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[45] τί ἂν αἰτιάσαιο, ὦ Λυκῖνε, τῆς εὐχῆς;
(ΛΥΚΙΝΟΣ)
Οὐδέν, ὦ Τιμόλαε. οὐδὲ γὰρ ἀσφαλὲς ἐναντιοῦσθαι
ἀνδρὶ πτηνῷ καὶ ὑπὲρ μυρίους τὴν ἰσχύν,
πλὴν ἀλλὰ ἐκεῖνο ἐρήσομαί σε, εἴ τινα ἄλλον εἶδες
ἐν τοσούτοις ἔθνεσιν, ὅσα ὑπερέπτης, γέροντα ἤδη
ἄνδρα οὕτω παρακεκινηκότα τὴν γνώμην, ἐπὶ
δακτυλίου μικροῦ ὀχούμενον, ὄρη ὅλα κινεῖν ἄκρῳ
τῷ δακτύλῳ δυνάμενον, ἐπέραστον πᾶσι, καὶ
ταῦτα φαλακρὸν ὄντα καὶ τὴν ῥῖνα σιμόν; ἀτὰρ
εἰπέ μοι καὶ τόδε, τί δή ποτε οὐχ εἷς δακτύλιος
ἅπαντα ταῦτα δύναταί σοι, ἀλλὰ τοσούτους περιημμένος
βαδιῇ τὴν ἀριστερὰν πεφορτισμένος κατὰ
δάκτυλον ἕνα; μᾶλλον δὲ ὑπερπαίει ὁ ἀριθμός,
καὶ δεήσει καὶ τὴν δεξιὰν συνεπιλαβεῖν. καίτοι
ἑνὸς τοῦ ἀναγκαιοτάτου προσδεῖ, ὃς περιθέμενόν
σε παύσει μωραίνοντα τὴν πολλὴν ταύτην κόρυζαν
ἀποξύσας. ἢ τοῦτο μὲν καὶ ὁ ἑλλέβορος ἱκανὸς
ποιῆσαι ζωρότερος ποθείς;
| [45] Que peux-tu reprocher à mon souhait, Lykinos?
(LYKINOS)
Rien, Timolaos; car il ne serait pas trop sûr de contre-dire
un homme qui a des ailes et dont la force surpasse
celle de dix mille autres. Néanmoins je te demanderai si,
parmi tant de nations que tu as survolées, tu n'as pas
aperçu certain homme déjà vieux, dont l'esprit bat la campagne,
qui voyage dans les airs sur un petit anneau, qui
est capable de remuer des montagnes entières du bout de
son doigt et qui inspire de l'amour à tout le monde
en dépit de sa tête chauve et de son nez camard. Mais
dis-moi encore pourquoi un seul anneau n'aurait pas le
pouvoir d'opérer toutes ces merveilles. Ne pourras-tu
marcher qu'après avoir enfilé toutes ces bagues et en
avoir couvert tous les doigts de ta main gauche? Il y en
a même trop pour une seule main, et il faudra que la
droite lui vienne en aide. Cependant il te manque encore
un anneau, et c'est le plus nécessaire, celui qui, si tu le
passais à ton doigt, ferait cesser ta folie et enlèverait
cette épaisse couche de sottise. Peut-être aussi une potion
d'hellébore pur produirait-elle le même effet.
| [46] (ΤΙΜΟΛΑΟΣ)
Ἀλλὰ πάντως, ὦ Λυκῖνε, καὶ αὐτὸς εὔξῃ τι
ἤδη ποτέ, ὡς ἂν μάθωμεν οἷα αἰτήσεις ἀνεπίληπτα
καὶ ἀνέγκλητα ὁ συκοφαντῶν τοὺς ἄλλους.
