|
[3,20] Ἐπείτε δὲ τῷ Καμβύσῃ ἐκ τῆς Ἐλεφαντίνης ἀπίκοντο οἱ Ἰχθυοφάγοι, ἔπεμπε αὐτοὺς ἐς τοὺς
Αἰθίοπας ἐντειλάμενος τὰ λέγειν χρῆν καὶ δῶρα φέροντας πορφύρεόν τε εἷμα καὶ χρύσεον στρεπτὸν
περιαυχένιον καὶ ψέλια καὶ μύρου ἀλάβαστρον καὶ φοινικηίου οἴνου κάδον. οἱ δὲ Αἰθίοπες οὗτοι, ἐς
τοὺς ἀπέπεμπε ὁ Καμβύσης, λέγονται εἶναι μέγιστοι καὶ κάλλιστοι ἀνθρώπων πάντων. (2) νόμοισι
δὲ καὶ ἄλλοισι χρᾶσθαι αὐτοὺς κεχωρισμένοισι τῶν ἄλλων ἀνθρώπων καὶ δὴ καὶ κατὰ τὴν
βασιληίην τοιῷδε· τὸν ἂν τῶν ἀστῶν κρίνωσι μέγιστόν τε εἶναι καὶ κατὰ τὸ μέγαθος ἔχειν τὴν ἰσχύν,
τοῦτον ἀξιοῦσι βασιλεύειν.
| [3,20] XX. Lorsque les Ichtyophages furent arrivés d'Éléphantine, Cambyse leur
donna ses ordres sur ce qu'ils devaient dire, et les envoya en Éthiopie avec des
présents pour le roi. Ils consistaient en un habit de pourpre, un collier d'or,
des bracelets, un vase d'albâtre plein de parfums, et une barrique de vin de
palmier. On dit que les Éthiopiens, à qui Cambyse envoya cette ambassade, sont
les plus grands et les mieux faits de tous les hommes ; qu'ils ont des lois et
des coutumes différentes de celles de toutes les autres nations, et qu'entre
autres ils ne jugent digne de porter la couronne que celui d'entre eux qui est
le plus grand, et dont la force est proportionnée à la taille.
| [3,21] Ἐς τούτους δὴ ὦν τοὺς ἄνδρας ὡς ἀπίκοντο οἱ Ἰχθυοφάγοι, διδόντες τὰ δῶρα τῷ, βασιλέι
αὐτῶν ἔλεγον τάδε. “βασιλεὺς ὁ Περσέων Καμβύσης, βουλόμενος φίλος καὶ ξεῖνός τοι γενέσθαι,
ἡμέας τε ἀπέπεμψε ἐς λόγους τοι ἐλθεῖν κελεύων, καὶ δῶρα ταῦτά τοι διδοῖ τοῖσι καὶ αὐτὸς μάλιστα
ἥδεται χρεώμενος„. (2) ὁ δὲ Αἰθίοψ μαθὼν ὅτι κατόπται ἥκοιεν, λέγει πρὸς αὐτοὺς τοιάδε. “οὔτε ὁ
Περσέων βασιλεὺς δῶρα ὑμέας ἔπεμψε φέροντας προτιμῶν πολλοῦ ἐμοὶ ξεῖνος γενέσθαι, οὔτε ὑμεῖς
λέγετε ἀληθέα (ἥκετε γὰρ κατόπται τῆς ἐμῆς ἀρχῆς), οὔτε ἐκεῖνος ἀνήρ δίκαιος. εἰ γὰρ ἦν δίκαιος,
οὔτ᾽ ἂν ἐπεθύμησε χώρης ἄλλης ἢ τῆς ἑωυτοῦ, οὔτ᾽ ἂν ἐς δουλοσύνην ἀνθρώπους ἦγε ὑπ᾽ ὧν μηδὲν
ἠδίκηται. νῦν δὲ αὐτῷ τόξον τόδε διδόντες τάδε ἔπεα λέγετε„. (3) βασιλεὺς ὁ Αἰθιόπων συμβουλεύει
τῷ Περσέων βασιλέι, ἐπεὰν οὕτω εὐπετέως ἕλκωσι τὰ τόξα Πέρσαι ἐόντα μεγάθεϊ τοσαῦτα, τότε ἐπ᾽
Αἰθίοπας τοὺς μακροβίους πλήθεϊ ὑπερβαλλόμενον στρατεύεσθαι· μέχρι δὲ τούτου θεοῖσι εἰδέναι
χάριν, οἳ οὐκ ἐπὶ νόον τρέπουσι Αἰθιόπων παισὶ γῆν ἄλλην προσκτᾶσθαι τῇ ἑωυτῶν„.
