[1,100] φράζεο, καί ποτέ μου μνήσεαι ἐξοπίσω.
101 Μηδείς ς´ ἀνθρώπων πείσηι κακὸν ἄνδρα φιλῆσαι,
102 Κύρνε· τί δ´ ἔστ´ ὄφελος δειλὸς ἀνὴρ φίλος ὤν;
103 οὔτ´ ἄν ς´ ἐκ χαλεποῖο πόνου ῥύσαιτο καὶ ἄτης,
104 οὔτε κεν ἐσθλὸν ἔχων τοῦ μεταδοῦν ἐθέλοι.
105 Δειλοὺς εὖ ἕρδοντι ματαιοτάτη χάρις ἐστίν·
106 ἶσον καὶ σπείρειν πόντον ἁλὸς πολιῆς.
107 οὔτε γὰρ ἂν πόντον σπείρων βαθὺ λήιον ἀμῶις,
108 οὔτε κακοὺς εὖ δρῶν εὖ πάλιν ἀντιλάβοις·
109 ἄπληστον γὰρ ἔχουσι κακοὶ νόον· ἢν δ´ ἓν ἁμάρτηις,
110 τῶν πρόσθεν πάντων ἐκκέχυται φιλότης·
111 οἱ δ´ ἀγαθοὶ τὸ μέγιστον ἐπαυρίσκουσι παθόντες,
112 μνῆμα δ´ ἔχους´ ἀγαθῶν καὶ χάριν ἐξοπίσω.
113 Μήποτε τὸν κακὸν ἄνδρα φίλον ποιεῖσθαι ἑταῖρον,
114 ἀλλ´ αἰεὶ φεύγειν ὥστε κακὸν λιμένα.
115 Πολλοί τοι πόσιος καὶ βρώσιός εἰσιν ἑταῖροι,
116 ἐν δὲ σπουδαίωι πρήγματι παυρότεροι.
117 Κιβδήλου δ´ ἀνδρὸς γνῶναι χαλεπώτερον οὐδέν,
118 Κύρν´, οὐδ´ εὐλαβίης ἐστὶ περὶ πλέονος.
119 Χρυσοῦ κιβδήλοιο καὶ ἀργύρου ἀνσχετὸς ἄτη,
120 Κύρνε, καὶ ἐξευρεῖν ῥάιδιον ἀνδρὶ σοφῶι.
121 εἰ δὲ φίλου νόος ἀνδρὸς ἐνὶ στήθεσσι λελήθηι
122 ψυδρὸς ἐών, δόλιον δ´ ἐν φρεσὶν ἦτορ ἔχηι,
123 τοῦτο θεὸς κιβδηλότατον ποίησε βροτοῖσιν,
124 καὶ γνῶναι πάντων τοῦτ´ ἀνιηρότατον.
125 οὐδὲ γὰρ εἰδείης ἀνδρὸς νόον οὐδὲ γυναικός,
126 πρὶν πειρηθείης ὥσπερ ὑποζυγίου,
127 οὐδέ κεν εἰκάσσαις ὥσπερ ποτ´ ἐς ὥριον ἐλθών·
128 πολλάκι γὰρ γνώμην ἐξαπατῶς´ ἰδέαι.
129 Μήτ´ ἀρετὴν εὔχου, Πολυπαΐδη, ἔξοχος εἶναι
130 μήτ´ ἄφενος· μοῦνον δ´ ἀνδρὶ γένοιτο τύχη.
131 Οὐδὲν ἐν ἀνθρώποισι πατρὸς καὶ μητρὸς ἄμεινον
132 ἔπλετο, οἷς´ ὁσίη, Κύρνε, μέμηλε δίκη.
133 Οὐδείς, Κύρν´, ἄτης καὶ κέρδεος αἴτιος αὐτός,
134 ἀλλὰ θεοὶ τούτων δώτορες ἀμφοτέρων·
135 οὐδέ τις ἀνθρώπων ἐργάζεται ἐν φρεσὶν εἰδώς,
136 ἐς τέλος εἴτ´ ἀγαθὸν γίνεται εἴτε κακόν.
137 πολλάκι γὰρ δοκέων θήσειν κακὸν ἐσθλὸν ἔθηκεν,
138 καί τε δοκῶν θήσειν ἐσθλὸν ἔθηκε κακόν.
