[34] (1) Οὕτω δὲ τοῦ Ἀλκιβιάδου λαμπρῶς εὐημεροῦντος,
ὑπέθραττεν ἐνίους ὅμως ὁ τῆς καθόδου καιρός. ᾗ γὰρ
ἡμέρᾳ κατέπλευσεν, ἐδρᾶτο τὰ Πλυντήρια τῇ θεῷ. δρῶσι
δὲ τὰ ὄργια Πραξιεργίδαι Θαργηλιῶνος ἕκτῃ φθίνοντος
ἀπόρρητα, τόν τε κόσμον ἀφελόντες καὶ τὸ ἕδος κατακαλύψαντες.
(2) ὅθεν ἐν ταῖς μάλιστα τῶν ἀποφράδων τὴν ἡμέραν
ταύτην ἄπρακτον Ἀθηναῖοι νομίζουσιν. οὐ φιλοφρόνως
οὖν οὐδ´ εὐμενῶς ἐδόκει προσδεχομένη τὸν Ἀλκιβιάδην
ἡ θεὸς παρακαλύπτεσθαι καὶ ἀπελαύνειν ἑαυτῆς.
(3) Οὐ μὴν ἀλλὰ πάντων γεγονότων τῷ Ἀλκιβιάδῃ κατὰ
γνώμην, καὶ πληρουμένων ἑκατὸν τριήρων αἷς αὖθις
ἐκπλεῖν ἔμελλε, φιλοτιμία τις οὐκ ἀγεννὴς προσπεσοῦσα
κατέσχεν αὐτὸν μέχρι μυστηρίων. (4) ἀφ´ οὗ γὰρ ἐπετειχίσθη
Δεκέλεια καὶ τῶν εἰς Ἐλευσῖνα παρόδων ἐκράτουν
οἱ πολέμιοι παρόντες, οὐδένα κόσμον εἶχεν ἡ τελετὴ
πεμπομένη κατὰ θάλατταν, ἀλλὰ καὶ θυσίαι καὶ χορεῖαι
καὶ πολλὰ τῶν δρωμένων καθ´ ὁδὸν ἱερῶν, ὅταν ἐξελαύνωσι
τὸν Ἴακχον, ὑπ´ ἀνάγκης ἐξελείπετο. (5) καλὸν οὖν
ἐφαίνετο τῷ Ἀλκιβιάδῃ καὶ πρὸς θεῶν ὁσιότητα καὶ
πρὸς ἀνθρώπων δόξαν ἀποδοῦναι τὸ πάτριον σχῆμα τοῖς
ἱεροῖς, παραπέμψαντα πεζῇ τὴν τελετὴν καὶ δορυφορήσαντα
παρὰ τοὺς πολεμίους· ἢ γὰρ ἀτρεμήσαντα κομιδῇ
κολούσειν καὶ ταπεινώσειν τὸν Ἆγιν, ἢ μάχην ἱερὰν καὶ
θεοφιλῆ περὶ τῶν ἁγιωτάτων καὶ μεγίστων ἐν ὄψει τῆς
πατρίδος μαχεῖσθαι, καὶ πάντας ἕξειν μάρτυρας τοὺς πολίτας
τῆς ἀνδραγαθίας. (6) ὡς δὲ ταῦτ´ ἔγνω καὶ προεῖπεν
Εὐμολπίδαις καὶ Κήρυξι, σκοποὺς μὲν ἐπὶ τῶν ἄκρων
ἐκάθισε καὶ προδρόμους τινὰς ἅμ´ ἡμέρᾳ προεξέπεμψεν,
ἱερεῖς δὲ καὶ μύστας καὶ μυσταγωγοὺς ἀναλαβὼν καὶ
τοῖς ὅπλοις περικαλύψας, ἦγεν ἐν κόσμῳ καὶ μετὰ σιωπῆς,
θέαμα σεμνὸν καὶ θεοπρεπὲς τὴν στρατηγίαν ἐκείνην
ἐπιδεικνύμενος, ὑπὸ τῶν μὴ φθονούντων ἱεροφαντίαν
καὶ μυσταγωγίαν προσαγορευομένην. (7) μηδενὸς δὲ τῶν
πολεμίων ἐπιθέσθαι τολμήσαντος, ἀσφαλῶς ἀπαγαγὼν
εἰς τὴν πόλιν, ἤρθη μὲν αὐτὸς τῷ φρονήματι, καὶ τὴν
στρατιὰν ἐπῆρεν ὡς ἄμαχον καὶ ἀήττητον οὖσαν ἐκείνου
στρατηγοῦντος, τοὺς δὲ φορτικοὺς καὶ πένητας οὕτως
ἐδημαγώγησεν, ὥστ´ ἐρᾶν ἔρωτα θαυμαστὸν ὑπ´ ἐκείνου
τυραννεῖσθαι, καὶ λέγειν ἐνίους καὶ προσιέναι παρακελευομένους,
ὅπως τοῦ φθόνου κρείττων γενόμενος καὶ
καταβαλὼν ψηφίσματα καὶ νόμους καὶ φλυάρους ἀπολλύντας
τὴν πόλιν ὡς ἂν πράξῃ καὶ χρήσηται τοῖς
πράγμασι, μὴ δεδιὼς τοὺς συκοφάντας.