| [3,21] XXI. Les Ichtyophages, étant arrivés chez ces peuples, offrirent leurs présents
au roi, et lui parlèrent ainsi: «Cambyse, roi des Perses, qui désire votre
amitié et votre alliance, nous a envoyés pour en conférer avec vous : il vous
offre ces présents, dont l'usage le flatte le plus.» Le roi, qui n'ignorait pas
que ces Ichtyophages étaient des espions, leur répondit en ces termes : «Ce
n'est pas le vif désir de faire amitié avec moi qui a porté le roi des Perses à
vous envoyer ici avec ces présents, et vous ne me dites pas la vérité. Vous
venez examiner les forces de mes États, et votre maître n'est pas un homme
juste. S'il l'était, il n'envierait pas un pays qui ne lui appartient pas, et il
ne chercherait point à réduire en esclavage un peuple dont il n'a reçu aucune
injure. Portez-lui donc cet arc de ma part, et dites-lui : Le roi d'Éthiopie
conseille à celui de Perse de venir lui faire la guerre avec des forces plus
nombreuses, lorsque les Perses pourront bander un arc de cette grandeur aussi
facilement que moi. Mais en attendant qu'il rende grâces aux dieux de n'avoir
pas inspiré aux Éthiopiens le désir d'agrandir leur pays par de nouvelles
conquêtes!»
| [3,22] Ταῦτα δὲ εἴπας καὶ ἀνεὶς τὸ τόξον παρέδωκε τοῖσι ἥκουσι. λαβὼν δὲ τὸ εἷμα τὸ πορφύρεον
εἰρώτα ὅ τι εἴη καὶ ὅκως πεποιημένον· εἰπόντων δὲ τῶν Ἰχθυοφάγων τὴν ἀληθείην περὶ τῆς
πορφύρης καὶ τῆς βαφῆς, δολεροὺς μὲν τοὺς ἀνθρώπους ἔφη εἶναι, δολερὰ δὲ αὐτῶν τὰ εἵματα. (2)
δεύτερα δὲ τὸν χρυσὸν εἰρώτα τὸν στρεπτὸν τὸν περιαυχένιον καὶ τὰ ψέλια· ἐξηγεομένων δὲ τῶν
Ἰχθυοφάγων τὸν κόσμον αὐτοῦ, γελάσας ὁ βασιλεὺς καὶ νομίσας εἶναι σφέα πέδας εἶπε ὡς παρ᾽
ἑωυτοῖσι εἰσὶ ῥωμαλεώτεραι τουτέων πέδαι. (3) τρίτον δὲ εἰρώτα τὸ μύρον· εἰπόντων δὲ τῆς ποιήσιος
πέρι καὶ ἀλείψιος, τὸν αὐτὸν λόγον τὸν καὶ περὶ τοῦ εἵματος εἶπε. ὡς δὲ ἐς τὸν οἶνον ἀπίκετο καὶ
ἐπύθετο αὐτοῦ τὴν ποίησιν, ὑπερησθεὶς τῷ πόματι ἐπείρετο ὅ τι τε σιτέεται ὁ βασιλεὺς καὶ χρόνον
ὁκόσον μακρότατον ἀνὴρ Πέρσης ζώει. (4) οἳ δὲ σιτέεσθαι μὲν τὸν ἄρτον εἶπον, ἐξηγησάμενοι τῶν
πυρῶν τὴν φύσιν, ὀγδώκοντα δὲ ἔτεα ζόης πλήρωμα ἀνδρὶ μακρότατον προκεῖσθαι. πρὸς ταῦτα ὁ
Αἰθίοψ ἔφη οὐδὲν θωμάζειν εἰ σιτεόμενοι κόπρον ἔτεα ὀλίγα ζώουσι· οὐδὲ γὰρ ἂν τοσαῦτα δύνασθαι
ζώειν σφέας, εἰ μὴ τῷ πόματι ἀνέφερον, φράζων τοῖσι Ἰχθυοφάγοισι τὸν οἶνον· τούτῳ γὰρ ἑωυτοὺς
ὑπὸ Περσέων ἑσσοῦσθαι.
