[391] (Ἑρμογένης)
Οὐκ ἔχω, ὦ Σώκρατες, ὅπως χρὴ πρὸς ἃ λέγεις (391a) ἐναντιοῦσθαι. ἴσως μέντοι οὐ ῥᾴδιόν ἐστιν οὕτως ἐξαίφνης πεισθῆναι, ἀλλὰ δοκῶ μοι ὧδε ἂν μᾶλλον πιθέσθαι σοι, εἴ μοι δείξειας ἥντινα φῂς εἶναι τὴν φύσει ὀρθότητα ὀνόματος.
(Σωκράτης)
Ἐγὼ μέν, ὦ μακάριε Ἑρμόγενες, οὐδεμίαν λέγω, ἀλλ᾽ ἐπελάθου γε ὧν ὀλίγον πρότερον ἔλεγον, ὅτι οὐκ εἰδείην ἀλλὰ σκεψοίμην μετὰ σοῦ. Νῦν δὲ σκοπουμένοις ἡμῖν, ἐμοί τε καὶ σοί, τοσοῦτον μὲν ἤδη φαίνεται παρὰ τὰ πρότερα, φύσει τέ τινα ὀρθότητα ἔχον εἶναι τὸ ὄνομα καὶ οὐ (391b) παντὸς ἀνδρὸς ἐπίστασθαι (καλῶς) αὐτὸ πράγματι ὁτῳοῦν θέσθαι· ἢ οὔ;
(Ἑρμογένης)
Πάνυ γε.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν τὸ μετὰ τοῦτο χρὴ ζητεῖν, εἴπερ ἐπιθυμεῖς εἰδέναι, ἥτις ποτ᾽ αὖ ἐστιν αὐτοῦ ἡ ὀρθότης.
(Ἑρμογένης)
Ἀλλὰ μὴν ἐπιθυμῶ γε εἰδέναι.
(Σωκράτης)
Σκόπει τοίνυν.
(Ἑρμογένης)
Πῶς οὖν χρὴ σκοπεῖν;
(Σωκράτης)
Ὀρθοτάτη μὲν τῆς σκέψεως, ὦ ἑταῖρε, μετὰ τῶν ἐπισταμένων, χρήματα ἐκείνοις τελοῦντα καὶ χάριτας κατατιθέμενον. Εἰσὶ δὲ οὗτοι οἱ σοφισταί, οἷσπερ καὶ ὁ ἀδελφός (391c) σου Καλλίας πολλὰ τελέσας χρήματα σοφὸς δοκεῖ εἶναι. Ἐπειδὴ δὲ οὐκ ἐγκρατὴς εἶ τῶν πατρῴων, λιπαρεῖν χρὴ τὸν ἀδελφὸν καὶ δεῖσθαι αὐτοῦ διδάξαι σε τὴν ὀρθότητα περὶ τῶν τοιούτων ἣν ἔμαθεν παρὰ Πρωταγόρου.
(Ἑρμογένης)
Ἄτοπος μεντἂν εἴη μου, ὦ Σώκρατες, ἡ δέησις, εἰ τὴν μὲν ἀλήθειαν τὴν Πρωταγόρου ὅλως οὐκ ἀποδέχομαι, τὰ δὲ τῇ τοιαύτῃ ἀληθείᾳ ῥηθέντα ἀγαπῴην ὥς του ἄξια.
(Σωκράτης)
Ἀλλ᾽ εἰ μὴ αὖ σε ταῦτα ἀρέσκει, παρ᾽ Ὁμήρου χρὴ (391d) μανθάνειν καὶ παρὰ τῶν ἄλλων ποιητῶν.
