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[22] Φέρ´ οὖν, εἰ δοκεῖ, πρόσαγε τοῖς ὑπ´ ἐμοῦ
εἰρημένοις τοὺς κανόνας ἀμφοτέρους, ὡς μάθῃς
εἴτε τούτῳ εἴτ´ ἐκείνῳ ἐοίκασιν. ἐγὼ γὰρ εἰ μέν
τινα ἄμορφον οὖσαν ἔφην τῷ ἐν Κνίδῳ ἀγάλματι
ὁμοίαν, γόης ἂν καὶ τοῦ Κυναίθου κολακικώτερος
ὄντως νομιζοίμην· εἰ δὲ τοιαύτην ὑπάρχουσαν
οἵαν πάντες ἴσασιν, οὐ πάνυ ἐκ πολλοῦ διαστήματος
ἦν τὸ τόλμημα.
| [22] Maintenant, rapprochez, si vous voulez bien, mon
ouvrage de chacune de ces deux règles, et vous verrez
s'il s'applique à celle-ci ou à celle-là. Si j'avais comparé
une femme laide à la Vénus de Cnide, je passerais à bon
droit pour un flagorneur plus impudent que Cynéthus ;
mais lorsque c'est une femme comme vous, et que tout le
monde connaît, la distance n'est pas assez grande pour
qu'on blâme ma témérité.
| [23] Τάχ´ ἂν οὖν φαίης, μᾶλλον δὲ ἤδη εἴρηκας,
"ἐπαινεῖν μέν σοι εἰς τὸ κάλλος ἐφείσθω· ἀνεπίφθονον
μέντοι ποιήσασθαι τὸν ἔπαινον ἐχρῆν,
ἀλλὰ μὴ θεαῖς ἀπεικάζειν ἄνθρωπον οὖσαν."
ἐγὼ δὲ—ἤδη γάρ με προάξεται τἀληθὲς εἰπεῖν—
οὐ θεαῖς σε, ὦ βελτίστη, εἴκασα, τεχνιτῶν δὲ
ἀγαθῶν δημιουργήμασιν λίθου καὶ χαλκοῦ ἢ
ἐλέφαντος πεποιημένοις· τὰ δὲ ὑπ´ ἀνθρώπων
γεγενημένα οὐκ ἀσεβές, οἶμαι, ἀνθρώποις εἰκάζειν.
ἐκτὸς εἰ μὴ σὺ τοῦτο εἶναι τὴν Ἀθηνᾶν
ὑπείληφας τὸ ὑπὸ Φειδίου πεπλασμένον ἢ τοῦτο
τὴν οὐρανίαν Ἀφροδίτην ὃ ἐποίησεν Πραξιτέλης
ἐν Κνίδῳ οὐ πάνυ πολλῶν ἐτῶν. ἀλλ´ ὅρα μὴ
ἄσεμνον ᾖ τὰ τοιαῦτα περὶ τῶν θεῶν δοξάζειν,
ὧν τάς γε ἀληθεῖς εἰκόνας ἀνεφίκτους εἶναι
ἀνθρωπίνῃ μιμήσει ἔγωγε ὑπολαμβάνω.
| [23] Peut-être me direz-vous, ou plutôt vous me l'avez
déjà dit : « Je vous permets de louer ma beauté ; mais il
fallait faire un éloge à l'abri de tout reproche, et non pas
assimiler une mortelle à des déesses." Je réponds à cela,
puisque la vérité m'y force, que je ne vous ai point
comparée à des déesses, ô femme accomplie, mais aux
chefs-d'oeuvre de nos meilleurs artistes, à des ouvrages
de pierre, d'airain ou d'ivoire. Il n'y a pas d'impiété, je
pense, à comparer l'homme aux oeuvres sorties de sa
main ; à moins que vous ne confondiez Minerve avec la
statue faite par Phidias, et la Vénus Uranie avec le
marbre que Praxitèle a sculpté à Cnide quelques années
après. Prenez garde qu'une telle opinion ne blesse
les dieux, dont il me semble que la véritable image ne
saurait être représentée par la main des mortels.
| [24] Εἰ δὲ καὶ ὅτι μάλιστά σε αὐταῖς ἐκείναις εἴκασα,
οὐκ ἐμὸν τοῦτο, οὐδὲ ἐγὼ πρῶτος ταύτην ἐτεμόμην
τὴν ὁδόν, ἀλλὰ πολλοὶ καὶ ἀγαθοὶ ποιηταί, καὶ
μάλιστα ὁ πολίτης ὁ σὸς Ὅμηρος, ὃν καὶ νῦν
ἀναβιβάσομαι συναγορεύσοντά μοι, ἢ οὐδεμία
μηχανὴ μὴ οὐχὶ καὶ αὐτὸν σὺν ἐμοὶ ἁλῶναι.