| [3,22] XXII. Ayant ainsi parlé, il débanda son arc, et te donna aux envoyés. Il prit
ensuite l'habit de pourpre, et leur demanda ce que c'était que la pourpre, et
comment elle se faisait. Quand les Ichtyophages lui eurent appris le véritable
procédé de cette teinture : «Ces hommes, dit-il, sont trompeurs ; leurs
vêtements le sont aussi.» Il les interrogea ensuite sur le collier et les
bracelets d'or. Les Ichtyophages lui ayant répondu que c'étaient des ornements,
il se mit à rire, et, les prenant pour des chaînes, il leur dit que les
Éthiopiens en avaient chez eux de plus fortes. Il leur parla en troisième lieu
des parfums qu'ils avaient apportés ; et lorsqu'ils lui en eurent expliqué la
composition et l'usage, il leur répondit comme il avait fait au sujet de l'habit
de pourpre. Mais lorsqu'il en fut venu au vin, et qu'il eut appris la manière de
le faire, il fut très content de cette boisson. Il leur demanda ensuite de quels
aliments se nourrissait le roi, et quelle était la plus longue durée de la vie
chez les Perses. Les envoyés lui répondirent qu'il vivait de pain, et lui
expliquèrent la nature du froment. Ils ajoutèrent ensuite que le plus long terme
de la vie des Perses était de quatre-vingts ans. Là-dessus, l'Éthiopien leur dit
qu'il n'était point étonné que des hommes qui ne se nourrissaient que de fumier
ne vécussent que peu d'années ; qu'il était persuadé qu'ils ne vivraient pas
même si longtemps s'ils ne réparaient leurs forces par cette boisson (il voulait
parler du vin) , et qu'en cela ils avaient un avantage sur les Éthiopiens.
| [3,23] Ἀντειρομένων δὲ τὸν βασιλέα τῶν Ἰχθυοφάγων τῆς ζόης καὶ διαίτης πέρι, ἔτεα μὲν ἐς εἴκοσι
καὶ ἑκατὸν τοὺς πολλοὺς αὐτῶν ἀπικνέεσθαι, ὑπερβάλλειν δὲ τινὰς καὶ ταῦτα, σίτησιν δὲ εἶναι κρέα
τε ἑφθὰ καὶ πόμα γάλα. (2) θῶμα δὲ ποιευμένων τῶν κατασκόπων περὶ τῶν ἐτέων, ἐπὶ κρήνην σφι
ἡγήσασθαι, ἀπ᾽ ἧς λουόμενοι λιπαρώτεροι ἐγίνοντο, κατά περ εἰ ἐλαίου εἴη· ὄζειν δὲ ἀπ᾽ αὐτῆς ὡς εἰ
ἴων. (3) ἀσθενὲς δὲ τὸ ὕδωρ τῆς κρήνης ταύτης οὕτω δή τι ἔλεγον εἶναι οἱ κατάσκοποι ὥστε μηδὲν
οἷόν τ᾽ εἶναι ἐπ᾽ αὐτοῦ ἐπιπλέειν, μήτε ξύλον μήτε τῶν ὅσα ξύλου ἐστὶ ἐλαφρότερα, ἀλλὰ πάντα
σφέα χωρέειν ἐς βυσσόν. τὸ δὲ ὕδωρ τοῦτο εἴ σφι ἐστὶ ἀληθέως οἷόν τι λέγεται, διὰ τοῦτο ἂν εἶεν,
τούτῳ τὰ πάντα χρεώμενοι, μακρόβιοι. (4) ἀπὸ τῆς κρήνης δὲ ἀπαλλασσομένων, ἀγαγεῖν σφεας ἐς
δεσμωτήριον ἀνδρῶν, ἔνθα τοὺς πάντας ἐν πέδῃσι χρυσέῃσι δεδέσθαι. ἔστι δὲ ἐν τούτοισι τοῖσι
Αἰθίοψι πάντων ὁ χαλκὸς σπανιώτατον καὶ τιμιώτατον. θεησάμενοι δὲ καὶ τὸ δεσμωτήριον,
ἐθεήσαντο καὶ τὴν τοῦ ἡλίου λεγομένην τράπεζαν.
