[7,1150] (1150a) (1) Ἔλαττον δὲ θηριότης κακίας, φοβερώτερον δέ· οὐ γὰρ διέφθαρται τὸ βέλτιον, ὥσπερ ἐν τῷ ἀνθρώπῳ, ἀλλ' οὐκ ἔχει. Ὅμοιον οὖν ὥσπερ ἄψυχον συμβάλλειν πρὸς ἔμψυχον, πότερον κάκιον· ἀσινεστέρα γὰρ ἡ (5) φαυλότης ἀεὶ
ἡ τοῦ μὴ ἔχοντος ἀρχήν, ὁ δὲ νοῦς ἀρχή. Παραπλήσιον οὖν τὸ συμβάλλειν
ἀδικίαν πρὸς ἄνθρωπον ἄδικον. Ἔστι γὰρ ὡς ἑκάτερον κάκιον· μυριοπλάσια γὰρ
ἂν κακὰ ποιήσειεν ἄνθρωπος κακὸς θηρίου.
VII. Περὶ δὲ τὰς δι' ἁφῆς καὶ γεύσεως ἡδονὰς καὶ λύπας (10) καὶ ἐπιθυμίας
καὶ φυγάς, περὶ ἃς ἥ τε ἀκολασία καὶ ἡ σωφροσύνη διωρίσθη πρότερον, ἔστι
μὲν οὕτως ἔχειν ὥστε ἡττᾶσθαι καὶ ὧν οἱ πολλοὶ κρείττους, ἔστι δὲ κρατεῖν
καὶ ὧν οἱ πολλοὶ ἥττους· τούτων δ' ὁ μὲν περὶ ἡδονὰς ἀκρατὴς ὃ δ'
ἐγκρατής, ὁ δὲ περὶ λύπας μαλακὸς ὃ δὲ καρτερικός. (15) Μεταξὺ δ' ἡ τῶν
πλείστων ἕξις, κἂν εἰ ῥέπουσι μᾶλλον πρὸς τὰς χείρους. Ἐπεὶ δ' ἔνιαι τῶν
ἡδονῶν ἀναγκαῖαί εἰσιν αἳ δ' οὔ, καὶ μέχρι τινός, αἱ δ' ὑπερβολαὶ οὔ, οὐδ'
αἱ ἐλλείψεις, ὁμοίως δὲ καὶ περὶ ἐπιθυμίας ἔχει καὶ λύπας, ὁ μὲν τὰς
ὑπερβολὰς διώκων τῶν ἡδέων ἢ καθ' ὑπερβολὰς (20) ἢ διὰ προαίρεσιν, δι'
αὐτὰς καὶ μηδὲν δι' ἕτερον ἀποβαῖνον, ἀκόλαστος· ἀνάγκη γὰρ τοῦτον μὴ
εἶναι μεταμελητικόν, ὥστ' ἀνίατος· ὁ γὰρ ἀμεταμέλητος ἀνίατος. Ὁ δ'
ἐλλείπων ὁ ἀντικείμενος, ὁ δὲ μέσος σώφρων. Ὁμοίως δὲ καὶ ὁ φεύγων τὰς
σωματικὰς λύπας μὴ δι' ἧτταν ἀλλὰ διὰ προαίρεσιν. (25) Τῶν δὲ μὴ
προαιρουμένων ὃ μὲν ἄγεται διὰ τὴν ἡδονήν, ὃ δὲ διὰ τὸ φεύγειν τὴν λύπην
τὴν ἀπὸ τῆς ἐπιθυμίας, ὥστε διαφέρουσιν ἀλλήλων. Παντὶ δ' ἂν δόξειε χείρων
εἶναι, εἴ τις μὴ ἐπιθυμῶν ἢ ἠρέμα πράττοι τι αἰσχρόν, ἢ εἰ σφόδρα
ἐπιθυμῶν, καὶ εἰ μὴ ὀργιζόμενος τύπτοι ἢ (30) εἰ ὀργιζόμενος· τί γὰρ ἂν
ἐποίει ἐν πάθει ὤν; Διὸ ὁ ἀκόλαστος χείρων τοῦ ἀκρατοῦς. Τῶν δὴ λεχθέντων
τὸ μὲν μαλακίας εἶδος μᾶλλον, ὃ δ' ἀκόλαστος. Ἀντίκειται δὲ τῷ μὲν ἀκρατεῖ
