[4,8c] Τοιοῦτος γάρ τίς ἐστιν ὁ Κυνικὸς τοῦ σκήπτρου καὶ
διαδήματος ἠξιωμένος παρὰ τοῦ Διὸς καὶ λέγων ’ἵν´
ἴδητε, ὦ ἄνθρωποι, ὅτι τὴν εὐδαιμονίαν καὶ ἀταραξίαν
οὐχ ὅπου ἐστὶ ζητεῖτε, ἀλλ´ ὅπου μή ἐστιν, ἰδοὺ ἐγὼ
ὑμῖν παράδειγμα ὑπὸ τοῦ θεοῦ ἀπέσταλμαι μήτε κτῆσιν
ἔχων μήτε οἶκον μήτε γυναῖκα μήτε τέκνα, ἀλλὰ μηδ´
ὑπόστρωμα μηδὲ χιτῶνα μηδὲ σκεῦος· καὶ ἴδετε, πῶς
ὑγιαίνω· πειράθητέ μου κἂν ἴδητε ἀτάραχον, ἀκούσατε
τὰ φάρμακα καὶ ὑφ´ ὧν ἐθεραπεύθην.‘ τοῦτο γὰρ ἤδη
καὶ φιλάνθρωπον καὶ γενναῖον. ἀλλ´ ὁρᾶτε, τίνος ἔργον
ἐστίν· τοῦ Διὸς ἢ ὃν ἂν ἐκεῖνος ἄξιον κρίνῃ ταύτης
τῆς ὑπηρεσίας, ἵνα μηδαμοῦ μηδὲν παραγυμνώσῃ πρὸς
τοὺς πολλούς, δι´ οὗ τὴν μαρτυρίαν τὴν αὑτοῦ, ἣν τῇ
ἀρετῇ μαρτυρεῖ καὶ τῶν ἐκτὸς καταμαρτυρεῖ, αὐτὸς ἄκυρον ποιήσῃ·
οὔτ´ ὠχρήσαντα χρόα κάλλιμον οὔτε παρειῶν
δάκρυ´ ὀμορξάμενον.
καὶ οὐ μόνον ταῦτα, ἀλλ´ οὐδὲ ποθοῦντά τι ἢ ἐπιζητοῦντα,
ἄνθρωπον ἢ τόπον ἢ διαγωγήν, ὡς τὰ παιδία
τὸν τρυγητὸν ἢ τὰς ἀργίας, αἰδοῖ πανταχοῦ κεκοσμημένον,
ὡς οἱ ἄλλοι τοίχοις καὶ θύραις καὶ θυρωροῖς.
Νῦν δ´ αὐτὸ μόνον κινηθέντες πρὸς φιλοσοφίαν, ὡς
οἱ κακοστόμαχοι πρός τι βρωμάτιον, ὃ μετὰ μικρὸν
σικχαίνειν μέλλουσιν, εὐθὺς ἐπὶ τὸ σκῆπτρον, ἐπὶ τὴν
βασιλείαν. καθεῖκε τὴν κόμην, ἀνείληφε τρίβωνα, γυμνὸν δεικνύει τὸν ὦμον,
μάχεται τοῖς ἀπαντῶσιν κἂν ἐν
φαινόλῃ τινὰ ἴδῃ, μάχεται αὐτῷ. ἄνθρωπε, χειμάσκησον
πρῶτον· ἰδοῦ σου τὴν ὁρμήν, μὴ κακοστομάχου ἢ κισσώσης γυναικός ἐστιν.
ἀγνοεῖσθαι μελέτησον πρῶτον,
τίς εἶ· σαυτῷ φιλοσόφησον ὀλίγον χρόνον. οὕτως καρπὸς γίνεται·
κατορυγῆναι δεῖ εἰς χρόνον τὸ σπέρμα,
κρυφθῆναι, κατὰ μικρὸν αὐξηθῆναι, ἵνα τελεσφορήσῃ.
ἂν δὲ πρὸ τοῦ γόνυ φῦσαι τὸν στάχυν ἐξενέγκῃ, ἀτελές
ἐστιν, ἐκ κήπου Ἀδωνιακοῦ. τοιοῦτον εἶ καὶ σὺ φυτάριον· θᾶττον τοῦ δέοντος
ἤνθηκας, ἀποκαύσει σε ὁ χειμών. ἰδοῦ, τί λέγουσιν οἱ γεωργοὶ περὶ τῶν
σπερμάτων, ὅταν πρὸ ὥρας θερμασίαι γένωνται. ἀγωνιῶσιν, μὴ
ἐξυβρίσῃ τὰ σπέρματα, εἶτα αὐτὰ πάγος εἷς λαβὼν ἐξελέγξῃ. ὅρα καὶ σύ,
ἄνθρωπε· ἐξύβρικας, ἐπιπεπήδηκας
δοξαρίῳ πρὸ ὥρας· δοκεῖς τις εἶναι, μωρὸς παρὰ μωροῖς· ἀποπαγήσῃ, μᾶλλον δ´
ἀποπέπηγας ἤδη ἐν τῇ ῥίζῃ
κάτω, τὰ δ´ ἄνω σου μικρὸν ἔτι ἀνθεῖ καὶ διὰ τοῦτο
δοκεῖς ἔτι ζῆν καὶ θάλλειν. ἄφες ἡμᾶς γε κατὰ φύσιν
πεπανθῆναι. τί ἡμᾶς ἀποδύεις, τί βιάζῃ; οὔπω δυνάμεθα ἐνεγκεῖν τὸν ἀέρα.