| [3,23] XXIII. Les Ichtyophages interrogèrent à leur tour le roi sur la longueur de la
vie des Éthiopiens, et sur leur manière de vivre. Il leur répondit que la
plupart allaient jusqu'à cent vingt ans, et quelques-uns même au delà ; qu'ils
vivaient de viandes bouillies, et que le lait était leur boisson. Les espions
paraissant étonnés de la longue vie des Éthiopiens, il les conduisit à une
fontaine où ceux qui s'y baignent en sortent parfumés comme d'une odeur de
violette, et plus luisants que s'ils s'étaient frottés d'huile. Les espions
racontèrent à leur retour que l’eau de cette fontaine était si légère, que rien
n'y pouvait surnager, pas même le bois, ni les choses encore moins pesantes que
le bois ; mais que tout ce qu'on y jetait allait an fond. Si cette eau est
véritablement telle qu'on le dit, l'usage perpétuel qu'ils en font est peut-être
la cause d'une si longue vie. De la fontaine, le roi les conduisit à la prison.
Tous les prisonniers y étaient attachés avec des chaînes d'or ; car chez ces
Éthiopiens le cuivre est de tous les métaux le plus rare et le plus précieux.
Après qu'ils eurent visité la prison, on leur fit voir aussi ce qu'on appelle la
Table du Soleil.
| [3,24] Μετὰ δὲ ταύτην τελευταίας ἐθεήσαντο τὰς θήκας αὐτῶν, αἳ λέγονται σκευάζεσθαι ἐξ ὑέλου
τρόπῳ τοιῷδε· (2) ἐπεὰν τὸν νεκρὸν ἰσχνήνωσι, εἴτε δὴ κατά περ Αἰγύπτιοι εἴτε ἄλλως κως,
γυψώσαντες ἅπαντα αὐτὸν γραφῇ κοσμέουσι, ἐξομοιεῦντες τὸ εἶδος ἐς τὸ δυνατόν, ἔπειτα δέ οἱ
περιιστᾶσι στήλην ἐξ ὑέλου πεποιημένην κοίλην· ἣ δέ σφι πολλὴ καὶ εὐεργὸς ὀρύσσεται. (3) ἐν μέσῃ
δὲ τῇ στήλῃ ἐνεὼν διαφαίνεται ὁ νέκυς, οὔτε ὀδμὴν οὐδεμίαν ἄχαριν παρεχόμενος οὔτε ἄλλο ἀεικὲς
οὐδέν, καὶ ἔχει πάντα φανερὰ ὁμοίως αὐτῷ τῷ νέκυϊ. (4) ἐνιαυτὸν μὲν δὴ ἔχουσι τὴν στήλην ἐν τοῖσι
οἰκίοισι οἱ μάλιστα προσήκοντες, πάντων ἀπαρχόμενοι καὶ θυσίας οἱ προσάγοντες· μετὰ δὲ ταῦτα
ἐκκομίσαντες ἱστᾶσι περὶ τὴν πόλιν.
| [3,24] XXIV. Enfin on leur montra les cercueils des Éthiopiens, qui sont faits, à ce
qu'on dit, de verre, et dont voici le procédé. On dessèche d'abord le corps à la
façon des Égyptiens, ou de quelque autre manière on l'enduit ensuite entièrement
de plâtre, qu'on peint : de sorte qu'il ressemble, autant qu'il est possible, à
la personne même. Après cela, on le renferme dans une colonne creuse et
transparente de verre fossile, aisé à mettre en oeuvre, et qui se tire en
abondance des mines du pays. On aperçoit le mort à travers cette colonne, au
milieu de laquelle il est placé. Il n'exhale aucune mauvaise odeur, et n'a rien
de désagréable. Les plus proches parents du mort gardent cette colonne un an
entier dans leur maison. Pendant ce temps-là, ils lui offrent des victimes, et
les prémices de toutes choses. Ils la portent ensuite dehors, et la placent
quelque part autour de la ville.
