[1,150] Κύρν´· ἀρετῆς δ´ ὀλίγοις´ ἀνδράσι μοῖρ´ ἕπεται.
151 Ὕβριν, Κύρνε, θεὸς πρῶτον κακῶι ὤπασεν ἀνδρί,
152 οὗ μέλλει χώρην μηδεμίην θέμεναι.
153 Τίκτει τοι κόρος ὕβριν, ὅταν κακῶι ὄλβος ἕπηται
154 ἀνθρώπωι καὶ ὅτωι μὴ νόος ἄρτιος ἦι.
155 Μήποτέ τοι πενίην θυμοφθόρον ἀνδρὶ χολωθείς
156 μηδ´ ἀχρημοσύνην οὐλομένην πρόφερε·
157 Ζεὺς γάρ τοι τὸ τάλαντον ἐπιρρέπει ἄλλοτε ἄλλωι,
158 ἄλλοτε μὲν πλουτεῖν, ἄλλοτε μηδὲν ἔχειν.
159 Μήποτε, Κύρν´, ἀγορᾶσθαι ἔπος μέγα· οἶδε γὰρ οὐδείς
160 ἀνθρώπων ὅ τι νὺξ χἠμέρη ἀνδρὶ τελεῖ.
161 Πολλοί τοι χρῶνται δειλαῖς φρεσί, δαίμονι δ´ ἐσθλῶι,
162 οἷς τὸ κακὸν δοκέον γίνεται εἰς ἀγαθόν.
163 εἰσὶν δ´ οἳ βουλῆι τ´ ἀγαθῆι καὶ δαίμονι δειλῶι
164 μοχθίζουσι, τέλος δ´ ἔργμασιν οὐχ ἕπεται.
165 Οὐδεὶς ἀνθρώπων οὔτ´ ὄλβιος οὔτε πενιχρός
166 οὔτε κακὸς νόσφιν δαίμονος οὔτ´ ἀγαθός.
167 Ἄλλ´ ἄλλωι κακόν ἐστι, τὸ δ´ ἀτρεκὲς ὄλβιος οὐδείς
168 ἀνθρώπων ὁπόσους ἠέλιος καθορᾶι.
169 Ὃν δὲ θεοὶ τιμῶσιν, ὁ καὶ μωμεύμενος αἰνεῖ·
170 ἀνδρὸς δὲ σπουδὴ γίνεται οὐδεμία.
171 Θεοῖς´ εὔχου, θεοῖς´ οἷσιν ἔπι κράτος· οὔτοι ἄτερ θεῶν
172 γίνεται ἀνθρώποις´ οὔτ´ ἀγάθ´ οὔτε κακά.
173 Ἄνδρ´ ἀγαθὸν πενίη πάντων δάμνησι μάλιστα,
174 καὶ γήρως πολιοῦ, Κύρνε, καὶ ἠπιάλου.
175 ἣν δὴ χρὴ φεύγοντα καὶ ἐς βαθυκήτεα πόντον
176 ῥιπτεῖν καὶ πετρέων, Κύρνε, κατ´ ἠλιβάτων.
177 καὶ γὰρ ἀνὴρ πενίηι δεδμημένος οὔτε τι εἰπεῖν
178 οὔθ´ ἕρξαι δύναται, γλῶσσα δέ οἱ δέδεται.
179 χρὴ γὰρ ὁμῶς ἐπὶ γῆν τε καὶ εὐρέα νῶτα θαλάσσης
180 δίζησθαι χαλεπῆς, Κύρνε, λύσιν πενίης.
181 τεθνάμεναι, φίλε Κύρνε, πενιχρῶι βέλτερον ἀνδρί
182 ἢ ζώειν χαλεπῆι τειρόμενον πενίηι.
183 Κριοὺς μὲν καὶ ὄνους διζήμεθα, Κύρνε, καὶ ἵππους
184 εὐγενέας, καί τις βούλεται ἐξ ἀγαθῶν
185 βήσεσθαι· γῆμαι δὲ κακὴν κακοῦ οὐ μελεδαίνει
186 ἐσθλὸς ἀνήρ, ἤν οἱ χρήματα πολλὰ διδῶι,
187 οὐδὲ γυνὴ κακοῦ ἀνδρὸς ἀναίνεται εἶναι ἄκοιτις
188 πλουσίου, ἀλλ´ ἀφνεὸν βούλεται ἀντ´ ἀγαθοῦ.
189 χρήματα μὲν τιμῶσι· καὶ ἐκ κακοῦ ἐσθλὸς ἔγημε
190 καὶ κακὸς ἐξ ἀγαθοῦ· πλοῦτος ἔμειξε γένος.
