[3,1281a] τοῦτο δ' ἐστίν, ὡς φαμέν, τὸ ζῆν εὐδαιμόνως καὶ καλῶς. Τῶν καλῶν
ἄρα πράξεων χάριν θετέον εἶναι τὴν πολιτικὴν κοινωνίαν ἀλλ' οὐ τοῦ συζῆν.
§ 15. Διόπερ ὅσοι συμβάλλονται πλεῖστον εἰς τὴν τοιαύτην κοινωνίαν,
τούτοις τῆς πόλεως μέτεστι πλεῖον ἢ τοῖς κατὰ μὲν ἐλευθερίαν καὶ γένος
ἴσοις ἢ μείζοσι κατὰ δὲ τὴν πολιτικὴν ἀρετὴν ἀνίσοις, ἢ τοῖς κατὰ
πλοῦτον ὑπερέχουσι κατ' ἀρετὴν δ' ὑπερεχομένοις.
§ 16. Ὅτι μὲν οὖν πάντες οἱ περὶ τῶν πολιτειῶν ἀμφισβητοῦντες μέρος
τι τοῦ δικαίου λέγουσι, φανερὸν ἐκ τῶν εἰρημένων.
CHAPITRE VI.
§ 1. Ἔχει δ' ἀπορίαν τί δεῖ τὸ κύριον εἶναι τῆς πόλεως. Ἢ γάρ τοι τὸ
πλῆθος, ἢ τοὺς πλουσίους, ἢ τοὺς ἐπιεικεῖς, ἢ τὸν βέλτιστον ἕνα
πάντων, ἢ τύραννον. Ἀλλὰ ταῦτα πάντα ἔχειν φαίνεται δυσκολίαν. Τί
γάρ; Ἂν οἱ πένητες διὰ τὸ πλείους εἶναι διανέμωνται τὰ τῶν πλουσίων,
τοῦτ' οὐκ ἄδικόν ἐστιν; Ἔδοξε γὰρ νὴ Δία τῷ κυρίῳ δικαίως. Τὴν οὖν
ἀδικίαν τί χρὴ λέγειν τὴν ἐσχάτην; Πάλιν τε πάντων ληφθέντων, οἱ
πλείους τὰ τῶν ἐλαττόνων ἂν διανέμωνται, φανερὸν ὅτι φθείρουσι τὴν
πόλιν. Ἀλλὰ μὴν οὐχ ἥ γ' ἀρετὴ φθείρει τὸ ἔχον αὐτήν, οὐδὲ τὸ δίκαιον
πόλεως φθαρτικόν· ὥστε δῆλον ὅτι καὶ τὸν νόμον τοῦτον οὐχ οἷόν τ'
εἶναι δίκαιον.
§ 2. Ἔτι καὶ τὰς πράξεις ὅσας ὁ τύραννος ἔπραξεν ἀναγκαῖον εἶναι
πάσας δικαίας· βιάζεται γὰρ ὢν κρείττων, ὥσπερ καὶ τὸ πλῆθος τοὺς
πλουσίους. Ἀλλ' ἆρα τοὺς ἐλάττους δίκαιον ἄρχειν καὶ τοὺς πλουσίους;
Ἂν οὖν κἀκεῖνοι ταῦτα ποιῶσι καὶ διαρπάζωσι καὶ ἀφαιρῶνται τὰ
κτήματα τοῦ πλήθους, τοῦτ' ἐστὶ δίκαιον· καὶ θάτερον ἄρα. Ταῦτα μὲν
τοίνυν ὅτι πάντα φαῦλα καὶ οὐ δίκαια, φανερόν·
§ 3. ἀλλὰ τοὺς ἐπιεικεῖς ἄρχειν δεῖ καὶ κυρίους εἶναι πάντων; Οὐκοῦν
ἀνάγκη τοὺς ἄλλους ἀτίμους εἶναι πάντας, μὴ τιμωμένους ταῖς
πολιτικαῖς ἀρχαῖς· τιμὰς γὰρ λέγομεν εἶναι τὰς ἀρχάς, ἀρχόντων δ' αἰεὶ
τῶν αὐτῶν ἀναγκαῖον εἶναι τοὺς ἄλλους ἀτίμους. Ἀλλ' ἕνα τὸν
σπουδαιότατον ἄρχειν βέλτιον; Ἀλλ' ἔτι τοῦτο ὀλιγαρχικώτερον· οἱ γὰρ
ἄτιμοι πλείους. Ἀλλ' ἴσως φαίη τις ἂν τὸ κύριον ὅλως ἄνθρωπον εἶναι
ἀλλὰ μὴ νόμον φαῦλον, ἔχοντά γε τὰ συμβαίνοντα πάθη περὶ τὴν
ψυχήν. Ἂν οὖν ᾖ νόμος μὲν ὀλιγαρχικὸς δὲ ἢ δημοκρατικός, τί διοίσει
περὶ τῶν ἠπορημένων; Συμβήσεται γὰρ ὁμοίως τὰ λεχθέντα πρότερον.
