[3,1286a] ἓν δὲ πότερον ἕνα συμφέρει κύριον εἶναι πάντων, ἢ οὐ συμφέρει.
§ 3. Τὸ μὲν οὖν περὶ τῆς τοιαύτης στρατηγίας ἐπισκοπεῖν νόμων ἔχει
μᾶλλον εἶδος ἢ πολιτείας ςἐν ἁπάσαις γὰρ ἐνδέχεται γίγνεσθαι τοῦτο
ταῖς πολιτείαισσ, ὥστ' ἀφείσθω τὴν πρώτην· ὁ δὲ λοιπὸς τρόπος τῆς
βασιλείας πολιτείας εἶδός ἐστιν, ὥστε περὶ τούτου δεῖ θεωρῆσαι καὶ τὰς
ἀπορίας ἐπιδραμεῖν τὰς ἐνούσας.
§ 4. Ἀρχὴ δ' ἐστὶ τῆς ζητήσεως αὕτη, πότερον συμφέρει μᾶλλον ὑπὸ
τοῦ ἀρίστου ἀνδρὸς ἄρχεσθαι ἢ ὑπὸ τῶν ἀρίστων νόμων.
Δοκοῦσι δὴ τοῖς νομίζουσι συμφέρειν βασιλεύεσθαι τὸ καθόλου μόνον
οἱ νόμοι λέγειν, ἀλλ' οὐ πρὸς τὰ προσπίπτοντα ἐπιτάττειν, ὥστ' ἐν
ὁποιᾳοῦν τέχνῃ τὸ κατὰ γράμματ' ἄρχειν ἠλίθιον (καὶ ἐν Αἰγύπτῳ μετὰ
τὴν τετρήμερον κινεῖν ἔξεστι τοῖς ἰατροῖς, ἐὰν δὲ πρότερον, ἐπὶ τῷ αὑτοῦ
κινδύνῳ). Φανερὸν τοίνυν ὡς οὐκ ἔστιν ἡ κατὰ γράμματα καὶ νόμους
ἀρίστη πολιτεία, διὰ τὴν αὐτὴν αἰτίαν. Ἀλλὰ μὴν κἀκεῖνον δεῖ ὑπάρχειν
τὸν λόγον, τὸν καθόλου, τοῖς ἄρχουσιν. Κρεῖττον δ' ᾧ μὴ πρόσεστι τὸ
παθητικὸν ὅλως ἢ ᾧ συμφυές· τῷ μὲν οὖν νόμῳ τοῦτο οὐχ ὑπάρχει,
ψυχὴν δ' ἀνθρωπίνην ἀνάγκη τοῦτ' ἔχειν πᾶσαν.
§ 5. Ἀλλ' ἴσως ἂν φαίη τις ὡς ἀντὶ τούτου βουλεύσεται περὶ τῶν καθ'
ἕκαστα κάλλιον. Ὅτι μὲν τοίνυν ἀνάγκη νομοθέτην αὐτὸν εἶναι, δῆλον,
καὶ κεῖσθαι νόμους, ἀλλὰ μὴ κυρίους ᾗ παρεκβαίνουσιν, ἐπεὶ περὶ τῶν γ'
ἄλλων εἶναι δεῖ κυρίους· ὅσα δὲ μὴ δυνατὸν τὸν νόμον κρίνειν ἢ ὅλως ἢ
εὖ, πότερον ἕνα τὸν ἄριστον δεῖ ἄρχειν ἢ πάντας; Καὶ γὰρ νῦν
συνιόντες δικάζουσι καὶ βουλεύονται καὶ κρίνουσιν, αὗται δ' αἱ κρίσεις
εἰσὶ πᾶσαι περὶ τῶν καθ' ἕκαστον. Καθ' ἕνα μὲν οὖν συμβαλλόμενος
ὁστισοῦν ἴσως χείρων· ἀλλ' ἐστὶν ἡ πόλις ἐκ πολλῶν, ὥσπερ δ' ἑστίασις
συμφορητὸς καλλίων μιᾶς καὶ ἁπλῆς· διὰ τοῦτο καὶ κρίνει ἄμεινον ὄχλος
πολλὰ ἢ εἷς ὁστισοῦν.
