[192] (192a) (ΣΩ.) Δεῖ ὧδε λέγεσθαι περὶ αὐτῶν ἐξ ἀρχῆς διοριζομένους
ὅτι ὃ μέν τις οἶδεν, σχὼν αὐτοῦ μνημεῖον ἐν τῇ
ψυχῇ, αἰσθάνεται δὲ αὐτὸ μή, οἰηθῆναι ἕτερόν τι ὧν οἶδεν,
ἔχοντα καὶ ἐκείνου τύπον, αἰσθανόμενον δὲ μή, ἀδύνατον.
καὶ ὅ γε οἶδεν αὖ, οἰηθῆναι εἶναι ὃ μὴ οἶδε μηδ´ ἔχει αὐτοῦ
σφραγῖδα· καὶ ὃ μὴ οἶδεν, ὃ μὴ οἶδεν αὖ· καὶ ὃ μὴ οἶδεν,
ὃ οἶδε· καὶ ὃ αἰσθάνεταί γε, ἕτερόν τι ὧν αἰσθάνεται
οἰηθῆναι εἶναι· καὶ ὃ αἰσθάνεται, ὧν τι μὴ αἰσθάνεται· καὶ
(192b) ὃ μὴ αἰσθάνεται, ὧν μὴ αἰσθάνεται· καὶ ὃ μὴ αἰσθάνεται,
ὧν αἰσθάνεται. καὶ ἔτι γε αὖ καὶ ὃ οἶδε καὶ αἰσθάνεται καὶ
ἔχει τὸ σημεῖον κατὰ τὴν αἴσθησιν, οἰηθῆναι αὖ ἕτερόν τι
ὧν οἶδε καὶ αἰσθάνεται καὶ ἔχει αὖ καὶ ἐκείνου τὸ σημεῖον
κατὰ τὴν αἴσθησιν, ἀδυνατώτερον ἔτι ἐκείνων, εἰ οἷόν τε.
καὶ ὃ οἶδε καὶ {ὃ} αἰσθάνεται ἔχων τὸ μνημεῖον ὀρθῶς, ὃ
οἶδεν οἰηθῆναι ἀδύνατον· καὶ ὃ οἶδε καὶ αἰσθάνεται ἔχων
(192c) κατὰ ταὐτά, ὃ αἰσθάνεται· καὶ ὃ αὖ μὴ οἶδε μηδὲ αἰσθάνεται,
ὃ μὴ οἶδε μηδὲ αἰσθάνεται· καὶ ὃ μὴ οἶδε μηδὲ αἰσθάνεται,
ὃ μὴ οἶδε· καὶ ὃ μὴ οἶδε μηδὲ αἰσθάνεται, ὃ μὴ
αἰσθάνεται· πάντα ταῦτα ὑπερβάλλει ἀδυναμίᾳ τοῦ ἐν
αὐτοῖς ψευδῆ τινα δοξάσαι. λείπεται δὴ ἐν τοῖς τοιοῖσδε,
εἴπερ που ἄλλοθι, τὸ τοιοῦτον γενέσθαι.
(ΘΕΑΙ.) Ἐν τίσι δή; ἐὰν ἄρα ἐξ αὐτῶν τι μᾶλλον μάθω·
νῦν μὲν γὰρ οὐχ ἕπομαι.
(ΣΩ.) Ἐν οἷς οἶδεν, οἰηθῆναι αὐτὰ ἕτερ´ ἄττα εἶναι ὧν
οἶδε καὶ αἰσθάνεται· ἢ ὧν μὴ οἶδεν, αἰσθάνεται δέ· ἢ ὧν
(192d) οἶδε καὶ αἰσθάνεται, ὧν οἶδεν αὖ καὶ αἰσθάνεται.
(ΘΕΑΙ.) Νῦν πολὺ πλέον ἀπελείφθην ἢ τότε.
(ΣΩ.) Ὧδε δὴ ἀνάπαλιν ἄκουε. ἐγὼ εἰδὼς Θεόδωρον καὶ
ἐν ἐμαυτῷ μεμνημένος οἷός ἐστι, καὶ Θεαίτητον κατὰ ταὐτά,
ἄλλο τι ἐνίοτε μὲν ὁρῶ αὐτούς, ἐνίοτε δὲ οὔ, καὶ ἅπτομαί ποτ´
αὐτῶν, τοτὲ δ´ οὔ, καὶ ἀκούω ἤ τινα ἄλλην αἴσθησιν αἰσθάνομαι,
τοτὲ δ´ αἴσθησιν μὲν οὐδεμίαν ἔχω περὶ ὑμῶν, μέμνημαι
δὲ ὑμᾶς οὐδὲν ἧττον καὶ ἐπίσταμαι αὐτὸς ἐν ἐμαυτῷ;
(192e) (ΘΕΑΙ.) Πάνυ μὲν οὖν.