| [3,25] Θεησάμενοι δὲ τὰ πάντα οἱ κατάσκοποι ἀπαλλάσσοντο ὀπίσω. ἀπαγγειλάντων δὲ ταῦτα
τούτων, αὐτίκα ὁ Καμβύσης ὀργὴν ποιησάμενος ἐστρατεύετο ἐπὶ τοὺς Αἰθίοπας, οὔτε παρασκευὴν
σίτου οὐδεμίαν παραγγείλας, οὔτε λόγον ἑωυτῷ δοὺς ὅτι ἐς τὰ ἔσχατα γῆς ἔμελλε στρατεύεσθαι· (2)
οἷα δὲ ἐμμανής τε ἐὼν καὶ οὐ φρενήρης, ὡς ἤκουε τῶν Ἰχθυοφάγων, ἐστρατεύετο, Ἑλλήνων μὲν τοὺς
παρεόντας αὐτοῦ τάξας ὑπομένειν, τὸν δὲ πεζὸν πάντα ἅμα ἀγόμενος. (3) ἐπείτε δὲ στρατευόμενος
ἐγένετο ἐν Θήβῃσι, ἀπέκρινε τοῦ στρατοῦ ὡς πέντε μυριάδας, καὶ τούτοισι μὲν ἐνετέλλετο
Ἀμμωνίους ἐξανδραποδισαμένους τὸ χρηστήριον τὸ τοῦ Διὸς ἐμπρῆσαι, αὐτὸς δὲ τὸν λοιπὸν ἄγων
στρατὸν ἤιε ἐπὶ τοὺς Αἰθίοπας. (4) πρὶν δὲ τῆς ὁδοῦ τὸ πέμπτον μέρος διεληλυθέναι τὴν στρατιήν,
αὐτίκα πάντα αὐτοὺς τὰ εἶχον σιτίων ἐχόμενα ἐπελελοίπεε, μετὰ δὲ τὰ σιτία καὶ τὰ ὑποζύγια
ἐπέλιπε κατεσθιόμενα. (5) εἰ μέν νυν μαθὼν ταῦτα ὁ Καμβύσης ἐγνωσιμάχεε καὶ ἀπῆγε ὀπίσω τὸν
στρατόν, ἐπὶ τῇ ἀρχῆθεν γενομένῃ ἁμαρτάδι ἦν ἂν ἀνὴρ σοφός· νῦν δὲ οὐδένα λόγον ποιεύμενος ἤιε
αἰεὶ ἐς τὸ πρόσω. (6) οἱ δὲ στρατιῶται ἕως μέν τι εἶχον ἐκ τῆς γῆς λαμβάνειν, ποιηφαγέοντες διέζωον,
ἐπεὶ δὲ ἐς τὴν ψάμμον ἀπίκοντο, δεινὸν ἔργον αὐτῶν τινες ἐργάσαντο· ἐκ δεκάδος γὰρ ἕνα σφέων
αὐτῶν ἀποκληρώσαντες κατέφαγον. (7) πυθόμενος δὲ ταῦτα ὁ Καμβύσης, δείσας τὴν
ἀλληλοφαγίην, ἀπεὶς τὸν ἐπ᾽ Αἰθίοπας στόλον ὀπίσω ἐπορεύετο καὶ ἀπικνέεται ἐς Θήβας πολλοὺς
ἀπολέσας τοῦ στρατοῦ· ἐκ Θηβέων δὲ καταβὰς ἐς Μέμφιν τοὺς Ἕλληνας ἀπῆκε ἀποπλέειν.
| [3,25] XXV. Les espions s'en retournèrent après avoir tout examiné. Sur leur rapport,
Cambyse, transporté de colère, marcha aussitôt contre les Éthiopiens, sans
ordonner qu'on préparât des vivres pour l'armée, et sans réfléchir qu'il allait
faire une expédition aux extrémités de la terre. Tel qu'un furieux et un
insensé, à peine eut-il entendu le rapport des Ichtyophages, qu'il se mit en
marche, menant avec lui toute son armée de terre, et ne laissant en Égypte que
les Grecs qui l'avaient accompagné. Lorsqu'il fut arrivé à Thèbes, il choisit
environ cinquante mille hommes , à qui il ordonna de réduire en esclavage les
Ammoniens, et de mettre ensuite le feu au temple où Jupiter rendait ses oracles.
