[12,10] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Ιʹ.
ΠΕΡΙ ΤΟΥ ΚΑΤΑ ΠΛΑΤΩΝΑ ΔΙΚΑΙΟΥ
Τῶν παρ´ Ἑβραίοις λογίων τοὺς παρ´ αὐτοῖς προφήτας καὶ δικαίους ἄνδρας
ὕβρεις ἐσχάτας καὶ προπηλακισμοὺς πάντα τε κίνδυνον εὐθαρσῶς ὑπομεῖναι
διδασκόντων, τὰ συνῳδὰ τῆς Πλάτωνος καὶ περὶ τούτου δόξης μάθοις ἂν ἀπὸ
τῶνδε αὐτοῦ τῶν φωνῶν, ἃς ἐν τῷ δευτέρῳ τέθειται τῆς Πολιτείας·
« Τὸν δ´ οὖν τοιοῦτον θέντες τὸν δίκαιον αὖ παρ´ αὐτὸν ἱστῶμεν τῷ λόγῳ,
ἄνδρα ἁπλοῦν καὶ γενναῖον, κατ´ Αἰσχύλον οὐ δοκεῖν, ἀλλ´ εἶναι ἀγαθὸν
ἐθέλοντα. Ἀφαιρετέον δὲ τὸ δοκεῖν. Εἰ γὰρ δόξει δίκαιος εἶναι, ἔσονται
αὐτῷ τιμαὶ καὶ δωρεαὶ δοκοῦντι τοιούτῳ εἶναι. Ἄδηλον οὖν εἴτε τοῦ δικαίου
εἴτε τῶν δωρεῶν τε καὶ τιμῶν ἕνεκα τοιοῦτος εἴη. Γυμνωτέος δὴ πάντων πλὴν
δικαιοσύνης καὶ ποιητέος ἐναντίως διακείμενος τῷ προτέρῳ· μηδὲν γὰρ ἀδικῶν
δόξαν ἐχέτω τῆς μεγίστης ἀδικίας, ἵνα βεβασανισμένος ᾖ εἰς δικαιοσύνην τῷ
μὴ τέγγεσθαι ὑπὸ κακοδοξίας καὶ τῶν ἀπ´ αὐτῆς γιγνομένων· ἀλλ´ ἔστω
ἀμετάστατος μέχρι θανάτου, δοκῶν μὲν εἶναι ἄδικος διὰ βίου. »
Καὶ μετὰ βραχέα ἐπιλέγει·
« Λεκτέον οὖν· καὶ δή, κἂν ἀγροικοτέρως λέγηται, μὴ ἐμὲ οἴου λέγειν, ὦ
Σώκρατες, ἀλλὰ τοὺς ἐπαινοῦντας πρὸ δικαιοσύνης ἀδικίαν. Ἐροῦσι δὲ τάδε,
ὅτι οὕτω διακείμενος ὁ δίκαιος μαστιγώσεται, στρεβλώσεται, δεδήσεται,
ἐκκοπήσεται τὼ ὀφθαλμώ, τελευτῶν πάντα κακὰ παθὼν ἀνασκινδυλευθήσεται καὶ
γνώσεται ὅτι οὐκ εἶναι δίκαιον, ἀλλὰ δοκεῖν δεῖ ἐθέλειν. »
Ταῦτα λόγοις ὁ Πλάτων· ἔργοις δὲ πολὺ πρότερον οἱ παρ´ Ἑβραίοις δίκαιοι
καὶ προφῆται μνημονεύονται τὰ εἰρημένα πάντα πεπονθέναι, οἵ γε δικαιότατοι
ὄντες ὡς ἀδικώτατοι
« ἐλιθάσθησαν, ἐπρίσθησαν, ἐν φόνῳ μαχαίρας ἀπέθανον, περιῆλθον ἐν
μηλωταῖς, ἐν αἰγείοις δέρμασιν, ὑστερούμενοι, κακουχούμενοι, ἐν ἐρημίαις
πλανώμενοι καὶ ὄρεσι καὶ σπηλαίοις καὶ ταῖς ὀπαῖς τῆς γῆς, ὧν οὐκ ἦν ἄξιος
ὁ κόσμος. »
Καὶ οἱ ἀπόστολοι δὲ τοῦ σωτῆρος ἡμῶν τὴν ἀνωτάτω δικαιοσύνην τε καὶ
εὐσέβειαν μετιόντες, δόξαν δ´ ἀδικίας παρὰ τοῖς πολλοῖς περιβαλλόμενοι,
ὁποῖα ἔπασχον αὐτῶν πάρεστιν ἐπακοῦσαι λεγόντων·
« Θέατρον ἐγενήθημεν τῷ κόσμῳ καὶ ἀγγέλοις καὶ ἀνθρώποις »
καί·
« Μέχρι τῆς ἄρτι ὥρας καὶ πεινῶμεν καὶ διψῶμεν καὶ γυμνητεύομεν καὶ
κολαφιζόμεθα καὶ ἀστατοῦμεν· λοιδορούμενοι εὐλογοῦμεν, διωκόμενοι
ἀνεχόμεθα, δυσφημούμενοι παρακαλοῦμεν· ὡς περικαθάρματα τοῦ κόσμου
ἐγενήθημεν. »
Ἀλλὰ καὶ εἰσέτι δεῦρο οἱ γενναῖοι τοῦ σωτῆρος ἡμῶν μάρτυρες καθ´ ὅλης τῆς
ἀνθρώπων οἰκουμένης οὐ τὸ δοκεῖν, ἀλλὰ τὸ εἶναι δίκαιοί τε καὶ εὐσεβεῖς
ἀσκοῦντες ὅσα δὴ κατέλεξεν ὁ Πλάτων πεπόνθασιν· ἐπεὶ καὶ ἐμαστιγώθησαν
δεσμά τε καὶ στρέβλας ὑπομεμενήκασι, ναὶ μὴν καὶ ἐξεκόπησαν τὼ ὀφθαλμὼ καὶ
τέλος πάντα τὰ δεινὰ παθόντες ἀνεσκινδυλεύθησαν. Ὧν οὐδένα παρ´ Ἕλλησιν
ἐπιζητήσας ὅμοιον ἂν εὕροις, ὡς εἰκότως τινὰ φάναι τὸν φιλόσοφον οὐδὲν
ἕτερον ἢ θεσπίσαι διὰ τούτων περὶ τῶν παρ´ ἡμῖν διαπρεπόντων ἐν εὐσεβείᾳ
καὶ ἀληθεῖ δικαιοσύνῃ.
