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[45] ὅθεν οὐκ ἀπέοικεν εἰπεῖν, ὡς ἰδίᾳ μὲν οὐκ ὀρθῶς
ἕκαστος, ὁμοῦ δὲ πάντες ὀρθῶς λέγουσιν· οὐ γὰρ αὐχμὸν
μόνον οὐδ´ ἄνεμον οὐδὲ θάλατταν οὐδὲ σκότος, ἀλλὰ
πᾶν ὅσον ἡ φύσις βλαβερὸν καὶ φθαρτικὸν ἔχει, μόριον
τοῦ Τυφῶνος ἔστιν εἰπεῖν. οὔτε γὰρ ἐν ἀψύχοις σώμασι
τὰς τοῦ παντὸς ἀρχὰς θετέον, ὡς Δημόκριτος καὶ
Ἐπίκουρος, οὔτ´ ἀποίου δημιουργὸν ὕλης ἕνα λόγον καὶ μίαν
πρόνοιαν, ὡς οἱ Στωικοί, περιγινομένην
ἁπάντων καὶ κρατοῦσαν· ἀδύνατον γὰρ ἢ φλαῦρον ὁτιοῦν,
ὅπου πάντων, ἢ χρηστόν, ὅπου μηδενὸς ὁ θεὸς αἴτιος,
ἐγγενέσθαι. ’παλίντονος‘ γάρ ’ἁρμονίη κόσμου, ὅκωσπερ
λύρης καὶ τόξου‘ καθ´ Ἡράκλειτον (B 51)· καὶ κατ´
Εὐριπίδην
’οὐκ ἂν γένοιτο χωρὶς ἐσθλὰ καὶ κακά,
ἀλλ´ ἔστι τις σύγκρασις ὥστ´ ἔχειν καλῶς.‘
διὸ καὶ παμπάλαιος αὕτη κάτεισιν ἐκ θεολόγων καὶ
νομοθετῶν εἴς τε ποιητὰς καὶ φιλοσόφους δόξα, τὴν
ἀρχὴν ἀδέσποτον ἔχουσα, τὴν δὲ πίστιν ἰσχυρὰν καὶ
δυσεξάλειπτον, οὐκ ἐν λόγοις μόνον οὐδ´ ἐν φήμαις, ἀλλ´
ἔν τε τελεταῖς ἔν τε θυσίαις καὶ βαρβάροις καὶ Ἕλλησι
πολλαχοῦ περιφερομένη, ὡς οὔτ´ ἄνουν καὶ ἄλογον καὶ
ἀκυβέρνητον αἰωρεῖται τῷ αὐτομάτῳ τὸ πᾶν, οὔθ´ εἷς
ἐστιν ὁ κρατῶν καὶ κατευθύνων ὥσπερ οἴαξιν ἤ τισι
πειθηνίοις χαλινοῖς λόγος, ἀλλὰ πολλὰ καὶ μεμιγμένα
κακοῖς καὶ ἀγαθοῖς μᾶλλον δὲ μηδὲν ὡς ἁπλῶς
εἰπεῖν ἄκρατον ἐνταῦθα τῆς φύσεως φερούσης οὐ δυεῖν
πίθων εἷς ταμίας ὥσπερ νάματα τὰ πράγματα καπηλικῶς
διανέμων ἀνακεράννυσιν ἡμῖν, ἀλλ´ ἀπὸ δυεῖν
ἐναντίων ἀρχῶν καὶ δυεῖν ἀντιπάλων δυνάμεων, τῆς μὲν
ἐπὶ τὰ δεξιὰ καὶ κατ´ εὐθεῖαν ὑφηγουμένης, τῆς δ´
ἔμπαλιν ἀναστρεφούσης καὶ ἀνακλώσης ὅ τε βίος μικτὸς
ὅ τε κόσμος, εἰ καὶ μὴ πᾶς, ἀλλ´ ὁ περίγειος οὗτος καὶ
μετὰ σελήνην ἀνώμαλος καὶ ποικίλος γέγονε καὶ μεταβολὰς
πάσας δεχόμενος. εἰ γὰρ οὐδὲν ἀναιτίως πέφυκε
γίνεσθαι, αἰτίαν δὲ κακοῦ τἀγαθὸν οὐκ ἂν παράσχοι,
δεῖ γένεσιν ἰδίαν καὶ ἀρχὴν ὥσπερ ἀγαθοῦ καὶ κακοῦ
τὴν φύσιν ἔχειν.
