, jusqu'à ce qu'il s'élève quelque grand
personnage qui les réprime en prenant autorité sur le peuple. Cet homme se fait
admirer, et cette admiration en fait un monarque ; ce qui nous prouve encore
que, de tous les gouvernements, le monarchique est le meilleur : mais enfin,
pour tout dire en peu de mots, d'où nous est venue la liberté ? de qui la
tenons-nous ? du peuple, de l'oligarchie, ou d'un monarque ? Puisqu'il est donc
vrai que c'est par un seul homme que nous avons été délivrés de l'esclavage, je
conclus qu'il faut nous en tenir au gouvernement d'un seul : d'ailleurs on ne
doit point renverser tes lois de la patrie lorsqu'elles sont sages; cela serait
dangereux.»
| [3,83] Γνῶμαι μὲν δὴ τρεῖς αὗται προεκέατο, οἱ δὲ τέσσερες τῶν ἑπτὰ ἀνδρῶν προσέθεντο ταύτῃ. ὡς
δὲ ἑσσώθη τῇ γνώμῃ ὁ Ὀτάνης Πέρσῃσι ἰσονομίην σπεύδων ποιῆσαι, ἔλεξε ἐς μέσον αὐτοῖσι τάδε.
(2) “ἄνδρες στασιῶται, δῆλα γὰρ δὴ ὅτι δεῖ ἕνα γε τινὰ ἡμέων βασιλέα γενέσθαι, ἤτοι κλήρῳ γε
λαχόντα, ἢ ἐπιτρεψάντων τῷ Περσέων πλήθεϊ τὸν ἂν ἐκεῖνο ἕληται, ἢ ἄλλῃ τινὶ μηχανῇ. ἐγὼ μέν
νυν ὑμῖν οὐκ ἐναγωνιεῦμαι· οὔτε γὰρ ἄρχειν οὔτε ἄρχεσθαι ἐθέλω· ἐπὶ τούτῳ δὲ ὑπεξίσταμαι τῆς
ἀρχῆς, ἐπ᾽ ᾧ τε ὑπ᾽ οὐδενὸς ὑμέων ἄρξομαι, οὔτε αὐτὸς ἐγὼ οὔτε οἱ ἀπ᾽ ἐμεῦ αἰεὶ γινόμενοι„. (3)
τούτου εἴπαντος ταῦτα ὡς συνεχώρεον οἱ ἓξ ἐπὶ τούτοισι, οὗτος μὲν δή σφι οὐκ ἐνηγωνίζετο ἀλλ᾽ ἐκ
μέσου κατῆστο, καὶ νῦν αὕτη ἡ οἰκίη διατελέει μούνη ἐλευθέρη ἐοῦσα Περσέων καὶ ἄρχεται τοσαῦτα
ὅσα αὐτὴ θέλει, νόμους οὐκ ὑπερβαίνουσα τοὺς Περσέων.
| [3,83] LXXXIII. Tels furent les trois sentiments proposés. Le dernier fut approuvé par
les quatre d'entre les sept qui n'avaient point encore opiné. Alors Otanes, qui
désirait ardemment d'établir l'isonomie, voyant que son avis n'avait point
prévalu, se leva au milieu de l'assemblée, et parla ainsi : «Perses, puisqu'il
faut que l'un de nous devienne roi, soit que le sort ou les suffrages de la
nation le placent sur le trône, soit qu'il y monte par quelque autre voie, vous
ne m'aurez point pour concurrent ; je ne veux ni commander ni obéir : je vous
cède l'empire, et je m’en retire, à condition cependant que je ne serai sous la
puissance d'aucun de vous, ni moi, ni les miens, ni mes descendants à
perpétuité.»
Les six autres lui accordèrent sa demande. Il se retira de l'assemblée, et
n'entra point en concurrence avec eux : aussi sa maison est-elle encore
aujourd'hui la seule de toute la Perse qui jouisse d'une pleine liberté, n'étant
soumise qu'autant qu'elle le veut bien, pourvu néanmoins qu'elle ne transgresse
en rien les lois du pays.
| [3,84] Οἱ δὲ λοιποὶ τῶν ἑπτὰ ἐβουλεύοντο ὡς βασιλέα δικαιότατα στήσονται· καί σφι ἔδοξε Ὀτάνῃ
μὲν καὶ τοῖσι ἀπὸ Ὀτάνεω αἰεὶ γινομένοισι, ἢν ἐς ἄλλον τινὰ τῶν ἑπτὰ ἔλθῃ ἡ βασιληίη, ἐξαίρετα
δίδοσθαι ἐσθῆτά τε Μηδικὴν ἔτεος ἑκάστου καὶ τὴν πᾶσαν δωρεὴν ἣ γίνεται ἐν Πέρσῃσι τιμιωτάτη.