(ΣΩ.) Τοῦτο τοίνυν πρῶτον μάθε ὧν βούλομαι δηλῶσαι,
ὅτι ἔστι μὲν ἃ οἶδε μὴ αἰσθάνεσθαι, ἔστιν δὲ αἰσθάνεσθαι.
(ΘΕΑΙ.) Ἀληθῆ.
(ΣΩ.) Οὐκοῦν καὶ ἃ μὴ οἶδε, πολλάκις μὲν ἔστι μηδὲ
αἰσθάνεσθαι, πολλάκις δὲ αἰσθάνεσθαι μόνον;
(ΘΕΑΙ.) Ἔστι καὶ τοῦτο.
(ΣΩ.) Ἰδὲ δὴ ἐάν τι μᾶλλον νῦν ἐπίσπῃ.
| [192] (SOCRATE)
Voici ce qu’il faut en dire, en remontant au début et en faisant les distinctions
suivantes. Il est impossible de penser que ce que l’on sait et dont on porte
l’empreinte en son âme, mais qu’on ne perçoit pas,
soit une autre chose que l’on sait, dont on a également l’empreinte, mais qu’on
ne perçoit pas. Il est impossible aussi de penser que ce que l’on sait soit ce
qu’on ne sait pas et dont on n’a pas le sceau en soi, ou que ce qu’on ne sait
pas soit ce qu’on ne sait pas non plus, ou que ce qu’on ne sait pas soit ce que
l’on sait. Il est de même impossible de penser que ce qu’on perçoit soit autre
chose qu’on perçoit également, que ce qu’on perçoit soit quelque chose qu’on ne
perçoit pas, que ce qu’on ne perçoit pas soit quelque chose qu’on ne perçoit pas
et que ce qu’on ne perçoit pas soit quelque chose qu’on perçoit. Il est encore,
si cela se peut, plus impossible de penser que ce que l’on sait, qu’on perçoit
et dont on a la marque conforme à la perception, soit autre chose qu’on connaît,
qu’on perçoit et dont on a la marque conforme à la perception. Il est également
impossible de confondre ce que l’on sait, qu’on perçoit et dont on a un souvenir
exact avec ce que l’on sait, et encore ce que l’on sait, qu’on perçoit et dont a
un souvenir fidèle avec ce qu’on perçoit, et de même ce qu’on ne sait pas, qu’on
ne perçoit pas, et encore ce qu’on ne sait pas et qu’on ne perçoit pas avec ce
qu’on ne perçoit pas. En tous ces cas, il est absolument impossible de concevoir
une opinion fausse. Il ne reste donc, si l’opinion fausse doit se produire
quelque part, que les cas suivants.
(THÉÉTÈTE)
Quels cas ? Peut-être comprendrai-je mieux par là ce que tu dis ; car à présent
je ne te suis pas.
(SOCRATE)
Ceux où l’on confond ce qu’on sait avec d’autres choses que l’on connaît et que
l’on perçoit, ou avec ce qu’on ne connaît pas, mais qu’on perçoit, et ceux où
l’on confond ce qu’on sait et qu’on perçoit avec ce qu’on sait et qu’on perçoit
également.
(THÉÉTÈTE)
A présent, je suis encore beaucoup plus loin de te comprendre que tout à l’heure.
(SOCRATE)
XXXIV. — Je vais donc reprendre la question de cette façon : écoute. N’est-il
pas vrai que, connaissant Théodore et me souvenant en moi-même de sa figure et
connaissant de même Théétète, quelquefois je les vois, quelquefois je ne les
vois pas, tantôt je les touche, tantôt je ne les touche pas, tantôt je les
entends ou les perçois par quelque autre sensation, et tantôt je n’ai à leur
sujet aucune sensation, mais que je ne me souviens pas moins de vous et ne vous
connais pas moins en moi-même ?
(THÉÉTÈTE)
C’est tout à fait vrai.
(SOCRATE)
Mets-toi donc dans l’esprit — c’est le premier des points que je veux
t’éclaircir — que, ce qu’on sait, il se peut qu’on n’en ait pas la sensation, il
se peut aussi qu’on l’ait.
(THÉÉTÈTE)
C’est vrai.
(SOCRATE)
Et pour ce qu’on ne sait pas, n’arrive-t-il pas aussi que souvent on n’en a même
pas la sensation, et que souvent on en a la sensation et rien de plus ?
(THÉÉTÈTE)
C’est possible aussi.
(SOCRATE)
Vois donc si tu peux me suivre plus aisément à présent.
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