[13] Ἤδη δέ τινας ἐγὼ εἶδον πατέρας, οἷς τὸ
λίαν φιλεῖν τοῦ μὴ φιλεῖν αἴτιον κατέστη. τί οὖν
ἐστιν ὃ βούλομαι λέγειν, ἵνα τῷ παραδείγματι φωτεινότερον
ποιήσω τὸν λόγον; σπεύδοντες γὰρ
τοὺς παῖδας ἐν πᾶσι τάχιον πρωτεῦσαι πόνους
αὐτοῖς ὑπερμέτρους ἐπιβάλλουσιν, οἷς ἀπαυδῶντες
ἐκπίπτουσι, καὶ ἄλλως βαρυνόμενοι ταῖς κακοπαθείαις
οὐ δέχονται τὴν μάθησιν εὐηνίως. ὥσπερ
γὰρ τὰ φυτὰ τοῖς μὲν μετρίοις ὕδασι τρέφεται,
τοῖς δὲ πολλοῖς πνίγεται, τὸν αὐτὸν τρόπον ψυχὴ
τοῖς μὲν συμμέτροις αὔξεται πόνοις, τοῖς δ´ ὑπερβάλλουσι
βαπτίζεται. δοτέον οὖν τοῖς παισὶν
ἀναπνοὴν τῶν συνεχῶν πόνων, ἐνθυμουμένους ὅτι
πᾶς ὁ βίος ἡμῶν εἰς ἄνεσιν καὶ σπουδὴν διῄρηται.
καὶ διὰ τοῦτ´ οὐ μόνον ἐγρήγορσις ἀλλὰ καὶ ὕπνος
εὑρέθη, οὐδὲ πόλεμος ἀλλὰ καὶ εἰρήνη, οὐδὲ χειμὼν
ἀλλὰ καὶ εὐδία, οὐδ´ ἐνεργοὶ πράξεις ἀλλὰ καὶ
ἑορταί. συνελόντι δ´ εἰπεῖν ἡ ἀνάπαυσις τῶν πόνων
ἐστὶν ἄρτυμα. καὶ οὐκ ἐπὶ τῶν ζῴων μόνων
τοῦτ´ ἂν ἴδοι τις γιγνόμενον, ἀλλὰ καὶ ἐπὶ τῶν
ἀψύχων· καὶ γὰρ τὰ τόξα καὶ τὰς λύρας ἀνίεμεν,
ἵν´ ἐπιτεῖναι δυνηθῶμεν. καθόλου δὲ σῴζεται σῶμα
μὲν ἐνδείᾳ καὶ πληρώσει, ψυχὴ δ´ ἀνέσει καὶ πόνῳ.
Ἄξιον δ´ ἐπιτιμᾶν τῶν πατέρων ἐνίοις, οἵτινες
παιδαγωγοῖς καὶ διδασκάλοις ἐπιτρέψαντες τοὺς
υἱεῖς αὐτοὶ τῆς τούτων μαθήσεως οὔτ´ αὐτόπται
γίγνονται τὸ παράπαν οὔτ´ αὐτήκοοι, πλεῖστον
τοῦ δέοντος ἁμαρτάνοντες. αὐτοὺς γὰρ παρ´ ὀλίγας
ἡμέρας δεῖ δοκιμασίαν λαμβάνειν τῶν παίδων,
ἀλλὰ μὴ τὰς ἐλπίδας ἔχειν ἐν μισθωτοῦ διαθέσει·
καὶ γὰρ ἐκεῖνοι πλείονα ποιήσονται τὴν ἐπιμέλειαν
τῶν παίδων, μέλλοντες ἑκάστοτε διδόναι τὰς
εὐθύνας. κἀνταῦθα δὴ τὸ ῥηθὲν ὑπὸ τοῦ ἱπποκόμου
χάριεν, ὡς οὐδὲν οὕτω πιαίνει τὸν ἵππον ὡς
βασιλέως ὀφθαλμός.
Πάντων δὲ μάλιστα τὴν μνήμην τῶν παίδων
ἀσκεῖν καὶ συνεθίζειν· αὕτη γὰρ ὥσπερ τῆς
παιδείας ἐστὶ ταμιεῖον, καὶ διὰ τοῦτο μητέρα τῶν
Μουσῶν ἐμυθολόγησαν εἶναι τὴν Μνημοσύνην,
αἰνιττόμενοι καὶ παραδηλοῦντες ὅτι οὕτως οὐδὲν
γεννᾶν καὶ τρέφειν ὡς ἡ μνήμη πέφυκε. καὶ
τοίνυν ταύτην κατ´ ἀμφότερ´ ἐστὶν ἀσκητέον, εἴτ´
ἐκ φύσεως μνήμονες εἶεν οἱ παῖδες, εἴτε καὶ τοὐναντίον
ἐπιλήσμονες. τὴν γὰρ πλεονεξίαν τῆς
φύσεως ἐπιρρώσομεν, τὴν δ´ ἔλλειψιν ἀναπληρώσομεν·
καὶ οἱ μὲν τῶν ἄλλων ἔσονται βελτίους, οἱ
δ´ ἑαυτῶν. τὸ γὰρ Ἡσιόδειον καλῶς εἴρηται
"εἰ γάρ κεν καὶ σμικρὸν ἐπὶ σμικρῷ καταθεῖο
καὶ θαμὰ τοῦτ´ ἔρδοις, τάχα κεν μέγα καὶ τὸ γένοιτο."