τοῦδε δὲ εἵνεκεν ἐβούλευσάν οἱ δίδοσθαι ταῦτα, ὅτι ἐβούλευσέ τε πρῶτος τὸ πρῆγμα καὶ συνέστησε
αὐτούς. (2) ταῦτα μὲν δὴ Ὀτάνῃ ἐξαίρετα, τάδε δὲ ἐς τὸ κοινὸν ἐβούλευσαν, παριέναι ἐς τὰ βασιλήια
πάντα τὸν βουλόμενον τῶν ἑπτὰ ἄνευ ἐσαγγελέος, ἢν μὴ τυγχάνῃ εὕδων μετὰ γυναικὸς βασιλεύς,
γαμέειν δὲ μὴ ἐξεῖναι ἄλλοθεν τῷ βασιλέι ἢ ἐκ τῶν συνεπαναστάντων. (3) περὶ δὲ τῆς βασιληίης
ἐβούλευσαν τοιόνδε· ὅτευ ἂν ὁ ἵππος ἡλίου ἐπανατέλλοντος πρῶτος φθέγξηται, ἐν τῷ προαστείῳ
αὐτῶν ἐπιβεβηκότων, τοῦτον ἔχειν τὴν βασιληίην.
| [3,84] LXXXIV. Les six autres Perses consultèrent ensemble sur le moyen d'élire un roi
de la manière la plus juste. Il fut d'abord résolu que, la royauté étant
destinée à l'un d'entre eux, on donnerait tous les ans par distinction à
Otanes, à lui et à ses descendants à perpétuité, un habit à la médique, et
qu'on lui ferait les présents que les Perses regardent comme les plus
honorables. Cette distinction lui fut accordée, parce qu'il avait le premier
formé le projet de détrôner le mage, et qu'il les avait assemblés pour
l'exécuter. Ces honneurs le regardaient spécialement ; mais ils firent pour
eux-mêmes des règlements généraux. Il fut arrêté premièrement que chacun des
sept aurait au palais ses entrées libres, sans être obligé de se faire annoncer,
excepté quand le roi serait au lit avec sa femme ; secondement, que le roi ne
pourrait prendre femme ailleurs que dans la maison de ceux qui avaient détrôné
le mage. Quant à la manière dont il fallait élire le nouveau roi, il fut décidé
que, le lendemain matin, ils se rendraient à cheval devant la ville, et qu'on
reconnaîtrait pour roi celui dont le cheval hennirait le premier au lever du
soleil .
| [3,85] Δαρείῳ δὲ ἦν ἱπποκόμος ἀνὴρ σοφός, τῷ οὔνομα ἦν Οἰβάρης. πρὸς τοῦτον τὸν ἄνδρα, ἐπείτε
διελύθησαν, ἔλεξε Δαρεῖος τάδε. “Οἴβαρες, ἡμῖν δέδοκται περὶ τῆς βασιληίης ποιέειν κατὰ τάδε· ὅτευ
ἂν ὁ ἵππος πρῶτος φθέγξηται ἅμα τῷ ἡλίῳ ἀνιόντι αὐτῶν ἐπαναβεβηκότων, τοῦτον ἔχειν τὴν
βασιληίην. νῦν ὦν εἴ τινα ἔχεις σοφίην, μηχανῶ ὡς ἂν ἡμεῖς σχῶμεν τοῦτο τὸ γέρας καὶ μὴ ἄλλος
τις„. (2) ἀμείβεται Οἰβάρης τοῖσιδε. “εἰ μὲν δὴ ὦ δέσποτα ἐν τούτῳ τοι ἐστὶ ἢ βασιλέα εἶναι ἢ μή,
θάρσεε τούτου εἵνεκεν καὶ θυμὸν ἔχε ἀγαθόν, ὡς βασιλεὺς οὐδεὶς ἄλλος πρὸ σεῦ ἔσται· τοιαῦτα ἔχω
φάρμακα„. λέγει Δαρεῖος “εἰ τοίνυν τι τοιοῦτον ἔχεις σόφισμα, ὥρη μηχανᾶσθαι καὶ μὴ
ἀναβάλλεσθαι, ὡς τῆς ἐπιούσης ἡμέρης ὁ ἀγὼν ἡμῖν ἐστί„. (3) ἀκούσας ταῦτα ὁ Οἰβάρης ποιέει
τοιόνδε· ὡς ἐγίνετο ἡ νύξ, τῶν θηλέων ἵππων μίαν, τὴν ὁ Δαρείου ἵππος ἔστεργε μάλιστα, ταύτην
ἀγαγὼν ἐς τὸ προάστειον κατέδησε καὶ ἐπήγαγε τὸν Δαρείου ἵππον, καὶ τὰ μὲν πολλὰ περιῆγε
ἀγχοῦ τῇ ἵππῳ ἐγχρίμπτων τῇ θηλέῃ, τέλος δὲ ἐπῆκε ὀχεῦσαι τὸν ἵππον.
