[33] Ἡ πέμπτη μοῖρα τῶν συντελουσῶν εἰς τὸ ὕψος, ὧν γε ἐν
ἀρχῇ προὐθέμεθα, ἔθ´ ἡμῖν λείπεται, κράτιστε, ἦν δὲ τῶν λόγων
αὕτη ποιὰ σύνθεσις. ὑπὲρ ἧς ἐν δυσὶν ἀποχρώντως ἀποδεδωκότες
συντάγμασιν, ὅσα γε τῆς θεωρίας ἦν ἡμῖν ἐφικτά, τοσοῦτον ἐξ
ἀνάγκης προσθείημεν ἂν εἰς τὴν παροῦσαν ὑπόθεσιν, ὡς οὐ μόνον
ἐστὶ πειθοῦς καὶ ἡδονῆς ἡ ἁρμονία φυσικὸν ἀνθρώποις, ἀλλὰ καὶ
μεγαληγορίας καὶ πάθους θαυμαστόν τι ὄργανον. οὐ γὰρ αὐλὸς
μὲν ἐντίθησί τινα πάθη τοῖς ἀκροωμένοις καὶ οἷον ἔκφρονας καὶ
κορυβαντιασμοῦ πλήρεις ἀποτελεῖ, καὶ βάσιν ἐνδούς τινα ῥυθμοῦ
πρὸς ταύτην ἀναγκάζει βαίνειν ἐν ῥυθμῷ καὶ συνεξομοιοῦσθαι τῷ
μέλει τὸν ἀκροατήν, "κἂν ἄμουσος ᾖ" παντάπασι, καὶ νὴ Δία
φθόγγοι κιθάρας, οὐδὲν ἁπλῶς σημαίνοντες, ταῖς τῶν ἤχων
μεταβολαῖς καὶ τῇ πρὸς ἀλλήλους κράσει καὶ μίξει τῆς συμφωνίας
θαυμαστὸν ἐπάγουσι πολλάκις, ὡς ἐπίστασαι, θέλγητρον | (καίτοι
ταῦτα εἴδωλα καὶ μιμήματα νόθα ἐστὶ πειθοῦς, οὐχὶ τῆς
ἀνθρωπείας φύσεως, ὡς ἔφην, ἐνεργήματα γνήσια), οὐκ οἰόμεθα δ´
ἄρα τὴν σύνθεσιν, ἁρμονίαν τινὰ οὖσαν λόγων ἀνθρώποις ἐμφύτων
καὶ τῆς ψυχῆς αὐτῆς, οὐχὶ τῆς ἀκοῆς μόνης ἐφαπτομένων, ποικίλας
κινοῦσαν ἰδέας ὀνομάτων νοήσεων πραγμάτων κάλλους εὐμελείας,
πάντων ἡμῖν ἐντρόφων καὶ συγγενῶν, καὶ ἅμα τῇ μίξει καὶ
πολυμορφίᾳ τῶν ἑαυτῆς φθόγγων τὸ παρεστὼς τῷ λέγοντι πάθος
εἰς τὰς ψυχὰς τῶν πέλας παρεισάγουσαν καὶ εἰς μετουσίαν αὐτοῦ
τοὺς ἀκούοντας ἀεὶ καθιστᾶσαν, τῇ τε τῶν λέξεων ἐποικοδομήσει
τὰ μεγέθη συναρμόζουσαν, δι´ αὐτῶν τούτων κηλεῖν τε ὁμοῦ καὶ
πρὸς ὄγκον τε καὶ ἀξίωμα καὶ ὕψος καὶ πᾶν ὃ ἐν αὑτῇ
περιλαμβάνει καὶ ἡμᾶς ἑκάστοτε συνδιατιθέναι, παντοίως ἡμῶν
τῆς διανοίας ἐπικρατοῦσαν; ἀλλ´ εἰ καὶ μανία τὸ περὶ τῶν οὕτως
ὁμολογουμένων διαπορεῖν, ἀποχρῶσα γὰρ ἡ πεῖρα πίστις, | ὑψηλόν
γέ που δοκεῖ νόημα καὶ ἔστι τῷ ὄντι θαυμάσιον, ὃ τῷ ψηφίσματι ὁ
Δημοσθένης ἐπιφέρει· "τοῦτο τὸ ψήφισμα τὸν τότε τῇ πόλει
περιστάντα κίνδυνον παρελθεῖν ἐποίησεν ὥσπερ νέφος·" ἀλλ´
αὐτῆς τῆς διανοίας οὐκ ἔλαττον τῇ ἁρμονίᾳ πεφώνηται. ὅλον τε
γὰρ ἐπὶ τῶν δακτυλικῶν εἴρηται ῥυθμῶν, εὐγενέστατοι δ´ οὗτοι
καὶ μεγεθοποιοί· διὸ καὶ τὸ ἡρῷον ὧν ἴσμεν κάλλιστον μέτρον
συνιστᾶσι· τό τε - - - ἐπείτοιγε ἐκ τῆς ἰδίας αὐτὸ χώρας μετάθες ὅποι
δὴ ἐθέλεις, "τοῦτο τὸ ψήφισμα ὥσπερ νέφος ἐποίησε
τὸν τότε κίνδυνον παρελθεῖν," ἢ νὴ Δία μίαν ἀπόκοψον συλλαβὴν
μόνον "ἐποίησε παρελθεῖν ὡς νέφος," καὶ εἴσῃ πόσον ἡ ἁρμονία
τῷ ὕψει συνηχεῖ. αὐτὸ γὰρ τὸ "ὥσπερ νέφος" ἐπὶ μακροῦ τοῦ
πρώτου ῥυθμοῦ βέβηκε, τέτρασι καταμετρουμένου χρόνοις·
ἐξαιρεθείσης δὲ τῆς μιᾶς συλλαβῆς "ὡς νέφος" εὐθὺς ἀκρωτηριάζει
τῇ συγκοπῇ τὸ μέγεθος· ὡς ἔμπαλιν, ἐὰν ἐπεκτείνῃς "παρελθεῖν
ἐποίησεν ὡσπερεὶ νέφος," τὸ αὐτὸ σημαίνει, οὐ τὸ αὐτὸ δὲ ἔτι
προσπίπτει, ὅτι τῷ μήκει τῶν ἄκρων χρόνων συνεκλύεται καὶ
διαχαλᾶται τὸ ὕψος τὸ ἀπότομον.