Pour lui, il continua sa route vers l'Éthiopie avec le reste de l'armée. Ses
troupes n'avaient pas encore fait la cinquième partie du chemin, que les vivres
manquèrent tout à coup. On mangea les bêtes de somme, et bientôt après elles
manquèrent aussi. Si Cambyse, instruit de cette disette, eût alors changé de
résolution, et qu'après la faute qu'il avait faite dans le commencement il fût
revenu sur ses pas avec son armée, il aurait agi en homme sage. Mais, sans
s'inquiéter de la moindre chose, il continua à marcher en avant. Les soldats se
nourrirent d'herbages tant que la campagne put leur en fournir ; mais,
lorsqu'ils furent arrivés dans les pays sablonneux, la faim en porta
quelques-uns à une action horrible. Ils se mettaient dix à dix, tiraient au
sort, et mangeaient celui qu'ils désignaient. Cambyse en ayant eu connaissance,
et craignant qu'ils ne se dévorassent les uns les autres, abandonna l'expédition
contre les Éthiopiens, rebroussa chemin, et arriva à Thèbes, après avoir perdu
une partie de son armée. De Thèbes il vint à Memphis, où il congédia les Grecs,
et leur permit de se mettre en mer. Tel fut le succès de son expédition contre
les Éthiopiens.
| [3,26] Ὁ μὲν ἐπ᾽ Αἰθίοπας στόλος οὕτω ἔπρηξε· οἱ δ᾽ αὐτῶν ἐπ᾽ Ἀμμωνίους ἀποσταλέντες
στρατεύεσθαι, ἐπείτε ὁρμηθέντες ἐκ τῶν Θηβέων ἐπορεύοντο ἔχοντες ἀγωγούς, ἀπικόμενοι μὲν
φανεροί εἰσι ἐς Ὄασιν πόλιν, τὴν ἔχουσι μὲν Σάμιοι τῆς Αἰσχριωνίης φυλῆς λεγόμενοι εἶναι,
ἀπέχουσι δὲ ἑπτὰ ἡμερέων ὁδὸν ἀπὸ Θηβέων διὰ ψάμμου· ὀνομάζεται δὲ ὁ χῶρος οὗτος κατὰ
Ἑλλήνων γλῶσσαν Μακάρων νῆσος. (2) ἐς μὲν δὴ τοῦτον τὸν χῶρον λέγεται ἀπικέσθαι τὸν στρατόν,
τὸ ἐνθεῦτεν δέ, ὅτι μὴ αὐτοὶ Ἀμμώνιοι καὶ οἱ τούτων ἀκούσαντες, ἄλλοι οὐδένες οὐδὲν ἔχουσι εἰπεῖν
περὶ αὐτῶν· οὔτε γὰρ ἐς τοὺς Ἀμμωνίους ἀπίκοντο οὔτε ὀπίσω ἐνόστησαν. (3) λέγεται δὲ κατὰ τάδε
ὑπ᾽ αὐτῶν Ἀμμωνίων· ἐπειδὴ ἐκ τῆς Ὀάσιος ταύτης ἰέναι διὰ τῆς ψάμμου ἐπὶ σφέας, γενέσθαι τε
αὐτοὺς μεταξύ κου μάλιστα αὐτῶν τε καὶ τῆς Ὀάσιος, ἄριστον αἱρεομένοισι αὐτοῖσι ἐπιπνεῦσαι
νότον μέγαν τε καὶ ἐξαίσιον, φορέοντα δὲ θῖνας τῆς ψάμμου καταχῶσαι σφέας, καὶ τρόπῳ τοιούτῳ
ἀφανισθῆναι. Ἀμμώνιοι μὲν οὕτω λέγουσι γενέσθαι περὶ τῆς στρατιῆς ταύτης.
| [3,26] XXVI. Les troupes qu'on avait envoyées contre les Ammoniens partirent de
Thèbes avec des guides, et il est certain qu'elles allèrent jusqu'à Oasis. Cette ville
est habitée par des Samiens qu'on dit être de la tribu aeschrionienne. Elle est
à sept journées de Thèbes, et l'on ne peut y aller que par un chemin sablonneux.