(Ἑρμογένης)
Καὶ τί λέγει, ὦ Σώκρατες, Ὅμηρος περὶ ὀνομάτων, καὶ ποῦ;
(Σωκράτης)
Πολλαχοῦ· μέγιστα δὲ καὶ κάλλιστα ἐν οἷς διορίζει ἐπὶ τοῖς αὐτοῖς ἅ τε οἱ ἄνθρωποι ὀνόματα καλοῦσι καὶ οἱ θεοί. Ἢ οὐκ οἴει αὐτὸν μέγα τι καὶ θαυμάσιον λέγειν ἐν τούτοις περὶ ὀνομάτων ὀρθότητος; δῆλον γὰρ δὴ ὅτι οἵ γε θεοὶ αὐτὰ καλοῦσιν πρὸς ὀρθότητα ἅπερ ἔστι φύσει ὀνόματα· (391e) ἢ σὺ οὐκ οἴει;
(Ἑρμογένης)
Εὖ οἶδα μὲν οὖν ἔγωγε, εἴπερ καλοῦσιν, ὅτι ὀρθῶς καλοῦσιν. ἀλλὰ ποῖα ταῦτα λέγεις;
(Σωκράτης)
Οὐκ οἶσθα ὅτι περὶ τοῦ ποταμοῦ τοῦ ἐν τῇ Τροίᾳ, ὃς ἐμονομάχει τῷ Ἡφαίστῳ, «ὃν Ξάνθον,» φησί, «καλέουσι θεοί, ἄνδρες δὲ Σκάμανδρον;»
(Ἑρμογένης)
Ἔγωγε.
| [391] HERMOGÈNE.
Je ne vois pas, Socrate, ce que je pourrais opposer (391a) à ce que
tu dis. Mais pourtant il n'est pas facile de s'y rendre sur l'heure : ce qui
pourrait je crois me persuader le mieux, ce serait de me faire voir en quoi
consiste cette propriété du nom que tu prétends être fondée dans la
nature.
SOCRATE.
Moi, cher Hermogène, je ne prétends, rien : tu oublies ce que je
disais tout à l'heure, que j'ignore tout cela, mais que je l'étudierais
volontiers avec toi. Ce que nous avons du moins reconnu jusqu'ici,
contrairement à ce qui nous semblait d'abord, c'est que le nom a en
lui-même une certaine propriété naturelle, et que (391b) tout homme n'est
pas capable de donner à quelque chose que ce soit le nom qui lui
convient. N'est-il pas vrai ?
HERMOGÈNE.
Très vrai.
SOCRATE.
Ce qu'il nous faut donc chercher maintenant, puisque tu désires le
savoir, c'est en quoi consiste la propriété naturelle des noms?
HERMOGÈNE.
Assurément, je désire le savoir.
SOCRATE.
Eh bien, cherche-le.
HERMOGÈNE.
Mais comment faire ?
SOCRATE.
Le meilleur moyen, mon cher ami, et le plus propre à notre objet,
ce serait de s'adresser aux gens qui s'y entendent, en leur payant de
bonnes sommes avec bien des remerciements par dessus le marché. Je
veux parler des sophistes à qui ton frère (391c) Callias a compté tant
d'argent : aussi passe-t-il pour sage. Mais comme tu ne possèdes rien
du patrimoine de ta famille, je te conseille de cajoler ton frère, et de faire
en sorte par tes instances, qu'il t'enseigne cette propriété des noms dont il
a dû être instruit par Protagoras.
HERMOGÈNE.
La démarche serait étrange de ma part, Socrate, si moi qui n'admets
point du tout la vérité de Protagoras, je faisais le moindre cas des
conséquences qu'on peut en avoir tirées.
SOCRATE.
Si ce moyen ne te convient pas, il faut nous instruire auprès
d'Homère (391d) et des autres poètes.
HERMOGÈNE.
Et que dit Homère de la propriété des noms? Où en parle-t-il ?
SOCRATE.
En maint endroit : mais les principaux et les plus beaux sont ceux où
il distingue pour une même chose, le nom dont se servent les hommes et
celui dont se servent les dieux. Est-ce que tu ne trouves pas qu'Homère
nous dit là quelque chose de grand et de merveilleux sur la propriété des
noms? Car il est clair que les dieux doivent employer avec une
propriété parfaite les dénominations naturelles des choses. (391e) N'es-tu
pas de cet avis?
HERMOGÈNE.
Sans doute, je conçois que si les dieux donnent des noms, ils doivent
les donner justes. Mais quels sont ceux que tu veux dire?
SOCRATE.
Ne sais-tu pas qu'en parlant de ce fleuve de Troie qui a un combat
singulier avec Vulcain, Homère dit:
"Ce fleuve que les dieux appellent Xanthe, et les hommes Scamandre".
HERMOGÈNE.
Oui.
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