[4,1294a] Δοκεῖ δ' εἶναι τῶν ἀδυνάτων τὸ εὐνομεῖσθαι
τὴν μὴ ἀριστοκρατουμένην πόλιν ἀλλὰ πονηροκρατουμένην, ὁμοίως δὲ
καὶ ἀριστοκρατεῖσθαι τὴν μὴ εὐνομουμένην. Οὐκ ἔστι δὲ εὐνομία τὸ εὖ
κεῖσθαι τοὺς νόμους, μὴ πείθεσθαι δέ. Διὸ μίαν μὲν εὐνομίαν
ὑποληπτέον εἶναι τὸ πείθεσθαι τοῖς κειμένοις νόμοις, ἑτέραν δὲ τὸ
καλῶς κεῖσθαι τοὺς νόμους οἷς ἐμμένουσιν (ἔστι γὰρ πείθεσθαι καὶ
κακῶς κειμένοις). Τοῦτο δὲ ἐνδέχεται διχῶς· ἢ γὰρ τοῖς ἀρίστοις τῶν
ἐνδεχομένων αὐτοῖς, ἢ τοῖς ἁπλῶς ἀρίστοις.
§ 4. Δοκεῖ δὲ ἀριστοκρατία μὲν εἶναι μάλιστα τὸ τὰς τιμὰς νενεμῆσθαι
κατ' ἀρετήν (ἀριστοκρατίας μὲν γὰρ ὅρος ἀρετή, ὀλιγαρχίας δὲ πλοῦτος,
δήμου δ' ἐλευθερία)· τὸ δ' ὅ τι ἂν δόξῃ τοῖς πλείοσιν, ἐν πάσαις
ὑπάρχει· καὶ γὰρ ἐν ὀλιγαρχίᾳ καὶ ἐν ἀριστοκρατίᾳ καὶ ἐν δήμοις, ὅ τι ἂν
δόξῃ τῷ πλείονι μέρει τῶν μετεχόντων τῆς πολιτείας, τοῦτ' ἐστὶ κύριον.
Ἐν μὲν οὖν ταῖς πλείσταις πόλεσι τοῦτο τῆς πολιτείας εἶδος καλεῖται·
μόνον γὰρ ἡ μίξις στοχάζεται τῶν εὐπόρων καὶ τῶν ἀπόρων, πλούτου
καὶ ἐλευθερίας· ·σχεδὸν γὰρ παρὰ τοῖς πλείστοις οἱ εὔποροι τῶν καλῶν
κἀγαθῶν δοκοῦσι κατέχειν χώρανν·
§ 5. ἐπεὶ δὲ τρία ἐστὶ τὰ ἀμφισβητοῦντα τῆς ἰσότητος τῆς πολιτείας,
ἐλευθερία πλοῦτος ἀρετή ήτὸ γὰρ τέταρτον, ὃ καλοῦσιν εὐγένειαν,
ἀκολουθεῖ τοῖς δυσίν· ἡ γὰρ εὐγένειά ἐστιν ἀρχαῖος πλοῦτος καὶ ἀρετήή,
φανερὸν ὅτι τὴν μὲν τοῖν δυοῖν μίξιν, τῶν εὐπόρων καὶ τῶν ἀπόρων,
πολιτείαν λεκτέον, τὴν δὲ τῶν τριῶν ἀριστοκρατίαν μάλιστα τῶν ἄλλων
παρὰ τὴν ἀληθινὴν καὶ πρώτην.
§ 6. Ὅτι μὲν οὖν ἔστι καὶ ἕτερα πολιτείας εἴδη παρὰ μοναρχίαν τε καὶ
δημοκρατίαν καὶ ὀλιγαρχίαν, εἴρηται, καὶ ποῖα ταῦτα, καὶ τί διαφέρουσιν
ἀλλήλων αἵ τ' ἀριστοκρατίαι καὶ αἱ πολιτεῖαι τῆς ἀριστοκρατίας· καὶ ὅτι
οὐ πόρρω αὗται ἀλλήλων, φανερόν.
CHAPITRE VII.
§ 1. Τίνα δὲ τρόπον γίνεται παρὰ δημοκρατίαν καὶ ὀλιγαρχίαν ἡ
καλουμένη πολιτεία, καὶ πῶς αὐτὴν δεῖ καθιστάναι, λέγωμεν ἐφεξῆς τοῖς
εἰρημένοις. Ἅμα δὲ δῆλον ἔσται καὶ οἷς ὁρίζονται τὴν δημοκρατίαν καὶ
τὴν ὀλιγαρχίαν· ληπτέον γὰρ τὴν τούτων διαίρεσιν, εἶτα ἐκ τούτων ἀφ'
ἑκατέρας ὥσπερ σύμβολον λαμβάνοντας συνθετέον.