ὁ ἐγκρατής, τῷ δὲ μαλακῷ ὁ καρτερικός· τὸ μὲν γὰρ καρτερεῖν ἐστὶν ἐν τῷ
ἀντέχειν, ἡ δ' ἐγκράτεια (35) ἐν τῷ κρατεῖν, ἕτερον δὲ τὸ ἀντέχειν καὶ
κρατεῖν, ὥσπερ καὶ τὸ μὴ ἡττᾶσθαι τοῦ νικᾶν· διὸ καὶ αἱρετώτερον ἐγκράτεια
καρτερίας ἐστίν. (1150b) (1) Ὁ δ' ἐλλείπων πρὸς ἃ οἱ πολλοὶ καὶ
ἀντιτείνουσι καὶ δύνανται, οὗτος μαλακὸς καὶ τρυφῶν· καὶ γὰρ ἡ τρυφὴ
μαλακία τίς ἐστιν· ὃς ἕλκει τὸ ἱμάτιον, ἵνα μὴ πονήσῃ τὴν ἀπὸ τοῦ αἴρειν
λύπην, καὶ μιμούμενος τὸν (5) κάμνοντα οὐκ οἴεται ἄθλιος εἶναι, ἀθλίῳ
ὅμοιος ὤν. Ὁμοίως δ' ἔχει καὶ περὶ ἐγκράτειαν καὶ ἀκρασίαν. Οὐ γὰρ εἴ τις
ἰσχυρῶν καὶ ὑπερβαλλουσῶν ἡδονῶν ἡττᾶται ἢ λυπῶν, θαυμαστόν, ἀλλὰ
συγγνωμονικὸν εἰ ἀντιτείνων, ὥσπερ ὁ Θεοδέκτου Φιλοκτήτης ὑπὸ τοῦ ἔχεως
πεπληγμένος ἢ ὁ (10) Καρκίνου ἐν τῇ Ἀλόπῃ Κερκύων, καὶ ὥσπερ οἱ κατέχειν
πειρώμενοι τὸν γέλωτα ἀθρόον ἐκκαγχάζουσιν, οἷον συνέπεσε Ξενοφάντῳ· ἀλλ'
εἴ τις πρὸς ἃς οἱ πολλοὶ δύνανται ἀντέχειν, τούτων ἡττᾶται καὶ μὴ δύναται
ἀντιτείνειν, μὴ διὰ φύσιν τοῦ γένους ἢ διὰ νόσον, οἷον ἐν τοῖς Σκυθῶν
βασιλεῦσιν (15) ἡ μαλακία διὰ τὸ γένος, καὶ ὡς τὸ θῆλυ πρὸς τὸ ἄρρεν
διέστηκεν. Δοκεῖ δὲ καὶ ὁ παιδιώδης ἀκόλαστος εἶναι, ἔστι δὲ μαλακός. Ἡ
γὰρ παιδιὰ ἄνεσίς ἐστιν, εἴπερ ἀνάπαυσις· τῶν δὲ πρὸς ταύτην ὑπερβαλλόντων
ὁ παιδιώδης ἐστίν. Ἀκρασίας δὲ τὸ μὲν προπέτεια τὸ δ' ἀσθένεια. (20) Οἳ
μὲν γὰρ βουλευσάμενοι οὐκ ἐμμένουσιν οἷς ἐβουλεύσαντο διὰ τὸ πάθος, οἳ δὲ
διὰ τὸ μὴ βουλεύσασθαι ἄγονται ὑπὸ τοῦ πάθους· ἔνιοι γάρ, ὥσπερ
προγαργαλίσαντες οὐ γαργαλίζονται, οὕτω καὶ προαισθόμενοι καὶ προϊδόντες
καὶ προεγείραντες ἑαυτοὺς καὶ τὸν λογισμὸν οὐχ ἡττῶνται ὑπὸ τοῦ πάθους,
οὔτ' (25) ἂν ἡδὺ ᾖ οὔτ' ἂν λυπηρόν. Μάλιστα δ' οἱ ὀξεῖς καὶ μελαγχολικοὶ
τὴν προπετῆ ἀκρασίαν εἰσὶν ἀκρατεῖς· οἳ μὲν γὰρ διὰ τὴν ταχυτῆτα οἳ δὲ διὰ
τὴν σφοδρότητα οὐκ ἀναμένουσι τὸν λόγον, διὰ τὸ ἀκολουθητικοὶ εἶναι τῇ
φαντασίᾳ.