| [3,85] LXXXV. Darius avait un habile écuyer, nommé Oebarsès. Au sortir de l'assemblée,
Darius s'adressant à lui : «Oebarès, lui dit-il, il a été arrêté entre nous
que, demain matin, nous monterions à cheval, et que celui-là serait roi dont le
cheval hennirait le premier au soleil levant. Fais donc usage de toute ton
habileté, afin que j'obtienne ce haut rang préférablement à tout autre. -
Seigneur, répondit Oebarès, si votre élection ne dépend que de cela, prenez
courage, et ne vous mettez pas en peine : personne n'aura sur vous la
préférence; j'ai un secret infaillible.»
«Si tu en as véritablement un, reprit Darius, il est temps d'en faire usage ;
il n'y a point à différer : demain notre sort sera décidé.»
Sur cet avis, sitôt que la nuit fut venue, Oebarès prit une des cavales que le
cheval de Darius aimait le plus. Il la mena dans le faubourg, l'y attacha, et en
fit approcher le cheval de son maître, le fit passer et repasser plusieurs fois
autour de cette cavale, et enfin il lui permit de la saillir.
| [3,86] Ἅμ᾽ ἡμέρῃ δὲ διαφωσκούσῃ οἱ ἓξ κατὰ συνεθήκαντο παρῆσαν ἐπὶ τῶν ἵππων· διεξελαυνόντων
δὲ κατὰ τὸ προάστειον, ὡς κατὰ τοῦτο τὸ χωρίον ἐγίνοντο ἵνα τῆς παροιχομένης νυκτὸς κατεδέδετο
ἡ θήλεα ἵππος, ἐνθαῦτα ὁ Δαρείου ἵππος προσδραμὼν ἐχρεμέτισε· (2) ἅμα δὲ τῷ ἵππῳ τοῦτο
ποιήσαντι ἀστραπὴ ἐξ αἰθρίης καὶ βροντὴ ἐγένετο. ἐπιγενόμενα δὲ ταῦτα τῷ Δαρείῳ ἐτελέωσέ μιν
ὥσπερ ἐκ συνθέτου τευ γενόμενα· οἳ δὲ καταθορόντες ἀπὸ τῶν ἵππων προσεκύνεον τὸν Δαρεῖον.
| [3,86] LXXXVI. Le lendemain, dès qu'il fut jour, les six Perses, selon leur convention,
se trouvèrent à cheval au rendez-vous. Comme ils allaient de côté et d'autre
dans le faubourg, lorsqu'ils furent vers l'endroit où, la nuit précédente, la
cavale avait été attachée, le cheval de Darius y accourut, et se mit à hennir.