Ce pays s'appelle en grec les îles des Bienheureux. On dit que l'armée des
Perses alla jusque-là ; mais personne ne sait ce qu'elle devint ensuite, si ce
n'est les Ammoniens et ceux qu'ils en ont instruits. Ce qu'il y a de certain,
c'est qu'elle n'alla pas jusqu'au pays des Ammoniens, et qu'elle ne revint point
en Égypte. Les Ammoniens racontent que cette armée étant partie d'Oasis, et
ayant fait, par le milieu des sables, à peu près la moitié du chemin qui est
entre eux et cette ville, il s'éleva, pendant qu'elle prenait son repas, un vent
de sud impétueux, qui l'ensevelit sous des montagnes de sable, et la fit
entièrement disparaître. Ainsi périt cette armée, au rapport des Ammoniens.
| [3,27] Ἀπιγμένου δὲ Καμβύσεω ἐς Μέμφιν ἐφάνη Αἰγυπτίοισι ὁ Ἆπις, τὸν Ἕλληνες Ἔπαφον
καλέουσι· ἐπιφανέος δὲ τούτου γενομένου αὐτίκα οἱ Αἰγύπτιοι εἵματα ἐφόρεον τὰ κάλλιστα καὶ
ἦσαν ἐν θαλίῃσι. (2) ἰδὼν δὲ ταῦτα τοὺς Αἰγυπτίους ποιεῦντας ὁ Καμβύσης, πάγχυ σφέας καταδόξας
ἑωυτοῦ κακῶς πρήξαντος χαρμόσυνα ταῦτα ποιέειν, ἐκάλεε τοὺς ἐπιτρόπους τῆς Μέμφιος,
ἀπικομένους δὲ ἐς ὄψιν εἴρετο ὅ τι πρότερον μὲν ἐόντος αὐτοῦ ἐν Μέμφι ἐποίευν τοιοῦτον οὐδὲν
Αἰγύπτιοι, τότε δὲ ἐπεὶ αὐτὸς παρείη τῆς στρατιῆς πλῆθός τι ἀποβαλών. (3) οἳ δὲ ἔφραζον ὥς σφι
θεὸς εἴη φανεὶς διὰ χρόνου πολλοῦ ἐωθὼς ἐπιφαίνεσθαι, καὶ ὡς ἐπεὰν φανῇ τότε πάντες Αἰγύπτιοι
κεχαρηκότες ὁρτάζοιεν. ταῦτα ἀκούσας ὁ Καμβύσης ἔφη ψεύδεσθαι σφέας καὶ ὡς ψευδομένους
θανάτῳ ἐζημίου.
| [3,27] XXVII. Cambyse étant de retour à Memphis, le dieu Apis, que les Grecs
appellent Épaphus, se manifesta aux Égyptiens. Dès qu'il se fut montré, ils se
revêtirent de leurs plus riches habits, et firent de grandes réjouissances.
Cambyse, témoin de ces fêtes, s'imaginant qu'ils se réjouissaient du mauvais
succès de ses armes, fit venir devant lui les magistrats de Memphis. Quand ils
furent en sa présence, il leur demanda pourquoi, n'ayant pas témoigné de joie la
première fois qu'ils l'avaient vu dans leur ville, ils en faisaient tant
paraître depuis son retour, et après qu'il avait perdu une partie de son armée.
Ils lui dirent que leur dieu, qui était ordinairement très longtemps sans se
manifester, s'était montré depuis peu, et que lorsque cela arrivait tous les
Égyptiens en témoignaient leur joie par des fêtes publiques. Cambyse, les ayant
entendus parler de la sorte, leur dit qu'ils déguisaient la vérité, et les
condamna à mort, comme s'ils eussent cherché à lui en imposer.
| [3,28] Ἀποκτείνας δὲ τούτους δεύτερα τοὺς ἱρέας ἐκάλεε ἐς ὄψιν· λεγόντων δὲ κατὰ ταὐτὰ τῶν ἱρέων,
οὐ λήσειν ἔφη αὐτὸν εἰ θεός τις χειροήθης ἀπιγμένος εἴη Αἰγυπτίοισι. τοσαῦτα δὲ εἴπας ἀπάγειν
ἐκέλευε τὸν Ἆπιν τοὺς ἱρέας. οἳ μὲν δὴ μετήισαν ἄξοντες. (2) ὁ δὲ Ἆπις οὗτος ὁ Ἔπαφος γίνεται
μόσχος ἐκ βοός, ἥτις οὐκέτι οἵη τε γίνεται ἐς γαστέρα ἄλλον βάλλεσθαι γόνον. Αἰγύπτιοι δὲ λέγουσι
σέλας ἐπὶ τὴν βοῦν ἐκ τοῦ οὐρανοῦ κατίσχειν, καί μιν ἐκ τούτου τίκτειν τὸν Ἆπιν. (3) ἔχει δὲ ὁ
μόσχος οὗτος ὁ Ἆπις καλεόμενος σημήια τοιάδε ἐὼν μέλας, ἐπὶ μὲν τῷ μετώπῳ λευκόν τι τρίγωνον,
ἐπὶ δὲ τοῦ νώτου αἰετὸν εἰκασμένον, ἐν δὲ τῇ οὐρῇ τὰς τρίχας διπλᾶς, ὑπὸ δὲ τῇ γλώσσῃ κάνθαρον.