μὴ λανθανέτω τοίνυν μηδὲ τοῦτο τοὺς πατέρας, ὅτι
τὸ μνημονικὸν τῆς μαθήσεως μέρος οὐ μόνον πρὸς
τὴν παιδείαν ἀλλὰ καὶ πρὸς τὰς τοῦ βίου πράξεις
οὐκ ἐλαχίστην συμβάλλεται μοῖραν. ἡ γὰρ τῶν
γεγενημένων πράξεων μνήμη τῆς περὶ τῶν μελλόντων
εὐβουλίας γίγνεται παράδειγμα.
| [13] Autre chose : j'ai vu certains pères qui, à force d'aimer
leurs enfants, en étaient venus à ne les aimer point.
Que veux-je dire en parlant ainsi ? Un exemple rendra plus
claire ma pensée. Dans leur ardent désir de voir promptement
leurs fils être les premiers en tout, ils leur imposent
un travail qui n'a pas de proportion, sous lequel ils succombent
découragés ; et d'ailleurs, accablés par l'excès de
la fatigue, ils ne reçoivent plus l'instruction avec docilité.
Eh bien, comme les végétaux se développent si on les arrose
modérément, mais que trop d'eau les étouffe, de même
l'esprit s'accroît par des études mesurées, mais il est comme
noyé sous des travaux excessifs. Il faut donc qu'on laisse les
enfants reprendre haleine, loin de les occuper sans relâche.
Que l'on y réfléchisse : toute l'existence est une alternative
de repos et de travail ; et c'est dans ce but que non seulement
l'état de veille, mais encore le sommeil a été institué
par le Créateur. Il n'y a pas uniquement guerre : il y a
paix aussi; non uniquement tempête, mais aussi calme;
non uniquement labeur actif, mais aussi jours fériés. Pour
le dire en un mot, le repos est l'assaisonnement du travail.
Et ce n'est pas chez les seuls êtres vivants que l'on voit cet
effet se produire, c'est aussi dans les objets inanimés; car
nous relâchons les cordes des arcs et des lyres, afin de pouvoir
les tendre de nouveau. D'une manière générale, la santé
du corps s'entretient par une alternative de besoin et de satiété,
celle de l'âme, par le relâche combiné avec le travail.
Il y a lieu de blâmer certains pères qui, après avoir confié
leurs enfants à des précepteurs et à des maîtres, ne s'occupent
absolument plus de voir ou d'entendre par eux-mêmes
comment on les instruit. C'est un tort sans excuse. Il faut
qu'à peu de jours d'intervalle les uns des autres ils s'assurent
des progrès de leurs enfants, et qu'ils ne s'en reposent
pas, pour ce qui concerne de si chères espérances, sur les
dispositions d'instituteurs mercenaires. Et d'ailleurs, ceux-ci
ne donneront que plus de soins à leurs élèves, quand ils
auront à chaque instant des comptes à rendre. C'est ici le
lieu d'appliquer le bon mot de l'écuyer : «rien n'engraisse
aussi bien le cheval que l'oeil du Roi».
Ce qu'il faut surtout exercer et fortifier par l'habitude
chez les enfants, c'est la mémoire. Elle est comme le trésor
de la science. Aussi la fable dit-elle que la mère des Muses
est Mnémosyne : donnant à comprendre par cet emblême,
que rien n'est plus capable que la mémoire de féconder et
nourrir l'esprit. Cette faculté doit donc être exercée dans
deux cas différents, et lorsque les enfants ont naturellement
de la facilité à retenir, et lorsque au contraire ils oublient vite.
Nous ajouterons ainsi au bienfait de la nature, et nous suppléerons
à son insuffisance ; ceux qui sont bien doués surpasseront
leurs camarades, les autres se surpasseront eux-mêmes :
car c'est une belle parole que celle d'Hésiode:
"Que peu s'ajoute à peu, mais s'ajoute sans cesse,
Sous nos mains à la longue un vaste amas se dresse".
Ainsi donc les pères n'oublieront pas non plus cette vérité,
que les soins donnés à la mémoire durant les études contribuent
non seulement à l'intruction, mais encore, pour
une part qui n'est pas minime, au succès des affaires dans
le monde : car le souvenir des choses passées devient un exemple,
lorsqu'il s'agit de prendre des décisions sages en vue de l'avenir.
|