| [45] Par suite de tout cela, il ne paraît pas déraisonnable
de dire, que si en particulier chacune de ces explications est
inadmissible, prises toutes ensemble elles deviennent justes.
En effet ce n'est pas la sécheresse, le vent, la mer, les ténèbres,
mais tout ce que la nature contient de parties nuisibles
et destructives, que représente Typhon. Il ne faut
pas faire résider dans des corps inanimés les premiers principes
de l'univers, comme le voulaient Démocrite et Épicure.
Il ne faut pas non plus supposer, avec les Stoïciens,
une raison, une providence unique, qui, ayant créé une
matière sans propriétés, domine et maîtrise l'ensemble des
mondes. Il est impossible en effet qu'il y ait rien de mauvais
si Dieu est l'auteur de toutes choses, ou qu'il y ait quoi
que ce soit de bon si Dieu n'est l'auteur de rien. L'harmonie
du monde est, selon Héraclite, le résultat de mouvements
contraires, comme se détend et se tend une lyre ou
un arc. Euripide a dit de même :
"Le bien d'avec le mal ne peut se séparer :
C'est l'union des deux qui fait tout prospérer".
Aussi existe-t-il une opinion qui se rattache à la plus haute
antiquité, et qui des fondateurs de religions et des législateurs
est descendue aux poètes et aux philosophes. Le premier
auteur en est resté inconnu ; mais c'est une croyance
qui a pris de la force et qu'il serait difficile de déraciner,
attendu qu'on la retrouve non seulement dans les entretiens
et dans les traditions, mais encore dans les cérémonies religieuses,
et dans les sacrifices chez les Barbares, comme
chez les Grecs. Cette opinion enseigne, que l'univers ne flotte
pas au hasard dans le vide, sans intelligence et sans direction;
que ce n'est pas, non plus, une raison unique qui lui
commande et le dirige comme avec un gouvernail ou comme
par un frein auquel il obéisse; mais que la plus grande
partie en est un composé de mal et de bien; ou plutôt,
que rien, à vrai dire, dans la nature n'est exempt de mélange.
Ce n'est pas un même sommelier qui, puisant à
deux tonneaux des vins différents, les combine et les distribue
à tous comme ferait un cabaretier : et les vins, ici, ce
sont les divers événements. Non : il y a deux principes opposés,
deux forces contraires, dont l'une marche à droite et
en ligne directe, dont l'autre tire à gauche et en lignes
brisées. De là ce mélange, qui caractérise la vie et qui caractérise
le monde, sinon dans leur entier, au moins pour
ce qui est de notre globe terrestre et sublunaire. Est-il
quelque chose de plus irrégulier que ce globe, de plus divers,
de plus sujet à mille changements? Car si rien ne doit
originellement se faire sans cause, et si, d'un autre côté, un
être bon ne peut produire rien de mauvais, il faut qu'il y
ait dans la nature un principe particulier, qui soit l'auteur
du mal, comme il y en a un pour le bien.
| [46] Καὶ δοκεῖ τοῦτο τοῖς πλείστοις καὶ σοφωτάτοις·
νομίζουσι γὰρ οἱ μὲν θεοὺς εἶναι δύο καθάπερ ἀντιτέχνους,
τὸν μὲν ἀγαθῶν, τὸν δὲ φαύλων δημιουργόν·
οἱ δὲ τὸν μὲν {γὰρ} ἀμείνονα θεόν, τὸν δ´ ἕτερον δαίμονα
καλοῦσιν, ὥσπερ Ζωροάστρης ὁ μάγος, ὃν πεντακισχιλίοις
ἔτεσι τῶν Τρωικῶν γεγονέναι πρεσβύτερον ἱστοροῦσιν.
