[31] Οὐκοῦν ἐπί γε τῶν ἐν λόγοις μεγαλοφυῶν, ἐφ´ ὧν οὐκέτ´ ἔξω
τῆς χρείας καὶ ὠφελείας πίπτει τὸ μέγεθος, προσήκει συνθεωρεῖν
αὐτόθεν, ὅτι τοῦ ἀναμαρτήτου πολὺ ἀφεστῶτες οἱ τηλικοῦτοι
ὅμως παντὸς εἰσὶν ἐπάνω τοῦ θνητοῦ· καὶ τὰ μὲν ἄλλα τοὺς
χρωμένους ἀνθρώπους ἐλέγχει, τὸ δ´ ὕψος ἐγγὺς αἴρει
μεγαλοφροσύνης θεοῦ· καὶ τὸ μὲν ἄπταιστον οὐ ψέγεται, τὸ μέγα
δὲ καὶ θαυμάζεται. τί χρὴ πρὸς τούτοις ἔτι λέγειν, ὡς ἐκείνων τῶν
ἀνδρῶν ἕκαστος ἅπαντα τὰ σφάλματα ἑνὶ ἐξωνεῖται πολλάκις
ὕψει καὶ κατορθώματι, καὶ τὸ κυριώτατον, ὡς, εἴ γε ἐκλέξας τὰ
Ὁμήρου, τὰ Δημοσθένους, τὰ Πλάτωνος, τῶν ἄλλων ὅσοι δὴ
μέγιστοι παραπτώματα πάντα ὁμόσε συναθροίσειεν, ἐλάχιστον ἄν
τι, μᾶλλον δ´ οὐδὲ πολλοστημόριον ἂν εὑρεθείη τῶν ἐκείνοις τοῖς
ἥρωσι πάντη κατορθουμένων. διὰ ταῦθ´ ὁ πᾶς αὐτοῖς αἰὼν καὶ
βίος, οὐ δυνάμενος ὑπὸ τοῦ φθόνου παρανοίας ἁλῶναι, φέρων
ἀπέδωκε τὰ νικητήρια, καὶ ἄχρι νῦν ἀναφαίρετα φυλάττει, καὶ
ἔοικε τηρήσειν ἔστ´ ἂν ὕδωρ τε ῥέῃ καὶ δένδρεα μακρὰ τεθήλῃ.
πρὸς μέντοι γε τὸν γράφοντα ὡς ὁ Κολοσσὸς ὁ ἡμαρτημένος οὐ
κρείττων ἢ ὁ Πολυκλείτου Δορυφόρος παράκειται πρὸς πολλοῖς
εἰπεῖν ὅτι ἐπὶ μὲν τέχνης θαυμάζεται τὸ ἀκριβέστατον, ἐπὶ δὲ τῶν
φυσικῶν ἔργων τὸ μέγεθος, φύσει δὲ λογικὸν ὁ ἄνθρωπος· κἀπὶ
μὲν ἀνδριάντων ζητεῖται τὸ ὅμοιον ἀνθρώπῳ, ἐπὶ δὲ τοῦ λόγου
τὸ ὑπεραῖρον, ὡς ἔφην, τὰ ἀνθρώπινα. προσήκει δ´ ὅμως
(ἀνακάμπτει γὰρ ἐπὶ τὴν ἀρχὴν ἡμῖν τοῦ ὑπομνήματος ἡ παραίνεσις),
ἐπειδὴ τὸ μὲν ἀδιάπτωτον ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ τέχνης ἐστὶ κατόρθωμα,
τὸ δ´ ἐν ὑπεροχῇ, πλὴν οὐχ ὁμότονον, μεγαλοφυΐας, βοήθημα τῇ
φύσει πάντη πορίζεσθαι τὴν τέχνην· ἡ γὰρ ἀλληλουχία τούτων
ἴσως γένοιτ´ ἂν τὸ τέλειον.
Τοσαῦτα ἦν ἀναγκαῖον ὑπὲρ τῶν προτεθέντων ἐπικρῖναι
σκεμμάτων· χαιρέτω δ´ ἕκαστος οἷς ἥδεται.
| [31] CHAPITRE XXXI. Que les fautes dans le sublime se peuvent excuser.
A l'égard donc des grands orateurs en qui le sublime et le merveilleux se
rencontre joint avec l'utile et le nécessaire, il faut avouer, qu'encore
que ceux dont nous parlions n'ayant point été exempts de fautes, ils
avaient néanmoins quelque chose de surnaturel et de divin. En effet
d'exceller dans toutes les autres parties, cela n'a rien qui passe la
portée de l'homme : mais le sublime nous élève presque aussi haut que
Dieu. Tout ce qu'on gagne à ne point faire de fautes, c’est qu’on ne peut
être repris : mais le grand se fait admirer. Que vous dirai-je enfin ? un
seul de ces beaux traits et de ces pensées sublimes qui sont dans les
ouvrages de ces excellents auteurs, peut payer tous leurs défauts. Je dis
bien plus, c'est que si quelqu'un ramassait ensemble toutes les fautes qui
sont dans Homère, dans Démosthène, dans Platon, et dans tous ces autres
célèbres héros, elles ne feraient pas la moindre, ni la millième partie
des bonnes choses qu'ils ont dites. C'est pourquoi l'envie n'a pas empêché
qu'on ne leur ait donné le prix dans tous les siècles, et personne
jusqu'ici, n'a été en état de leur enlever ce prix, qu'ils conservent
encore aujourd'hui, et que vraisemblablement ils conserveront toujours,
"Tant qu’on verra les eaux dans les plaines courir,
Et les bois dépouillés au Printemps refleurir".
On me dira peut-être qu'un colosse qui a quelques défauts n'est pas plus à
estimer qu'une petite statue achevée, comme par exemple, le soldat de
Polyclète. A cela je réponds, que dans les ouvrages de l'art c'est le
travail et l'achèvement que l’on considère : au lieu que dans les ouvrages
de la nature c'est le sublime et le prodigieux. Or discourir c'est une
opération naturelle à l'homme. Ajoutez que dans une statue on ne cherche
que le rapport et la ressemblance : mais dans le discours on veut, comme
j'ai dit, le surnaturel et le divin. Toutefois, pour ne nous point éloigner
de ce que nous avons établi d'abord, comme c'est le devoir de l'art
d'empêcher que l’on ne tombe, et qu’il est bien difficile qu'une haute
élévation à la longue se soutienne, et garde toujours un ton égal, il faut
que l'art vienne au secours de la nature : parce qu'en effet c'est leur
parfaite alliance qui fait la souveraine perfection. Voila ce que nous
avons cru être obligés de dire sur les questions qui se sont présentées.
Nous laissons pourtant à chacun son jugement libre et entier.
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