Ἐν δὲ τοῖς μάλιστα μεγεθοποιεῖ τὰ λεγόμενα, καθάπερ τὰ
σώματα ἡ τῶν μελῶν ἐπισύνθεσις, ὧν ἓν μὲν οὐδὲν τμηθὲν ἀφ´
ἑτέρου καθ´ ἑαυτὸ ἀξιόλογον ἔχει, πάντα δὲ μετ´ ἀλλήλων
ἐκπληροῖ τέλειον σύστημα, οὕτως τὰ μεγάλα σκεδασθέντα μὲν ἀπ´
ἀλλήλων ἄλλος´ ἄλλῃ ἅμα ἑαυτοῖς συνδιαφορεῖ καὶ τὸ ὕψος,
σωματοποιούμενα δὲ τῇ κοινωνίᾳ καὶ ἔτι δεσμῷ τῆς ἁρμονίας
περικλειόμενα αὐτῷ τῷ κύκλῳ φωνήεντα γίνεται· καὶ σχεδὸν ἐν
ταῖς περιόδοις ἔρανός ἐστι πλήθους τὰ μεγέθη. ἀλλὰ μὴν ὅτι γε
πολλοὶ καὶ συγγραφέων καὶ ποιητῶν οὐκ ὄντες ὑψηλοὶ φύσει,
μήποτε δὲ καὶ ἀμεγέθεις, ὅμως κοινοῖς καὶ δημώδεσι τοῖς ὀνόμασι
καὶ οὐδὲν ἐπαγομένοις περιττὸν ὡς τὰ πολλὰ συγχρώμενοι, διὰ
μόνου τοῦ συνθεῖναι καὶ ἁρμόσαι ταῦτα δ´ ὅμως ὄγκον καὶ
διάστημα καὶ τὸ μὴ ταπεινοὶ δοκεῖν εἶναι περιεβάλοντο, καθάπερ
ἄλλοι τε πολλοὶ καὶ Φίλιστος, Ἀριστοφάνης ἔν τισιν, ἐν τοῖς
πλείστοις Εὐριπίδης, ἱκανῶς ἡμῖν δεδήλωται. μετά γέ τοι τὴν
"τεκνοκτονίαν Ἡρακλῆς φησι
γέμω κακῶν δὴ κοὐκέτ´ ἔσθ´ ὅποι τεθῇ".
σφόδρα δημῶδες τὸ λεγόμενον, ἀλλὰ γέγονεν ὑψηλὸν τῇ πλάσει
ἀναλογοῦν· εἰ δ´ ἄλλως αὐτὸ συναρμόσεις, φανήσεταί σοι διότι τῆς
συνθέσεως ποιητὴς ὁ Εὐριπίδης μᾶλλόν ἐστιν ἢ τοῦ νοῦ. ἐπὶ δὲ
τῆς συρομένης ὑπὸ τοῦ ταύρου Δίρκης,
εἰ δέ που τύχοι
"πέριξ ἑλίξας - - - εἷλχ´ ὁμοῦ λαβών,
γυναῖκα πέτραν δρῦν μεταλλάσσων ἀεί",
ἔστι μὲν γενναῖον καὶ τὸ λῆμμα, ἁδρότερον δὲ γέγονε τῷ τὴν
ἁρμονίαν μὴ κατεσπεῦσθαι μηδ´ οἷον ἐν ἀποκυλίσματι φέρεσθαι,
ἀλλὰ στηριγμούς τε ἔχειν πρὸς ἄλληλα τὰ ὀνόματα καὶ
ἐξερείσματα τῶν χρόνων πρὸς ἑδραῖον διαβεβηκότα μέγεθος.
| [33] CHAPITRE XXXIII. De l’arrangement des paroles.
