HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Arrien, Les Entretiens d'Épictête, livre IV

Chapitre 1c

  Chapitre 1c

[4,1c] δοῦλος εὐθὺς εὔχεται ἀφεθῆναι ἐλεύθερος. διὰ τί; δοκεῖτε, ὅτι τοῖς εἰκοστώναις ἐπιθυμεῖ δοῦναι ἀργύριον; οὔ· ἀλλ´ ὅτι φαντάζεται μέχρι νῦν διὰ τὸ μὴ τετυχηκέναι τούτου ἐμποδίζεσθαι καὶ δυσροεῖν. ‘ἂν ἀφεθῶ’, φησίν, ‘εὐθὺς πᾶσα εὔροια, οὐδενὸς ἐπιστρέφομαι, πᾶσιν ὡς ἴσος καὶ ὅμοιος λαλῶ, πορεύομαι ὅπου θέλω, ἔρχομαι ὅθεν θέλω καὶ ὅπου θέλω.’ εἶτα ἀπηλευθέρωται καὶ εὐθὺς μὲν οὐκ ἔχων, ποῖ φάγῃ, ζητεῖ, τίνα κολακεύσῃ, παρὰ τίνι δειπνήσῃ· εἶτα ἐργάζεται τῷ σώματι καὶ πάσχει τὰ δεινότατα κἂν σχῇ τινα φάτνην, ἐμπέπτωκεν εἰς δουλείαν πολὺ τῆς προτέρας χαλεπωτέραν καὶ εὐπορήσας ἄνθρωπος ἀπειρόκαλος πεφίληκε παιδισκάριον καὶ δυστυχῶν ἀνακλαίεται καὶ τὴν δουλείαν ποθεῖ. ‘τί γάρ μοι κακὸν ἦν; ἄλλος μ´ ἐνέδυεν, ἄλλος μ´ ὑπέδει, ἄλλος ἔτρεφεν, ἄλλος ἐνοσοκόμει, ὀλίγα αὐτῷ ὑπηρέτουν. νῦν δὲ τάλας οἷα πάσχω πλείοσι δουλεύων ἀνθ´ ἑνός; ὅμως δ´ ἐὰν δακτυλίους’, φησίν, ‘λάβω, τότε γ´ εὐρούστατα διάξω καὶ εὐδαιμονέστατα’. πρῶτον μὲν ἵνα λάβῃ, πάσχει ὧν ἐστιν ἄξιος· εἶτα λαβὼν πάλιν ταὐτά. εἶτά φησινἂν μὲν στρατεύσωμαι, ἀπηλλάγην πάντων τῶν κακῶν’. στρατεύεται, πάσχει ὅσα μαστιγίας καὶ οὐδὲν ἧττον δευτέραν αἰτεῖ στρατείαν καὶ τρίτην. εἶθ´ ὅταν αὐτὸν τὸν κολοφῶνα ἐπιθῇ καὶ γένηται συγκλητικός, τότε γίνεται δοῦλος εἰς σύλλογον ἐρχόμενος, τότε τὴν καλλίστην καὶ λιπαρωτάτην δουλείαν δουλεύει. Ἵνα μὴ μωρὸς , ἀλλ´ ἵνα μάθῃ, ἔλεγεν Σωκράτης, τί ἐστι τῶν ὄντων ἕκαστον, καὶ μὴ εἰκῇ τὰς προλήψεις ἐφαρμόζῃ ταῖς ἐπὶ μέρους οὐσίαις. τοῦτο γάρ ἐστι τὸ αἴτιον τοῖς ἀνθρώποις πάντων τῶν κακῶν, τὸ τὰς προλήψεις τὰς κοινὰς μὴ δύνασθαι ἐφαρμόζειν. τοῖς ἐπὶ μέρους. ἡμεῖς δ´ ἄλλοι ἄλλο οἰόμεθα. μὲν ὅτι νοσεῖ. οὐδαμῶς, ἀλλ´ ὅτι τὰς προλήψεις οὐκ ἐφαρμόζει. δ´ ὅτι πτωχός ἐστιν, δ´ ὅτι πατέρα χαλεπὸν ἔχει μητέρα, τῷ δ´ ὅτι Καῖσαρ οὐχ ἵλεώς ἐστιν. τοῦτο δ´ ἐστὶν ἓν καὶ μόνον τὸ τὰς προλήψεις ἐφαρμόζειν μὴ εἰδέναι. ἐπεὶ τίς οὐκ ἔχει κακοῦ πρόληψιν, ὅτι βλαβερόν ἐστιν, ὅτι φευκτόν ἐστιν, ὅτι παντὶ τρόπῳ ἀποικονόμητόν ἐστιν; πρόληψις προλήψει οὐ μάχεται, ἀλλ´ ὅταν ἔλθῃ ἐπὶ τὸ ἐφαρμόζειν. τί οὖν τὸ κακόν ἐστι τοῦτο καὶ βλαβερὸν καὶ φευκτόν; λέγει τὸ Καίσαρος μὴ εἶναι φίλον· ἀπῆλθεν, ἀπέ{ς}πεσεν τῆς ἐφαρμογῆς, θλίβεται, ζητεῖ τὰ μηδὲν πρὸς τὸ προκείμενον· ὅτι τυχὼν τοῦ φίλος εἶναι Καίσαρος οὐδὲν ἧττον τοῦ ζητουμένου οὐ τέτευχεν. τί γάρ ἐστιν, ζητεῖ πᾶς ἄνθρωπος; εὐσταθῆσαι, εὐδαιμονῆσαι, πάντα ὡς θέλει ποιεῖν, μὴ κωλύεσθαι, μὴ ἀναγκάζεσθαι. ὅταν οὖν γένηται Καίσαρος φίλος, πέπαυται κωλυόμενος, πέπαυται ἀναγκαζόμενος, εὐσταθεῖ, εὐροεῖ; τίνος πυθώμεθα; τίνα ἔχομεν ἀξιοπιστότερον αὐτὸν τοῦτον τὸν γεγονότα φίλον; ἐλθὲ εἰς τὸ μέσον καὶ εἰπὲ ἡμῖν, πότε ἀταραχώτερον ἐκάθευδες, νῦν πρὶν γενέσθαι φίλος τοῦ Καίσαρος; εὐθὺς ἀκούεις ὅτιπαῦσαι, τοὺς θεούς σοι, ἐμπαίζων μου τῇ τύχῃ· οὐκ οἶδας, οἷα πάσχω τάλας· οὐδ´ ὕπνος ἐπέρχεταί μοι, ἀλλ´ ἄλλος ἐλθὼν λέγει, ὅτι ἤδη ἐγρηγορεῖ, ἤδη