191 οὕτω μὴ θαύμαζε γένος, Πολυπαΐδη, ἀστῶν
192 μαυροῦσθαι· σὺν γὰρ μίσγεται ἐσθλὰ κακοῖς.
193 Αὐτός τοι ταύτην εἰδὼς κακόπατριν ἐοῦσαν
194 εἰς οἴκους ἄγεται χρήμασι πειθόμενος
195 εὔδοξος κακόδοξον, ἐπεὶ κρατερή μιν ἀνάγκη
196 ἐντύνει, ἥτ´ ἀνδρὸς τλήμονα θῆκε νόον.
197 Χρῆμα δ´ ὃ μὲν Διόθεν καὶ σὺν δίκηι ἀνδρὶ γένηται
198 καὶ καθαρῶς, αἰεὶ παρμόνιμον τελέθει.
199 εἰ δ´ ἀδίκως παρὰ καιρὸν ἀνὴρ φιλοκερδέι θυμῶι
| [1,150] mais la vertu, Cyrnus, est le partage d'un bien petit nombre (149-150).
Un esprit porté à la violence est, Cyrnus, le premier don que fasse la
divinité à l'homme dont elle ne veut faire aucun état (151-152).
La violence, c'est la satiété qui l'engendre, lorsque l'opulence échoit à
un homme méchant et d'un esprit peu sain (153-154).
Qu'il ne t'arrive jamais de reprocher à quelqu'un, dans ta colère, la
pauvreté, l'indigence qui l'affligent. Jupiter incline sa balance, tantôt
d'une façon, tantôt de l'autre; tantôt pour qu'on soit riche, tantôt pour
qu'on ne possède rien (155-158).
Que jamais, Cyrnus, il ne t'échappe d'orgueilleuse parole. Nul homme ne
sait ce que lui apporte la nuit qui vient, le jour prochain (159-160).
Beaucoup, sans prudence dans leurs conseils, ont pour eux la fortune, et
ce qui semblait devoir les perdre leur tourne à bien. D'autres, qui n'ont
que des vues raisonnables avec des dieux contraires, se travaillent en
vain; ils n'amènent point à bonne fin leurs entreprises (161-164).
Nul, parmi les hommes, n'est riche ou pauvre, bon ou mauvais, sans la
volonté des dieux (165-166).
Les maux varient, mais, à vrai dire, le bonheur ne se rencontre chez aucun
de ceux que voit le soleil (167-168).
Celui que les dieux protègent, est loué même de l'envieux. L'homme par
lui-même n'obtient aucune estime (169-170).
Adresse tes prières aux dieux, dont la puissance est souveraine: sans les
dieux, il n'est pour les hommes ni biens ni maux (171-172).
Ce qui abat, ce qui dompte plus que toute chose, plus que la vieillesse
chenue, que la maladie, l'homme de bien, c'est, Cyrnus, la pauvreté. Il
faut la fuir, la jeter dans les flots profonds, la précipiter du haut des
rochers escarpés. L'homme qu'a dompté la pauvreté, ne peut ni parler, ni
agir; sa langue est enchaînée (173-178).
Il faut chercher sans relâche, sur la terre, sur le large dos de la mer,
ce qui peut, Cyrnus, nous dégager des liens pénibles de la pauvreté
(179-180).
La mort, cher Cyrnus, vaut mieux pour le pauvre que la vie, avec le
supplice de sa pauvreté (181-182).
Nous recherchons, Cyrnus, des béliers, des ânes, des chevaux de bonne
race, pour qu'ils nous donnent des rejetons qui leur ressemblent. Mais
l'homme bien né ne refuse pas de prendre pour femme la fille d'un vilain,
si elle lui apporte beaucoup de bien. Point de femme, non plus, qui ne
consente à devenir l'épouse d'un vilain, s'il est riche, qui ne préfère
l'homme opulent à l'honnête homme. On ne fait cas que des richesses;
l'homme de bien, prend femme dans la maison du méchant, le méchant dans la
maison de l'homme de bien. La richesse confond les races. Ne t'étonne donc
point, Polypédès, que l'espèce s'altère chez nos concitoyens, puisque le
mauvais s'y mêle au bon (183-192).
Voilà un homme qui connaît cette femme pour mal née, et ne l'en conduit
pas moins dans sa maison, séduit par la richesse qu'elle possède; il est
illustre et s'associe à son ignominie; car la puissante nécessité l'arme
de courage, la nécessité qui donne l'audace à l'esprit de l'homme
(193-196).
L'homme qui jouit, par la faveur de Jupiter, de richesses justement
acquises, les possède jusqu'au bout sans atteinte. Mais celui qui, dans sa
cupidité, s'enrichit par des moyens injustes,
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