139 οὐδέ τωι ἀνθρώπων παραγίνεται, ὅσσα θέληισιν·
140 ἴσχει γὰρ χαλεπῆς πείρατ´ ἀμηχανίης.
141 ἄνθρωποι δὲ μάταια νομίζομεν εἰδότες οὐδέν·
142 θεοὶ δὲ κατὰ σφέτερον πάντα τελοῦσι νόον.
143 Οὐδείς πω ξεῖνον, Πολυπαΐδη, ἐξαπατήσας
144 οὐδ´ ἱκέτην θνητῶν ἀθανάτους ἔλαθεν.
145 Βούλεο δ´ εὐσεβέων ὀλίγοις σὺν χρήμασιν οἰκεῖν
146 ἢ πλουτεῖν ἀδίκως χρήματα πασάμενος.
147 ἐν δὲ δικαιοσύνηι συλλήβδην πᾶς´ ἀρετή ´στι,
148 πᾶς δέ τ´ ἀνὴρ ἀγαθός, Κύρνε, δίκαιος ἐών.
149 Χρήματα μὲν δαίμων καὶ παγκάκωι ἀνδρὶ δίδωσιν,
| [1,100] Médite là-dessus, ô mon ami, et quelque jour tu te souviendras
de moi (93-100).
Ne te laisse persuader par personne, Cyrnus, de prendre un méchant pour
ami. De quel avantage te serait l'amitié d'un tel homme? il ne te
sauverait point de la peine, de la ruine; ce qu'il aurait de bien, il ne
t'en ferait point part. Celui qui oblige des méchants, compterait
vainement sur leur reconnaissance. Autant vaudrait ensemencer les blanches
vagues de la mer. Ni la semence jetée dans la mer ne peut produire les
riches moissons, ni le bien fait aux méchants rapporter un bien pareil.
Les méchants ont un cœur insatiable. Qu'on leur refuse une seule chose, et
tous les bienfaits d'autrefois s'échappent de leur âme ingrate. Pour les
hommes de bien, ils se sentent comblés par un bienfait; ils en gardent la
mémoire, ils s'en montrent plus tard reconnaissants (101-112).
Il ne faut jamais faire d'un méchant son ami; il faut le fuir constamment,
comme un port dangereux (113-114).
On ne manque pas de compagnons pour manger et pour boire; mais, pour les
choses sérieuses, on en trouve beaucoup moins (115-116).
Rien de difficile à connaître comme un homme aux fausses couleurs; rien,
Cyrnus, ne demande plus de prudence (117-118).
De l'or, de l'argent faux causent une perte légère et dont l'homme avisé
se garde facilement. Mais si un ami cache dans son sein une âme trompeuse,
un cœur artificieux, c'est la fraude la plus perfide par laquelle Dieu ait
voulu abuser les mortels; il n'en est pas de plus pénible à pénétrer. On
ne connaît le caractère de l'homme ou de la femme, comme la force des
bêtes de somme, qu'après en avoir fait l'épreuve. On ne peut là-dessus
former de conjecture vraisemblable; trop souvent notre esprit est dupe de
l'apparence (119-128).
Ne souhaite point, Polypédès, d'exceller par la puissance, par la
richesse. Il suffit à l'homme d'un peu de bonne fortune (129-130).
Rien ne vaut, Cyrnus, un père, une mère, pour ceux qui ont souci de la
sainte justice (131-132).
Nul, Cyrnus, ne doit s'attribuer à lui-même ni la perte ni le gain; des
dieux viennent l'un et l'autre. Point d'homme qui puisse savoir d'avance
quelle est la fin, bonne ou mauvaise, de son travail. Souvent, croyant
produire le bien, on amène le mal. Rien n'arrive, à qui que ce soit, comme
il l'a voulu; il rencontre sur sa route la borne de l'impossible. Nous
n'avons, faibles humains, que de vaines imaginations, point de
connaissance réelle. Aux dieux seuls il appartient de tout accomplir selon
leur volonté (133-142).
Nul mortel, Polypédès, lorsqu'il trompe un hôte, un suppliant, ne peut
échapper à l'œil des immortels (143-144).
Préfère une vie honnête, dans une fortune médiocre, à des richesses
injustement acquises. La justice comprend en soi toutes les vertus.
Celui-là est bon, Cyrnus, qui est juste (145-148).
Un dieu peut accorder des richesses au plus méchant des hommes;
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