πρόεισιν· εἶτα ταραχαί, εἶτα φροντίδες’. ἄγε, ἐδείπνεις δὲ πότε εὐαρεστότερον, νῦν πρότερον; ἄκουσον αὐτοῦ καὶ περὶ τούτων τί λέγει· ὅτι, ἂν μὲν μὴ κληθῇ, ὀδυνᾶται, ἂν δὲ κληθῇ, ὡς δοῦλος παρὰ κυρίῳ δειπνεῖ μεταξὺ προσέχων, μή τι μωρὸν εἴπῃ ποιήσῃ. καὶ τί δοκεῖς φοβεῖται; μὴ μαστιγωθῇ ὡς δοῦλος; πόθεν αὐτῷ οὕτως καλῶς; ἀλλ´ ὡς πρέπει τηλικοῦτον ἄνδρα, Καίσαρος φίλον, μὴ ἀπολέσῃ τὸν τράχηλον. ἐλούου δὲ πότ´ ἀταραχώτερον; ἐγυμνάζου δὲ πότε σχολαίτερον; τὸ σύνολον ποῖον μᾶλλον ἤθελες βίον βιοῦν, τὸν νῦν τὸν τότε; ὀμόσαι δύναμαι, ὅτι οὐδεὶς οὕτως ἐστὶν ἀναίσθητος ἀναλήθης, μὴ ἀποδύρασθαι τὰς αὑτοῦ συμφοράς, ὅσῳ ἂν φίλτερος. [4,1c] L'esclave souhaite bien vite d'être affranchi. Pourquoi? Pour le plaisir de donner de l'argent aux fermiers du vingtième? Non, mais parce qu'il s'imagine que c'est faute d'avoir obtenu cet affranchissement, qu'il n'est ni libre ni heureux. « Que l'on m'affranchisse, dit-il, et à l'instant mon bonheur est complet : je n'ai plus à faire ma cour à personne, je parle à qui que ce soit comme son égal et son semblable, je vais où je veux, je pars d'où je veux et pour où je veux. » On l'affranchit : aussitôt, n'ayant plus où manger, il cherche quelqu'un à flatter, quelqu'un chez qui dîner. Il fait argent de son corps, et se prête aux dernières infamies. Qu'il trouve un râtelier, et le voilà retombé dans une servitude bien plus dure que la première. Ou, s'il fait fortune, le goujat qu'il est, le voilà qui s'éprend d'une femme de rien; et alors il souffre, il pleure, et il regrette son temps d'esclavage. « Quel mal y avais-je? dit-il. C'était un autre qui m'habillait, qui me chaussait, qui me nourrissait, qui me soignait quand j'étais malade; et mon service chez lui était bien peu de chose. Mais aujourd'hui, hélas, que de misères ! Que de maîtres j'ai au lieu d'un seul ! » Et il ajoute : « Si pourtant j'obtenais les anneaux, quelle vie facile et heureuse j'aurais alors ! » Et, pour les obtenir, il commence par endurer mille choses dont il est digne ; puis, quand il les a obtenus, il en endure encore de pareilles. Puis il se dit : « Si je faisais campagne, je couperais court à toutes mes misères. » Il fait campagne ; il souffre comme un vaurien; et il n'en demande pas moins une seconde et une troisième fois à faire campagne. Puis, quand il a mis le comble à son élévation, quand il est devenu sénateur, qu'est-il alors? Un esclave qui se rend aux séances. Ses chaînes sont plus belles ; elles sont les plus brillantes de toutes; mais ce sont des chaînes. Qu'il cesse de n'être qu'un sot. Qu'il apprenne, comme le disait Socrate, la nature vraie de chaque chose; et qu'il n'applique pas sans réflexion ses notions premières aux objets particuliers. Là, en effet, est la cause de tous les malheurs des hommes : ils ne savent pas appliquer leurs notions premières et générales aux faits particuliers. Nous croyons les uns à une cause de nos maux, les