En même temps il parut un éclair, et l'on entendit un coup de tonnerre, quoique
l'air fût alors serein. Ces signes, survenant comme le ciel eût été
d'intelligence avec Darius, furent pour ce prince une espèce d'inauguration. Les
cinq autres descendirent aussitôt de cheval, se prosternèrent à ses pieds, et le
reconnurent pour leur roi.
| [3,87] Οἳ μὲν δή φασι τὸν Οἰβάρεα ταῦτα μηχανήσασθαι, οἳ δὲ τοιάδε (καὶ γὰρ ἐπ᾽ ἀμφότερα λέγεται
ὑπὸ Περσέων), ὡς τῆς ἵππου ταύτης τῶν ἄρθρων ἐπιψαύσας τῇ χειρὶ ἔχοι αὐτὴν κρύψας ἐν τῇσι
ἀναξυρίσι· ὡς δὲ ἅμα τῷ ἡλίῳ ἀνιόντι ἀπίεσθαι μέλλειν τοὺς ἵππους, τὸν Οἰβάρεα τοῦτον ἐξείραντα
τὴν χεῖρα πρὸς τοῦ Δαρείου ἵππου τοὺς μυκτῆρας προσενεῖκαι, τὸν δὲ αἰσθόμενον φριμάξασθαί τε
καὶ χρεμετίσαι.
| [3,87] LXXXVII. Tel fut, suivant quelques-uns, le moyen dont se servit Oebarès; mais
d'autres rapportent le fait différemment, car les Perses le content de deux
manières. Ils disent donc qu'Oebarès passa la main sur les parties naturelles de
cette cavale, et qu'ensuite il la tint cachée sous sa ceinture ; que dans
le moment que le soleil commençait à paraître, les chevaux faisant le premier
pas pour se mettre en marche, il la tira de sa ceinture, l'approcha des naseaux
du cheval de Darius ; que cet animal, sentant l'odeur de la cavale, se mit à
ronfler et à hennir.
| [3,88] Δαρεῖός τε δὴ ὁ Ὑστάσπεος βασιλεὺς ἀπεδέδεκτο, καί οἱ ἦσαν ἐν τῇ Ἀσίῃ πάντες κατήκοοι
πλὴν Ἀραβίων, Κύρου τε καταστρεψαμένου καὶ ὕστερον αὖτις Καμβύσεω. Ἀράβιοι δὲ οὐδαμὰ
κατήκουσαν ἐπὶ δουλοσύνῃ Πέρσῃσι, ἀλλὰ ξεῖνοι ἐγένοντο παρέντες Καμβύσεα ἐπ᾽ Αἴγυπτον·
ἀεκόντων γὰρ Ἀραβίων οὐκ ἂν ἐσβάλοιεν Πέρσαι ἐς Αἴγυπτον. (2) γάμους τε τοὺς πρώτους ἐγάμεε
Πέρσῃσι ὁ Δαρεῖος, Κύρου μὲν δύο θυγατέρας Ἄτοσσάν τε καὶ Ἀρτυστώνην, τὴν μὲν Ἄτοσσαν
προσυνοικήσασαν Καμβύσῃ τε τῷ ἀδελφεῷ καὶ αὖτις τῷ Μάγῳ, τὴν δὲ Ἀρτυστώνην παρθένον· (3)
ἑτέρην δὲ Σμέρδιος τοῦ Κύρου θυγατέρα ἔγημε, τῇ οὔνομα ἦν Πάρμυς· ἔσχε δὲ καὶ τὴν τοῦ Ὀτάνεω
θυγατέρα, ἣ τὸν Μάγον κατάδηλον ἐποίησε· δυνάμιός τε πάντα οἱ ἐπιμπλέατο. πρῶτον μέν νυν
τύπον ποιησάμενος λίθινον ἔστησε· ζῷον δέ οἱ ἐνῆν ἀνὴρ ἱππεύς, ἐπέγραψε δὲ γράμματα λέγοντα
τάδε· “Δαρεῖος ὁ Ὑστάσπεος σύν τε τοῦ ἵππου τῇ ἀρετῇ„ τὸ οὔνομα λέγων “καὶ Οἰβάρεος τοῦ
ἱπποκόμου ἐκτήσατο τὴν Περσέων βασιληίην„.
| [3,88] LXXXVIII. Darius, fils d'Hystaspe, fut proclamé roi ; et tous les peuples de
l'Asie, qui avaient été subjugués par Cyrus et ensuite par Cambyse, lui furent
soumis, excepté les Arabes. Ceux-ci, en effet, n'ont jamais été esclaves des
Perses, mais leurs alliés. Ils donnèrent passage à Cambyse pour entrer en
Égypte. S'ils s'y fussent opposés, l'armée des Perses n'aurait jamais pu y
pénétrer. Ce fut avec des femmes perses que Darius contracta ses premiers
mariages : il épousa deux filles de Cyrus, Atosse et Artystone. Atosse avait été
femme de son frère Cambyse, et ensuite du mage ; Artystone était encore vierge.