| [12,10] CHAPITRE X.
DE L'HOMME JUSTE SUIVANT PLATON.
Tandis que nous apprenons par les oracles des Hébreux que les prophètes et
les hommes justes chez eux ont supporté avec courage les sévices les plus
violents et les outrages les plus blessants, vous apprendrez de Platon
lui-même, dont j'emprunte les paroles dans le second livre de la
République, sa conformité d'opinion avec les Hébreux, à cet égard.
«L'ayant donc ainsi défini, fixons par la pensée ce qu'est le juste
en lui-même : c'est un homme simple et généreux, qui veut, suivant Eschyle,
ne pas paraître, mais être réellement bon. Ecartons-donc tout ce qui
est apparent ; si en effet, il paraît juste, aussitôt les honneurs et les
dons seront offerts à celui qui semble tel. Il demeure incertain si c'est
pour la justice, ou pour les dons et les honneurs, qu'il se montre ainsi
qu'il le fait : dépouillons-le en conséquence de tout, excepté de la
justice, et plaçons-le dans une situation diamétralement contraire à celle
du précédent. Sans commettre aucune injustice, qu'il ait la réputation
d'une extrême injustice, de manière à être éprouvé dans son sentiment
indélébile de justice, en ce que la mauvaise réputation ne pourra pas le
lui ravir, non plus que toutes les conséquences qui viennent à sa suite.
Qu'il soit donc inébranlable jusqu'à la mort, passant pendant toute sa vie
pour être injuste, quoiqu'il soit juste. » Après quelques autres
réflexions, il continue :
« Il faut bien le dire, encore que cela puisse sembler par trop féroce. Ne
vous figurez pas, ô Socrate, que ce soit moi qui vous parle, mais que ce
seront ceux qui vantent l'injustice bien plus que la justice : ils vous
diront que le juste ainsi placé, sera battu de verges, sera torturé, sera
enchaîné, sera aveuglé, qu'enfin, après avoir souffert tous les maux
possibles, il sera crucifié; et il apprendra ainsi que ce n'est pas être
juste qu'il faut vouloir, mais simplement le paraître. » Ce que Platon
s'est contenté de dire, les justes Hébreux et leurs prophètes l'ont mis en
pratique, bien avant lui, car les récits nous font connaître qu'ils ont
enduré tous les tourments possibles : ceux-ci étant les plus justes, ils ont
été lapidés comme les plus injustes: ils ont été sciés en deux, ils sont
morts par le glaive, ils ont erré couverts de peaux de brebis ou de
chèvres, en proie au besoin, opprimés, maltraités : ils se sont disséminés
dans les déserts, dans les montagnes, dans les cavernes, dans les fissures
de la terre : eux dont le monde n'était pas digne. » Les apôtres de
notre Sauveur, en pratiquant la plus sublime justice et la piété, ont eu
aux yeux de la multitude, une réputation d'injustice qui leur attira les
persécutions, dont il est à propos de les entendre eux-mêmes faire le
récit. « Nous sommes devenus un spectacle pour le monde, pour les anges et
pour les hommes. Jusqu'à la saison qui vient de s'écouler, nous avons
souffert de la faim, de la soif, de la nudité, nous avons été souffletés,
repousses, injuriés, lorsque nous bénissions, poursuivis, lorsque nous
endurions, diffamés, lorsque nous exhortions, traités comme les souillures
du monde. » Enfin jusqu'au siècle dernier, les généreux martyrs de
notre Sauveur ont souffert tout ce que Platon a énuméré de supplices dans
toutes les parties de la terre habitée, pour s'être étudiés non pas à
paraître, mais à être vraiment justes et pieux : car ils ont été frappés
de verges, retenus dans les liens et les entraves; on leur a arraché les
yeux, et enfin, après avoir éprouvé toutes ces tortures, on a fini par les
mettre en croix : ce dont on chercherait vainement un exemple pareil parmi
les Grecs ; en sorte qu'on serait fondé à dire que le philosophe n'a fait
que prophétiser par ses paroles ce qui devait se réaliser dans ces modèles
de piété et de véritable justice.
|