[1,2,17] Καὶ τὰ ἐν τῇ Μήνιγγι δὲ τοῖς περὶ τῶν Λωτοφάγων εἰρημένοις
συμφωνεῖν. Εἰ δέ τινα μὴ συμφωνεῖ, μεταβολὰς αἰτιᾶσθαι δεῖν ἢ
ἄγνοιαν ἢ καὶ ποιητικὴν ἐξουσίαν, ἣ συνέστηκεν ἐξ ἱστορίας καὶ
διαθέσεως καὶ μύθου. Τῆς μὲν οὖν ἱστορίας ἀλήθειαν εἶναι τέλος, ὡς
ἐν Νεῶν καταλόγῳ τὰ ἑκάστοις τόποις συμβεβηκότα λέγοντος τοῦ
ποιητοῦ, τὴν μὲν πετρήεσσαν τὴν δὲ ἐσχατόωσαν πόλιν, ἄλλην δὲ
πολυτρήρωνα, τὴν δ' ἀγχίαλονΝ τῆς δὲ διαθέσεως ἐνέργειαν εἶναι τὸ
τέλος, ὡς ὅταν μαχομένους εἰσάγῃ, μύθου δὲ ἡδονὴν καὶ ἔκπληξιν.
τὸ δὲ πάντα πλάττειν οὐ πιθανόν, οὐδ' Ὁμηρικόν· τὴν γὰρ ἐκείνου
ποίησιν φιλοσόφημα πάντας νομίζειν, οὐχ ὡς Ἐρατοσθένης φησί,
κελεύων μὴ κρίνειν πρὸς τὴν διάνοιαν τὰ ποιήματα, μηδ' ἱστορίαν
ἀπ' αὐτῶν ζητεῖν. Πιθανώτερόν τε τό
Ἔνθεν δ' ἐννῆμαρ φερόμην ὀλοοῖς ἀνέμοισιν
ἐν βραχεῖ διαστήματι δέχεσθαι ( οἱ γὰρ ὀλοοὶ οὐκ εὐθύδρομοι) ἢ
ἐξωκεανίζειν, ὡς ἂν οὐρίων πνεόντων συνεχῶς. Συνθεὶς δὲ τὸ
διάστημα τὸ ἐκ Μαλεῶν ἐπὶ στήλας σταδίων δισμυρίων καὶ δισχιλίων
πεντακοσίων, εἰ, φησί, τοῦτο θείημεν ἐν ταῖς ἐννέα ἡμέραις
διηνύσθαι ἰσοταχῶς, ἑκάστης ἂν ἡμέρας ὁ πλοῦς συμβαίνοι σταδίων
δισχιλίων πεντακοσίων. Τίς οὖν ἱστόρηκεν ἐκ Λυκίας ἢ Ῥόδου
δευτεραῖόν τινα ἀφιγμένον εἰς Ἀλεξάνδρειαν, ὄντος τοῦ διαστήματος
σταδίων τετρακισχιλίων; Πρὸς δὲ τοὺς ἐπιζητοῦντας πῶς τρὶς εἰς
Σικελίαν ἐλθὼν οὐδ' ἅπαξ διὰ τοῦ πορθμοῦ πέπλευκεν Ὀδυσσεύς,
ἀπολογεῖται διότι καὶ οἱ ὕστερον ἔφευγον ἅπαντες τὸν πλοῦν τοῦτον.
| [1,2,17] 17. «Ce qui se voit à Méninx, poursuit-il, s'accorde aussi le mieux du
monde avec ce qu'Homère a raconté des Lotophages,» et, si par hasard
quelques circonstances ne se rapportent point, il veut qu'on s'en prenne
soit aux changements que le temps a pu produire, soit aux défauts de
renseignements précis, soit même à la licence poétique, laquelle consiste
à employer tour à tour l'histoire, la diathèse et la fable. De ces trois
éléments différents, l'un, l'histoire, a la vérité pour fin et intervient dans le
Catalogue des vaisseaux, par exemple, quand le poète rappelle le
caractère propre à chaque lieu, le sol pierreux de telle ville, l'extrême
éloignement de telle autre; les nuées de colombes que nourrit celle-ci, la
proximité où celle-là est de la mer; le second élément, la diathèse, a pour
fin principale de produire de l'effet sur les âmes, et intervient par exemple
dans les peintures de combats; quant à la fable, son objet, comme on
sait, est de plaire et de surprendre. «Mais toujours la fiction , dit Polybe,
et rien que la fiction, mauvais moyen pour persuader, procédé anti-
homérique !» Car la poésie d'Homère, tout le monde en convient, est une
oeuvre philosophique, bien différente par conséquent de ce que la juge
Ératosthène, quand il 'défend d'appliquer à la poésie en général le
critérium de la raison, c'est-à-dire le sens commun et d'y chercher aucune
notion d'histoire positive. Polybe trouve aussi que le vers suivant,
«Dès là et durant neuf jours je me sentis emporté par des vents contraires,»
est plus facile à admettre, si on l'entend d'un faible trajet (car un vent
défavorable ne vous pousse jamais directement au but), que si l'on veut y
voir Ulysse emporté en plein Océan, comme il aurait pu l'être par des
vents favorables soufflant sans interruption. «Encore, ajoute Polybe, en
supposant que la distance de Malées aux Colonnes d'Hercule (distance
évaluée par lui précédemment à 22.500 stades) ait été parcourue dans
les neuf jours avec une vitesse égale, le trajet de chaque jour se
trouverait-il avoir été de 2500 stades. Or, qui a jamais vu que de la Lycie
ou de Rhodes, on soit venu en deux jours à Alexandrie? Et pourtant la
distance entre ces deux points n'excède pas 4000 stades.» Enfin, auprès
de ceux qui demandent comment il se peut faire qu'Ulysse ait abordé trois
fois en Sicile, sans avoir passé une seule fois par le détroit, il excuse
Homère en rappelant que les navigateurs modernes eux-mêmes ont
toujours évité avec soin de tenir cette route.
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