(ΛΥΚΙΝΟΣ)
Ἀλλ´ οὐ δέομαι εὐχῆς ἐγώ. ἥκομεν γὰρ δὴ
πρὸς τὸ Δίπυλον, καὶ ὁ βέλτιστος οὑτοσὶ Σάμιππος
ἀμφὶ Βαβυλῶνα μονομαχῶν, καὶ σύ, ὦ Τιμόλαε,
ἀριστῶν μὲν ἐν Συρίᾳ, δειπνῶν δὲ ἐν Ἰταλίᾳ καὶ
τοῖς ἐμοὶ ἐπιβάλλουσι σταδίοις κατεχρήσασθε
καλῶς ποιοῦντες. ἄλλως τε οὐκ ἂν δεξαίμην
πλουτήσας ἐπ´ ὀλίγον ὑπηνέμιόν τινα πλοῦτον
ἀνιᾶσθαι μετ´ ὀλίγον ψιλὴν τὴν μᾶζαν ἐσθίων, οἷα
ὑμεῖς πείσεσθε μετ´ ὀλίγον, ἐπειδὰν ἡ εὐδαιμονία
μὲν ὑμῖν καὶ ὁ πολὺς πλοῦτος οἴχηται ἀποπτάμενος,
αὐτοὶ δὲ καταβάντες ἀπὸ τῶν θησαυρῶν τε
καὶ διαδημάτων ὥσπερ ἐξ ἡδίστου ὀνείρατος
ἀνεγρόμενοι ἀνόμοια τὰ ἐπὶ τῆς οἰκίας εὑρίσκητε
ὥσπερ οἱ τοὺς βασιλεῖς ὑποκρινόμενοι τραγῳδοὶ
ἐξελθόντες ἀπὸ τοῦ θεάτρου λιμώττοντες οἱ πολλοί,
καὶ ταῦτα πρὸ ὀλίγου Ἀγαμέμνονες ὄντες ἢ
Κρέοντες. λυπήσεσθε οὖν, ὡς τὸ εἰκός, καὶ
δυσάρεστοι ἔσεσθε τὰ ἐπὶ τῆς οἰκίας, καὶ μάλιστα
σύ, ὦ Τιμόλαε, ὁπόταν δέῃ σε τὸ αὐτὸ παθεῖν τῷ
Ἰκάρῳ τῆς πτερώσεως διαλυθείσης καταπεσόντα
ἐκ τοῦ οὐρανοῦ χαμαὶ βαδίζειν ἀπολέσαντα τοὺς
δακτυλίους ἐκείνους ἅπαντας ἀπορρυέντας τῶν
δακτύλων. ἐμοὶ δὲ καὶ τοῦτο ἱκανὸν ἀντὶ πάντων
θησαυρῶν καὶ Βαβυλῶνος αὐτῆς τὸ γελάσαι μάλα
ἡδέως ἐφ´ οἷς ὑμεῖς ᾐτήσατε τοιούτοις οὖσι, καὶ
ταῦτα φιλοσοφίαν ἐπαινοῦντες.
| [46] (TIMOLAOS)
Mais il faudra bien, Lykinos, que tu fasses un
souhait toi aussi, afin que nous sachions si tu ne demanderas
rien qui donne prise à la censure et aux reproches,
toi qui critiques si bien les autres.
(LYKINOS)
Moi, je n'ai pas de souhait à former; car nous voilà
arrivés au Dipyle et ce brave Samippos, en bataillant
en combat singulier à Babylone, et toi, Timolaos, en
déjeunant en Syrie et en dînant en Italie, vous avez
épuisé les stades qui m'étaient dévolus, et vous avez
bien fait. D'ailleurs je ne voudrais pas, pour une fortune
éphémère que le vent emporte avec lui, être réduit
quelque moment après à manger mon pain sec, comme
cela va vous arriver tout à l'heure, quand votre félicité
et vos immenses richesses se seront envolées et que vous-mêmes,
dépouillés de vos trésors et de vos diadèmes,
vous allez vous éveiller comme d'un songe enchanteur et
trouver dans vos maisons une réalité toute différente.
Vous ressemblerez alors à ces tragédiens qui, au sortir de
la scène, meurent de faim pour la plupart, après avoir été
quelques instants avant des Agamemnons et des Créons.
Vous en aurez naturellement du regret et vous aurez
de la peine à reprendre votre régime domestique, toi
surtout, Timolaos, lorsque, nouvel Icare, tu verras tes
ailes se fondre et que, tombé du haut du ciel, tu seras
forcé de marcher à terre, privé de tous ces anneaux
échappés de tes doigts. Pour moi, je me contenterai,
au lieu de tous ces trésors et de Babylone même, de rire
de tout mon coeur des souhaits insensés que vous avez
faits, en dépit de votre attachement à la philosophie.
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