| [3,28] XXVIII. Après les avoir fait mourir, il manda les prêtres, et, ayant aussi reçu
d'eux la même réponse, il leur dit que si quelque dieu se montrait familièrement
aux Égyptiens, il n'échapperait pas à sa connaissance. Là-dessus, il leur ordonna
de lui amener Apis. Ils allèrent sur-le-champ le chercher.
Cet Apis, appelé aussi Épaphus, est un jeune boeuf, dont la mère ne peut en porter
d'autre. Les Égyptiens disent qu'un éclair descend du ciel sur elle, et que de cet éclair
elle conçoit le dieu Apis. Ce jeune boeuf, qu'on nomme Apis, se connaît à de certaines
marques. Son poil est noir; il porte sur le front une marque blanche et triangulaire,
sur le dos la ligure d'un aigle, sous la langue celle d'un escarbot, et les poils de sa queue
sont doubles.
| [3,29] Ὡς δὲ ἤγαγον τὸν Ἆπιν οἱ ἱρέες, ὁ Καμβύσης, οἷα ἐὼν ὑπομαργότερος, σπασάμενος τὸ
ἐγχειρίδιον, θέλων τύψαι τὴν γαστέρα τοῦ Ἄπιος παίει τὸν μηρόν· γελάσας δὲ εἶπε πρὸς τοὺς ἱρέας
(2) “ὦ κακαὶ κεφαλαί, τοιοῦτοι θεοὶ γίνονται, ἔναιμοί τε καὶ σαρκώδεες καὶ ἐπαΐοντες σιδηρίων;
ἄξιος μέν γε Αἰγυπτίων οὗτός γε ὁ θεός, ἀτάρ τοι ὑμεῖς γε οὐ χαίροντες γέλωτα ἐμὲ θήσεσθε„.
ταῦτα εἴπας ἐνετείλατο τοῖσι ταῦτα πρήσσουσι τοὺς μὲν ἱρέας ἀπομαστιγῶσαι, Αἰγυπτίων δὲ τῶν
ἄλλων τὸν ἂν λάβωσι ὁρτάζοντα κτείνειν. (3) ὁρτὴ μὲν δὴ διελέλυτο Αἰγυπτίοισι, οἱ δὲ ἱρέες
ἐδικαιεῦντο, ὁ δὲ Ἆπις πεπληγμένος τὸν μηρὸν ἔφθινε ἐν τῷ ἱρῷ κατακείμενος. καὶ τὸν μὲν
τελευτήσαντα ἐκ τοῦ τρώματος ἔθαψαν οἱ ἱρέες λάθρῃ Καμβύσεω.
| [3,29] XXIX. Dès que les prêtres eurent amené Apis, Cambyse, tel qu'un furieux, tira
son poignard pour lui en donner un coup dans le ventre ; mais il ne le frappa
qu'à la cuisse. S'adressant ensuite aux prêtres d'un ton railleur : «Scélérats,
leur dit-il, les dieux sont-ils donc de chair et de sang ? Sentent-ils les
atteintes du fer ? Ce dieu, sans doute, est bien digne des Égyptiens: mais vous
ne vous serez pas impunément moqués de moi.» Là-dessus, il les fit battre de
verges par ceux qui ont coutume d'exécuter ces sortes de jugements, et il
ordonna qu'on fît main basse sur tous les Égyptiens que l'on trouverait
célébrant la fête d'Apis. Les réjouissances cessèrent aussitôt, et les prêtres
furent punis. A l'égard d'Apis, il languit quelque temps dans le temple, de la
blessure qu'il avait reçue à la cuisse, et mourut ensuite. Les prêtres lui
donnèrent la sépulture à l'insu de Cambyse.
| | |