Des cinq parties qui produisent le grand, comme nous avons supposé
d’abord, il reste encore la cinquième à examiner: c'est à savoir la
composition et l'arrangement des paroles. Mais comme nous avons déjà donné
deux volumes de cette matière, où nous avons suffisamment expliqué tout ce
qu'une longue spéculation nous en a pu apprendre: nous nous contenterons
de dire ici ce que nous jugeons absolument nécessaire à notre sujet,
comme, par exemple: que l'harmonie n'est pas simplement un agrément que la
nature a mis dans la voix de l'homme pour persuader et pour inspirer le
plaisir : mais que dans les instruments même inanimés, c’est un moyen
merveilleux pour élever le courage et pour émouvoir les passions.
Et de vrai, ne voyons-nous pas que le son des flûtes émeut l'âme de ceux
qui l'écoutent et les remplit de fureur, comme s'ils étaient hors
d’eux-mêmes ? Que leur imprimant dans l'oreille le mouvement de sa
cadence, il les contraint de la suivre, et d'y conformer en quelque sorte
le mouvement de leur corps. Et non seulement le son des suites, mais
presque tout ce qu'il y a de différents sons au monde, comme par exemple,
ceux de la lyre, font cet effet. Car bien qu'ils ne signifient rien
d'eux-mêmes : néanmoins par ces changements de tons qui s'entrechoquent
les uns les autres, et par le mélange de leurs accords, souvent, comme nous
voyons, ils causent à l'âme un transport, et un ravissement admirable.
Cependant ce ne sont que des images et de simples imitations de la voix,
qui ne disent et ne persuadent rien, n’étant, s'il faut parler ainsi, que
des sons bâtards, et non point, comme j'ai dit, des effets de la nature de
l'homme. Que ne dirons-nous donc point de la composition, qui est en effet
comme l'harmonie du discours dont l'usage est naturel à l'homme, qui ne
frappe pas simplement l'oreille, mais l'esprit: qui remue tout à la fois
tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de
beautés, et d'élégances avec lesquelles notre âme a comme une espèce de
liaison et d'affinité : qui par le mélange et la diversité des sons insinue
dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mêmes de
l'orateur, et qui bâtit sur ce sublime amas de paroles, ce grand et ce
merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu'elle ne
contribue beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du
discours, et à toutes ces autres beautés qu'elle renferme en soi, et
qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps
les ravir, et les enlever ? il y aurait de la folie à douter d'une vérité
universellement reconnue, et l’expérience en fait foi.
Au reste il en est de même des discours que des corps, qui doivent
ordinairement leur principale excellence à l'assemblage, et à la juste
proportion de leurs membres : de sorte même qu'encore qu'un membre séparé
de l'autre n'ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas
de faire un corps parfait. Ainsi les parties du sublime étant divisées, le
sublime se dissipe entièrement: au lieu que venant à ne former qu'un corps
par l'assemblage qu'on en fait et par cette liaison harmonieuse qui les
joint, le seul tour de la période leur donne du son et de l'emphase. C'est
pourquoi l'on peut comparer le sublime dans les périodes à un festin par
écot auquel plusieurs ont contribué. Jusque-là qu'on voit beaucoup de
poètes et d'écrivains qui n'étant point nés au sublime, n'en ont jamais
manqué néanmoins bien que pour l'ordinaire ils se servissent de façons de
parler basses, communes et fort peu élégantes. En effet ils se soutiennent
par ce seul arrangement de paroles qui leur enfle et grossit en quelque
forte la voix : si bien qu'on ne remarque point leur bassesse. Philiste
est de ce nombre. Tel est aussi Aristophane en quelques endroits, et
Euripide en plusieurs, comme nous l'avons déjà suffisamment montré. Ainsi
quand Hercule dans cet auteur après avoir tué ses enfants dit ;
"Tant de maux à la fois ont assiégé mon âme,
Que je n’y puis loger de nouvelles douleurs".:
Cette pensée est fort triviale. Cependant il la rend noble par le moyen de
ce tour qui a quelque chose de musical et d'harmonieux : et certainement,
pour peu que vous renversiez l’ordre de sa période, vous verrez
manifestement combien Euripide est plus heureux dans l'arrangement de ces
paroles, que dans le sens de ses pensées. De même, dans sa tragédie
intitulée Dircé emportée par un taureau.
"Il tourne aux environs dans sa route incertaine:
Et courant en tous lieux où sa rage le mène
Traîne après soi la femme, et l’arbre et le rocher".
Cette pensée est fort noble à la vérité: mais il faut avouer que ce qui
lui donne plus de force, c'est cette harmonie qui n'est point précipitée,
ni emportée comme une masse pesante : mais dont les paroles se soutiennent
les unes les autres, et où il y a plusieurs pauses. En effet ces pauses
sont comme autant de fondements solides sur lesquels son discours s'appuie
et s'élève.
|