[4,1,10] ἐπεὶ δὲ οἱ τελευταῖοι τῶν Ἑλλήνων κατέβαινον εἰς τὰς κώμας ἀπὸ τοῦ
ἄκρου ἤδη σκοταῖοι (διὰ γὰρ τὸ στενὴν εἶναι τὴν ὁδὸν ὅλην τὴν ἡμέραν ἡ
ἀνάβασις αὐτοῖς ἐγένετο καὶ κατάβασις), τότε δὴ συλλεγέντες τινὲς τῶν
Καρδούχων τοῖς τελευταίοις ἐπετίθεντο, καὶ ἀπέκτεινάν τινας καὶ λίθοις καὶ
τοξεύμασι κατέτρωσαν, ὀλίγοι ὄντες· ἐξ ἀπροσδοκήτου γὰρ αὐτοῖς ἐπέπεσε τὸ
Ἑλληνικόν. (4.1.11) εἰ μέντοι τότε πλείους συνελέγησαν, ἐκινδύνευσεν ἂν
διαφθαρῆναι πολὺ τοῦ στρατεύματος. καὶ ταύτην μὲν τὴν νύκτα οὕτως ἐν ταῖς
κώμαις ηὐλίσθησαν· οἱ δὲ Καρδοῦχοι πυρὰ πολλὰ ἔκαιον κύκλῳ ἐπὶ τῶν ὀρέων
καὶ συνεώρων ἀλλήλους. (4.1.12) ἅμα δὲ τῇ ἡμέρᾳ συνελθοῦσι τοῖς στρατηγοῖς
καὶ λοχαγοῖς τῶν Ἑλλήνων ἔδοξε τῶν τε ὑποζυγίων τὰ ἀναγκαῖα καὶ
δυνατώτατα ἔχοντας πορεύεσθαι, καταλιπόντας τἆλλα, καὶ ὅσα ἦν νεωστὶ
αἰχμάλωτα ἀνδράποδα ἐν τῇ στρατιᾷ πάντα ἀφεῖναι. (4.1.13) σχολαίαν γὰρ
ἐποίουν τὴν πορείαν πολλὰ ὄντα τὰ ὑποζύγια καὶ τὰ αἰχμάλωτα, πολλοὶ δὲ οἱ
ἐπὶ τούτοις ὄντες ἀπόμαχοι ἦσαν, διπλάσιά τε ἐπιτήδεια ἔδει πορίζεσθαι καὶ
φέρεσθαι πολλῶν τῶν ἀνθρώπων ὄντων. δόξαν δὲ ταῦτα ἐκήρυξαν οὕτω ποιεῖν.
(4.1.14) ἐπεὶ δὲ ἀριστήσαντες ἐπορεύοντο, ὑποστήσαντες ἐν τῷ στενῷ οἱ
στρατηγοί, εἴ τι εὑρίσκοιεν τῶν εἰρημένων μὴ ἀφειμένον, ἀφῃροῦντο, οἱ δ᾽
ἐπείθοντο, πλὴν εἴ τις ἔκλεψεν, οἷον ἢ παιδὸς ἐπιθυμήσας ἢ γυναικὸς τῶν
εὐπρεπῶν. καὶ ταύτην μὲν τὴν ἡμέραν οὕτως ἐπορεύθησαν, τὰ μέν τι μαχόμενοι
τὰ δὲ καὶ ἀναπαυόμενοι. (4.1.15) εἰς δὲ τὴν ὑστεραίαν γίγνεται χειμὼν πολύς,
ἀναγκαῖον δ᾽ ἦν πορεύεσθαι· οὐ γὰρ ἦν ἱκανὰ τἀπιτήδεια. καὶ ἡγεῖτο μὲν
Χειρίσοφος, ὠπισθοφυλάκει δὲ Ξενοφῶν. (4.1.16) καὶ οἱ πολέμιοι ἰσχυρῶς
ἐπετίθεντο, καὶ στενῶν ὄντων τῶν χωρίων ἐγγὺς προσιόντες ἐτόξευον καὶ
ἐσφενδόνων· ὥστε ἠναγκάζοντο οἱ Ἕλληνες ἐπιδιώκοντες καὶ πάλιν
ἀναχάζοντες σχολῇ πορεύεσθαι· καὶ θαμινὰ παρήγγελλεν ὁ Ξενοφῶν
ὑπομένειν, ὅτε οἱ πολέμιοι ἰσχυρῶς ἐπικέοιντο. (4.1.17) ἐνταῦθα ὁ Χειρίσοφος
ἄλλοτε μὲν ὅτε παρεγγυῷτο ὑπέμενε, τότε δὲ οὐχ ὑπέμενεν, ἀλλ᾽ ἦγε ταχέως καὶ
παρηγγύα ἕπεσθαι, ὥστε δῆλον ἦν ὅτι πρᾶγμά τι εἴη· σχολὴ δ᾽ οὐκ ἦν ἰδεῖν
παρελθόντι τὸ αἴτιον τῆς σπουδῆς· ὥστε ἡ πορεία ὁμοία φυγῇ ἐγίγνετο τοῖς
ὀπισθοφύλαξι. (4.1.18) καὶ ἐνταῦθα ἀποθνῄσκει ἀνὴρ ἀγαθὸς Λακωνικὸς
Λεώνυμος τοξευθεὶς διὰ τῆς ἀσπίδος καὶ τῆς σπολάδος εἰς τὰς πλευράς, καὶ
Βασίας Ἀρκὰς διαμπερὲς τὴν κεφαλήν. (4.1.19) ἐπεὶ δὲ ἀφίκοντο ἐπὶ σταθμόν,
εὐθὺς ὥσπερ εἶχεν ὁ Ξενοφῶν ἐλθὼν πρὸς τὸν Χειρίσοφον ᾐτιᾶτο αὐτὸν ὅτι οὐχ
ὑπέμενεν, ἀλλ᾽ ἠναγκάζοντο φεύγοντες ἅμα μάχεσθαι. καὶ νῦν δύο καλώ τε καὶ
ἀγαθὼ ἄνδρε τέθνατον καὶ οὔτε ἀνελέσθαι οὔτε θάψαι ἐδυνάμεθα.