autres à une autre. L'un se dit : « C'est que je suis malade ! » — Pas du tout ; c'est qu'il applique mal ses notions premières. Un autre : « C'est que je suis pauvre. » Celui-ci : « C'est que j'ai un méchant père ou une méchante mère. » Celui-là : « C'est que César ne m'est pas favorable. » Mais la seule et unique cause, la voici : ils ne savent pas appliquer leurs notions premières. Est-il quelqu'un, en effet, qui n'ait pas sur le mal cette notion première, qu'il est funeste, qu'il est à fuir, qu'il est à écarter de toutes les façons? Personne, car il n'y a jamais d'opposition entre les notions premières des uns ou des autres. Les oppositions ne commencent que quand on en vient aux applications. Par exemple, qu'est-ce qui est ce mal si funeste, que l'on doit si bien éviter? On dit : « C'est de ne pas être l'ami de César. » C'en est fait; on est à côté de l'application vraie; on est aux abois; on va chercher des choses sans rapport avec la question ; car on aura beau obtenir l'amitié de César, on n'aura pas obtenu pour cela ce qu'on demandait. Qu'est-ce que l'homme demande, en effet? A vivre calme et heureux, à tout faire comme il le veut, à ne jamais être empêché ni contraint. Or, une fois l'ami de César, n'est-il plus jamais empêché? Plus jamais contraint? Vit-il toujours calme et heureux? Qui interrogerons-nous là-dessus? Et quelle autorité plus digne de foi, que celle de l'ami même de César? « Avance donc au milieu de nous, toi, et dis-nous quand est-ce que ton sommeil était le plus tranquille. Est-ce aujourd'hui, ou avant que tu ne fusses l'ami de César? » Aussitôt tu lui entends dire : « Cesse, par tous les Dieux ! de te railler de mon sort. Tu ne sais pas ce que je souffre, hélas ! Le sommeil ne vient même pas pour moi. On accourt me dire : Il est déjà éveillé ! Il sort déjà ! Puis tous mes soucis, et toutes mes craintes ! » — « Eh bien ! quand est-ce que tu as le mieux goûté les douceurs de la table? Aujourd'hui, ou auparavant? » Écoute encore ce qu'il nous dit là-dessus. S'il n'est pas invité par César, le voilà triste; « il est invité, il est au souper comme un esclave à la table de son maître, tremblant sans cesse de dire ou de faire quelque sottise. Et que crois-tu qu'il craigne? D'être fouetté comme un esclave? Et d'où lui viendrait tant de chance? Comme il convient à un homme de son importance, à un ami de César, il craint d'avoir la tête coupée. Posons-lui ces question : « Quand te baignais-tu avec le moins d'appréhensions? Quand t'exerçais-tu le plus à loisir? En somme, quelle est celle des deux vies que tu aimerais le mieux mener? Celle de maintenant, ou celle d'autrefois? » Je puis bien jurer qu'il n'y a personne d'assez dénué de sens, d'assez ennemi de la vérité, pour ne pas se plaindre de souffrir d'autant plus qu'il est plus ami de César.


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Dernière mise à jour : 18/05/2007