Ἔστι δ' ὁ μὲν ἀκόλαστος, ὥσπερ ἐλέχθη, οὐ μεταμελητικός· (30) ἐμμένει γὰρ
τῇ προαιρέσει· ὁ δ' ἀκρατὴς μεταμελητικὸς πᾶς. Διὸ οὐχ ὥσπερ ἠπορήσαμεν,
οὕτω καὶ ἔχει, ἀλλ' ὃ μὲν ἀνίατος ὃ δ' ἰατός· ἔοικε γὰρ ἡ μὲν μοχθηρία τῶν
νοσημάτων οἷον ὑδέρῳ καὶ φθίσει, ἡ δ' ἀκρασία τοῖς ἐπιληπτικοῖς· ἣ μὲν γὰρ
συνεχὴς ἣ δ' οὐ συνεχὴς (35) πονηρία. Καὶ ὅλως δ' ἕτερον τὸ γένος ἀκρασίας
καὶ κακίας· ἡ μὲν γὰρ κακία λανθάνει, ἡ δ' ἀκρασία οὐ λανθάνει.
| [7,1150] (1150a)
Au reste, la brutalité est un moindre mal que le vice ou la méchanceté, quoiqu'elle
semble plus effrayante; car elle n'est pas, comme dans l'homme, la
dépravation de ce qu'il y a de plus excellent, elle en est l'absence.
C'est donc comme si, en comparant l'être animé à l'être inanimé, on
demandait qui des deux est plus méchant ou plus vicieux : car sans doute
les mauvaises qualités sont moins nuisibles dans ce qui n'a pas en soi un
principe qui le dirige; or, l'intelligence, ou la raison, est un tel principe.
C'est donc à peu près comparer l'injustice avec l'homme injuste. Il est
possible qu'à certains égards l'un soit pire que l'autre : car l'homme
injuste peut faire infiniment plus de mal qu'une bête féroce.
Vll. Quant aux plaisirs et aux peines, aux désirs et aux aversions que
font naître les sensations du toucher et du goût, auxquelles nous avons vu
précédemment que se rapportent les idées de débauche et de sobriété, on
peut être susceptible de se laisser entraîner à ceux dont la plupart des
hommes savent triompher, et l'on peut résister à ceux qui séduisent le
plus grand nombre. En ce genre, on appelle intempérant celui qui cède au
plaisir, et tempérant celui qui y résiste; on dit de celui qui cède à la
peine, qu'il est mou, sans énergie; on dit de celui qui ne s'en laisse
point abattre, qu'il a de la force d'âme. La manière d'être qui tient le
milieu entre ces deux genres de dispositions, est celle de la grande
majorité des hommes, quoiqu'ils inclinent plus généralement du pire côté.
Cependant, comme il y a des plaisirs qui sont nécessaires, d'autres qui ne
le sont pas, ou qui ne le sont que jusqu'à un certain point, et
qu'assurément l'excès ou le défaut, en ce genre, ne sont pas des
nécessités de la nature; comme il en est de même des désirs et des
sentiments pénibles: celui qui recherche avec ardeur les sensations
agréables, ou qui les veut éprouver au plus haut degré, par choix et pour
elles-mêmes, sans avoir aucun autre but, est proprement un débauché; car
il est impossible qu'il éprouve du regret ou du repentir, et dès lors son
vice est incurable. Celui qui est insensible à ces plaisirs, est dans
l'extrême opposé : l'homme tempérant et sobre est dans le juste milieu. Il
en faut dire autant de celui qui fuit toutes les sensations pénibles ou
douloureuses, de dessein prémédité, et non faute de pouvoir les supporter.
Mais, parmi ceux dont la manière d'agir n'est pas le résultat d'un choix
ou d'une préférence, l'un se laisse séduire par l'attrait du plaisir,
l'autre cède à la peine que lui fait éprouver ses désirs; en sorte qu'il y
a quelque différence entre eux. Or, il n'est personne qui ne fasse moins
de cas de l'homme qui, sans passion, ou du moins avec des désirs très
modérés, commet quelque action honteuse, que de celui qui la fait parce
qu'il est emporté par un violent désir; de celui qui maltraite quelqu'un,
sans être en colère, que de celui qui le fait dons un accès de fureur :
car que ferait le premier s'il éprouvait une passion violente ? Voilà
pourquoi le débauché est plus méprisable que l'intempérant (qui n'est pas
maître de lui). Celui-là est donc, contre ceux dont nous venons de parler,
comme le type de ce qu'on pourrait appeler mollesse ou faiblesse de
caractère. Cependant, l'intempérant est opposé au tempérant, et l'homme
faible à l'homme ferme ou capable d'endurer la peine; car c'est dans la
résistance que consiste cette vertu, au lieu qu'il faut une force active
pour la tempérance, qui consiste à se rendre maître de ses passions; ce
qui est autre chose que de résister, comme vaincre et n'être pas vaincu
sont des choses différentes. C'est pour cela que l'empire sur soi-même est
une qualité plus précieuse que la patience et la résignation.