| [4,1,10] L'arrière-garde ne descendit qu'à la nuit dans les villages, car le chemin était
si étroit que l'armée avait employé un jour entier à monter au sommet et à
descendre le revers de la montagne. Quelques Carduques s'étant rassemblés,
tombèrent sur les traîneurs, en tuèrent plusieurs et en blessèrent d'autres avec
les flèches et les pierres qu'ils lançaient. Heureusement les Barbares étaient
en petit nombre, parce que les Grecs étaient entrés dans leur pays sans qu'ils
l'eussent prévu ; car si les Carduques eussent été rassemblés en force, une
grande partie de l'armée eût couru risque d'être taillée en pièces. On cantonna
ainsi cette nuit dans les villages. Les Carduques allumèrent des feux tout
autour sur les pointes des montagnes, et en vue les uns des autres.
Au point du jour, les généraux et les chefs de loches s'assemblèrent et
résolurent de ne garder pour leur marche que les bêtes de somme nécessaires, de
trier les meilleures, de laisser le reste, et de donner la liberté à tous les
prisonniers que l'armée avait faits récemment et condamnés à l'esclavage, car la
multitude des bêtes d'équipage et des prisonniers rendait la marche lente.
Beaucoup de Grecs étaient employés à y donner des ordres ; c'était autant de
soldats hors de service : il fallait trouver et porter le double de vivres pour
une telle quantité d'hommes. Ce plan ayant été agréé par les généraux, les
hérauts le publièrent.
Après dîner, l'armée se mit en marche. Les généraux, s'arrêtant à un défilé,
ôtèrent les équipages et les esclaves superflus aux Grecs qui n'avaient pas obéi
au plan. Tous se soumirent. Quelques-uns seulement firent passer en fraude ou un
jeune garçon ou une jolie maîtresse. On marcha ainsi toute la journée,
repoussant quelquefois l'ennemi, et faisant halte de temps en temps. Le
lendemain s'élève un grand orage. Il fallut cependant marcher, car il n'y avait
plus assez de vivres pour l'armée. Chirisophe la conduisit : Xénophon marcha à
l'arrière-garde. On fut assailli vigoureusement par l'ennemi. Les passages étant
étroits, les Carduques s'approchaient et tiraient alors avec leurs arcs et leurs
frondes. Les Grecs, contraints à les poursuivre et à se retirer ensuite
eux-mêmes, ne pouvaient avancer dans leur marche que lentement : souvent,
lorsque les ennemis attaquaient vivement, Xénophon demandait que l’armée fît
halte. Chirisophe, dès qu'il en était instruit, avait coutume de s'arrêter ;
mais il y eut une occasion où il ne s'arrêta pas, marcha au contraire plus vite,
et commanda qu'on suivît. Il était clair qu'il se passait quelque chose à la
tête, mais Xénophon n'avait pas le loisir de s'y porter pour voir la cause de
cette marche précipitée, et l'arrière-garde suivait d'un train qui lui donnait
l'air de fuir à toutes jambes.
On perdit alors Cléonyme Lacédémonien, brave soldat ; il eut le flanc percé
d'une flèche qui traversa et son bouclier et son habit de peau. Basias d'Arcadie
eut aussi la tête percée de part en part. Quand on fut arrivé au lieu où l'on
voulait camper, Xénophon alla sur-le-champ trouver Chirisophe et lui reprocha de
ne l'avoir pas attendu, et de l'avoir mis dans le cas de fuir en combattant.
« Il vient de périr deux braves Grecs, deux excellents soldats, nous n'avons pu ni
les enterrer, ni enlever leurs corps. »
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