οὗτος οὖν ἐκάλει τὸν μὲν Ὡρομάζην, τὸν δ´ Ἀρειμάνιον·
καὶ προσαπεφαίνετο τὸν μὲν ἐοικέναι φωτὶ μάλιστα
τῶν αἰσθητῶν, τὸν δ´ ἔμπαλιν σκότῳ καὶ ἀγνοίᾳ, μέσον
δ´ ἀμφοῖν τὸν Μίθρην εἶναι· διὸ καὶ Μίθρην Πέρσαι
τὸν μεσίτην ὀνομάζουσιν· ἐδίδαξε δὲ τῷ μὲν εὐκταῖα
θύειν καὶ χαριστήρια, τῷ δ´ ἀποτρόπαια καὶ σκυθρωπά.
πόαν γάρ τινα κόπτοντες ὄμωμι καλουμένην ἐν ὅλμῳ
τὸν Ἅιδην ἀνακαλοῦνται καὶ τὸν σκότον, εἶτα μίξαντες
αἵματι λύκου σφαγέντος εἰς τόπον ἀνήλιον ἐκφέρουσι
καὶ ῥίπτουσι. καὶ γὰρ τῶν φυτῶν νομίζουσι τὰ μὲν τοῦ
ἀγαθοῦ θεοῦ, τὰ δὲ τοῦ κακοῦ δαίμονος εἶναι, καὶ τῶν
ζῴων ὥσπερ κύνας καὶ ὄρνιθας καὶ χερσαίους ἐχίνους τοῦ
ἀγαθοῦ, τοῦ {δὲ} φαύλου μῦς ἐνύδρους εἶναι· διὸ καὶ τὸν
κτείναντα πλείστους εὐδαιμονίζουσιν.
| [46] C'est là une opinion adoptée par le plus grand nombre
et par les plus sages. Les uns pensent qu'il existe deux divinités
en quelque sorte rivales, dont l'une produit les biens
et la seconde, les maux. D'autres appellent Dieu le meilleur
de ces principes, et Démon le plus mauvais. C'est la doctrine
du mage Zoroastre, lequel vécut, dit-on, cinq mille ans
avant la guerre de Troie. Il donnait au Dieu le nom d'Oromase,
et au Démon celui d'Arimane. Il ajoutait, qu'entre les
choses sensibles c'était à la lumière que le premier ressemblait
le plus, le second, au contraire, aux ténèbres et à l'ignorance;
que Mithra tenait le milieu entre ces deux principes ;
d'où vient, que les Perses donnent aussi à Mithra le nom
de Mesitès. Pour l'un Zoroastre enseigna des sacrifices de
prières et d'actions de grâces, pour l'autre, des cérémonies
lugubres destinées à détourner les maux. Et en effet, les
Perses pilent dans un mortier une certaine herbe appelée
"omômi", et ils invoquent en même temps Hadès et les ténèbres.
Ensuite, ayant mêlé à cette herbe le sang d'un loup
égorgé, ils emportent la mixture et la jettent dans un lieu où
le soleil ne pénètre jamais. Car ils pensent que parmi les
végétaux les uns appartiennent au Dieu bon, les autres au Démon
méchant. De même parmi les animaux, ils regardent
les chiens, les oiseaux et les hérissons de terre comme appartenant
au Dieu bon, et les hérissons de rivière au Démon
méchant. Voilà pourquoi ils estiment heureux celui qui a
mis à mort le plus grand nombre de ces derniers.
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