[4,6c] Ἀλλ´ ἄλλοι πλειόνων τεύξονται καὶ προτιμηθήσονται.
(-) Τί οὖν εὐλογώτερον ἢ τοὺς περί τι ἐσπουδακότας ἐν ἐκείνῳ πλεῖον
ἔχειν, ἐν ᾧ ἐσπουδάκασιν; περὶ ἀρχὰς ἐσπουδάκασιν, σὺ περὶ δόγματα·
καὶ περὶ πλοῦτον, σὺ περὶ τὴν χρῆσιν τῶν φαντασιῶν. ὅρα, εἰ ἐν
τούτῳ σου πλέον ἔχουσιν, περὶ ὃ σὺ μὲν ἐσπούδακας,
ἐκεῖνοι δ´ ἀμελοῦσιν· εἰ συγκατατίθενται μᾶλλον περὶ
τὰ φυσικὰ μέτρα, εἰ ὀρέγονταί σου ἀναποτευκτότερον,
εἰ ἐκκλίνουσιν ἀπεριπτωτότερον, εἰ ἐν ἐπιβολῇ, ἐν
προθέσει, εἰ ἐν ὁρμῇ μᾶλλον εὐστοχοῦσιν, εἰ τὸ πρέπον
σῴζουσιν ὡς ἄνδρες, ὡς υἱοί, ὡς γονεῖς, εἶθ´ ἑξῆς κατὰ
τὰ ἄλλα τῶν σχέσεων ὀνόματα. εἰ δ´ ἄρχουσιν ἐκεῖνοι,
σὺ δ´ οὐ θέλεις σαυτῷ τὰς ἀληθείας εἰπεῖν, ὅτι σὺ μὲν
οὐδὲν τούτου ἕνεκα ποιεῖς, ἐκεῖνοι δὲ πάντα, ἀλογώτατον
δὲ τὸν ἐπιμελούμενόν τινος ἔλαττον φέρεσθαι {οὐ} ἢ τὸν ἀμελοῦντα;
Οὔ, ἀλλ´ ἐπειδὴ φροντίζω ἐγὼ δογμάτων ὀρθῶν,
εὐλογώτερόν μέ ἐστιν ἄρχειν. (-) Ἐν ᾧ φροντίζεις, ἐν
δόγμασιν· ἐν ᾧ δ´ ἄλλοι μᾶλλόν σου πεφροντίκασιν,
ἐκείνοις παραχώρει. οἷον εἰ διὰ τὸ δόγματα ἔχειν ὀρθὰ
ἠξίους τοξεύων μᾶλλον ἐπιτυγχάνειν τῶν τοξοτῶν ἢ
χαλκεύων μᾶλλον τῶν χαλκέων. ἄφες οὖν τὴν περὶ
τὰ δόγματα σπουδὴν καὶ περὶ ἐκεῖνα ἀναστρέφου, ἃ
κτήσασθαι θέλεις, καὶ τότε κλαῖε, ἐάν σοι μὴ προχωρῇ·
κλαίειν γὰρ ἄξιος εἶ. νῦν δὲ πρὸς ἄλλοις γίνεσθαι λέγεις,
ἄλλων ἐπιμελεῖσθαι, οἱ πολλοὶ δὲ τοῦτο καλῶς
λέγουσιν, ὅτι ἔργον ἔργῳ οὐ κοινωνεῖ. ὁ μὲν ἐξ
ὄρθρου ἀναστὰς ζητεῖ, τίνα ἐξ οἴκου ἀσπάσηται, τίνι
κεχαρισμένον λόγον εἴπῃ, τίνι δῶρον πέμψῃ, πῶς τῷ
ὀρχηστῇ ἀρέσῃ, πῶς κακοηθισάμενος ἄλλον ἄλλῳ χαρίσηται.
ὅταν εὔχηται, περὶ τούτων εὔχεται· ὅταν θύῃ,
ἐπὶ τούτοις θύει· τὸ τοῦ Πυθαγόρου
μὴ δ´ ὕπνον μαλακοῖσιν ἐπ´ ὄμμασι προσδέξασθαι
ἐνταῦθα παρατέθεικεν. ’πῇ παρέβην;‘ τῶν πρὸς κολακείαν.