§ 2. Εἰσὶ δὲ ὅροι τρεῖς τῆς συνθέσεως καὶ μίξεως. Ἢ γὰρ ἀμφότερα
ληπτέον ἃ ἑκάτεροι νομοθετοῦσιν, οἷον περὶ τοῦ δικάζειν (ἐν μὲν γὰρ
ταῖς ὀλιγαρχίαις τοῖς εὐπόροις ζημίαν τάττουσιν ἂν μὴ δικάζωσι, τοῖς δ'
ἀπόροις οὐδένα μισθόν, ἐν δὲ ταῖς δημοκρατίαις τοῖς μὲν ἀπόροις
μισθόν, τοῖς δ' εὐπόροις οὐδεμίαν ζημίαν· κοινὸν δὲ καὶ μέσον τούτων
ἀμφότερα ταῦτα, διὸ καὶ πολιτικόν, μέμεικται γὰρ ἐξ ἀμφοῖν)·
| [4,1294a] Or, il semble impossible qu'un gouvernement dirigé par les meilleurs citoyens,
ne soit pas un excellent gouvernement, un mauvais gouvernement ne devant peser
que sur les États régis par des hommes corrompus. Et réciproquement, il semble
impossible que là où l'administration n'est pas bonne, l'État soit gouverné par les
meilleurs citoyens.
Mais il faut remarquer que de bonnes lois ne constituent pas à elles seules un bon
gouvernement, et qu'il importe surtout que ces bonnes lois soient observées. Il n'y
a donc de bon gouvernement d'abord que celui où l'on obéit à la loi, puis ensuite
que celui où la loi à laquelle on obéit est fondée sur la raison ; car on pourrait aussi
obéir à des lois déraisonnables. L'excellence de la loi peut du reste s'entendre de
deux façons : la loi est, ou la meilleure possible, relativement aux circonstances ;
ou la meilleure possible, d'une manière générale et absolue.
§ 4. Le principe essentiel de l'aristocratie paraît être d'attribuer la prédominance
politique à la vertu; car le caractère spécial de l'aristocratie, c'est la vertu, comme
la richesse est celui de l'oligarchie, et la liberté, celui de la démocratie. Toutes trois
admettent d'ailleurs la suprématie de la majorité, puisque, dans les unes comme
dans les autres, la décision prononcée par le plus grand nombre des membres du
corps politique, a toujours force de loi. Si la plupart des gouvernements prennent
le nom de république, c'est qu'ils cherchent presque tous uniquement à combiner
les droits des riches et des pauvres, de la fortune et de la liberté; et la richesse
semble presque partout tenir lieu de mérite et de vertu.
§ 5. Trois éléments dans l'État se disputent l'égalité ; ce sont la liberté, la richesse et
le mérite. Je ne parle pas d'un quatrième qu'on appelle la noblesse; car il n'est
qu'une conséquence des deux autres, et la noblesse est une ancienneté de richesse
et de talent. Or, la combinaison des deux premiers éléments donne évidemment la
république, et la combinaison de tous les trois donne l'aristocratie plutôt que toute
autre forme. Je classe toujours à part la véritable aristocratie, dont j'ai parlé
d'abord.
§ 6. Ainsi, nous avons démontré qu'à côté de la monarchie, de la démocratie et de
l'oligarchie, il existe encore d'autres systèmes politiques. Nous avons expliqué la
nature de ces systèmes, les différences des aristocraties entre elles, et les
différences des républiques aux aristocraties; enfin on doit voir clairement que
toutes ces formes sont moins éloignées qu'on ne pourrait le croire les unes des autres.
CHAPITRE VII.
§ 1. Comme conséquence de ces premières considérations, nous examinerons
maintenant comment la république proprement dite se forme à côté de l'oligarchie
et de la démocratie, et comment elle doit être constituée. Cette recherche aura de
plus l'avantage de montrer nettement les limites de l'oligarchie et de la
démocratie; car c'est en empruntant quelques principes à l'une et à l'autre de ces
deux constitutions si opposées, que nous formerons la république, comme on
reforme un objet de reconnaissance, en en réunissant les parties séparées.
§ 2. Il y a ici trois modes possibles de combinaison et de mélange. D'abord, on peut
réunir la législation de l'oligarchie et de la démocratie sur une matière
quelconque, par exemple sur le pouvoir judiciaire. Ainsi, dans l'oligarchie, on met
le riche à l'amende s'il ne se rend pas au tribunal, et l'on ne paye pas le pauvre
pour y siéger; dans les démocraties au contraire, indemnité aux pauvres, sans
amende pour les riches. C'est un terme commun et moyen de ces institutions
diverses que la réunion de toutes deux : amende aux riches, indemnité aux
pauvres; et l'institution nouvelle est républicaine, car elle n'est que le mélange des
deux autres.
|