§ 4. Περὶ μὲν οὖν τῶν ἄλλων ἔστω τις ἕτερος λόγος· ὅτι δὲ δεῖ κύριον
εἶναι μᾶλλον τὸ πλῆθος ἢ τοὺς ἀρίστους μὲν ὀλίγους δέ, δόξειεν ἂν
λύεσθαι καί τιν' ἔχειν ἀπορίαν, τάχα δὲ κἂν ἀλήθειαν. Τοὺς γὰρ
πολλούς, ὧν ἕκαστός ἐστιν οὐ σπουδαῖος ἀνήρ,
| [3,1281a] c'est-à-dire, je le répète, une vie vertueuse et fortunée.
Ainsi donc, l'association politique a certainement pour objet la vertu et
le bonheur des individus, et non pas seulement la vie commune.
§ 15. Ceux qui apportent le plus au fonds général de l'association,
ceux-là ont dans l'État une plus large part que ceux qui, égaux ou
supérieurs par la liberté, par la naissance, ont cependant moins de
vertu politique ; une plus large part que ceux qui, l'emportant par la
richesse, le cèdent toutefois en mérite.
§ 16. Je puis conclure de tout ceci qu'évidemment, dans leurs opinions
si opposées sur le pouvoir, les riches et les pauvres n'ont trouvé les
uns et les autres qu'une partie de la vérité et de la justice.
CHAPITRE VI.
§ 1. C'est un grand problème de savoir à qui doit appartenir la
souveraineté dans l'État. Ce ne peut qu'être ou à la multitude, ou aux
riches, ou aux gens de bien, ou à un seul individu supérieur par ses
talents, ou à un tyran. L'embarras est, ce semble, égal de toutes parts.
Quoi ! les pauvres, parce qu'ils sont en majorité, pourront se partager
les biens des riches ; et ce ne sera point une injustice, attendu que le
souverain de par son droit aura décidé que ce n'en est point une ! Et
que sera donc la plus criante des iniquités ? Mais, quand tout sera
divisé, si une seconde majorité se partage de nouveau les biens de la
minorité, l'État évidemment sera anéanti. Et pourtant, la vertu ne ruine
point ce qui la possède; la justice n'est point un poison pour l'État.
Cette prétendue loi ne peut donc être certainement qu'une flagrante injustice.
§ 2. Par le même principe, tout ce qu'aura fait le tyran sera
nécessairement juste ; il emploiera la violence parce qu'il sera le plus
fort, comme les pauvres l'auront été contre les riches. Le pouvoir
appartiendra-t-il de droit à la minorité, aux riches ? Mais s'ils agissent
comme les pauvres et le tyran, s'ils pillent la multitude et la dépouillent,
cette spoliation sera-t-elle juste ? Les autres alors ne le seront pas moins.
Ainsi de toutes parts, on le voit, ce ne sont que crimes et iniquités.
§ 3. Doit-on remettre la souveraineté absolue sur toutes les affaires
aux citoyens distingués ? Alors, c'est avilir toutes les autres classes
exclues des fonctions publiques ; les fonctions publiques sont de
véritables honneurs, et la perpétuité du pouvoir aux mains de quelques
citoyens déconsidère nécessairement tous les autres. Vaut-il mieux
donner le pouvoir à un seul, à l'homme supérieur ? Mais, c'est
exagérer le principe oligarchique ; et une majorité plus grande encore
sera bannie des magistratures. On pourrait ajouter que c'est une faute
grave de substituer à la souveraineté de la loi la souveraineté d'un
individu, toujours sujet aux mille passions qui agitent toute âme
humaine. Eh bien ! dira-t-on : Que la loi soit donc souveraine.
Oligarchique ou démocratique, aura-t-on mieux évité tous les écueils ?
Pas le moins du monde ; les mêmes dangers que nous venons de
signaler subsisteront toujours.
§ 4. Mais nous reviendrons ailleurs sur ces divers sujets.
Attribuer la souveraineté à la multitude plutôt qu'aux hommes
distingués, qui sont toujours en minorité, peut sembler une solution
équitable et vraie de la question, quoiqu'elle ne tranche pas encore
toutes les difficultés. On peut admettre en effet que la majorité, dont
chaque membre pris à part n'est pas un homme remarquable,
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