’τί ἔρεξα;‘ μή τι ὡς ἐλεύθερος, μή τι ὡς γενναῖος; κἂν εὕρῃ τι τοιοῦτον,
ἐπιτιμᾷ ἑαυτῷ καὶ ἐγκαλεῖ ’τί γάρ σοι καὶ τοῦτο εἰπεῖν; οὐ γὰρ ἐνῆν
ψεύσασθαι; λέγουσιν καὶ οἱ φιλόσοφοι, ὅτι οὐδὲν κωλύει ψεῦδος εἰπεῖν‘. σὺ δ´
εἴπερ ταῖς ἀληθείαις οὐδενὸς ἄλλου πεφρόντικας ἢ χρήσεως οἵας δεῖ φαντασιῶν,
εὐθὺς ἀναστὰς ἕωθεν ἐνθυμοῦ ’τίνα μοι λείπει πρὸς ἀπάθειαν; τίνα πρὸς
ἀταραξίαν; τίς εἰμι; μή
τι σωμάτιον, μή τι κτῆσις, μή τι φήμη; οὐδὲν τούτων.
ἀλλὰ τί; λογικόν εἰμι ζῷον‘. τίνα οὖν τὰ ἀπαιτήματα;
ἀναπόλει τὰ πεπραγμένα. ’πῇ παρέβην τῶν πρὸς
εὔροιαν; τί ἔρεξα ἢ ἄφιλον ἢ ἀκοινώνητον ἢ ἄγνωμον;
τί μοι δέον οὐκ ἐτελέσθη πρὸς ταῦτα;‘
Τοσαύτης οὖν διαφορᾶς οὔσης τῶν ἐπιθυμουμένων,
τῶν ἔργων, τῶν εὐχῶν ἔτι θέλεις τὸ ἴσον ἔχειν ἐκείνοις, περὶ ἃ σὺ μὲν οὐκ
ἐσπούδακας, ἐκεῖνοι δ´ ἐσπουδάκασιν; εἶτα θαυμάζεις, εἴ ς´ ἐλεοῦσιν, καὶ
ἀγανακτεῖς; ἐκεῖνοι δ´ οὐκ ἀγανακτοῦσιν, εἰ σὺ αὐτοὺς ἐλεεῖς.
διὰ τί; ὅτι ἐκεῖνοι μὲν πεπεισμένοι εἰσίν, ὅτι ἀγαθῶν
τυγχάνουσιν, σὺ δ´ οὐ πέπεισαι. διὰ τοῦτο σὺ μὲν οὐκ
ἀρκῇ τοῖς σοῖς, ἀλλ´ ἐφίεσαι τῶν ἐκείνων· ἐκεῖνοι δ´
ἀρκοῦνται τοῖς ἑαυτῶν καὶ οὐκ ἐφίενται τῶν σῶν. ἐπεί
τοι εἰ ταῖς ἀληθείαις ἐπέπεισο, ὅτι περὶ τὰ ἀγαθὰ σὺ
ὁ ἐπιτυγχάνων εἶ, ἐκεῖνοι δ´ ἀποπεπλάνηνται, οὐδ´ ἂν
ἐνεθυμοῦ, τί λέγουσι περὶ σοῦ.
| [4,6c] — Mais d'autres obtiendront plus que moi de richesses et d'honneurs!
— Eh bien ! quoi de plus rationnel que de voir ceux qui ont travaillé en vue
d'une chose, avoir plus de cette chose en vue de laquelle ils ont
travaillé? Ils ont travaillé pour être magistrats, toi pour penser juste;
ils ont travaillé pour être riches, toi pour faire un bon emploi des
idées. Vois si la chose dont ils ont plus que toi, est celle en vue de
laquelle tu as travaillé, tandis qu'ils la négligeaient. Vois s'ils jugent
d'une manière plus conforme à la nature, s'ils échouent moins dans ce
qu'ils désirent, s'ils tombent moins dans ce qu'ils veulent éviter, si
dans leurs entreprises, dans leurs projets, dans leurs efforts, ils
atteignent plus sûrement leur but, s'ils font toujours leur devoir comme
maris, comme fils, comme pères, et à tous les titres qui naissent de nos
différentes relations. Mais ils sont magistrats et tu ne l'es pas !