ἔασον τὴν ῥίζαν αὐξηθῆναι,
εἶτα γόνυ λαβεῖν τὸ πρῶτον, εἶτα τὸ δεύτερον, εἶτα τὸ
τρίτον· εἶθ´ οὕτως ὁ καρπὸς ἐκβιάσεται τὴν φύσιν, κἂν
ἐγὼ μὴ θέλω. τίς γὰρ ἐγκύμων γενόμενος καὶ πλήρης
τηλικούτων δογμάτων οὐχὶ αἰσθάνεταί τε τῆς αὑτοῦ
παρασκευῆς καὶ ἐπὶ τὰ κατάλληλα ἔργα ὁρμᾷ; ἀλλὰ ταῦρος μὲν οὐκ ἀγνοεῖ τὴν
αὑτοῦ φύσιν καὶ παρασκευήν,
ὅταν ἐπιφανῇ τι θηρίον, οὐδ´ ἀναμένει τὸν προτρεψόμενον, οὐδὲ κύων, ὅταν ἴδῃ
τι τῶν ἀγρίων ζῴων· ἐγὼ δ´ ἂν ἴσχω τὴν ἀνδρὸς ἀγαθοῦ παρασκευήν, ἐκδέξομαι,
ἵνα με σὺ παρασκευάσῃς ἐπὶ τὰ οἰκεῖα ἔργα; νῦν δ´
οὔπω ἔχω, πίστευσόν μοι. τί οὖν με πρὸ ὥρας ἀποξηρᾶναι θέλεις,
ὡς αὐτὸς ἐξηράνθης;
| [4,8c] Voilà, en effet, ce qu'est le Cynique, que Jupiter a jugé digne de porter
le sceptre et le diadème. «Hommes, dit-il, pour que vous voyiez bien que
vous cherchez le bonheur et le calme, non pas où ils sont, mais où ils ne
sont pas, me voici comme un exemple que Dieu vous envoie : je n'ai ni
fortune, ni maison, ni femme, ni enfants ; bien loin de là, je n'ai même
pas de lit, pas de tunique, pas de meubles; voyez pourtant comme je me
porte bien. Mettez-moi à l'épreuve; et, si vous reconnaissez qu'en effet
je suis exempt de trouble, instruisez-vous de mes remèdes et de mon
traitement. Voilà la conduite d'un ami de l'humanité et d'un homme de cœur !
Mais voyez à qui il appartient d'agir ainsi : à Jupiter, ou à celui
qu'il a jugé digne d'être ainsi son ministre, en lui défendant de jamais
laisser voir à la foule quoique ce soit, qui puisse affaiblir le
témoignage qu'il rend en faveur de la vertu contre les choses extérieures.
« On ne doit jamais voir son beau teint pâlir; on ne doit jamais le voir
essuyer des larmes sur ses joues. »
Et cela ne suffit pas : on ne doit pas le voir non plus regretter ou
désirer quoi que ce soit, homme, lieu, ou manière d'employer son temps, à
la façon des enfants qui regrettent ou désirent les vendanges et les jours
de congé. Le respect de lui-même doit être pour lui ce que sont pour les
autres les murs, les portes et les portiers.
Aujourd'hui, dès qu'on se sent attiré vers la philosophie, comme les
estomacs malades vers des mets dont ils seront bientôt fatigués, on
prétend aussitôt au sceptre et à la royauté. On laisse pousser sa
chevelure, on prend la tunique, on découvre son épaule, on discute contre
ceux que l'on rencontre; trouve-t-on même quelqu'un en simple casaque, on
discute encore contre lui. Homme, commence plutôt par t'exercer à l'écart.
Prends garde que ton désir ne soit celui d'un estomac malade, ou une envie
de femme grosse. Commence par faire en sorte qu'on ne sache pas ce que tu
es ; pendant quelque temps sois philosophe pour toi seul. C'est ainsi que
pousse le blé : il faut que le germe soit enfoui et caché dans la terre
pendant quelque temps, et qu'il s'y développe lentement, pour arriver à
bien. Si l'épi se montre avant que le nœud de la tige ne soit formé, il
n'arrive pas à terme; il est du jardin d'Adonis. Tu es une plante du même
genre : si tu fleuris trop vite, le froid te brûlera.
Vois ce que les cultivateurs disent des semences, lorsque la chaleur vient
avant le temps; ils tremblent qu'elles ne poussent trop vite, et que la
gelée, en tombant sur elles, ne les en punisse. Homme, prends garde à ton
tour : tu as poussé trop vite; tu t'es jeté trop tôt sur la gloire; tu
sembles être quelque chose; tu n'es qu'un sot au milieu des sots ; le
froid te tuera, ou plutôt il t'a déjà tué par le bas, dans ta racine; le
haut pourtant chez toi fleurit encore un peu, et c'est ce qui fait croire
que tu es encore vivant et fort. Mais, nous au moins, laisse-nous mûrir
conformément à la nature. Pourquoi nous découvrir? Pourquoi forcer notre
croissance? Nous ne pouvons pas encore supporter l'air. Laisse ma racine
grandir, prendre un premier nœud, puis un second, puis un troisième ; et
de cette façon le fruit forcera la nature, alors même que je ne le
voudrais pas. Comment, en effet, un homme tout plein et tout rempli de ces
sages principes, ne sentirait-il pas sa force, et ne se porterait-il pas
de lui-même aux actes pour lesquels elle est faite? Quoi ! le taureau
n'ignore pas sa nature et sa force, et, quand une bête farouche se
présente, il n'attend pas qu'on le stimule ; quoi ! le chien fait de même
à la vue d'une bête fauve ; et moi, si j'avais la force du Sage,
j'attendrais, pour faire ce que je dois, que tu m'y eusses disposé !
Mais, à l'heure qu'il est, je n'ai pas cette force, crois-moi. Pourquoi
donc veux-tu que je me fane avant le temps, comme tu t'es fané toi-même?
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