(1150b) Quant à celui qui pèche par faiblesse, dans les choses où la plupart
des hommes résistent et peuvent résister, c'est un homme mou, et qui aime
à vivre dans les délices; car ce penchant tient à une sorte de mollesse.
Tel est, par exemple, celui qui laisse traîner son manteau pour ne pas
prendre la peine de le soulever; ou celui qui, en se donnant l'air et la
démarche d'un homme malade, ne se croit pas à plaindre, quoiqu'il
ressemble à ceux qui le sont. Or, il en est de même dans tout ce qui
tient à la tempérance et à l'intempérance : car, si l'on se laisse vaincre
à des plaisirs ou à des peines portées au dernier degré de vivacité ou de
violence, cela n'a rien de surprenant; on mérite, au contraire, quelque
indulgence, si l'on s'efforce au moins d'y résister, comme Philoctète
blessé par un reptile venimeux, tel que nous le représente Théodecte;
ou comme Cercyon dans l'Alopé de Carcinus ; ou comme ceux qui, en
faisant tous leurs efforts pour s'empêcher de rire, finissent par éclater
avec bruit , ainsi qu'il arriva à Xenophantus. Mais ce qui peut
étonner, c'est qu'un homme soit incapable de résister aux plaisirs ou aux
peines dont presque tout le monde peut surmonter l'attrait ou
l'inconvénient, sans avoir pour excuse ou la nature de son tempérament, ou
l'altération de sa santé, comme les rois des Scythes chez lesquels la
mollesse était héréditaire ou comme les femmes dont la constitution
diffère essentiellement de celle des hommes.
L'habitude du jeu et de la dissipation semble aussi tenir de
l'intempérance : c'est du moins une sorte de faiblesse. Car le jeu peut
être regardé comme un délassement des occupations sérieuses, puisqu'il
procure du repos; mais l'excès en ce genre, caractérise un joueur de
profession. Au reste, les causes de l'intempérance sont d'une part
l'impétuosité, et de l'autre la faiblesse. En effet, il y a des gens qui,
après avoir pris une résolution, n'y sauraient demeurer fidèles, parce que
la passion les emporte ; et il y en a qui sont entraînés par elle, faute
d'avoir songé à prendre une résolution. D'autres, au contraire (semblables
à ceux qui, après avoir été vivement chatouillés, deviennent insensibles à
ce genre de sensation), ayant pris soin de tout sentir et de tout prévoir,
de se tenir sur leurs gardes et de fortifier leur raison, ne se laissent
vaincre par aucune passion, soit agréable, soit pénible. Mais les hommes
d'un esprit vif et pénétrant, et les mélancoliques, sont plus
particulièrement sujets à l'intempérance qui naît de l'impétuosité des
passions : les uns par la promptitude, et les autres par la violence des
affections qu'ils éprouvent, sont incapables d'entendre le langage de la
raison, parce qu'ils se laissent surtout conduire par l'imagination.
VIII. Le débauché, comme on l'a dit, n'est pas sujet à se repentir; car
il persiste dans ses déterminations : mais l'intempérant (celui qui n'est
pas maître de soi) est toujours susceptible d'éprouver quelque regret. Ces
caractères ne sont donc pas entièrement tels que nous l'avions supposé
d'abord; mais l'un est perverti sans ressource, l'autre peut encore
s'amender. Car le vice est comme l'hydropisie ou la phtisie, et
l'intempérance comme l'épilepsie; l'un est une maladie continue, l'autre
est une maladie qui a ses intervalles de relâche; et, en général, le vice
est un genre d'habitudes autre que l'intempérance. L'homme vicieux ne se
connaît pas lui-même comme tel; l'intempérant s'aperçoit de son défaut;
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