Consens à te dire à toi-même la vérité : tu n'as rien fait pour l'être, et
eux ont tout fait. Or, il serait souverainement absurde que celui qui
poursuit un but l'atteignît moins que celui qui ne s'en occupe pas. « Non,
dis-tu; mais comme je m'occupe d'avoir des opinions justes, il est logique
que je sois au premier rang. » Oui, pour les choses dont tu t'occupes,
pour les opinions. Mais dans les choses dont d'autres se sont occupés plus
que toi, cède-leur le pas; c'est comme si, parce que tu as des opinions
justes, tu demandais à mieux réussir que les archers en tirant de l'arc,
et que les forgerons en forgeant. Laisse de coté ta préoccupation des
opinions, et tourne-toi vers les choses que tu veux obtenir; et alors
pleure, si elles ne t'arrivent pas, car tu es bien digne de pleurer. Mais
aujourd'hui tu nous dis que tu t'attaches à autre chose, que tu travailles
à autre chose ; or, le vulgaire dit très bien qu'on ne fait pas deux
choses à la fois. Un tel, levé dès l'aurore, cherche qui saluer parmi les
gens du palais, à qui adresser une parole flatteuse, à qui envoyer un
cadeau, comment plaire au danseur favori, comment nuire à l'un pour avoir
les bonnes grâces de l'autre. Quand il prie, c'est pour cela qu'il prie ;
quand il offre un sacrifice, c'est pour cela qu'il l'offre. Le précepte de
Pythagore, « Ne permets pas que le sommeil entre dans tes yeux délicats,
c'est à cela qu'il l'applique. « Qu'ai-je omis, se dit-il, » en fait de
flatterie? Comment me suis-je conduit? » Aurais-je, par hasard, agi en
homme indépendant, en homme de cœur? » Et, s'il trouve qu'il a agi de la
sorte, il se le reproche et s'en accuse. « Qu'avais-tu besoin de parler
ainsi? (se dit-il.) Ne pouvais-tu pas mentir? Les philosophes eux-mêmes
disent qu'il est permis de faire un mensonge. » Toi, au contraire, si
réellement tu ne t'es jamais occupé que de faire des idées l'usage que tu
en dois faire, dis-toi dès le matin, sitôt que tu es levé : « Que me
manque-t-il pour m'élever au-dessus de toutes les passions, au-dessus de
tous les troubles? Qui suis-je? Mon misérable corps est-il moi? Ma fortune
est-elle moi? Ma réputation est-elle moi? Point du tout. Que suis-je donc?
Un être animé et doué de raison. Or, que demande-t-on à un tel être? »
Repasse alors dans ton esprit ce que tu as fait : « Qu'ai-je omis de ce
qui conduit a la tranquille félicité? Quel acte ai-je commis qui ne soit
ni d'un ami, ni d'un citoyen? » A quel devoir ai-je manqué dans ce sens? »
Eh bien ! quand il y a entre vous une telle divergence dans les désirs,
dans les actions, dans les prières, tu voudrais avoir la même part que ces
gens aux choses pour lesquelles tu n'as pas travaillé, tandis que c'était
pour elles qu'ils travaillaient! Et tu t'étonneras, tu te fâcheras, s'ils
te plaignent ! Mais eux ne se fâchent pas, quand tu les plains. Pourquoi?
Parce qu'ils sont convaincus que leur lot est le bon, tandis que tu n'as
pas la même conviction pour toi. C'est pour cela que tu ne te contentes
pas de ce que tu as, et que tu désires ce qu'ils ont, tandis qu'ils se
contentent de ce qu'ils ont, sans désirer ce que tu as.
Si, en effet, tu étais réellement persuadé que c'est toi qui as en partage
les vrais biens, et qu'eux se trompent, tu ne t'inquiéterais pas de ce
qu'ils disent de toi.
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