| [34] (1) Alors qu'Alcibiade coulait ainsi avec éclat des
jours heureux, la date de son retour commençait tout de même
à troubler certains citoyens. C'est que le jour où il
débarqua se célébraient les Plyntéries en l'honneur de la
déesse - les Praxiergides célèbrent ces rites secrets le
sixième jour de la fin de Thargélion, en ôtant la parure de
la statue cultuelle et en la voilant entièrement. (2) De là
vient que ce jour, qui est chômé, les Athéniens le mettent
au nombre de ceux qui sont au plus haut point néfastes. La
déesse avait donc l'air d'accueillir Alcibiade sans amitié
ni bienveillance, en se cachant et en le repoussant. (3)
Néanmoins, alors que tout s'était passé au gré d'Alcibiade
et que l'on chargeait cent trières avec lesquelles il allait
à nouveau prendre la mer, il lui vint une ambition qui
n'était pas sans noblesse et qui le retint jusqu'aux
Mystères. (4) Depuis le moment où Décélie avait été
fortifiée et où les ennemis qui s'y trouvaient contrôlaient
les accès vers Éleusis, le cortège d'initiation qu'on
envoyait là-bas par mer n'avait plus aucun éclat;sacrifices,
danses et quantité de rites qui se pratiquent en cours de
route, lorsqu'on fait sortir Iacchos, étaient nécessairement
abandonnés. (5) Dès lors Alcibiade jugeait beau, à la fois
par piété envers les dieux et pour assurer son renom chez
les hommes, de restituer aux cérémonies leur caractère
ancestral, en envoyant par terre le cortège d'initiation et
en lui assurant une garde du corps contre les ennemis; dans
sa pensée, en effet, ou bien il abaisserait à coup sûr et
humilierait Agis si celui-ci ne bougeait pas, ou bien
lui-même engagerait un combat sacré, destiné à plaire aux
dieux, pour les valeurs le plus saintes et les plus grandes:
et ce, sous le regard de sa patrie, ayant pour témoins de
son courage tous ses concitoyens. (6) Quand il eut pris
cette décision et averti les Eumolpides et les Kéryces, il
posta des sentinelles sur les hauteurs et, dès l'aube,
dépêcha des éclaireurs vers l'avant. Dans le même temps, il
prenait avec lui prêtres, mystes et mystagogues et, les
entourant d'hommes en armes, il les conduisait en bon ordre
et en silence, faisant de cette expédition un spectacle
imposant et tellement digne des dieux que ceux qui n'étaient
pas jaloux d'Alcibiade la qualifièrent d'hiérophantie et de
procession d'initiation. (7) Comme nul ennemi n'avait osé
l'attaquer et qu'il avait ramené en toute sécurité son monde
en ville, il en fut personnellement soulevé d'orgueil et sut
exalter l'armée, convaincue que, sous son commandement, elle
était invincible et irrésistible. Quant au vulgaire et aux
pauvres gens, il les flatta tellement, en démagogue, qu'ils
désiraient avec une étonnante passion tomber sous son
gouvernement souverain - certains allaient même jusqu'à le
dire et venaient l'inciter à agir et à profiter des
circonstances, sans craindre les délateurs, en se plaçant
au-dessus de l'envie et en renversant décrets et lois - et,
du même coup, les bavards qui perdent la cité.
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