Il prit ensuite pour femme Parmys, fille de Smerdis fils de Cyrus, et Phédyme,
fille d'Otanes, qui avait découvert l'imposture du mage.
Sa puissance étant affermie de tous côtés, il commença par faire ériger en
pierre sa statue équestre, avec cette inscription : DARIUS, FILS D'HYSTASPE, EST
PARVENU A L'EMPIRE DES PERSES PAR L'INSTINCT DE SON CHEVAL
(son nom était marqué dans l'inscription) ET L'ADRESSE D'OEBARÉS, SON ÉCUYER.
| [3,89] Ποιήσας δὲ ταῦτα ἐν Πέρσῃσι ἀρχὰς κατεστήσατο εἴκοσι, τὰς αὐτοὶ καλέουσι σατραπηίας·
καταστήσας δὲ τὰς ἀρχὰς καὶ ἄρχοντας ἐπιστήσας ἐτάξατο φόρους οἱ προσιέναι κατὰ ἔθνεά τε καὶ
πρὸς τοῖσι ἔθνεσι τοὺς πλησιοχώρους προστάσσων, καὶ ὑπερβαίνων τοὺς προσεχέας τὰ ἑκαστέρω
ἄλλοισι ἄλλα ἔθνεα νέμων. (2) ἀρχὰς δὲ καὶ φόρων πρόσοδον τὴν ἐπέτειον κατὰ τάδε διεῖλε. τοῖσι
μὲν αὐτῶν ἀργύριον ἀπαγινέουσι εἴρητο Βαβυλώνιον σταθμὸν τάλαντον ἀπαγινέειν, τοῖσι δὲ
χρυσίον ἀπαγινέουσι Εὐβοϊκόν. τὸ δὲ Βαβυλώνιον τάλαντον δύναται Εὐβοΐδας ὀκτὼ καὶ
ἑβδομήκοντα μνέας. (3) ἐπὶ γὰρ Κύρου ἄρχοντος καὶ αὖτις Καμβύσεω ἦν κατεστηκὸς οὐδὲν φόρου
πέρι, ἀλλὰ δῶρα ἀγίνεον. διὰ δὲ ταύτην τὴν ἐπίταξιν τοῦ φόρου καὶ παραπλήσια ταύτῃ ἄλλα
λέγουσι Πέρσαι ὡς Δαρεῖος μὲν ἦν κάπηλος, Καμβύσης δὲ δεσπότης, Κῦρος δὲ πατήρ, ὃ μὲν ὅτι
ἐκαπήλευε πάντα τὰ πρήγματα, ὁ δὲ ὅτι χαλεπός τε ἦν καὶ ὀλίγωρος, ὁ δὲ ὅτι ἤπιός τε καὶ ἀγαθά
σφι πάντα ἐμηχανήσατο.
| [3,89] LXXXIX. Cela fait, il partagea ses États en vingt gouvernements, que les Perses
appellent satrapies, et dans chacune il établit un gouverneur. Il régla le
tribut que chaque nation devait lui payer, et, à cet effet, il joignait à une
nation les peuples limitrophes ; et quelquefois, passant par-dessus ceux qui
étaient voisins, il mettait dans un même département des peuples éloignés l'un de l'autre.
Voici comment il distribua les satrapies, et régla les tributs que chacune lui
devait rendre tous les ans. Il fut ordonné que ceux qui devaient payer leur
contribution en argent la payeraient au poids du talent babylonien, et que ceux
qui la devaient en or la payeraient au poids du talent euboïque : or le talent
babylonien vaut soixante et dix mines euboïques.
Sous le règne de Cyrus, et même sous celui de Cambyse, il n'y avait rien de
réglé concernant les tributs; on donnait seulement au roi un don gratuit. Ces
impôts, et autres pareils établissements, font dire aux Perses que Darius était
un marchand, Cambyse un maître, et Cyrus un père : le premier, parce qu'il
faisait argent de tout ; le deuxième, parce qu'il était dur et négligent ; et le
troisième enfin , parce qu'il était doux, et qu'il avait fait à ses sujets le
plus de bien qu'il avait pu.
| | |