Ἐρήσομαι τοίνυν αὐτόν, μᾶλλον δὲ σὲ ὑπὲρ
αὐτοῦ—καὶ γὰρ διαμνημονεύεις εὖ ποιοῦσα τὰ
χαριέστατα τῶν ἐρραψῳδημένων αὐτῷ—τί σοι
ἐκεῖνος δοκεῖ, ὁπόταν περὶ τῆς αἰχμαλώτου
λέγῃ τῆς Βρισηΐδος ὅτι χρυσῇ Ἀφροδίτῃ ἰκέλη
ἐπένθει τὸν Πάτροκλον; εἶτα μετὰ μικρόν, ὡς
οὐχ ἱκανὸν εἰ μόνῃ τῇ Ἀφροδίτῃ ἐοικυῖα ἔσται,
Εἶπε δ´ ἄρα—φησίν—κλαίουσα γυνὴ εἰκυῖα θεῇσιν.
Ὁπόταν οὖν τὰ τοιαῦτα λέγῃ, μισεῖς κἀκεῖνον
καὶ ἀπορρίπτεις τὸ βιβλίον, ἢ δίδως αὐτῷ ἐλευθεριάζειν
ἐν τῷ ἐπαίνῳ; ἀλλὰ κἂν σὺ μὴ δῷς, ὅ
γε τοσοῦτος αἰὼν δέδωκεν, οὐδ´ ἔστιν ὅστις αὐτὸν
ἐπὶ τούτῳ ᾐτιάσατο, οὐδὲ ὁ μαστίξαι τολμήσας
αὐτοῦ τὴν εἰκόνα οὐδ´ ὁ τὰ νόθα ἐπισημηνάμενος
τῶν ἐπῶν ἐν τῇ παραγραφῇ τῶν ὀβελῶν.
Εἶτα ἐκείνῳ μὲν ἐφεθήσεται βάρβαρον γυναῖκα,
καὶ ταῦτα κλαίουσαν, τῇ χρυσῇ Ἀφροδίτῃ εἰκάσαι,
ἐγὼ δ´, ἵνα μὴ τὸ κάλλος εἴπω, διότι μὴ
ἀνέχῃ ἀκούουσα, οὐκ ἂν παραβάλλοιμι θεῶν
εἰκόσι γυναῖκα φαιδρὰν καὶ μειδιῶσαν τὰ πολλά,
ὅπερ θεοῖς ὅμοιον ἄνθρωποι ἔχουσιν;
| [24] Si d'ailleurs je vous ai comparée à des déesses, je n'ai
rien fait en cela qui me soit particulier ; je ne suis pas le
premier qui ait frayé cette route : un grand nombre de
poètes estimables l'avaient ouverte avant moi, et à leur
tête, Homère, votre compatriote, que je vais citer à cette
barre pour ma défense. Il n'est pas possible que l'on me
condamne sans le condamner aussi. Je l'interrogerai
donc, ou plutôt je vous interrogerai pour lui, car vous
conservez dans votre mémoire, et vous faites bien, les
passages les plus charmants de ses rhapsodies. Que
pensez-vous de lui, lorsqu'il dit de Briséis captive, que,
semblable à Vénus d'or, elle pleure la mort de Patrocle ?
Et comme si ce n'était pas assez de ressembler à Vénus
toute seule, il ajoute :
"Ainsi pleure la femme aux déesses semblable".
Ce langage vous le fait-il haïr ? jetez-vous son livre, ou
lui accordez-vous la liberté d'un pareil éloge ? Quand
vous la lui refuseriez, tant de siècles la lui ont donnée ! Il
n'est personne qui lui en ait fait un crime, ni celui qui eut
l'audace de fouetter son image, ni celui qui marqua
d'un obèle les vers qu'il prétendait supposés. Eh
quoi ! il lui sera permis de comparer à Vénus d'or une
femme barbare, dont les yeux sont baignés de larmes ; et
moi, sans faire de votre beauté un éloge que vous ne
voulez pas entendre, je ne pourrai comparer aux statues
des déesses une femme dont le charmant visage s'éclaire
de ce sourire qui rend l'homme semblable aux dieux !
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