[1,6] Μετὰ ταύτας ἀρετὴν εὑρίσκω παρὰ Λυσίᾳ
πάνυ θαυμαστήν, ἧς Θεόφραστος μέν φησιν ἄρξαι
Θρασύμαχον· ἐγὼ δ´ ἡγοῦμαι Λυσίαν. Καὶ γὰρ τοῖς
χρόνοις οὗτος ἐκείνου προέχειν ἔμοιγε δοκεῖ · λέγω δ´
ὡς ἐν ἀκμῇ κοινῇ βίου γενομένων ἀμφοῖν· καὶ εἰ μὴ
τοῦτο δοθείη, τῷ γέ τοι περὶ τοὺς ἀληθινοὺς ἀγῶνας
ἐκείνου μᾶλλον τετρῖφθαι. Οὐ μέντοι διαβεβαιοῦμαί
γε, ὁπότερος ἦρξε τῆς ἀρετῆς ταύτης, κατὰ τὸ παρόν·
ἀλλ´ ὅτι Λυσίας μᾶλλον ἐν αὐτῇ διήνεγκεν, τοῦτο
θαρρῶν ἂν ἀποφηναίμην. Τίς δ´ ἐστὶν ἥν φημι ἀρετήν;
ἡ συστρέφουσα τὰ νοήματα καὶ στρογγύλως
ἐκφέρουσα λέξις, οἰκεία πάνυ καὶ ἀναγκαία τοῖς
δικανικοῖς λόγοις, καὶ παντὶ ἀληθεῖ ἀγῶνι. Ταύτην
ὀλίγοι μὲν ἐμιμήσαντο· Δημοσθένης δὲ καὶ
ὑπερεβάλετο· πλὴν οὐχ οὕτως εὐτελῶς, οὐδὲ ἀφελῶς
ὥσπερ Λυσίας χρησάμενος αὐτῇ, ἀλλὰ περιέργως καὶ
πικρῶς· λεγέσθω γάρ, ὡς ἐμοὶ φαίνεται· ὑπὲρ ὧν κατὰ
τὸν οἰκεῖον διαλέξομαι καιρόν.
| [1,6] VI. Il se distingue aussi par une autre qualité
remarquable, et dont Thrasymaque, suivant
Théophraste, donna l'exemple : pour moi, je pense
que c'est Lysias, parce qu'il était plus ancien que
Thrasymaque : je veux parler de cette époque de
la vie qu'on regarde en général comme la maturité
de l'âge. Si l'on me conteste ce point, je fonderai
mon assertion sur ce que Lysias s'exerça plus
longtemps que Thrasymaque dans les véritables
débats. Je n'affirmerai pas en ce moment quel est,
entre ces deux orateurs, celui qui, le premier,
donna cette qualité à son style; mais je soutiens
que, sous ce rapport, Lysias n'a point d'égal. Or,
en quoi consiste cette qualité ? à présenter les
pensées sous une forme vive et arrondie : elle
trouve sa place dans les harangues judiciaires et
dans les débats sérieux; elle en est même une
partie essentielle. Peu d'orateurs l'ont portée aussi
loin que Lysias. Démosthène seul l'a possédée à
un degré plus éminent ; mais il n'a pas la même
mesure ni la même simplicité : il tombe
quelquefois dans l'excès et la recherche. J'ai cru
devoir faire ici cette observation, sur laquelle je
reviendrai lorsque l'occasion s'en présentera.
|