§ 6. Ἔτι μᾶλλον ἀδιάφθορον τὸ πολύκαθάπερ ὕδωρ τὸ πλεῖον, οὕτω
καὶ τὸ πλῆθος τῶν ὀλίγων ἀδιαφθορώτερον· τοῦ δ' ἑνὸς ὑπ' ὀργῆς
κρατηθέντος ἤ τινος ἑτέρου πάθους τοιούτου ἀναγκαῖον διεφθάρθαι τὴν
κρίσιν, ἐκεῖ δ' ἔργον ἅμα πάντας ὀργισθῆναι καὶ ἁμαρτεῖν. Ἔστω δὲ τὸ
πλῆθος οἱ ἐλεύθεροι, μηδὲν παρὰ τὸν νόμον πράττοντες ἀλλ' ἢ περὶ ὧν
ἐκλείπειν ἀναγκαῖον αὐτόν. Εἰ δὲ δὴ τοῦτο μὴ ῥᾴδιον ἐν πολλοῖς, ἀλλ' εἰ
πλείους εἶεν ἀγαθοὶ καὶ ἄνδρες καὶ πολῖται, πότερον ὁ εἷς
ἀδιαφθορώτερος ἄρχων, ἢ μᾶλλον οἱ πλείους μὲν τὸν ἀριθμὸν ἀγαθοὶ
δὲ πάντες;
| [3,1286a] En second lieu, est-il utile ou funeste à l'État d'avoir un maître
absolu ?
§ 3. La question d'un généralat de ce genre est un objet de lois
réglementaires bien plutôt que de constitution, puisque toutes les
constitutions pourraient également l'admettre. Je ne m'arrêterai donc
point à la royauté de Sparte. Quant à l'autre espèce de royauté, elle
forme une espèce de constitution à part ; je vais m'en occuper
spécialement, et parcourir toutes les questions qu'elle peut faire naître.
§ 4. Le premier point, dans cette recherche, est de savoir s'il est
préférable de remettre le pouvoir à un individu de mérite, ou de le
laisser à de bonnes lois ? Les partisans de la royauté, qui la trouvent si
bienfaisante, prétendront, sans nul doute, que la loi, ne disposant
jamais que d'une manière générale, ne peut prévoir tous les cas
accidentels, et que c'est déraisonner que de vouloir soumettre une
science, quelle qu'elle soit, à l'empire d'une lettre morte, comme cette
loi d'Égypte, qui ne permet aux médecins d'agir qu'après le quatrième
jour de la maladie, et qui les rend responsables, s'ils agissent avant ce
délai. Donc, évidemment, la lettre et la loi ne peuvent jamais, par les
mêmes motifs, constituer un bon gouvernement. Mais d'abord, cette
forme de dispositions générales est une nécessité pour tous ceux qui
gouvernent ; et l'emploi en est certainement plus sage dans une nature
exempte de toutes les passions que dans celle qui leur est
essentiellement soumise. La loi est impassible ; toute âme humaine au
contraire est nécessairement passionnée.
§ 5. Mais, dit-on, le monarque sera plus apte que la loi à prononcer
dans les cas particuliers. On admet alors évidemment qu'en même
temps qu'il est législateur, il existe aussi des lois qui cessent d'être
souveraines là où elles se taisent, mais qui le sont partout, où elles
parlent. Dans tous le cas où la loi ne peut pas du tout prononcer, ou ne
peut pas prononcer équitablement, doit-on s'en remettre à l'autorité
d'un individu supérieur à tous les autres, ou à celle de la majorité ? En
fait, la majorité aujourd'hui juge, délibère, élit dans les assemblées
publiques ; et tous ses décrets se rapportent à des cas particuliers.
Chacun de ses membres, pris à part, est inférieur peut-être, si on le
compare à l'individu dont je viens de parler ; mais l'État se compose
précisément de cette majorité, et le repas où chacun fournit son écot
est toujours plus complet que ne le serait le repas isolé d'un des
convives. C'est là ce qui rend la foule, dans la plupart des cas, meilleur
juge qu'un individu quel qu'il soit.
§ 6. De plus, une grande quantité est toujours moins corruptible,
comme l'est par exemple une masse d'eau ; et la majorité est de
même bien moins facile à corrompre que la minorité. Quand l'individu
est subjugué par la colère ou toute autre passion, il laisse de toute
nécessité fausser son jugement ; mais il serait prodigieusement difficile
que, dans le même cas, la majorité tout entière se mît en fureur ou se
trompât. Qu'on prenne d'ailleurs une multitude d'hommes libres, ne
s'écartant de la loi que là où nécessairement la loi doit être en défaut,
bien que la chose ne soit pas aisée dans une masse nombreuse, je
puis supposer toutefois que la majorité s'y compose d'hommes
honnêtes comme individus et comme citoyens ; je demande alors si un
seul sera plus incorruptible, ou si ce n'est pas cette majorité
nombreuse, mais probe ?
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